Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2011, présentée pour Mme Carolle A, demeurant ...;
Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°0801589-0802624-0802710-0804178 en date du 4 mars 2011 du Tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté sa demande tendant d'une part, à l'annulation de la délibération, en date du 30 juin 2008, par laquelle le Syndicat Energie de l'Isère a décidé de supprimer le poste d'ingénieur en chef de classe normale correspondant à l'emploi de chargé de mission qu'elle occupait, d'autre part, à la condamnation du Syndicat Energie de l'Isère à lui verser diverses sommes en réparation des préjudices subis ainsi qu'au titre des indemnités non versées et au titre de la perte future de rémunération ;
2°) d'annuler la délibération susmentionnée ;
3°) de condamner le Syndicat Energie de l'Isère à lui verser la somme de 92 000 euros au titre de ses préjudices confondus ;
4°) de mettre à la charge du Syndicat Energie de l'Isère la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- dès lors que le comité technique paritaire a souhaité différer son avis aux résultats de la médiation qu'il préconisait, il n'a pas rendu un avis favorable ou défavorable au sens des dispositions de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984, et l'absence d'avis rendu par le comité technique paritaire ne permettait pas au comité syndical de délibérer valablement sur la suppression du poste d'ingénieur en chef de classe normale ;
- les motifs de fait à l'origine de la délibération litigieuse sont matériellement inexacts ;
- la délibération attaquée est illégale du fait de l'illégalité des décisions sur lesquelles elle s'appuie, à savoir la délibération du conseil syndical du 3 mars 2008 portant création d'un second poste d'ingénieur en chef et l'arrêté du syndicat en date du 2 avril 2008 nommant M. B ;
- le motif budgétaire de la suppression de son poste n'étant pas justifié, la délibération attaquée est entachée d'un détournement de procédure, destiné à la mettre à l'écart ;
- dès lors que les décisions successives visent essentiellement à l'écarter de ses fonctions de directeur et à terme de l'exclure totalement de la structure du syndicat, la décision attaquée constitue une sanction déguisée et est entachée d'un détournement de pouvoir ;
- le harcèlement moral qu'elle a subi justifie l'indemnisation de son préjudice moral à hauteur de 10 000 euros et non à la somme de 1 500 euros fixée par le Tribunal ;
- les décisions illégales prises successivement ont eu une incidence sur ses perspectives de carrière et sa rémunération : elle justifie à ce titre d'un préjudice au titre de la perte de chance sérieuse d'avancement, d'un droit à indemnités calculé en tenant compte de la différence entre la somme qu'elle a perçue et la rémunération qui aurait dû être la sienne si elle avait reçu l'affectation de directeur et justifie d'un préjudice financier lié à la perte future de rémunération ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, en défense, enregistré le 23 août 2011, présenté pour le Syndicat Energie de l'Isère qui conclut au rejet de la requête et ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme A sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code justice administrative ;
Elle soutient que :
- la requête est tardive ;
- les conclusions indemnitaires tendant à la condamnation du Syndicat à verser à l'intéressée la somme de 92 000 euros, " au titre de ses préjudices confondus ", constituent des conclusions nouvelles en appel, et irrecevables, à ce titre ;
- la décision de mutation interne de l'intéressée a été prise dans l'intérêt du service ;
- le comité technique paritaire a bien rendu un avis conformément aux dispositions de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984, qui n'imposent pas que cet avis soit expressément favorable ou défavorable ;
- dès lors que, dans l'intérêt du service, il a été contraint pour des motifs économiques, et faute de missions suffisantes de nature à justifier son maintien, de supprimer l'emploi de Mme A, la délibération attaquée n'est pas entachée de détournement de pouvoir ;
- la délibération attaquée n'a pas été adoptée sur le fondement de la délibération du 3 mars 2008 dont l'illégalité a été reconnue par le Tribunal ;
- il pouvait valablement, en raison des dépenses futures auxquelles il devait faire face, décider de supprimer l'emploi de l'intéressée dont le maintien ne se justifiait pas, sans commettre de détournement de pouvoir ;
- dès lors que l'intéressée ne pouvait plus rester sur le poste de directeur du Syndicat, compte tenu des difficultés relationnelles rencontrées, et qu'ensuite, les nouvelles fonctions qui lui ont été confiées se sont révélées insuffisantes, la délibération attaquée ne constitue pas une sanction disciplinaire déguisée et n'est entachée d'aucun détournement de pouvoir ;
- l'intéressée ne justifie pas que la somme sollicitée correspondrait aux préjudices qu'elle aurait subis ;
- dès lors que le Tribunal a annulé la décision de mutation et la nomination du nouveau directeur pour vice de forme et que ces décisions étaient justifiées au fond, l'indemnité allouée par les premiers juges au titre du préjudice moral est suffisante ;
- l'intéressée n'établit pas qu'elle aurait été victime de harcèlement moral ;
- l'indemnité de 1 260 euros fixée par le Tribunal en réparation du préjudice financier subi par l'intéressée du fait de l'illégalité externe des deux décisions portant baisse de son régime indemnitaire est suffisante dès lors que la manière de servir de l'intéressée justifiait une baisse de son régime indemnitaire ;
- dès lors que l'intéressée a fait l'objet d'un avancement d'échelon et que son placement en surnombre qui a induit sa baisse de rémunération est la conséquence de la décision régulière de suppression de son emploi, elle ne justifie d'aucun préjudice au titre de la perte de chance sérieuse d'avancement et dans le déroulement de sa carrière ;
- dès lors que l'intéressée a été placée en surnombre, perdant de ce fait, son régime indemnitaire, elle ne justifie d'aucun droit à indemnité ;
- elle n'établit pas que le Syndicat lui ferait une mauvaise publicité qui serait directement à l'origine de ses difficultés de recherche d'emploi : le préjudice invoqué au titre de la perte future de rémunération n'est pas établi ;
Vu le mémoire, enregistré le 7 mai 2012, présenté pour Mme A qui conclut en outre à ce qu'il soit enjoint au Syndicat Energie de l'Isère de la réintégrer dans un délai d'un mois, à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
Vu le mémoire, enregistré le 24 mai 2012, présenté pour le Syndicat Energie de l'Isère qui conclut aux mêmes fins ;
Il soutient en outre que la demande d'injonction n'est pas recevable et en, tout état de cause, devra être rejetée, la délibération du 30 juin 2008 étant régulière ;
Vu le mémoire, enregistré le 15 juin 2012, présenté pour Mme A qui conclut aux mêmes fins ;
Elle soutient en outre que la demande d'injonction peut être présentée à tout moment ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 juillet 2012, présenté pour le Syndicat Energie de l'Isère qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 17 août 2012, présenté pour Mme A qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 14 septembre 2012, présenté pour Mme A qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 20 novembre 2012, présentée pour Syndicat Energie de l'Isère ;
Vu les ordonnances en dates des 9 mai, 1er et 21 juin, 11 et 27 juillet et 29 août 2012, par lesquelles la date de la clôture de l'instruction a été fixée au 25 mai et reportée au 15 septembre 2012 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2012 :
- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
- et les observations de Mme A, requérante, et celles de Me Riffard, avocat du Syndicat Energie de l'Isère ;
1. Considérant que Mme A, ingénieur en chef territorial, a demandé au Tribunal administratif de Grenoble l'annulation de plusieurs décisions prises à la suite du retrait des fonctions du directeur du Syndicat Energie de l'Isère qu'elle occupait et qui ont conduit ledit syndicat, par délibération en date du 30 juin 2008, à supprimer son emploi et à la maintenir en surnombre avant de la remettre à disposition du centre départemental de gestion de la fonction publique territoriale ; qu'elle a également demandé au Tribunal à être indemnisée des conséquences dommageables de ces différentes décisions qu'elle estimait illégales ; que, par la présente requête, Mme A fait appel du jugement rendu par le Tribunal administratif de Grenoble, le 4 mars 2011, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la délibération précitée en date du 30 juin 2008, d'autre part, en tant qu'il a limité sa demande indemnitaire dirigée contre le Syndicat Energie de l'Isère, au versement d'une somme de 1 260 euros au titre de rappel de primes et indemnités et d'une indemnité de 1 500 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis ;
Sur la recevabilité de la requête d'appel :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 et R. 751-4. " ; qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été notifié à Mme A le 21 mars 2011 ; que, dès lors, sa requête, enregistrée le lundi 23 mai 2011, n'est pas tardive ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 97 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée: " Un emploi ne peut être supprimé qu'après avis du comité technique paritaire (...) " ; que Mme A fait valoir qu'en réservant sa position dans l'attente des résultats d'une " médiation entre les deux parties avec une nouvelle présentation du dossier en comité technique paritaire ", ce dernier n'aurait pas prononcé un avis au sens des dispositions précitées ; que toutefois, cette circonstance est sans incidence sur la régularité de la procédure de consultation, dès lors qu'il est constant que le comité technique paritaire du centre de gestion de l'Isère a été régulièrement saisi avant la suppression d'emploi litigieuse ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la délibération attaquée, que la suppression du poste d'ingénieur en chef occupé par Mme A a été décidée au motif que les missions qui ont été confiées à l'intéressée à la suite du retrait de ses fonctions de directeur du Syndicat, ne s'avéraient pas suffisantes en quantité pour occuper un emploi à temps complet du niveau de la catégorie A supérieur et que compte tenu de l'existence d'un second poste d'ingénieur en chef qui avait été créé pour permettre le recrutement du nouveau directeur du Syndicat, l'impact financier du poste d'ingénieur en chef ainsi occupé par Mme A représentait une charge budgétaire trop importante pour le Syndicat ; que la circonstance que la suppression de son emploi soit intervenue deux mois après la création d'un poste budgétaire identique, mais destiné à accueillir les fonctions de directeur du Syndicat ne permet pas d'établir que les motifs tirés de l'insuffisance des fonctions à confier à un second ingénieur en chef et de l'importance du coût financier représenté par ce poste seraient entachés d'inexactitude matérielle ;
5. Considérant, en troisième lieu, que le moyen par lequel Mme A excipe de l'illégalité de la délibération du conseil syndical en date du 3 mars 2008 portant création d'un emploi d'ingénieur territorial à temps complet et de l'arrêté en date du 2 avril 2008 par lequel le président du Syndicat a nommé M. B sur cet emploi doit être écarté comme inopérant dès lors que la décision attaquée n'a été prise ni en application, ni en conséquence de ces décisions ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que le Syndicat pouvait légalement, quel que soit l'état de ses finances, procéder à une suppression d'emploi par mesure d'économie ; qu'il ressort des pièces du dossier et de ce qui précède que la suppression d'emploi décidée en l'espèce était motivée par un souci d'économie et par la nécessité de réorganiser le service ; que, par suite la circonstance que la création d'un emploi de collaborateur de cabinet aurait été envisagée en juin 2008, ne permet pas elle seule d'établir que la délibération attaquée serait entachée de détournement de pouvoir ; que, pour les mêmes raisons, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait entachée d'un détournement de procédure destiné à la mettre à l'écart, ou qu'elle constituerait une sanction disciplinaire déguisée ;
Sur les conclusions indemnitaires :
En ce qui concerne le préjudice moral :
7. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que Mme A aurait subi, dans l'exercice de ses fonctions, des faits de harcèlement moral ; que dans les circonstances de l'espèce, en évaluant à 1 500 euros le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence résultant de l'irrégularité de la procédure par laquelle le Syndicat Energie de l'Isère a affecté l'intéressée sur un poste de chargée de mission, le tribunal n'a pas fait une inexacte appréciation de ce préjudice ;
En ce qui concerne la perte financière liée à la baisse du régime indemnitaire de l'intéressée entre la date d'application de la décision du 26 décembre 2007 et la date de son placement en surnombre, à la suite de la suppression de son poste :
8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A, qui a fait l'objet d'une réduction de son indemnité spécifique de service et de sa prime de rendement, à partir du 26 décembre 2007, jusqu'à la date de son placement en surnombre, consécutive à la décision du 30 juin 2008 supprimant son poste, en raison de l'intervention illégale des décisions des 26 décembre 2007 et 9 avril 2008 réduisant le taux desdites indemnités versées à l'intéressée, aurait bénéficié des mêmes montants de primes que ceux qu'elle percevait avant l'intervention de la décision précitée du 26 décembre 2007, alors qu'elle avait conservé les mêmes missions techniques ; que dans ces conditions, elle est fondée à demander réparation du préjudice résultant de la perte de ces indemnités durant la période concernée ; qu'il sera dès lors fait une exacte appréciation de ce préjudice en l'évaluant à 3500 euros ;
En ce qui concerne les autres préjudices financiers :
9. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que Mme A aurait subi une baisse de rémunération, hormis la réduction précédemment évoquée de ses primes et indemnités ; qu'elle n'établit pas plus qu'elle aurait subi un préjudice dans le déroulement de sa carrière alors qu'elle a bénéficié d'un avancement d'échelon à la durée minimum, le 19 novembre 2008 et que, par ses agissements, le président du Syndicat Energie de l'Isère serait directement à l'origine des difficultés qu'elle rencontre pour trouver un nouvel emploi ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité en appel des conclusions indemnitaires de Mme A en tant qu'elles excèdent la somme demandée aux premiers juges, que cette dernière est seulement fondée à demander d'une part, que la condamnation du Syndicat Energie de l'Isère à hauteur de 1 260 euros au titre du rappel de primes et indemnités soit remplacée par la somme de 3 500 euros et à demander d'autre part la réformation en ce sens du jugement dont elle fait appel ;
Sur les conclusions de la requérante à fins d'injonction et d'astreinte :
11. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions susmentionnées doivent être rejetées, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme A, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement au Syndicat Energie de l'Isère de la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du Syndicat Energie de l'Isère, le versement à Mme A de la somme de 1 500 euros au titre des mêmes frais ;
DECIDE :
Article 1 : La somme de 1 260 euros que le Syndicat Energie de l'Isère est condamné à verser à Mme A au titre du rappel de primes et indemnités en vertu de l'article 2 du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 4 mars 2011 sera remplacée par la somme de 3 500 euros.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble en date du 4 mars 2011 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.
Article 3 : Le Syndicat Energie de l'Isère versera à Mme A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Carolle A et au Syndicat Energie de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 20 novembre 2012 à laquelle siégeaient :
M. Tallec, président de chambre,
M. Rabaté, président-assesseur,
Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 décembre 2012.
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N° 11LY01287