Vu la requête, enregistrée le 31 mai 2010, présentée pour M. et Mme A, domiciliés ..., et M. et Mme B, domiciliés ...;
M. et Mme A et M. et Mme B demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0604020 du Tribunal administratif de Grenoble du 26 mars 2010 qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juin 2006 par lequel le maire de la commune de Chapeiry (Haute-savoie) a refusé de délivrer à M. et Mme A un permis de construire une maison d'habitation ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre à la commune de Chapeiry de statuer à nouveau sur la demande de permis de construire, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de condamner la commune de Chapeiry à leur verser une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Les requérants soutiennent que, étant chacun partie à la promesse de vente du terrain d'assiette du projet, ils ont qualité et intérêt à agir à l'encontre du refus de permis de construire du 23 juin 2006 et, par suite, à demander l'annulation du jugement qui a rejeté leur demande ; que le refus de permis de construire est illégal en raison de l'illégalité du classement en zone NC du terrain d'assiette du projet, qui n'est pas fondé en fait et en droit ; que, contrairement à ce que le Tribunal semble avoir estimé, la parcelle cadastrée A 130 n'est pas totalement classée en zone NC, la partie de cette parcelle supportant la maison d'habitation de M. et Mme B faisant l'objet d'un classement en zone constructible UD ; que, si le zonage n'a pas à suivre le contour des parcelles, il ne doit pas exclure la vocation et l'utilisation du sol du tènement ; que la partie de ladite parcelle classée en zone NC, qui sert de jardin d'agrément, n'est pas utilisée à des fins agricoles, ne présente aucun intérêt agricole et ne pourrait être utilisée pour l'agriculture ; que le Tribunal a reconnu que le rapport de présentation ne décrit pas la situation du hameau des Blanchets ; que la construction d'une seconde maison sur la même parcelle renforcerait l'image de ce hameau et ne serait pas constitutive d'un mitage ; que le terrain est desservi par tous les équipements publics ; que le plan d'occupation des sols, qui divise la parcelle en deux zones distinctes, n'est pas cohérent ; que le terrain ne présente également aucun intérêt paysager particulier et n'est pas concerné par une protection édictée au titre des paysages ou des monuments historiques ; que la construction d'une seule maison ne saurait porter atteinte au paysage ; que le MARNU, opposable avant l'approbation du plan d'occupation des sols, autorisait la constructibilité totale de la parcelle ; que, dans ces conditions, le classement en zone NC du terrain d'assiette du projet est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'ils n'ont eu connaissance du plan d'occupation des sols que longtemps après son approbation et n'ont pas été informés de l'évolution des classements affectant le hameau des Blanchets ; que les incohérences réalisées dans le classement des terrains situés dans ce hameau laissent penser que des intérêts personnels ont dicté le zonage ; que le classement litigieux est arbitraire ; que le déclassement au regard du MARNU caractérise une erreur de droit ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 2 septembre 2010, présenté pour la commune de Chapeiry, représentée par son maire, qui demande à la Cour :
- de rejeter la requête ;
- de condamner solidairement les requérants à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La commune soutient que les requérants ne produisent pas la lettre de notification du jugement, alors que l'appel a été enregistré plus de deux mois après la date du jugement attaqué, ce qui rend nécessaire la vérification du respect des dispositions de l'article R. 811-2 du code de justice administrative, qui fixe à deux mois le délai d'appel ; qu'à défaut, l'appel sera déclaré irrecevable ; qu'aucune disposition n'imposait d'informer individuellement les propriétaires fonciers sur les classements envisagés de leurs parcelles lors de l'élaboration du plan d'occupation des sols ; qu'en tout état de cause, un tel défaut d'information constituerait un vice de procédure insusceptible d'être désormais invoqué, en application de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme ; qu'une information suffisante a été effectuée dans le cadre de la procédure d'élaboration du plan d'occupation des sols ; que le moyen tiré du détournement de pouvoir n'est pas étayé par des précisions suffisantes ; que la contestation du classement de parcelles appartenant à des tiers ne saurait établir qu'un détournement de pouvoir a été commis dans le classement de la parcelle litigieuse ; que des terrains du même secteur ont été traités de la même façon que cette dernière ; que le classement litigieux en zone NC n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation ; qu'en effet, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le Tribunal n'a pas estimé que la totalité de la parcelle cadastrée A 130 a fait l'objet d'un classement en zone NC ; que les auteurs d'un plan d'occupation des sols ne sont pas liés par les limites parcellaires et l'affectation matérielle des terrains au moment de l'élaboration du plan ; que nul ne peut prétendre à la pérennité d'un classement ; que la possibilité antérieure de construire ou l'existence d'une construction sur le terrain est sans incidence ; que le classement par le MARNU de ladite parcelle en secteur constructible ne pouvait faire obstacle à son classement ultérieur en zone NC au plan d'occupation des sols ; que les auteurs d'un plan d'occupation des sols peuvent classer en zone NC des terrains situés dans un secteur à dominante agricole et rurale, ce qui est le cas du terrain litigieux, qui se trouve en périphérie du hameau des Blanchets, lequel forme, à distance du centre du village, une sorte d'enclave au coeur d'un vaste secteur à dominante agricole et rurale ; que, dans une telle hypothèse, la circonstance que le terrain soit desservi par les équipements publics importe peu ; qu'aucune disposition ne fait obligation d'analyser la situation spécifique de tous les secteurs de la commune dans le rapport de présentation ; que ce rapport comporte des précisions suffisantes ; que le classement contesté s'inscrit dans la logique exposée dans le rapport de présentation, visant à recentrer l'urbanisation et préserver l'activité agricole ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 7 mars 2011, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 avril 2011 ;
Vu le mémoire, enregistré le 7 avril 2011, présenté pour M. et Mme A et M. et Mme B, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
Les requérants soutiennent, en outre, que leur requête n'est pas tardive, le jugement ayant été notifié par un courrier du 30 mars 2010 et la requête ayant été enregistrée le 31 mai 2010 ; que le rapport de présentation ne justifie pas les classements opérés dans le hameau des Blanchets ; que ce rapport ne démontre pas que la constructibilité du terrain litigieux favoriserait le mitage ; que l'orientation visant à sauvegarder la structure traditionnelle du village serait parfaitement respectée dans l'hypothèse dans laquelle ce terrain serait constructible ; que le classement litigieux en zone NC est contraire aux objectifs de la zone NC exposés dans le rapport de présentation ; que le classement litigieux révèle une discrimination, le terrain étant utilisé à des fins d'agrément pour l'habitation et ne pouvant être utilisé à des fins agricoles ; que les auteurs du plan d'occupation des sols ont clairement indiqué que les zones NC constituent des zones insuffisamment équipées ; que la parcelle cadastrée A 130, qui est viabilisée, ne pouvait donc être classée en zone NC ; qu'une parcelle du hameau, sur laquelle paissent des vaches, est constructible ; que ce classement est incohérent et rien ne justifie cette situation ; que, par ailleurs, le conseil municipal a choisi d'interdire toute construction devant les façades sud des maisons du maire adjoint et de sa soeur, vraisemblablement à la demande de ce conseiller municipal ; que le classement d'une partie de la parcelle cadastrée A 130 en zone NC a pour objet d'apporter une apparence de légitimité à ces situations ; que le classement litigieux est ainsi entaché de détournement de pouvoir ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 12 avril 2011, la clôture de l'instruction a été reportée au 11 mai 2011 ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 avril 2011, présenté pour la commune de Chapeiry, représentée par son maire, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
La commune soutient, en outre, que la définition des zones naturelles comme étant celles qui sont non équipées ou insuffisamment équipées n'interdisait pas de classer en zone NC un partie du secteur des Blanchets, dès lors que les zones NA et NC, à l'inverse des zones ND, restent constructibles sous conditions ; que l'absence d'usage agricole au jour de l'approbation du plan d'occupation des sols est indifférente, dès lors que les terres du secteur sont reconnues de bonne qualité ; que les auteurs du plan d'occupation des sols ont choisi de réduire de façon sensible la superficie des zones constructibles par rapport à celle résultant du MARNU ; qu'une telle restriction avait potentiellement pour effet d'empêcher toute nouvelle construction à proximité de certaines constructions existantes ; que la circonstance qu'elle puisse bénéficier à tel ou tel membre du conseil municipal ou à ses proches ne saurait, par elle-même, établir un quelconque détournement de pouvoir ; que le fait qu'en revanche, est resté constructible un terrain pourtant affecté à la pâture de bovins ne suffit pas à démontrer que le classement litigieux répondrait à d'autres motifs que ceux relevant de l'urbanisme ;
Vu le mémoire, enregistré le 4 mai 2011, présenté pour M. et Mme A et M. et Mme B, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
Vu le mémoire, enregistré le 11 mai 2011, présenté pour M. et Mme A et M. et Mme B, qui, n'apportant aucun élément nouveau, n'a pas été communiqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 novembre 2011, présentée pour les requérants ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative, et notamment son article R. 613-3, en application duquel les pièces produites le 15 novembre 2011 pour les requérants, après la clôture de l'instruction, n'ont pas été examinées par la Cour ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2011 :
- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;
- les observations de Me Boucherie, représentant M. et Mme A et M. et Mme B, et celles de Me Gallety, représentant la commune de Chapeiry ;
- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
- la parole ayant à nouveau été donnée aux parties présentes ;
Considérant que le plan d'occupation des sols de la commune de Chapeiry, qui a été approuvé par une délibération du 29 juin 2000, classe dans deux zones distinctes la parcelle cadastrée A 130 appartenant à M. et Mme B, située dans le hameau des Blanchets ; que la partie Est de cette parcelle, qui supporte la maison d'habitation de ces derniers, fait l'objet d'un classement en zone UD et, la partie Ouest, dénuée de toute construction, fait l'objet d'un classement en zone NC ; que M. et Mme A ont déposé une demande de permis de construire une maison d'habitation sur cette seconde partie de la parcelle ; que, par un arrêté du 23 juin 2006, le maire de la commune de Chapeiry a rejeté cette demande, au motif que le projet ne respecte pas les dispositions des articles NC 1 et NC 2 du règlement du plan d'occupation de sols, qui interdisent les constructions à usage d'habitation qui ne sont pas indispensables à l'activité agricole ; que M. et Mme A et M. et Mme B ont demandé au Tribunal administratif de Grenoble d'annuler cet arrêté ; que, par un jugement du 26 mars 2010, le Tribunal a rejeté cette demande ; que M. et Mme A et M. et Mme B relèvent appel de ce jugement ; qu'à l'appui de leur requête, ils excipent de l'illégalité de ladite délibération du 29 juin 2000 approuvant le plan d'occupation des sols de la commune de Chapeiry ;
Considérant, en premier lieu, que les moyens des requérants tirés de ce que le rapport de présentation du plan d'occupation des sols ne comporte aucune description de la situation particulière du hameau des Blanchets, à proximité duquel se situe le terrain d'assiette du projet, et qu'ils n'ont eu connaissance de ce plan qu'après son approbation doivent être écartés par adoption des motifs des premiers juges ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions alors applicables de l'article R. 123-18 du code de l'urbanisme : I. - Les documents graphiques doivent faire apparaître les zones urbaines et les zones naturelles. / Ces zones, à l'intérieur desquelles s'appliquent les règles prévues à l'article R. 123-21 et s'il y a lieu, les coefficients d'occupation des sols définis à l'article R. 123-22 sont : / (...) 2. Les zones naturelles, équipées ou non, dans lesquelles les règles et coefficients mentionnés ci-dessus peuvent exprimer l'interdiction de construire. / Ces zones naturelles comprennent en tant que de besoin : / (...) c) Les zones de richesses naturelles, dites Zones NC, à protéger en raison notamment de la valeur agricole des terres ou de la richesse du sol ou du sous-sol (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les objectifs principaux de l'élaboration du plan d'occupation des sols de la commune de Chapeiry étaient de recentrer l'urbanisation sur le chef lieu, de limiter le mitage des paysages et de préserver l'activité agricole, qui constitue la principale activité économique de la commune ; que le terrain d'assiette du projet de M. et Mme A, bien que situé à proximité de plusieurs constructions, et notamment de la propre maison d'habitation de M. et Mme B, se rattache au vaste secteur rural qui entoure ce groupe de constructions ; que, même si ce terrain, qui est desservi par les réseaux publics, faisait antérieurement l'objet d'un classement en zone constructible dans la carte communale et même si le parti d'urbanisme retenu par la commune n'exclut pas toutes possibilités d'urbanisation nouvelle dans les secteurs construits extérieurs au chef-lieu, son classement en zone NC, définie comme une zone naturelle de richesses économiques agricoles , correspond aux orientations principales précitées choisies pour l'élaboration du plan d'occupation des sols ; que, s'il est vrai que les requérants font valoir que le terrain, qui constitue le jardin d'agrément de la propriété de M. et Mme B, n'est pas susceptible de présenter un quelconque intérêt pour l'agriculture, il n'est pas contesté que ledit secteur rural auquel il se rattache est principalement à vocation agricole ; que, dans ces conditions, en procédant au classement du terrain d'assiette du projet en zone NC, le conseil municipal de la commune de Chapeiry n'a pas entaché sa décision d'une erreur de droit ou d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant, en troisième lieu, que la seule circonstance que la parcelle cadastrée A 130 fasse l'objet de deux classements différents au plan d'occupation des sols, en zone UD et en zone NC, ne saurait, par elle-même, permettre d'établir l'existence d'une discrimination illégale, quand bien même la partie de cette parcelle faisant l'objet d'un classement en zone NC serait dépourvue de tout intérêt particulier pour l'agriculture ;
Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune de Chapeiry aurait choisi de restreindre les possibilités de construire dans le hameau des Blanchets afin de satisfaire les seuls intérêts particuliers d'un conseiller municipal et d'un membre de la famille de celui-ci, qui auraient souhaité voir leurs maisons rester sans vis-à-vis ; qu'au contraire, les restrictions apportées aux possibilités de construire dans ce hameau correspondent au parti d'urbanisme choisi par la commune, consistant à recentrer l'urbanisation et à renforcer le centre du village ; que, si la parcelle cadastrée A 1014, située à l'Est dudit hameau et qui ne supporte aucune construction, a néanmoins, quant à elle, fait l'objet d'un classement en zone UD, les auteurs du plan d'occupation des sols n'ont pas choisi d'interdire, par principe, toutes constructions nouvelles dans les secteurs périphériques déjà urbanisés ; que, dans ces conditions, le moyen tiré du détournement de pouvoir doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, M. et Mme A et M. et Mme B ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif Grenoble a rejeté leur demande ;
Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu, en conséquence, de rejeter les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par les requérants au titre des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Chapeiry, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer aux requérants la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner M. et Mme A et M. et Mme B au versement d'une somme au bénéfice de cette commune sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A et M. et Mme B est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Chapeiry au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A, à M. et Mme B et à la commune de Chapeiry.
Délibéré à l'issue de l'audience du 22 novembre 2011, à laquelle siégeaient :
M. Moutte, président,
M. Zupan, président-assesseur,
M. Chenevey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 décembre 2011.
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N° 10LY01294
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