Vu la requête, enregistrée le 19 février 2010, présentée pour M. Serghei A, domicilié chez Mme Larissa B, née C, ...) ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0906540 du Tribunal administratif de Lyon du 21 janvier 2010 rejetant sa demande tendant à l'annulation des décisions du 7 octobre 2009 par lesquelles le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et lui a fixé comme pays de destination le pays dont il a la nationalité ou tout autre pays où il établirait être légalement admissible ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 7 octobre 2009 susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer, dans le mois suivant l'arrêt à intervenir, un titre de séjour, en cas d'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français pour un motif de fond, ou de réexaminer sa demande et de lui délivrer, dans l'attente de ce réexamen, une autorisation de séjour en cas d'annulation des décisions attaquées pour un motif de forme ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à charge pour lui de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
Il soutient que le refus de titre de séjour qui lui est opposé méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, celles de l'article 3 de la même convention, ainsi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée, fondée sur un refus de titre dont il excipe de l'illégalité, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et qu'elle méconnaît également les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision lui fixant un pays de destination méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la décision en date du 30 mars 2010 accordant à M. Serghei A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 mai 2010, présenté par le préfet du Rhône, qui conclut, à titre principal, au prononcé d'un non-lieu et, à titre subsidiaire, au rejet de la requête ;
Il soutient, à titre principal, que l'intéressé a été effectivement reconduit à la frontière le 14 mars 2010, et, à titre subsidiaire, que le refus de titre de séjour ne méconnaît ni les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, et qu'il n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation ; qu'elle est fondée sur un refus de titre qui n'est pas illégal ; qu'elle ne méconnaît pas les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que la décision fixant le pays de renvoi ne viole ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu l'ordonnance en date du 20 juillet 2010 fixant la clôture d'instruction au 20 août 2010, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 janvier 2011 :
- le rapport de M. Pourny, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;
Considérant que M. A, ressortissant moldave, né en 1977, revenu irrégulièrement en France après une première reconduite à la frontière en juillet 2006, conteste le jugement du Tribunal administratif de Lyon, en date du 21 janvier 2010, rejetant sa demande tendant à l'annulation des décisions du 7 octobre 2009 par lesquelles le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et lui a fixé, comme pays de destination, le pays dont il a la nationalité ou tout autre pays où il établirait être légalement admissible ;
Sur l'exception de non-lieu :
Considérant que la reconduite en Moldavie de M. A, en mars 2010, ne prive pas d'objet le présent litige ; que, dès lors, l'exception de non-lieu présentée par le préfet du Rhône ne peut être accueillie ;
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;
Considérant que M. A fait valoir qu'il vit avec Mme Larissa C, épouse B, dont il a reconnu l'enfant, né à Lyon le 24 mars 2009, et qu'il serait exposé à des traitements dégradants en Moldavie, pays dans lequel sa compagne ne pourrait le suivre, au motif que le père de son premier enfant, né en 1999, réside en France ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme C, de nationalité biélorusse, ne pourrait le suivre en Moldavie, ou que le couple y serait exposé à des risques faisant obstacle à la poursuite de son union, alors qu'il est constant que M. A n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que, dès lors, eu égard au caractère récent du retour en France de M. A, après une reconduite à la frontière en 2006, aux conditions de son séjour, l'intéressé qui faisait usage de faux documents administratifs s'étant maintenu en France en dépit d'un deuxième arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre en avril 2008, et au fait que la stabilité de son union avec Mme C, alors mariée à M. B, n'est pas établie, le refus de titre de séjour attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, le préfet du Rhône n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, en deuxième lieu, que, compte tenu des circonstances susdécrites, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Rhône aurait entaché sa décision portant refus de titre de séjour à M. A d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant, en dernier lieu, que M. A ne peut utilement se prévaloir à l'encontre d'un refus de titre de séjour ni des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'un refus de titre de séjour n'implique pas le retour de l'étranger qu'il concerne dans son pays d'origine, ni des dispositions, relatives à la détermination du pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : I. - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à être motivée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cette décision serait insuffisamment motivée doit être écarté ;
Considérant que les moyens soulevés à l'encontre de la décision du 7 octobre 2009 portant refus de titre de séjour ayant été écartés, celui soulevé, par voie d'exception, de l'illégalité du refus de titre de séjour ne peut, par voie de conséquence, être accueilli ;
Considérant qu'eu égard aux conditions d'entrée et de séjour en France de M. A et à sa situation familiale, telles qu'exposées ci-dessus, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français qui lui est faite méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
Considérant que, la fixation du pays de destination résultant d'une décision distincte, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison des risques auxquels M. A serait exposé dans son pays d'origine est inopérant ;
Considérant, enfin, que l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation entachant la décision faisant obligation de quitter le territoire français à M. A ne ressort pas des pièces du dossier ; que ce moyen doit être écarté ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. et qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ;
Considérant que si M. A soutient avoir été torturé et menacé en Moldavie au cours de l'année 2003, il n'établit ni que sa vie ou sa liberté seraient menacées dans ce pays, où il a déjà été reconduit en 2006, ni qu'il y serait exposé à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; que, dès lors, les risques allégués par l'intéressé n'étant pas établis, les moyens tirés de ce que la décision fixant son pays de destination méconnaîtrait les stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions susrappelées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente au titre des articles L. 911-1 à L. 911-3 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Serghei A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 4 janvier 2011 à laquelle siégeaient :
M. Chanel, président de chambre,
MM. Pourny et Segado, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 18 janvier 2011.
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N° 10LY00423