Vu la requête, enregistrée le 27 novembre 2012, présentée pour Mme B...C..., domiciliée ... ;
Mme C...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1102189 en date du 2 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société France Télécom à lui verser une somme de 110 000 euros en réparation du préjudice subi en raison du harcèlement moral dont elle prétend avoir été victime ;
2°) de condamner la société France Télécom à lui verser la somme susmentionnée ;
3°) de mettre à la charge de la société France Télécom, une somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que les agissements de la société France Télécom dont elle a été victime sont constitutifs d'un harcèlement moral directement à l'origine de la dégradation de son état de santé et qui présente le caractère d'une faute de nature à engager la responsabilité de cet établissement ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2013, présenté pour la société France Télécom qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme C...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que Mme C...n'a pas été victime de harcèlement moral de sa part et qu'elle l'a toujours soutenue dans ses différents projets, qu'elle a toujours abandonnés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, modifiée notamment par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 ;
Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications ;
Vu le décret n° 90-1112 du 12 décembre 1990 portant statut de la société France Télécom ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er octobre 2013 :
- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
- et les observations de Me A...représentant la société France Télécom ;
1. Considérant que MmeC..., collaborateur de second niveau titulaire au sein de la société France Télécom, affectée à l'agence de Dijon, depuis le 1er janvier 2001, a présenté sa démission, le 1er juillet 2010, qui a été acceptée ; qu'elle relève appel du jugement du 2 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société France Télécom à lui verser une somme de 110 000 euros en réparation du préjudice subi en raison du harcèlement moral dont elle prétend avoir été victime ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 bis de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : " Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leur sexe. (...) / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il a subi ou refusé de subir des agissements contraires aux principes énoncés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il a formulé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire respecter ces principes ; / 3° Ou bien le fait qu'il a témoigné d'agissements contraires à ces principes ou qu'il les a relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. / Les dispositions du présent article sont applicables aux agents non titulaires de droit public. " qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la même loi : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. / Les dispositions du présent article sont applicables aux agents non titulaires de droit public. " ;
3. Considérant qu'il appartient à un agent public, qui soutient avoir été victime d'agissements proscrits par les dispositions précitées, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer leur existence ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ou à toute discrimination ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement ou de discrimination sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
4. Considérant, en premier lieu, que si Mme C...fait valoir qu'à compter de 1998 et de l'entrée en fonction d'un nouveau supérieur hiérarchique, elle a fait l'objet d'un dénigrement systématique de la part de ce dernier ainsi que d'une réduction non négligeable de ses attributions d'attachée clientèle, il résulte de l'instruction que l'intéressée qui effectuait alors son stage, présentait des difficultés d'adaptation à la fonction d'hôtesse d'accueil et des difficultés relationnelles avec les clients ; que son stage a été prolongé de trois mois sur un autre poste dans lequel elle a su s'intégrer et donner entière satisfaction, permettant ainsi sa titularisation ; que, dans ces conditions, la circonstance que l'appréciation négative dont elle a fait l'objet pour la première période de stage ait été annulée par la commission administrative paritaire pour être remplacée par un entretien de progrès intermédiaire portant sur les dix premiers mois de l'année 1998, ne permet pas d'établir que Mme C...aurait fait l'objet d'un dénigrement systématique de la part de sa hiérarchie et d'une dégradation de ses conditions de travail ; qu'enfin, si la requérante fait valoir qu'elle a été affectée l'année suivante sur une plateforme comportant des conditions de travail particulièrement pénibles, elle reconnaît que les nouvelles responsabilités qui lui ont été confiées lui ont permis d'être promue à un niveau supérieur ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la demande présentée par Mme C...pour obtenir une aide aux fins de création d'une entreprise de restauration en Angleterre, par courrier du 5 septembre 2000, la société France Télécom, après avoir accusé réception de sa demande, l'a informée des conditions d'accompagnement du projet se traduisant notamment par des aménagements d'horaires et par l'octroi d'une prime d'aide à la création d'entreprise ; qu'il est constant que Mme C...n'a donné aucune suite à ce projet ; qu'il résulte également de l'instruction, que par décision du 29 novembre 2002, la société France Télécom a donné son accord à la demande présentée par MmeC..., concernant un congé de formation pour la période du 6 janvier au 13 décembre 2003, en vue de la préparation d'un diplôme d'opérateur de développement local ; qu'il est constant que la société France Télécom a pris en charge le coût de cette formation et a rémunéré Mme C...pendant toute la durée de ce congé formation en lui versant 85% de son traitement ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'affectation de Mme C...au plateau 116, à l'issue de son congé formation aurait constitué pour elle une rétrogradation ; qu'enfin, la circonstance que Mme C...n'ait pas été retenue pour occuper le poste de " rédacteur service jeunesse et territoire " proposé par le conseil général de la Côte-d'Or ne permet pas d'établir que la société France Télécom aurait fait obstacle à l'évolution de sa carrière professionnelle, dès lors que sa candidature a été transmise par un courrier du 23 décembre 2004, précisant que la société France Télécom donnait un avis favorable au détachement de l'intéressée ;
6. Considérant, en troisième lieu, que si Mme C...fait valoir qu'un de ses collègues aurait tenu, le 8 avril 2005, des propos à connotation raciste, que sa hiérarchie a refusé de sanctionner, il résulte de l'instruction que ces paroles déplacées ne visaient pas Mme C...et que l'adjointe du responsable de la plateforme est intervenue dans le but de gérer l'incident à l'amiable ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que si Mme C...fait valoir que la société France Télécom a modifié unilatéralement l'accord qui lui avait été donné concernant l'accompagnement financier à hauteur de vingt-quatre mois, de son projet professionnel en Chine pour 2009, il résulte de l'instruction que cette estimation qui avait été fournie à l'intéressée, alors qu'elle projetait de partir en novembre 2008, n'a pu être maintenue, du fait du souhait de l'intéressée de différer son départ au mois d'avril 2009 ; qu'il résulte en outre de l'instruction que Mme C...a continué à envisager son départ en Chine, sur la base de ce nouvel accompagnement financier, qu'un projet de convention a été élaboré mais que Mme C... est revenue elle-même sur sa décision de partir en Chine ; que, dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la société France Télécom aurait fait délibérément obstacle à son projet professionnel en Chine ;
8. Considérant, en cinquième et dernier lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'en vue de répondre à la demande de mutation présentée par Mme C...qui souhaitait partir à Nantes, l'échange de postes entre un agent dans cette ville et l'intéressée qui avait été envisagé, n'a pu être réalisé en raison d'un sureffectif de la zone ouest ; qu'en revanche, il a été proposé à Mme C... d'intégrer la plateforme de Nantes après une remise à niveau sur ce poste à Dijon pendant six mois ; que, toutefois, Mme C...a décliné cette offre ; que, dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que la société France Télécom aurait une nouvelle fois fait obstacle à sa mobilité professionnelle ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société France Télécom, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge Mme C...la somme que la société France Télécom demande sur le fondement des mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...et les conclusions de la société France Télécom présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et à la société France Télécom.
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2013 à laquelle siégeaient :
M. Martin, président de chambre,
Mme Courret, président-assesseur,
Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 octobre 2013.
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N° 12LY02935