Vu la requête, enregistrée par télécopie le 9 juillet 2009 à la Cour et régularisée le 15 juillet 2009, et le mémoire complémentaire enregistré le 14 septembre 2009, présentés pour M. Azzedine A, domicilié ... ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0901160, en date du 18 mai 2009, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 10 février 2009 du préfet de l'Isère portant refus de délivrance d'un certificat de résidence, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, soit de réexaminer son dossier, soit de lui délivrer le certificat de résidence sollicité ;
4°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer, dès la notification de la décision, un récépissé provisoire de demande de carte de séjour avec autorisation de travail ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que le préfet de l'Isère était incompétent pour examiner sa demande de délivrance de titre de séjour et qu'il lui appartenait de saisir les services de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, compétents pour examiner et viser les contrats de travail produits à l'appui de sa demande ; qu'en s'abstenant d'une telle transmission, le préfet de l'Isère a méconnu les dispositions de l'article 20 de la loi du 12 avril 2000 ; que le refus de titre de séjour contesté constitue, en fait, une décision de retrait d'une autorisation de travail créatrice de droits qui suppose le respect des dispositions de l'article 24 de cette même loi, s'agissant de la procédure contradictoire préalable et du respect du délai de quatre mois au-delà duquel ledit retrait est illégal ; que cette décision est entachée d'une erreur de droit sur laquelle, au demeurant, les premiers juges ne se sont pas prononcés, dès lors que le préfet de l'Isère s'est cru en situation de compétence liée par la condition posée à l'article 9 de l'accord franco-algérien tenant à la possession d'un visa long séjour ; qu'eu égard à son intégration en France, la décision de refus de titre de séjour méconnaît les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que l'obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ; qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ; que la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire enregistré le 17 septembre 2009 présenté par le préfet de l'Isère, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient qu'il n'était pas tenu de saisir préalablement à sa décision de refus de titre de séjour, la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, qu'il était ainsi compétent pour édicter une telle décision et n'a méconnu ni les dispositions de l'article 20 de la loi du 12 avril 2000, ni celles de l'article 24 de cette même loi ; qu'il n'a pas commis d'erreur de droit au regard des stipulations de l'article 9 de l'accord franco-algérien qui rend obligatoire la détention d'un visa long séjour pour prétendre à l'obtention d'un certificat de résidence algérien salarié ; que sa décision de refus ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale ;
Vu le mémoire complémentaire enregistré le 16 octobre 2009, présenté pour M. A qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
Il soutient en outre que ses conclusions aux fins d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français sont devenues sans objet dès lors qu'il a décidé de rentrer volontairement dans son pays d'origine ;
Vu la lettre en date du 4 mai 2010 informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de fonder sa décision sur un moyen soulevé d'office ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 2008-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mai 2010 :
- le rapport de Mme Pelletier, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que, contrairement aux allégations du requérant, il ressort des mentions du jugement attaqué que les premiers juges se sont prononcés sur le moyen tiré de ce que le préfet de l'Isère n'avait pas compétence pour statuer sur la demande d'autorisation de travail qu'il avait présentée ;
Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :
Considérant qu'aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien : (...) b) les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention salarié : cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française ; (...) et qu'aux termes de l'article 9 du même accord : (...) Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7 et 7 bis al. 4 (lettre c et d) et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. / Ce visa de long séjour accompagné de pièces et documents justificatifs permet d'obtenir un certificat de résidence dont la durée de validité est fixée par les articles et titres mentionnés à l'alinéa précédent. ;
Considérant que pour refuser la délivrance d'un titre de séjour à M. A, le préfet de l'Isère s'est fondé sur l'absence de visa valable pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois et sur l'absence de visa des services du ministre chargé de l'emploi sur les contrats de travail produits par M. A ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 20 de la loi du 12 avril 2000 : Lorsqu'une demande est adressée à une autorité administrative incompétente, cette dernière la transmet à l'autorité administrative compétente et en avise l'intéressé (...) et qu'aux termes de l'article 24 de la même loi : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79 587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) ;
Considérant, d'une part, que M. A ne saurait utilement soutenir qu'il appartenait au préfet de l'Isère, en application des dispositions précitées de l'article 20 de la loi du 12 avril 2000, de transmettre le contrat de travail qu'il aurait produit à l'appui de sa demande de titre de séjour, aux services de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, autorité compétente pour le viser, dès lors que la demande adressée au préfet de l'Isère consistait en une demande de délivrance de titre de séjour et que le préfet de l'Isère était bien l'autorité compétente pour statuer sur ladite demande ;
Considérant, d'autre part, que la décision de refus de titre de séjour est intervenue en réponse à une demande de l'intéressé et que la circonstance qu'il ait été muni le temps de l'instruction de celle-ci de récépissés de demandes de titres de séjour n'a pas eu effet de créer des droits à obtention d'un titre de séjour ; que, dès lors, M. A ne peut utilement soutenir que la décision contestée ne pouvait être prise qu'après la procédure contradictoire prévue par les dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de la combinaison des stipulations précitées des articles 7 et 9 de l'accord franco-algérien que la délivrance aux ressortissants algériens d'un certificat de résidence portant la mention salarié est subordonnée à la présentation d'un visa de long séjour et d'un contrat de travail visé par les services en charge de l'emploi ;
Considérant, qu'il est constant que M. A n'a pas présenté au préfet, à l'appui de sa demande de certificat de résidence algérien, un contrat de travail préalablement visé par les services chargés de l'emploi et, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est entré en France, le 28 décembre 2001, sous couvert d'un passeport muni d'un visa de court séjour ; que, par suite, le préfet de l'Isère, qui a examiné sa situation personnelle n'a pas méconnu les stipulations combinées des articles 7 et 9 de l'accord franco-algérien en refusant à l'intéressé, pour défaut de visa de long séjour, la délivrance d'un certificat de résidence portant la mention salarié ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, susvisé : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;
Considérant que M. A fait valoir qu'il justifie d'une intégration économique et sociale dès lors qu'il a toujours travaillé depuis qu'il a été mis en possession d'une autorisation provisoire de séjour puis de récépissés de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant algérien né en 1963, dont la demande d'asile territorial a été rejetée le 30 avril 2003 par le ministre de l'Intérieur, a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence algérien le 26 décembre 2007 et a alors bénéficié d'autorisations provisoires de séjour régulièrement renouvelées jusqu'à la décision contestée ; que M. A a conservé de fortes attaches dans son pays d'origine où résident notamment son épouse et ses huit enfants, et où lui-même a vécu l'essentiel de son existence alors qu'il n'établit pas disposer de liens particulièrement intenses en France ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions d'entrée et de séjour du requérant en France, et nonobstant la circonstance que M. A ait occupé un emploi alors qu'il était sous le régime d'autorisations provisoires de séjour, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, méconnu ni les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ni celles de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
Considérant, en premier lieu, que la circonstance que l'obligation de quitter le territoire français a été exécutée ne rend pas sans objet la requête de M. A tendant à l'annulation de la décision par laquelle le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français ;
Considérant, en deuxième lieu, que pour contester l'obligation de quitter le territoire français, M. A excipe de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ; que les moyens tirés de l'illégalité de cette dernière décision ayant été écartés, ce moyen doit être également écarté ;
Considérant, en dernier lieu, que M. A soutient que le préfet de l'Isère a fait une appréciation manifestement erronée des conséquences de l'obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle et familiale eu égard à son intégration économique et sociale ; que, toutefois, M. A n'établit pas disposer d'attache particulière en France alors que sa femme et ses huit enfants résident en Algérie et que, par suite, et nonobstant la circonstance qu'il ait occupé un emploi, le préfet de l'Isère ne saurait être regardé comme ayant entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation sur la situation personnelle et familiale de M. A ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
Considérant que M. A n'est pas recevable à soulever pour la première fois en appel le moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le pays de destination dès lors qu'il n'avait pas invoqué de moyens de légalité externe contre cette décision, devant le Tribunal administratif ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Azzedine A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 18 mai 2010, à laquelle siégeaient :
M. Fontanelle, président,
M. Givord, président-assesseur,
Mme Pelletier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 juin 2010.
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N° 09LY01578
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