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17/05/2011 | FRANCE | N°10LY02647

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 17 mai 2011, 10LY02647


Vu la requête, enregistrée le 30 novembre 2010, présentée pour Mlle Zohra A, domiciliée ... ;

Mlle A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001731 du 3 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant :

- d'une part, à l'annulation des décisions du 29 juin 2010 du préfet de Saône-et-Loire portant refus de délivrance d'un titre de séjour, assorti de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et prescrivant qu'à l'expiration de ce délai elle serait reconduite d'office à destina

tion du pays dont elle a la nationalité ou de tout pays où elle établirait être légal...

Vu la requête, enregistrée le 30 novembre 2010, présentée pour Mlle Zohra A, domiciliée ... ;

Mlle A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001731 du 3 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant :

- d'une part, à l'annulation des décisions du 29 juin 2010 du préfet de Saône-et-Loire portant refus de délivrance d'un titre de séjour, assorti de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et prescrivant qu'à l'expiration de ce délai elle serait reconduite d'office à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout pays où elle établirait être légalement admissible ;

- d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de Saône-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de Saône-et-Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire étudiant dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour son conseil de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le préfet de Saône-et-Loire avait mentionné, par une erreur de plume, les dispositions de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatives au visa de long séjour, et non, comme l'ont indiqué les premiers juges, à la carte de séjour compétences et talents, en lieu et place de l'article L. 313-7 du même code ;

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il ressort des termes mêmes de la décision de refus de titre de séjour en litige que la demande de titre présentée au préfet de Saône-et-Loire l'a été aux fins de poursuite de ses études en France ;

- en l'absence de mention, dans la décision de refus de titre de séjour en litige, des dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ladite décision est insuffisamment motivée en droit ;

- le refus de titre est entaché d'une erreur de droit, dès lors que le préfet de Saône-et-Loire a fait application des stipulations de l'accord franco-tunisien, dont aucune n'est relative au séjour des étudiants ;

- le refus de titre méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) du 14 décembre 2010 accordant à Mlle A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 mars 2011, présenté par le préfet de Saône-et-Loire, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que la requête est irrecevable, dès lors qu'elle ne comporte aucun moyen dirigé spécifiquement contre le jugement attaqué, et se borne à reprendre les griefs vainement soulevés en première instance contre la décision de refus de séjour, et s'en remet, à titre subsidiaire, aux écritures de première instance ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 avril 2011, présenté pour Mlle A, qui maintient les conclusions de sa requête par les mêmes moyens et soutient, en outre, que, contrairement à ce qu'affirme le préfet de Saône-et-Loire, sa requête est recevable dès lors qu'elle contient des moyens dirigés contre le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 avril 2011 :

- le rapport de M. Seillet, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée en défense par le préfet de Saône-et-Loire ;

Considérant que Mlle A, née le 18 janvier 1992 en Tunisie, pays dont elle possède la nationalité, est entrée sur le territoire français, le 31 juillet 2009, sous couvert d'un visa Schengen de court séjour, délivré par le consulat d'Allemagne à Tunis ; qu'après le rejet, par une décision du préfet de Saône-et-Loire du 4 novembre 2009, de la première demande de titre de séjour qu'elle avait présentée, alors qu'elle était encore mineure, Mlle A a présenté, les 14 janvier et 21 mai 2010, une nouvelle demande, tendant à la délivrance d'un titre de séjour, afin de poursuivre ses études en France ; que, par des décisions du 29 juin 2010, le préfet de Saône-et-Loire a rejeté cette demande, a assorti ce refus de titre d'une obligation pour l'intéressée de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a prescrit qu'à l'expiration de ce délai elle serait reconduite d'office à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout pays où elle établirait être légalement admissible ; que Mlle A fait appel du jugement du 3 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation desdites décisions du 29 juin 2010 du préfet de Saône-et-Loire ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ; qu'aux termes de l'article 5 de l'accord franco-tunisien susvisé : Le conjoint des personnes titulaires des titres de séjour et des titres de travail mentionnés aux articles précédents ainsi que leurs enfants n'ayant pas atteint l'âge de la majorité dans le pays d'accueil, admis dans le cadre du regroupement familial sur le territoire de l'un ou de l'autre Etat, sont autorisés à y résider dans les mêmes conditions que lesdites personnes ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour compétences et talents sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. ; qu'aux termes de l'article L. 313-7 du même code : I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention étudiant. En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France (...) ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier de la lecture même de la décision de refus de délivrance de titre de séjour en litige, que le préfet de Saône-et-Loire, après avoir mentionné que Mlle A avait sollicité la délivrance d'un titre de séjour afin de poursuivre des études en France, a examiné sa demande de carte de séjour temporaire en estimant que cette demande avait été sollicitée en application, d'une part, des stipulations précitées de l'article 5 de l'accord franco-tunisien, dont il a considéré que les conditions n'étaient pas remplies, dès lors que l'intéressée n'était pas entrée sur le territoire français par une procédure de regroupement familial et, d'autre part, des dispositions, également précitées, de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif à la carte de séjour temporaire mention étudiant, dont il a également considéré que les conditions n'étaient pas remplies, dès lors que Mlle A ne disposait pas du visa de long séjour requis pour une installation en France en qualité d'étudiante ; qu'il en ressort également que si le préfet de Saône-et-Loire a visé, à tort, en lieu et place des dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, celles précitées de l'article L. 311-7 du même code, qui ne peuvent constituer le fondement d'une demande de titre de séjour, dès lors qu'elles sont seulement relatives à la condition de visa devant être remplie par le demandeur d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour compétences et talents, ladite erreur de plume n'est pas de nature à démontrer, à elle-seule, contrairement à ce que soutient la requérante, que la décision du préfet de Saône-et-Loire, qui a examiné, au regard des dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sa demande, dont le rejet est motivé, en droit, par le visa, même erroné en raison d'une erreur matérielle, de cet article, et, en fait, par la constatation de l'absence de visa, serait entachée d'une insuffisante motivation, en violation des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit, la demande de carte de séjour temporaire étudiant présentée par Mlle A a été examinée par le préfet de Saône-et-Loire sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient la requérante, ledit préfet ne s'est pas fondé, pour refuser de lui délivrer une carte de séjour temporaire étudiant, sur les stipulations de l'article 5 de l'accord franco-tunisien, et par suite, n'a pas commis d'erreur de droit, nonobstant la circonstance qu'il a également examiné, comme il était fondé à le faire, si un titre de séjour ne pouvait, par ailleurs, être délivré à l'intéressée en application desdites stipulations ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; que Mlle A fait valoir que sa seule attache familiale en Tunisie est son père dont elle affirme qu'il serait sans emploi et affecté par des troubles d'ordre psychologiques le rendant incapable de s'occuper d'elle, alors qu'en France se trouvent sa mère, avec laquelle elle a développé une relation très forte, ainsi que son beau-père et ses enfants issus d'un premier mariage, auxquels elle indique être très attachée ; qu'elle fait également valoir qu'elle suit des études en France, où elle a noué des relations amicales ; que, toutefois, compte tenu du caractère récent, à la date des décisions en litige, de la venue en France, à l'âge de dix-sept ans, de Mlle A, qui avait jusqu'alors toujours vécu en Tunisie, où demeure son père, dont les difficultés à prendre en charge la requérante, au demeurant majeure à la date des décisions en litige, ne sont pas établies, le préfet de Saône-et-Loire n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mlle A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle Zohra A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 26 avril 2011, à laquelle siégeaient :

M. Fontanelle, président de chambre,

M. Givord, président-assesseur,

M. Seillet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 mai 2011.

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N° 10LY02647

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY02647
Date de la décision : 17/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FONTANELLE
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : DUFAY SUISSA CORNELOUP

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-05-17;10ly02647 ?
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