Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2011 au greffe de Cour, présentée pour M. et Mme Angelo A, demeurant ... ;
M. et Mme A demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1001823, en date du 18 octobre 2011, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant, d'une part, à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, des contributions sociales et des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 et 2005, d'autre part, à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) d'ordonner la décharge de ces impositions et pénalités y afférentes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens de l'instance et la somme de 3 000 euros à leur verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- M. A n'a pas la qualité de résident en France et n'est donc pas assujetti à l'impôt sur le revenu en France, au sens de la loi fiscale française et de la convention fiscale franco-italienne ; que le critère du foyer ou lieu de séjour principal est le premier critère à prendre en considération au sens de l'article 4B-1-b du code général des impôts ; que la résidence principale de M. A restait située en Italie, même s'il séjournait temporairement en France par nécessité professionnelle, travaillant en France pour la SAS Formopan, et même si cette société prenait en charge ses frais et charges de logement en France ainsi qu'un abonnement à la télévision par satellite ; que le centre de ses intérêts vitaux, au sens du paragraphe 2 de l'article 4 de la convention fiscale franco-italienne, était situé en Italie, où sa famille était restée et où il retournait tous les quinze jours ;
- le fait d'avoir souscrit à tort une déclaration d'impôt sur le revenu en France ne suffit pas à établir sa qualité de résident en France, alors même qu'il n'a pas payé l'impôt en Italie ;
- à supposer que M. A soit imposable en France dans la mesure où il y exerçait son activité professionnelle, en application des stipulations de l'article 15-1 de la convention fiscale franco-italienne, il ne serait soumis à l'impôt sur le revenu que pour les revenus tirés de son activité professionnelle et non pour des revenus distribués qui ne pouvaient être soumis en France qu'à une retenue à la source à hauteur de 15 %, en application de l'article 10 de la convention ;
- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées à défaut pour l'administration fiscale d'établir une intention de sa part d'éluder l'impôt, alors qu'il pouvait considérer de bonne foi que toutes les charges assumées par la société s'analysaient pour lui comme des remboursements de frais ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 février 2012, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, tendant au rejet de la requête de M. et Mme A ; le ministre soutient que les critères fixés à l'article 4B du code général des impôts sont alternatifs et que M. A exerçant son activité professionnelle en France y était fiscalement domicilié au sens du droit interne ; que la résidence de l'épouse et de la fille du requérant en Italie pendant les années en litige, d'ailleurs non démontrée, reste donc sans incidence ; que les requérants ne justifient pas avoir été assujettis à l'impôt sur le revenu en Italie et ne peuvent donc pas utilement invoquer la convention fiscale franco-italienne du 5 octobre 1989 ; que les pièces présentées ne suffisent pas à démontrer que le foyer principal de l'intéressé était en Italie ; qu'il n'est pas établi que l'épouse et la fille de l'intéressé résidaient de manière habituelle en Italie, ni que le centre des intérêts vitaux de M. A, qui tirait ses revenus de son travail en France, était en Italie : que les stipulations de l'article 10 de la convention fiscale franco-italienne, qui concerne seulement les dividendes payés par une société résidente d'un Etat à un résident d'un autre Etat, ne sont pas applicables en l'espèce ; que M. A ne pouvait ignorer que la prise en charge de l'intégralité des frais afférents à sa résidence en France et de ses frais de déplacements et de repas constituait un supplément de revenu imposable en France au même titre que ses salaires ; que la demande de paiement des frais irrépétibles présentée par les requérants ne peut être que rejetée, dans la mesure où l'Etat ne saurait être la partie perdante dans la présente affaire ;
Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 2 juillet 2012, présenté pour M. et Mme A, tendant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention fiscale franco-italienne du 5 octobre 1989 ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2012 :
- le rapport de M. Montsec, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;
Considérant qu'à l'occasion de la vérification de comptabilité dont la société Formopan, située à Blanzy (Saône-et-Loire), a fait l'objet, portant sur les exercices correspondant aux années 2003, 2004 et 2005, il a été constaté au profit de M. A, directeur technique de cette société, la prise en charge par la société, en 2004 et 2005, des frais et charges afférents au logement occupé par lui, ainsi que divers abonnements et des frais de déplacement aller-retour permettant à ce salarié de se rendre régulièrement en Italie ; que l'administration a notifié à M. et Mme A, le 17 décembre 2007, des rehaussements de leur revenu imposable, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, d'un montant de 17 717 euros au titre de l'année 2004 et de 20 364 euros au titre de l'année 2005, ainsi que des pénalités pour manquement délibéré ; que M. et Mme A font appel du jugement en date du 18 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, des contributions sociales et des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été en conséquence assujettis au titre des années 2004 et 2005 ;
Sur la domiciliation fiscale des requérants en France :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale française :
Considérant qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française " ; qu'aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; / b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; / c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques " ; qu'il résulte de ces dispositions combinées qu'une personne qui a en France son foyer ou lieu de séjour principal, ou qui y exerce son activité professionnelle, ou qui y a le centre de ses intérêts économiques, doit être regardée comme fiscalement domiciliée en France ;
Considérant qu'il est constant que M. A a exercé en France une activité professionnelle salariée durant la période en litige, en qualité de directeur technique de la société Formopan ; qu'ainsi, M. A, qui n'établit ni même n'allègue que cette activité n'aurait eu qu'un caractère accessoire, doit être considéré, pour ce seul motif, comme ayant eu alors son domicile fiscal en France au sens des dispositions précitées du 1 de l'article 4 B du code général des impôts, sans qu'il soit besoin d'examiner sa situation du point de vue des autres critères alternatifs fixés par lesdites dispositions, relatifs à la localisation en France du foyer ou lieu de séjour principal de l'intéressé et du centre de ses intérêts économiques ;
En ce qui concerne l'application de la convention fiscale franco-italienne du 5 octobre 1989 :
Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la convention fiscale franco-italienne signée entre la France et l'Italie le 5 octobre 1989 : " 1. Au sens de la présente convention, l'expression " résident d'un Etat " désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction, ou de tout autre critère de nature analogue. Toutefois, cette expression ne comprend pas les personnes qui ne sont assujetties à l'impôt dans cet Etat que pour les revenus y ayant leur source ou pour la fortune qui y est située. / 2. Lorsque, selon les dispositions du paragraphe 1, une personne physique est un résident des deux Etats, sa situation est réglée de la manière suivante : a) Cette personne est considérée comme un résident de l'Etat où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent ; si elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans les deux Etats, elle est considérée comme un résident de l'Etat avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits. b) Si l'Etat où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, ou si elle ne dispose d'un foyer d'habitation permanent dans aucun des Etats, elle est considérée comme un résident de l'Etat dont elle possède la nationalité (...) " ;
Considérant que les requérants ne contestent pas que M. MAZZIOLI a exercé de manière continue son activité professionnelle en France, au sein de la société Formotran, de 1998 à 2007, à l'exception de la période du 27 janvier au 1er octobre 2001 et n'allèguent pas qu'ils auraient, au titre des années 2004 et 2005, été assujettis à l'impôt sur le revenu en Italie ; qu'en se bornant par ailleurs à produire diverses factures italiennes de gaz, d'électricité et d'eau, un justificatif d'abonnement à la télévision, un justificatif de propriété et des documents présentés comme des certificats de scolarité concernant leur fille, les requérants n'établissent pas que leur foyer d'habitation permanente était situé en Italie et qu'ils avaient dans ce pays le centre de leurs intérêts vitaux, c'est-à-dire le lieu avec lequel leurs relations personnelles et économiques étaient les plus étroits ; qu'ils ne sauraient dès lors, pour faire échec à l'application de la loi fiscale française, revendiquer le bénéfice des stipulations précitées de la convention fiscale franco-italienne ;
Sur les pénalités pour manquement délibéré :
Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'espèce : " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 en cas de manquement délibéré (...) " ;
Considérant que, pour justifier l'application à M. et Mme A des pénalités pour manquement délibéré prévues par les dispositions précitées du code général des impôts, l'administration fiscale s'est fondée sur l'importance et la nature des rectifications opérées, qui portent sur les montants de 17 717 euros et 20 364 euros pour, respectivement, les deux années 2004 et 2005, avoisinant le montant des salaires perçus pour les mêmes années par M. A, soit, respectivement, 22 086 et 21 106 euros, et sur la circonstance que l'intéressé ne pouvait ignorer que les frais ainsi pris en charge par la société Formopan, correspondant, d'une part, à ses frais et charges de logement, à divers abonnements tels celui lui donnant accès à la télévision par satellite, et, d'autre part, à des frais de déplacement aller/retour pour se rendre en Italie pour des motifs personnels, présentaient le caractère de dépenses personnelles et étaient en réalité destinés à compenser la modicité des salaires versés au regard des fonctions exercées, tout en permettant à l'intéressé d'échapper à l'impôt ; que, dans ces conditions, et alors par ailleurs que M. et Mme A ne pouvaient ignorer qu'ils étaient fiscalement résidants en France, pays dans lequel ils avaient déposé leurs déclarations à l'impôt sur le revenu, l'administration doit être regardée comme établissant que les requérants se sont délibérément soustraits à leurs obligations fiscales, ce qui justifiait qu'ils fassent l'objet de l'amende prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande ; que leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Angelo A Xet au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 5 juillet 2012 à laquelle siégeaient :
M. Duchon-Doris, président de chambre,
M. Montsec, président-assesseur,
Mme Besson-Ledey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 août 2012.
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N° 11LY02984
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