Vu la requête, enregistrée le 24 septembre 2012, présentée pour M. B...G..., domicilié... ;
M. G...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1005165 en date du 10 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de l'Ardèche en date du 28 juin 2010 autorisant M. E...à exploiter 63 hectares comprenant des parcelles sur les communes de Rochemaure et d'Aubignas ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté préfectoral ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le préfet doit justifier de la délégation de signature consentie au signataire de l'arrêté attaqué ;
- les droits de la défense n'ont pas été respectés ;
- le préfet devait reprendre la procédure en saisissant une nouvelle fois la commission départementale d'orientation de l'agriculture et non se contenter de motiver la décision ;
- l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture ne lui a pas été communiqué ;
- il n'a pas été en mesure de consulter l'intégralité de son dossier ;
- il n'a pas été convié à la réunion de concertation du 10 juin 2008 et, s'il y était présent, il n'a pu s'exprimer ;
- il n'a pas été entendu par la commission départementale d'orientation de l'agriculture ;
- le préfet ne pouvait légalement procéder à une motivation rétroactive ou différée ;
- l'arrêté en litige est insuffisamment motivé ;
- le préfet ne s'est pas assuré que la résiliation du bail ne portait pas une atteinte excessive à la situation du preneur ;
- M.E..., qui conserve son emploi, ne pourra pas exploiter ses terres ;
- le préfet a ainsi commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision et méconnu les dispositions de l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime ;
- la décision est entachée d'un détournement de pouvoir manifesté par la volonté farouche de s'opposer à lui ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 13 mars 2013, présenté pour M.E... qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. G... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que la décision en litige n'entraînera pas de conséquences préjudiciables pour la situation du requérant ;
Vu l'ordonnance en date du 1er février 2013 par laquelle, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, le magistrat délégué par le président de la 3ème chambre de la Cour a fixé la clôture de l'instruction au 15 mars 2013 ;
Vu le mémoire, enregistré le 15 mars 2013, présenté par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- le signataire de l'arrêté du 28 juin 2010 avait reçu délégation de signature ;
- le préfet n'était pas tenu de consulter à nouveau la commission départementale d'orientation de l'agriculture ;
- le requérant était présent à la réunion de concertation du 10 juin 2008, sa situation a été prise en compte et le préfet n'était pas tenu de lui transmettre les pièces dont il sollicite la communication ;
- l'arrêté du 28 juin 2010 est suffisamment motivé ;
- le préfet n'a pas procédé à une motivation rétroactive du précédent arrêté ;
- il n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ni méconnu les dispositions en vigueur ;
Vu l'ordonnance en date du 18 mars 2013 par laquelle, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, le magistrat délégué par le président de la 3ème chambre de la Cour a reporté la clôture d'instruction au 12 avril 2013 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural et de la pêche maritime ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er octobre 2013 :
- le rapport de M. Clément, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
- et les observations de Me Darnoux, avocat de M.G... ;
1. Considérant que, par arrêté du 11 juillet 2008, le préfet de l'Ardèche a autorisé M. D... E...à exploiter 63 hectares de parcelles situées sur les communes de Rochemaure et d'Aubignas ; qu'à la demande de M.G..., le Tribunal administratif de Lyon a, par jugement du 8 avril 2010, annulé cet arrêté ; que le préfet de l'Ardèche a, par arrêté du 28 juin 2010, de nouveau délivré à M. E...l'autorisation d'exploiter les mêmes parcelles de terrain ; que M. G...fait appel du jugement en date du 10 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté 28 juin 2010 susmentionné ;
Sur les moyens de légalité externe :
2. Considérant qu'il ressort des pièces produites par le préfet de l'Ardèche devant les premiers juges que M. F...C..., directeur départemental adjoint des territoires avait reçu, par arrêté préfectoral du 25 mars 2010 régulièrement publié, délégation à l'effet de signer l'acte attaqué ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, nonobstant la circonstance, à la supposer établie, que le requérant n'aurait pas été invité à la réunion de concertation du 10 juin 2008, au demeurant non prévue par les textes, il y était présent et a pu s'y exprimer ;
4. Considérant que les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure en raison de l'absence de nouvelle consultation de la commission départementale d'orientation de l'agriculture, de l'absence du respect par la commission d'une procédure contradictoire, du défaut de communication de l'avis de la commission et de l'intégralité du dossier, ainsi que le moyen tiré d'une motivation insuffisante de la décision attaquée doivent être écartés pour les motifs retenus par le Tribunal administratif de Lyon et qu'il convient d'adopter ;
Sur les moyens de légalité interne :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime : " Le contrôle des structures des exploitations agricoles s'applique à la mise en valeur des terres agricoles ou des ateliers de production hors sol au sein d'une exploitation agricole, quels que soient la forme ou le mode d'organisation juridique de celle-ci, et le titre en vertu duquel la mise en valeur est assurée. / Est qualifié d'exploitation agricole, au sens du présent chapitre, l'ensemble des unités de production mises en valeur directement ou indirectement par la même personne, quels qu'en soient le statut, la forme ou le mode d'organisation juridique, dont les activités sont mentionnées à l'article L. 311-1. / L'objectif prioritaire du contrôle des structures est de favoriser l'installation d'agriculteurs, y compris ceux engagés dans une démarche d'installation progressive. / En outre, il vise : / - soit à empêcher le démembrement d'exploitations agricoles viables pouvant permettre l'installation d'un ou plusieurs agriculteurs ; / - soit à favoriser l'agrandissement des exploitations agricoles dont les dimensions, les références de production ou les droits à aide sont insuffisants au regard des critères arrêtés dans le schéma directeur départemental des structures ; - soit à permettre l'installation ou conforter l'exploitation d'agriculteurs pluriactifs partout où l'évolution démographique et les perspectives économiques le justifient. " ;
6. Considérant que M. G...fait valoir, en citant à nouveau en appel une note rédigée le 20 février 2009 par un technicien de la chambre d'agriculture de l'Ardèche, que son exploitation subirait des conséquences préjudiciables en termes de ventes et de subventions d'exploitation ; que, toutefois, la surface d'exploitation restante, de 130 hectares, demeurerait plus de trois fois supérieure à l'unité de référence prévue à l'article 3 du schéma départemental des structures agricoles de l'Ardèche et plus de cinq fois supérieure à la surface agricole utile moyenne d'une exploitation ardéchoise ; que, sauf à cesser son activité, le requérant ne sera pas conduit à restituer la dotation aux jeunes agriculteurs ; que l'obligation du remboursement des primes d'exploitation et la baisse des droits à paiement unique ne sont pas établis ; que les circonstances, à les supposer opérantes, que M.E... ne pourrait accéder à ses nouvelles parcelles qu'avec difficulté par des sentiers, ne disposerait pas du matériel requis ni des droits à paiement unique, et conserverait son emploi à la mairie du Teil, ne sont pas établies ; qu'ainsi, le préfet de l'Ardèche, par la décision contestée, n'a pas porté une atteinte excessive à la situation du requérant et méconnu les dispositions des articles L. 331-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime ; qu'il n'a pas davantage commis, en délivrant à M. E...l'autorisation d'exploiter qu'il sollicitait, d'erreur manifeste d'appréciation ;
7. Considérant que le détournement de pouvoir qui se serait manifesté par la volonté de s'opposer à M. G...n'est pas établi ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. G...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. G...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. G...une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. E...et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. G...est rejetée.
Article 2 : M. G...versera à M. D...E...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...G..., au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt et à M. D...E....
Copie en sera adressée au préfet de l'Ardèche.
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2013 à laquelle siégeaient :
M. Martin, président de chambre,
M. Clément et MmeA..., premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 22 octobre 2013.
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N° 12LY02514