Vu le recours, enregistré le 29 octobre 2010, présenté par le PREFET DE L'ISERE ;
Le PREFET DE L'ISERE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0901373 du 14 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions implicites par lesquelles il a rejeté les demandes de titre de séjour déposées par M. A le 19 février 2007 et le 29 juillet 2008 et lui a enjoint de délivrer à ce dernier une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal ;
Il soutient que dès lors que l'intéressé ne justifie pas d'un passeport en cours de validité afin que sa carte de séjour puisse être établie et qu'il n'établit pas être dans l'impossibilité de fournir un tel document, c'est à bon droit que le refus attaqué pris en application des dispositions de l'article L. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été opposé ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire enregistré le 2 mai 2011, présenté pour M. A, qui conclut :
1°) au rejet du recours ;
2°) à ce qu'il soit fait injonction au PREFET DE L'ISERE de lui délivrer une carte de séjour vie privée et familiale , ou à défaut de réexaminer sa situation sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
3°) à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 2 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Il soutient que :
- son mémoire est recevable ;
- la commission de titre de séjour devait être saisie ;
- les décisions attaquées sont entachées d'un défaut de motivation ;
- il pouvait bénéficier de plein droit d'une carte de séjour sur le fondement des articles L. 313-11-4° et L. 313-11-6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il établit bien être dans l'impossibilité matérielle de fournir un passeport ;
- les décisions attaquées sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
- dès lors qu'il vit en France depuis six ans, qu'il est marié avec une ressortissante française avec laquelle il a eu un enfant, et qu'il bénéficie d'une bonne intégration sur le territoire français, les refus attaqués ont été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) du 18 mars 2011 accordant à M. A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2011 :
- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
Considérant que M. A, ressortissant turc entré en France en 2005 a épousé, le 25 novembre 2006, une ressortissante française avec laquelle il a eu un enfant, né le 3 mars 2007 ; qu'il a sollicité à deux reprises la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement des articles L. 313-11-4° et L. 313-11-6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le PREFET DE L'ISERE relève appel du jugement du 14 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions implicites par lesquelles il a rejeté les demandes de titre de séjour déposées par M. A et lui a enjoint de délivrer à ce dernier une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La durée de validité de la carte de séjour temporaire ne peut être supérieure à un an et ne peut dépasser la durée de validité des documents et visas mentionnés à l'article L. 211-1 du présent code (...) ; qu'aux termes de L. 313-11 du même code: Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; (...) ; qu'aux termes de l'article R. 313-1 du même code : L'étranger qui, n'étant pas déjà admis à résider en France, sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire présente à l'appui de sa demande : 1° Les indications relatives à son état civil et, le cas échéant, à celui de son conjoint et de ses enfants à charge ; / 2° Les documents, mentionnés à l'article R. 211-1, justifiant qu'il est entré régulièrement en France ; / 3° Sauf stipulation contraire d'une convention internationale applicable en France, un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois autre que celui mentionné au 3° de l'article R. 311-3 ; / 4° Un certificat médical délivré dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ; / 5° Trois photographies de face, tête nue, de format 3, 5 x 4, 5 cm, récentes et parfaitement ressemblantes ; / 6° Un justificatif de domicile. ; que les documents mentionnés à l'article R. 211-1 sont définis par l'arrêté interministériel du 10 avril 1984 relatif aux conditions d'entrée des étrangers sur le territoire métropolitain et dans les départements d'outre-mer français aux termes duquel : Pour être admis à pénétrer sur le territoire métropolitain et dans les départements d'outre-mer français, tout étranger doit être muni d'un passeport national ou titre de voyage en tenant lieu, en cours de validité et revêtu d'un visa français. (...) ; que, toutefois, il résulte des dispositions des articles R. 313-2 et R. 313-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que certaines catégories d'étrangers, dont ceux mentionnés aux 6° à 11° de l'article L. 313-11, ne sont pas soumis aux dispositions des 2° et 3° de l'article R. 313-1 dudit code ; que, par suite, l'admission au séjour en France d'un étranger qui sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne saurait être subordonnée à la présentation d'un passeport en cours de validité ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, que M. A a déposé à la préfecture de l'Isère une demande de carte de séjour en se prévalant notamment de sa qualité de parent d'enfant français ; que le préfet a refusé de faire droit à la demande de titre de séjour présentée par l'intéressé, au seul motif qu'il n'avait pas présenté un passeport en cours de validité, alors qu'il répondait aux conditions fixées par les dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la circonstance qu'en application de l'article L. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la durée de validité d'une carte de séjour temporaire délivrée à un étranger ne peut pas dépasser la durée de validité du passeport du demandeur ou du titre de voyage en tenant lieu ne pouvait, à elle seule, justifier le refus opposé, lequel se trouve dès lors, entaché d'une erreur de droit ; que, par suite, le PREFET DE L'ISERE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions implicites de rejet des demandes de titre de séjour déposées par M. A ;
Sur les conclusions de M. A aux fins d'injonction :
Considérant que, dans son article 2, le jugement attaqué a enjoint au PREFET DE L'ISERE de délivrer à M. A une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans le délai de deux mois suivant la notification dudit jugement ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A répondait aux conditions fixées par les dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que dès lors, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de compléter ou modifier le dispositif adopté par le Tribunal sur ce point ;
Sur les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Vernay, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de mille euros au profit de Me Vernay, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le recours du PREFET DE L'ISERE est rejeté.
Article 2 : En application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, l'Etat versera la somme de mille euros à Me Vernay, avocat de M. A, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Ugur A, au PREFET DE L'ISERE et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Délibéré après l'audience du 27 septembre 2011, à laquelle siégeaient :
M. Givord, président de la formation de jugement,
M. Reynoird, premier conseiller,
Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 octobre 2011.
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N° 10LY02452
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