Vu la requête, enregistrée le 17 février 2012, présentée pour la Société JCDG Promotion, dont le siège est 508 chemin des Grands-Prés à Saint-Baldoph (73190) ;
La Société JCDG Promotion demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0805506 et n° 0902064 du Tribunal administratif de Grenoble du 15 décembre 2011 qui a rejeté ses demandes tendant à l'annulation, en premier lieu, de la décision du 13 juin 2008 par laquelle le maire de la commune de Saint-Baldoph (Savoie) lui a délivré un certificat d'urbanisme négatif et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux, en second lieu, de l'arrêté du 2 mars 2009 par lequel cette même autorité administrative a refusé de lui accorder un permis de construire ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) de condamner la commune de Saint-Baldoph à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La Société JCDG Promotion soutient, en premier lieu, que l'existence d'un éventuel coefficient d'occupation des sols s'apprécie à la date de détachement d'une parcelle ; que, depuis la loi Solidarité et renouvellement urbains (SRU), qui a abrogé l'ancienne interdiction prévue par le 1er alinéa de l'article L. 111-5 du code de l'urbanisme, l'acquéreur d'une parcelle détachée n'a pas à tenir compte des constructions préexistantes ; que, si les dispositions de l'article 18 de la loi du 2 juillet 2003 ont partiellement rétabli un contrôle des densités constructibles en cas de distraction parcellaire, la commune de Saint-Baldoph n'a pas établi, ni même soutenu, que le plan local d'urbanisme prévoit l'application de l'article L. 123-1-1 du code de l'urbanisme, issu de ces dispositions, sur le territoire communal ; que, contrairement à ce que cette commune a fait valoir, la parcelle cadastrée 125 constitue une parcelle détachée, car constituant une parcelle autonome faisant l'objet d'une division cadastrale distincte ; que, du fait du détachement de la parcelle cadastrée 217, la parcelle cadastrée 125 ne peut être regardée comme restant intégrée au tènement initial qu'elle formait avec la parcelle cadastrée 126 ; que l'article L. 112-5 du code de l'urbanisme qu'invoque la commune de Saint-Baldoph ne s'applique qu'aux seules communes dans lesquelles un plafond légal de densité était institué au 31 décembre 1999, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que, dans l'hypothèse même où l'on admettrait qu'aucun droit à construire ne s'attache à la parcelle cadastrée 125, il existerait néanmoins des droits à construire résiduels afférents à la parcelle cadastrée 217 ; que la motivation du certificat d'urbanisme négatif attaqué, selon laquelle toute construction d'une habitation supplémentaire nécessiterait une dérogation au plan d'occupation des sols, est donc inexacte ; qu'en second lieu, le refus de permis de construire ne peut se fonder sur l'existence d'une servitude, dès lors que le projet ne remet pas en cause l'existence et l'exercice de cette servitude ; qu'en tout état de cause, le maire n'a pas compétence pour apprécier une question de droit privé ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 15 mai 2012, présenté pour la commune de Saint-Baldoph, représentée par son maire, qui demande à la Cour :
- de rejeter la requête ;
- de condamner la Société JCDG Promotion à lui verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La commune soutient, en premier lieu, que la société requérante, qui fait valoir que l'article L. 112-5 du code de l'urbanisme a été invoqué à tort, ne critique cependant pas le jugement attaqué ; qu'en tout état de cause, cet article est bien applicable en l'espèce ; que le permis de construire qui a été accordé le 19 octobre 2005 à la Société JCDG Promotion a épuisé les droits à construire sur le terrain constitué des parcelles cadastrées 125 et 126 ; que, même si elle possède un numéro cadastral distinct et est contigüe à la nouvelle parcelle cadastrée 217, issue de la division de l'ancienne parcelle cadastrée 126, la parcelle cadastrée 125, qui quant à elle n'a pas fait l'objet d'un détachement, ne bénéficie d'aucun droit à construire ; que la solution qui a été retenue par le Tribunal ne repose nullement sur l'application de l'article L. 123-1-1 du code de l'urbanisme ; que le Tribunal a en effet simplement constaté que la Société JCDG Promotion ne démontre pas que les droits à construire sur la parcelle cadastrée 217, résultant du détachement parcellaire précité, sont suffisants pour autoriser le projet ; que la superficie de cette parcelle ne permettant pas d'autoriser la construction projetée, le maire était tenu de prendre les décisions attaquées ; qu'en second lieu, le moyen tiré de l'illégalité du motif de refus du permis de construire fondé sur l'existence d'une servitude ne pourra qu'être écarté, dès lors que le maire aurait pris la même décision s'il s'était uniquement fondé sur l'insuffisance des droits à construire ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 1er juin 2012, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 juin 2012 ;
Vu le mémoire, enregistré le 22 juin 2012, présenté pour la Société JCDG Promotion, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
En application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative, par une ordonnance du 25 juin 2012 l'instruction a été rouverte ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 juin 2012, présenté pour la commune de Saint-Baldoph, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 2012 :
- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
- et les observations de Me Gaudin, représentant la SCP Denarie - Butin - Bern, avocat de la SARL JCDG Promotion, et celles de Me Liochon, avocat de la commune de Saint-Baldoph ;
1. Considérant que, par un arrêté du 19 octobre 2005, le maire de la commune de Saint-Baldoph a délivré un permis de construire à la Société JCDG Promotion, en vue de l'édification de deux bâtiments d'habitation sur un terrain présentant une superficie
de 1 992 m² constitué des deux parcelles cadastrées 125 et 126, pour au total 295 m² de surface hors oeuvre nette ; qu'au cours du mois de mars 2007, la parcelle cadastrée 126 a été divisée en deux parties, qui sont devenues les parcelles cadastrées 216 et 217 ; que cette dernière parcelle a été réunie à la parcelle cadastrée 125, pour former un nouveau terrain, d'une superficie de 1 196 m², pour lequel la Société JCDG Promotion a présenté, en avril 2008, une demande de certificat d'urbanisme, en vue de la construction d'une maison d'habitation présentant une surface hors oeuvre nette de 170 m² ; que, par une décision du 13 juin 2008, faisant application de l'article UD 14 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, le maire a délivré un certificat d'urbanisme négatif à cette société, au motif que " le COS (est) déjà utilisé par la construction de deux bâtiments " ; que la société a exercé un recours gracieux à l'encontre de ce certificat négatif, que le maire a implicitement rejeté ; qu'elle a alors saisi le Tribunal administratif de Grenoble d'une demande d'annulation du certificat d'urbanisme négatif et de cette décision implicite ; que, bien que le litige fût encore pendant devant le Tribunal, en janvier 2009, la Société JCDG Promotion a présenté une demande de permis de construire, en vue de la construction, sur ce même terrain composé des parcelles cadastrées 125 et 217, d'une maison d'habitation constituée de deux logements, présentant une surface hors oeuvre nette de 168 m² ; que, par un arrêté du 2 mars 2009, le maire a rejeté cette nouvelle demande, en se fondant sur deux motifs : en premier lieu, faisant à nouveau application de l'article UD 14 du règlement du plan local d'urbanisme, sur le fait que " le coefficient d'occupation des sols est déjà utilisé par les constructions précédentes sur l'ensemble du terrain " et, en second lieu, sur la circonstance que l'autorisation de la co-propriété, au profit de laquelle une servitude a été constituée sur le terrain d'assiette du projet, est nécessaire avant toute nouvelle construction sur ce terrain ; que la Société JCDG Promotion a de nouveau saisi le Tribunal administratif de Grenoble, pour lui demander d'annuler ce refus de permis de construire ; qu'après avoir joint les deux demandes ainsi présentées par cette société, le Tribunal les a rejetées par un jugement du 15 décembre 2011 ; que la Société JCDG Promotion relève appel de ce jugement ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 111-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction antérieure à la loi susvisée du 13 décembre 2000 : " Il ne peut plus être construit sur toute partie détachée d'un terrain dont la totalité des droits de construire, compte tenu notamment du coefficient d'occupation du sol en vigueur, a été précédemment utilisée. / Lorsqu'une partie est détachée d'un terrain dont les droits de construire n'ont été que partiellement utilisés, il ne peut y être construit que dans la limite des droits qui n'ont pas été utilisés avant la division. (...) ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 123-1-1 du code de l'urbanisme en vigueur à la date des décisions attaquées : " Dans les zones où ont été fixés un ou des coefficients d'occupation des sols, le plan local d'urbanisme peut prévoir que, si une partie a été détachée depuis moins de dix ans d'un terrain dont les droits à construire résultant de l'application du coefficient d'occupation des sols ont été utilisés partiellement ou en totalité, il ne peut plus être construit que dans la limite des droits qui n'ont pas déjà été utilisés (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article UD 14 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Baldoph : " Le coefficient d'occupation des sols est fixé à 0,15 (...) " ;
3. Considérant qu'il est constant qu'à la date des décisions attaquées, le plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Baldoph ne faisait pas application de l'article
L. 123-1-1 précité du code de l'urbanisme ; que, par suite, en raison de l'abrogation des dispositions précitées de l'article L. 111-5 du même code, pour apprécier si les projets pour lesquels un certificat d'urbanisme et un permis de construire ont été demandés pouvaient être autorisés en application de l'article UD 14 du règlement du plan local d'urbanisme, le maire ne pouvait pas tenir compte de l'utilisation antérieure de droits à construire sur tout ou partie du terrain d'assiette de ces projets ; que le maire pouvait seulement, le cas échéant, tenir compte des constructions déjà implantées sur ce terrain pour déterminer la surface hors oeuvre nette constructible ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette des deux projets précités de la Société JCDG Promotion présente une superficie de 1 196 m² ; que, par suite, compte tenu du coefficient d'occupation des sols applicable, fixé à 0,15, un bâtiment présentant une surface hors oeuvre nette de 179,40 m² pouvait être autorisé sur ledit terrain, dès lors qu'aucune construction n'y était déjà implantée ; que le certificat d'urbanisme et le permis de construire ont été demandés pour des projets de respectivement 170 m² et 168 m² de surface hors oeuvre nette ; que, dès lors, c'est à tort que le maire de la commune de Saint-Baldoph a estimé que les projets de la Société JCDG Promotion méconnaissent les dispositions précitées de l'article UD 14 du règlement du plan local d'urbanisme ;
5. Considérant, en second lieu, qu'en défense, la commune de Saint-Baldoph ne soutient pas que c'est à tort que le Tribunal administratif de Grenoble a estimé que le motif du refus de permis de construire attaqué fondé sur la circonstance que l'autorisation de la co-propriété, au profit de laquelle une servitude a été constituée sur le terrain d'assiette du projet, est nécessaire avant toute nouvelle construction sur ce terrain est entaché d'illégalité ; qu'il ressort des pièces du dossier que c'est à bon droit que le Tribunal a censuré ce motif ;
6. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la Société JCDG Promotion est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes ; qu'en conséquence, il y a lieu d'annuler ce jugement, ainsi que les décisions attaquées ;
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Société JCDG Promotion, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer à la commune de Saint-Baldoph la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de cette commune le versement d'une somme au bénéfice de cette société sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 15 décembre 2011 est annulé.
Article 2 : La décision du 13 juin 2008 par laquelle le maire de la commune de Saint-Baldoph a délivré un certificat d'urbanisme négatif à la Société JCDG Promotion, la décision implicite de rejet du recours gracieux que cette société a exercé à l'encontre de ce certificat et l'arrêté du 2 mars 2009, par lequel cette même autorité administrative a refusé d'accorder un permis de construire à ladite société, sont annulés.
Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Société JCDG Promotion et à la commune de Saint-Baldoph.
Délibéré à l'issue de l'audience du 25 septembre 2012, à laquelle siégeaient :
M. Moutte, président,
M. Zupan, président-assesseur,
M. Chenevey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 octobre 2012.
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N° 12LY00507
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