Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 23 mai 2011 sous le n° 11LY01303, présentée pour M. Patrice D, domicilié ... par Me Verrier ;
M. D demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Dijon n° 0901909 du 24 février 2011 qui, à la demande de et autres, a annulé l'arrêté, en date du 5 novembre 2008, par lequel le maire d'Etivey lui a délivré au nom de l'Etat un permis de construire ;
2°) de rejeter la demande présentée au Tribunal administratif par , E, C et B ;
3°) de condamner à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient qu'il ne disposait d'aucun moyen pour vérifier la compétence du signataire de l'arrêté contesté ; que si le vice d'incompétence relevé par le Tribunal était confirmé, il engagerait la responsabilité de la commune ou celle de l'Etat à son égard ; que l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales interdit seulement les délégations générales de fonctions et n'a pas été méconnu en l'espèce ; que, contrairement à ce qu'énonce le jugement attaqué, le dossier de demande de permis de construire prévoyait bien une implantation sur la limite séparative, conformément à l'article R. 111-18 du code de l'urbanisme ; qu'il se peut simplement que, du fait de l'état très dégradé du mur séparatif existant, un écart soit apparu au moment de la réalisation des travaux ; que le motif d'annulation fondé sur l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme repose sur une appréciation subjective du projet ; que le bourg d'Etivey ne bénéficie d'aucune protection au titre des monuments historiques ; qu'il est économiquement impossible d'édifier un bâtiment agricole selon les techniques anciennes ; que le village compte déjà d'autres constructions de même nature, et plus volumineuses encore ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 10 octobre 2011, présenté pour par Me Chaton, concluant au rejet de la requête et à la condamnation de M. D à lui verser la somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que la circonstance que M. D n'est en rien responsable du vice d'incompétence relevé par les premiers juges est indifférente ; que la délégation conférée au signataire de l'arrêté contesté est excessivement imprécise et intègre l'intégralité des compétences du maire ; qu'elle n'a pas été publiée ; que l'arrêté contesté ne mentionne pas que le maire aurait été absent ou empêché ; qu'il n'a jamais été justifié d'une absence ou d'un empêchement, ni de l'urgence de statuer, à la date de l'arrêté contesté, sur la demande de permis de construire présentée par M. D ; que, comme le Tribunal l'a relevé à juste titre, le plan de masse fait clairement apparaître que l'implantation de la construction projetée ne se situe ni sur la limite séparative ni à l'écart minimal de celle-ci prévu par l'article R. 111-18 du code de l'urbanisme ; que l'argument économique exposé à l'encontre du motif d'annulation fondé sur l'article R. 111-21 du même code est inopérant ; que le bâtiment projeté défigure l'harmonie architecturale du bourg ; que l'absence de protection au titre des monuments historiques ne fait nullement obstacle au constat de l'erreur manifeste d'appréciation commise à ce titre ; que l'immeuble litigieux est le seul à ne pas avoir de toiture rouge et n'obéit pas au dessin géométrique du village ; que M. D a frauduleusement dissimulé à l'autorité d'urbanisme l'affectation qu'il entendait donner à la construction, présentée comme un hangar destiné à abriter des engins agricoles alors qu'il s'agit en réalité d'un silo à céréales ; que le risque d'incendie est bien plus important pour un tel ouvrage, de sorte que le service départemental d'incendie et de secours, s'il avait eu connaissance de la réalité du projet, eût rendu un tout autre avis ; que le projet méconnaît l'article R. 111-8 du code de l'urbanisme, en ce qu'il ne prévoit aucun dispositif d'évacuation des eaux pluviales et des eaux usées ; que l'administration avait d'ailleurs invité M. D à compléter son dossier, sans qu'il ait été donné suite à cette injonction, de sorte qu'elle s'est prononcée sur la base d'une demande incomplète ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2012 :
- le rapport de M. Zupan, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public
- et les observations de Me Verrier, représentant la société civile professionnelle d'avocats Pascal-Verrier, avocat de M. D, et celles de Me Ciaudo substituant Me Chaton, avocat de ;
Considérant que M. D relève appel du jugement, en date du 24 février 2011, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé, à la demande de , E, C et B, l'arrêté du maire d'Etivey du 5 novembre 2008 lui délivrant, au nom de l'Etat, le permis de construire un hangar agricole sur un terrain dont il est propriétaire, sis rue de la Poste ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints (...) ; que le permis de construire contesté a été signé par Mme B, deuxième adjoint, en vertu d'un arrêté du maire d'Etivey du 8 avril 2008 lui attribuant délégation, sur le fondement de cette disposition, pour signer toutes les pièces (domaine état-civil, affaires financières et diverses), pour assurer les fonctions et missions relatives à une bonne gestion des affaires communales et pour prendre toutes décisions indispensables (...) ; que cet arrêté, dépourvu de toute précision quant aux limites de la délégation conférée à Mme B, et qui recouvre ainsi la totalité des fonctions légalement dévolues au maire, méconnaît en cela l'article L. 2122-18 précité du code général des collectivités territoriales ; que par suite, les premiers juges ont à bon droit retenu le moyen tiré du vice d'incompétence, sur le bien-fondé duquel demeure sans incidence le fait que M. D n'ait pas été en mesure, à la date à laquelle le permis litigieux lui a été délivré, de vérifier la qualité de son signataire ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'article R. 111-18 du code de l'urbanisme dispose : A moins que le bâtiment à construire ne jouxte la limite parcellaire, la distance comptée horizontalement de tout point de ce bâtiment au point de la limite parcellaire qui en est le plus rapproché doit être au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre ces deux points, sans pouvoir être inférieure à trois mètres ; qu'il ressort des pièces annexées à la demande de permis de construire, et notamment du plan de masse censé représenter l'emprise au sol de la construction projetée, que l'implantation de sa façade Nord est nettement écartée de la limite séparative de la propriété de , sans que ce retrait n'atteigne la distance minimale imposée par la disposition précitée ; que celle-ci a donc été méconnue, ainsi que le Tribunal l'a relevé à juste titre ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ; qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet se situe au centre du village d'Etivey qui, s'il ne fait l'objet d'aucune protection particulière au titre du livre VI du code du patrimoine relatif aux monuments historiques, sites et espaces protégés, n'en présente pas moins une certaine unité architecturale, caractérisée notamment par un bâti resserré de type traditionnel, où prédominent les murs de pierre et les toitures de tuile ; que le hangar projeté, de longueur importante et d'une hauteur excédant la quasi-totalité des immeubles environnants, présente des façades essentiellement revêtues d'un bardage métallique non teint et une toiture en tôle de couleur bleu-ardoise, qui seront visibles à distance ; qu'en estimant qu'une telle construction, alors même qu'elle jouxte un bâtiment agricole édifié dans les mêmes matériaux, n'était pas de nature à porter atteinte au caractère des lieux avoisinants, au sens des dispositions précitées, le maire d'Etivey a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation à bon droit relevée par les premiers juges ; que, pour contester ce motif d'annulation, M. D ne saurait utilement arguer du surcoût considérable résultant de la mise en oeuvre de procédés constructifs propres à assurer une meilleure insertion d'un tel immeuble dans son environnement ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du maire d'Etivey du 5 novembre 2008 ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que , qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. D la somme qu'il réclame en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, au contraire, de le condamner lui-même, sur ce fondement, à verser à une somme de 1 000 euros ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D est rejetée.
Article 2 : M. D versera à une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Patrice D, à M. Manuel , à M. Serge E, à M. Patrick C, à M. Gérard B et au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
Délibéré après l'audience du 31 janvier 2012, à laquelle siégeaient :
M. Moutte, président de chambre,
M. Bézard, président,
M. Zupan, président-assesseur.
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