Vu la requête, enregistrée le 21 mai 2012, présentée pour M. B...A..., domicilié ... ;
M. A...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1003032 du 20 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée, en droits et majorations, auxquelles il a été assujetti pour la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient :
- que la perquisition effectuée sans son consentement est irrégulière, inéquitable, constitue une atteinte à sa liberté individuelle et viole le principe constitutionnel de la présomption d'innocence consacré par l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et l'article 11 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, ainsi que son droit de propriété prévu par l'article 17 de la Constitution ; que, par suite, cette perquisition ne saurait, sans constituer un détournement d'une procédure pénale, servir de fondement dans le cadre d'une infraction au code général des impôts ;
- que " l'administration ne l'a jamais touché " et " qu'il n'a jamais bénéficié de redressement de l'administration " ; qu'il n'a reçu aucune proposition de redressement, alors qu'il avait déménagé et que l'administration avait été informée de ce changement d'adresse ;
- que la saisie de ses documents comptables lors de la perquisition effectuée à son domicile, dans le cadre d'une procédure pénale concernant son frère, lui a rendu impossible la présentation de justificatifs de sa comptabilité, dans le cadre du contrôle fiscal dont il faisait l'objet ; que, par suite, l'administration ne pouvait recourir à la procédure prévue par les dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ;
- que la taxation d'office a été appliquée en méconnaissance des normes européennes, internationales et constitutionnelles et a méconnu les articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales ;
- qu'il peut justifier de l'origine des fonds en litige, s'agissant de virements et de remises en espèces sur ses comptes bancaires en 2005 et 2006, pour des montants respectifs totaux de 66 995,63 euros, et de 68 375,88 euros ; qu'en outre, l'administration fiscale a repris " de façon péremptoire " un chiffre d'affaires de 150 000 euros pour 2005 et de 50 000 euros pour 2006 ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 septembre 2012, présenté par le ministre de l'économie et des finances, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient :
- que le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution devait, à peine d'irrecevabilité, être présenté dans un écrit distinct et motivé ;
- que le requérant a reçu une première proposition de rectification portant sur l'année 2005, adressée le 5 septembre 2006 et réceptionnée le 6 septembre, et une seconde concernant l'année 2006, adressée le 14 septembre 2007 ; qu'il ne peut faire état d'un changement d'adresse pour faire valoir qu'il n'aurait pas reçu ledit pli, dès lors que le pli a été retourné au service avec la mention " non réclamé, retour à l'envoyeur " ;
- que le moyen tiré d'un détournement de la procédure pénale n'est pas fondé dès lors que la perquisition-saisie diligentée à son domicile, dans le cadre d'une procédure pénale concernant son frère, est totalement indépendante de la procédure de taxation d'office dont il a fait l'objet de la part des services fiscaux de l'Ardèche ;
- que le moyen tiré de l'absence de débat oral et contradictoire et celui tiré de l'impossibilité de lui transmettre les documents professionnels saisis par l'autorité judiciaire sont inopérants dès lors que la situation de taxation d'office résulte de l'absence de production par M. A... de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée ;
- qu'il ne peut utilement se prévaloir ni des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni de celles de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ni encore de celles de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- que, sur le bien-fondé des impositions, que ce soit pour l'année 2005 ou pour l'année 2006, le requérant n'apporte aucune preuve de ce que le chiffre d'affaires aurait été surévalué ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution de 1958 et la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
Vu la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code pénal ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 novembre 2013 :
- le rapport de Mme Bourion, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Chevalier-Aubert, rapporteur public ;
- et les observations de M. A...;
1. Considérant que M. A...a exercé à Annonay, du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006, une activité de réparation et d'entretien de véhicules automobiles ; qu'il a fait l'objet en 2007 d'un contrôle sur pièces portant sur les années 2005 et 2006 ; qu'en l'absence de déclaration annuelle de chiffre d'affaires, malgré des mises en demeure de l'administration, M. A... a fait l'objet, selon la procédure prévue à l'article L. 66-3 du livre des procédures fiscales, d'une taxation d'office de la taxe sur la valeur ajoutée découlant du chiffre d'affaires déterminé par le service ; que M. A...interjette appel du jugement du 20 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions litigieuses ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant, en premier lieu, que M. A...fait valoir que la perquisition-saisie effectuée le 19 juin 2007, dans le cadre d'une procédure pénale concernant son frère, est irrégulière, et inéquitable, dès lors qu'elle a été effectuée sans son consentement, qu'elle constitue une atteinte à sa liberté individuelle et viole le principe constitutionnel de la présomption d'innocence consacré par l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ainsi que son droit de propriété prévu par l'article 17 de la Constitution et qu'ainsi, cette perquisition, qui a servi de fondement dans le cadre d'une infraction au code général des impôts, constitue un détournement d'une procédure pénale ;
3. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que, si les services de la gendarmerie ont procédé sur commission rogatoire délivrée par le juge d'instruction près le Tribunal de grande instance de Privas à la perquisition du domicile de M. A...et à la saisie de certaines pièces dans le cadre d'une procédure pénale diligentée contre son frère, l'administration n'est pas intervenue, pour ce qui le concerne, dans le cadre de la procédure pénale diligentée par les autorités judicaires, laquelle constitue une procédure indépendante de la procédure fiscale, mais a diligenté un contrôle sur pièces effectué par les services fiscaux de l'Ardèche ; que, par suite, M. A...ne saurait utilement invoquer un moyen tiré du détournement de la procédure pénale dans l'exercice du contrôle fiscal mené à son encontre ; qu'en tout état de cause, le détournement de procédure dont une perquisition serait entachée pour avoir notamment poursuivi une fin de contrôle fiscal est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition du contribuable dont le siège a fait l'objet de la perquisition, dès lors que l'intéressé est dans une situation de taxation d'office qui n'a pas été révélée par la perquisition ; que par suite, le moyen doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 97 du code de procédure pénale : " (...) Si les nécessités de l'instruction ne s'y opposent pas, copie ou photocopie des documents ou des données informatiques placés sous main de justice peuvent être délivrés à leurs frais, dans le plus bref délai, aux intéressés qui en font la demande (...) " ; qu'aux termes de l'article 99 du même code : " Au cours de l'information, le juge d'instruction est compétent pour décider de la restitution des objets placés sous main de justice. / Il statue, par ordonnance motivée, soit sur réquisitions du procureur de la République, soit, après avis de ce dernier, d'office ou sur requête de la personne mise en examen, de la partie civile ou de tout autre personne qui prétend avoir droit sur l'objet. (...) Il n'y a pas lieu à restitution lorsque celle-ci est de nature à faire obstacle à la manifestation de la vérité (...) " ; que M. A...invoque l'impossibilité pratique dans laquelle il aurait été placé de déposer ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée, en raison de la saisie de sa comptabilité par l'autorité judiciaire ; que, toutefois, en application des dispositions précitées, il lui appartient d'établir qu'il a pris toutes dispositions pour avoir accès à ces documents ; qu'il résulte de l'instruction que rien ne s'opposait, suite au refus de restitution des documents demandés opposé par le Tribunal de grande instance de Privas, en date du 2 juillet 2008, à ce qu'il sollicite une copie de ces pièces ; qu'en tout état de cause, la mise en application de la taxation d'office telle qu'elle ressort des dispositions de l'article L. 66-3 du livre des procédures fiscales ne résulte pas de l'absence de transmission de documents comptables saisis mais de l'absence de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée ;
5. Considérant, en troisième lieu, que M. A...fait valoir que " l'administration ne l'a jamais touché " et " qu'il n'a jamais bénéficié de redressement de l'administration " ; que, toutefois, il résulte de l'instruction qu'une proposition de rectification portant sur l'année 2005 lui a été adressée le 5 septembre 2006, dont il a accusé réception le 6 septembre suivant, et qu'une seconde proposition de rectification, concernant l'année 2006, lui a été adressée le 14 septembre 2007 et a été retournée au service avec la mention " non réclamé, retour à l'envoyeur " ; que, si le requérant soutient ne pas avoir reçu les propositions de rectification du fait d'un déménagement effectué en avril 2009, qui aurait été connu de l'administration, d'une part, ce déménagement est nettement postérieur à l'envoi des propositions de rectification, et, d'autre part, le pli de la seconde proposition se rectification est revenu avec la mention " non réclamé " et non avec la mention " N'habite pas à l'adresse indiquée " ; que, par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ne lui auraient pas été régulièrement notifiés ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que M. A...ne peut utilement soutenir qu'il aurait été privé d'un débat oral et contradictoire dès lors que la situation de taxation d'office est justifiée par l'absence de production par lui de ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée ;
7. Considérant, en cinquième lieu, que M. A...ne peut utilement invoquer dans le cadre du présent litige la méconnaissance du principe constitutionnel de présomption d'innocence prévu par l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et l'article 11 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 ;
8. Considérant, en sixième et dernier lieu, que M. A...ne peut utilement soutenir que le recours à la taxation d'office porterait atteinte au droit à un procès équitable prévu par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, serait contraire à l'article 17 de la Constitution de 1958 ainsi qu'aux articles 48 et 52 § 3 de la Charte des droits fondamentaux de l'union européenne, dès lors qu'il n'appartient au juge administratif ni de contrôler, en dehors des cas et conditions où il est saisi sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution, la conformité des lois à la constitution, ou à un principe général du droit, ni de statuer en matière pénale et de trancher des contestations sur des droits et obligations à caractère civil, ni de faire application d'une charte qui ne s'applique aux Etats membres que lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
9. Considérant qu'aux termes de l'article 242 sexies de l'annexe II au code général des impôts : " Les entreprises placées sous le régime simplifié souscrivent avant le 1er avril de chaque année une déclaration (...) faisant ressortir les taxes sur le chiffre d'affaires dues au titre de l'année précédente " ; qu'aux termes de l'article L. 66-3 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable au présent litige : " Sont taxés d'office : (...) 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes " ; qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à M.A..., régulièrement taxé d'office pour ne pas avoir produit de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée pour les années 2005 et 2006, d'apporter la preuve de l'exagération des impositions mises à sa charge ;
10. Considérant que l'administration a calculé la taxe sur la valeur ajoutée après avoir fixé le chiffre d'affaires, en application des dispositions précitées de l'article 256 du code général des impôts et selon la procédure de taxation d'office du fait de l'absence de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée pour la période en cause ; qu'en se bornant à soutenir que l'administration a effectué " un redressement totalement infondé " pour avoir été fixé " de façon empirique " à 150 000 euros pour 2005 et à 50 000 euros pour 2006 et à invoquer des éléments étrangers à la base d'imposition retenue, M. A...n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'exagération des impositions mises à sa charge ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A...la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 14 novembre 2013 à laquelle siégeaient :
M. Montsec, président de chambre,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Bourion, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 décembre 2013.
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N° 12LY01294