Vu l'ordonnance du 18 novembre 2013 par laquelle, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, le président de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué le jugement de l'affaire à la cour ;
Vu la requête, le mémoire rectificatif et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 janvier, 20 janvier et 24 octobre 2012, présentés pour Mme C...G..., domiciliée ...;
Mme G...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0902781 du tribunal administratif de Nîmes du 8 novembre 2011 qui, à la demande de M. L...et autres demandeurs, a annulé l'arrêté du 29 juillet 2009 par lequel le maire de la commune de Pujaut (Gard) lui a délivré un permis de construire une maison d'habitation ;
2°) de rejeter la demande de M. I...L..., la SCI Clairefontaine, Mme K...J..., Mme E...L..., M. A...L...et Mme F...D...devant le tribunal administratif ;
3°) de condamner les consorts L...:
. à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ;
. au dépens de l'instance ;
Mme G...soutient que l'article NB 2 du règlement du plan d'occupation des sols, qui interdit les lotissements, étant entaché d'illégalité, dès lors que les documents d'urbanisme peuvent seulement comporter des règles de fond, c'est à bon droit que le maire n'a pas fait application des dispositions de cet article ; que l'opération en litige, qui vise à la création d'un lot unique à construire, ne constitue pas un lotissement au sens de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme ; qu'au surplus, cet article, issu de la réforme qui est entré en vigueur le 1er octobre 2007, n'est pas applicable en l'espèce, la division parcellaire étant intervenue au cours de l'année 2005 et le permis de construire litigieux visant à régulariser une construction qui a été édifiée à la suite d'un permis obtenu le 25 janvier 2007 ; que comme le tribunal administratif de Nîmes l'a jugé, les autres moyens invoqués par les consorts L...ne sont pas fondés ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 2 août 2013, présenté pour M. I...L..., la SCI Clairefontaine, Mme K...J..., Mme E...L..., M. A...L...et Mme F...D..., qui demandent à la cour :
- de rejeter la requête ;
- de condamner Mme G...à leur verser une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Les intimés soutiennent que le projet constitue un lotissement en application de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme et, dès lors, le permis de construire ne pouvait être légalement délivré en l'absence de la déclaration prévue par l'article L. 442-3 du même code ; que le projet ne prévoit pas un dispositif suffisant susceptible de permettre de répondre aux dispositions relatives à l'évacuation des eaux pluviales de l'article NB 4-2 du règlement du plan d'occupation des sols ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 17 décembre 2013, la clôture de l'instruction a été fixée au 14 janvier 2014 ;
Vu le mémoire, enregistré le 11 décembre 2013, présenté pour MmeG..., tendant aux mêmes fins que précédemment, le montant de la somme réclamée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative étant porté à 2 500 euros ;
Mme G...soutient, en outre, que le dispositif prévu pour l'évacuation des eaux pluviales permet de répondre aux dispositions de l'article NB 4-2 du règlement du plan d'occupation des sols ;
Vu le mémoire, enregistré le 10 janvier 2014, présenté pour la commune de Pujaut, représentée par son maire, qui demande à la cour :
- d'annuler le jugement précité du 8 novembre 2011 du tribunal administratif de Nîmes ;
- de condamner les demandeurs à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La commune soutient que la réglementation relative aux lotissements n'est pas applicable en l'espèce, en vertu des dispositions de l'article R. 315-1 du code de l'urbanisme en vigueur à la date de la donation ayant entraîné la division du terrain ; qu'au surplus, la création d'une seule maison individuelle, après division d'une propriété en deux, ne constitue pas un lotissement au sens de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme ; que comme le tribunal administratif de Nîmes l'a estimé dans son jugement attaqué, les autres moyens invoqués par M. L... et les autres demandeurs ne sont pas fondés ; que le dispositif prévu pour l'évacuation des eaux pluviales permet de répondre aux dispositions de l'article NB 4-2 du règlement du plan d'occupation des sols ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 24 janvier 2014, la clôture de l'instruction a été reportée au 14 février 2014 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 5 mars 2014, présentée pour Mme G...;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mars 2014 :
- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
- et les observations de MeB..., représentant la SCP d'avocats CGCB et associés, avocat de MmeG..., et celles de MeH..., représentant la SCP Margall-d'Albenas, avocat de la commune de Pujaut ;
1. Considérant que, par un jugement du 8 novembre 2011, à la demande des consorts L...et de la SCI Clairefontaine, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du 29 juillet 2009 par lequel le maire de la commune de Pujaut a délivré à Mme G...un permis de construire une maison d'habitation ; que Mme G...relève appel de ce jugement ;
Sur la légalité du permis de construire litigieux :
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme, applicable à la date du permis de construire litigieux : " Constitue un lotissement l'opération d'aménagement qui a pour objet ou qui, sur une période de moins de dix ans, a eu pour effet la division, qu'elle soit en propriété ou en jouissance, qu'elle résulte de mutations à titre gratuit ou onéreux, de partage ou de locations, d'une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments. " ; qu'aux termes de l'article L. 442-2 du même code, dans sa rédaction applicable à ladite date : " Un décret en Conseil d'Etat précise, en fonction du nombre de terrains issus de la division, de la création de voies et d'équipements communs et de la localisation de l'opération, les cas dans lesquels la réalisation d'un lotissement doit être précédée d'un permis d'aménager. " ; qu'aux termes de l'article L. 442-3 du même code : " Les lotissements qui ne sont pas soumis à la délivrance d'un permis d'aménager doivent faire l'objet d'une déclaration préalable. " ;
3. Considérant qu'une opération d'aménagement ayant pour effet la division en deux lots d'une propriété foncière est susceptible de constituer un lotissement, au sens de ces dispositions, s'il est prévu d'implanter des bâtiments sur l'un au moins de ces deux lots ; qu'il est constant que le terrain d'assiette du projet en litige résulte de la division d'une propriété foncière plus grande, qui est intervenue au cours de l'année 2005 ; que la prise en compte de cette division, antérieure à l'entrée en vigueur des dispositions précitées, qui est intervenue le 1er octobre 2007, n'a pas pour conséquence de conférer une portée rétroactive à ces dispositions, qui se bornent à attacher des effets futurs à une situation passée sans remettre en cause aucune situation juridiquement constituée ; que, si Mme G...fait valoir que le permis litigieux a pour objet de régulariser une construction qui avait été autorisée par un permis de construire du 25 janvier 2007, ultérieurement annulé, et que celui-ci est intervenu avant l'entrée en vigueur desdites dispositions, la légalité d'un permis de construire, même de régularisation, doit s'apprécier au regard des dispositions d'urbanisme applicables à la date d'intervention de ce permis ; qu'ainsi, le projet de Mme G...constitue un lotissement, même si une seule construction doit être édifiée sur le terrain issu de ladite division ;
4. Considérant, d'autre part, que l'article NB 2 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Pujaut interdit les opérations d'aménagement, et notamment les lotissements ;
5. Considérant que le livre IV du code de l'urbanisme fixe le régime des constructions, aménagements et démolitions et définit notamment les procédures administratives d'autorisation ou de déclaration auxquelles ils sont préalablement soumis ; qu'en vertu des dispositions de son article L. 442-1, applicables au présent litige, le lotissement constitue une division d'une ou plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments ;
6. Considérant qu'il ne ressort d'aucune disposition législative que les auteurs du règlement d'un plan d'occupation des sols aient compétence pour interdire par principe ou pour limiter la faculté reconnue aux propriétaires de procéder, dans les conditions prévues au livre IV précité du code de l'urbanisme, à la division d'une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments, faculté qui participe de l'exercice de leur droit à disposer de leurs biens, dont il appartient au seul législateur de fixer les limites ; qu'ainsi, en interdisant par principe les lotissements en zone NB, l'article NB 2 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Pujaut édicte une règle qui excède celles que la loi l'autorise à prescrire ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, si l'opération en litige constitue un lotissement, le tribunal administratif de Nîmes ne pouvait, après avoir estimé que les dispositions de l'article NB 2 du règlement sont légales, se fonder sur leur méconnaissance pour annuler le permis de construire en litige ;
8. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés en première instance comme en appel devant le juge administratif ;
9. Considérant, en premier lieu, que le projet litigieux, qui constitue un lotissement n'ayant pas pour effet de créer plus de deux lots à construire, devait, en application des dispositions combinées des articles R. 421-19 et R. 421-23 du code de l'urbanisme, pris pour l'application des articles L. 442-2 et L. 442-3 du même code, être précédé d'une déclaration préalable de travaux ; qu'il est constant que Mme G...n'a pas procédé à une telle déclaration ; que le permis de construire contesté ne pouvait dès lors être légalement délivrée à cette dernière ;
10. Considérant, en second lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article R. 123-18 du code de l'urbanisme applicables lors de l'approbation du plan d'occupation des sols de la commune de Pujaut : " I - Les documents graphiques doivent faire apparaître les zones urbaines et les zones naturelles. / Ces zones (...) sont : / (...) 2. Les zones naturelles, équipées ou non, (...). / Ces zones naturelles comprennent en tant que de besoin : / (...) b) Les zones, dites "Zones NB", desservies partiellement par des équipements qu'il n'est pas prévu de renforcer et dans lesquelles des constructions ont déjà été édifiées ; / c) Les zones de richesses naturelles, dites "Zones NC", à protéger en raison notamment de la valeur agricole des terres ou de la richesse du sol ou du sous-sol ; / (...) " ;
11. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que l'un des objectifs de la révision du plan d'occupation des sols de la commune de Pujaut était de contenir l'urbanisation diffuse et pavillonnaire ; que, conformément à cet objectif, le rapport de présentation précise que la zone NB du plan, qui constitue une zone naturelle occupée principalement par de l'habitat individuel diffus et dans laquelle aucun renforcement des équipements publics n'est prévu, n'a pas pour objet de permettre un développement de l'urbanisation ; que la parcelle cadastrée A 828, d'une superficie de presque 4 000 m², de laquelle est issue la parcelle cadastrée A 2867 sur laquelle doit être implantée la construction projetée, se situe dans un secteur dans lequel les constructions sont très dispersées ; que le projet de révision du plan d'occupation des sols envisageait initialement de conserver le classement de cette parcelle en zone NC, seules les parcelles contigües situées au sud supportant déjà des constructions étant intégrées au secteur NBg du quartier des Conques ; que les consorts L...et la SCI Clairefontaine soutiennent, en versant un document intitulé " Prise en compte des observations du commissaire enquêteur " à l'appui de leurs allégations, que la parcelle cadastrée A 828 a été en définitive intégrée à ce secteur NBg afin de conserver l'unité foncière appartenant alors aux parents de Mme G...; que cette affirmation n'est pas sérieusement contredite par la commune de Pujaut, qui n'explique pas quelles raisons particulières seraient susceptibles de justifier l'extension de l'urbanisation vers le nord du secteur NBg qu'entraîne le classement de cette parcelle dans ce secteur, contrairement à l'objectif précité consistant à contenir l'urbanisation diffuse ; que, dans ces conditions, à supposer même que, comme le fait valoir MmeG..., la parcelle cadastrée A 828 ne présenterait aucun intérêt pour l'agriculture, en intégrant cette parcelle au secteur NBg, le conseil municipal de la commune de Pujaut a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
12. Considérant, d'autre part, qu'une maison d'habitation sans lien avec une activité agricole n'est pas autorisée par le règlement de la zone NC, redevenu applicable en raison de l'illégalité affectant le classement en secteur NBg de la partie du terrain d'assiette supportant la construction projetée ;
13. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît, en l'état de l'instruction, également susceptible de fonder l'annulation du permis attaqué ;
14. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme G...n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du 29 juillet 2009 par lequel le maire de la commune de Pujaut lui a délivré un permis de construire ;
Sur les dépens :
15. Considérant qu'en vertu de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts (...). / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties (...) " ; qu'il y a lieu de laisser à MmeG..., partie perdante, la charge de la contribution pour l'aide juridique qu'elle a acquittée lors de l'introduction de sa requête ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les consorts L...et la SCI Clairefontaine, qui ne sont pas, dans la présente instance, parties perdantes, soient condamnés à payer à Mme G...et à la commune de Pujaut les sommes qu'elles demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme G...le versement de la somme de 1 000 euros demandée au bénéfice des intimés sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme G...est rejetée.
Article 2 : Mme G...versera aux consorts L...et à la SCI Clairefontaine une somme globale de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Pujaut tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...G..., à M. I...L..., à la SCI Clairefontaine, Mme K...J..., Mme E...L..., M. A...L..., Mme F...D...et à la commune de Pujaut.
Délibéré à l'issue de l'audience du 4 mars 2014, à laquelle siégeaient :
M. Riquin, président de chambre,
M. Picard, président-assesseur ;
M. Chenevey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 mars 2014.
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N° 12LY20024
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