Vu la requête, enregistrée le 4 novembre 2013 présentée pour M. E...B...et par Mme F...B...néeC..., domiciliés 36 avenue de Genève à Annecy (74000) ;
M. et Mme B...demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1302851-1302853 du 2 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Haute-Savoie du 30 avril 2013 leur refusant la délivrance d'un titre de séjour, les obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel ils seront reconduits ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie de leur délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. et Mme B...soutiennent que ;
S'agissant de la régularité du jugement :
- le jugement est irrégulier en ce qu'il a omis de statuer sur les conclusions des requérants tendant à obtenir la production de leur entier dossier détenu par l'administration ;
S'agissant de la décision leur refusant le droit au séjour :
- la décision portant refus de séjour est entachée d'incompétence, le préfet n'ayant pas produit la délégation de signature accordée au secrétaire général de la préfecture ;
- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que leur demande n'a pas été soumise pour avis à la commission du titre de séjour ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention de New York ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en ce qu'elle est fondée sur des décisions illégales ;
- elle méconnaît tant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales que celles des stipulations des articles 3-1 et 9-1 de la convention de New York ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît tant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales que celles des stipulations des articles 3-1 et 9-1 de la convention de New York ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de la Haute-Savoie qui n'a pas produit d'observations ;
Vu l'ordonnance en date du 5 février 2014 fixant la clôture d'instruction au 24 février 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu les décisions du 5 décembre 2013, par lesquelles le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a d'une part, accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...et, d'autre part, rejeté la demande formulée par Mme B...;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991;
Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 24 avril 2014, le rapport de M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur ;
1. Considérant que M. E...B..., né le 27 novembre 1978, et Mme F...B...née C...le 7 août 1979, son épouse, tous deux de nationalité kosovare, sont entrés en France le 28 avril 2009 avec leurs trois enfants ; qu'ils ont déposé le 12 mai 2009 une demande d'asile que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté par décisions du 6 octobre 2009 confirmées par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 25 octobre 2010 ; que leur demande de réexamen au titre de l'asile a également été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 11 février 2011, que par la Cour nationale du droit d'asile, le 24 octobre 2011 ; que par arrêtés du 9 décembre 2010, le préfet de la Haute-Savoie a refusé de leur délivrer un titre de séjour et les a obligés à quitter le territoire français ; que ces décisions ont été annulées par le Tribunal administratif de Grenoble par jugement du 17 mai 2011 ; que M. et Mme B...ont fait l'objet de nouvelles décisions de refus de séjour avec obligation de quitter le territoire français, le 24 octobre 2011, confirmées par jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 6 avril 2012, puis par la Cour administrative d'appel de Lyon, le 6 novembre 2012 ; que M. et Mme B...ont alors présenté, le 8 octobre 2012, une demande de titre de séjour, sur le fondement des dispositions de l'article L.313-14 et du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par arrêtés du 30 avril 2013, le préfet de la Haute-Savoie a refusé de les admettre au séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office ; que M. et Mme B...demandent l'annulation du jugement n° 1302851-1302853 du 2 octobre 2013, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Haute-Savoie du 30 avril 2013 ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que les motifs du jugement impliquent que les premiers juges, qui se sont référés aux pièces du dossier pour écarter chacun des moyens invoqués par M. et Mme B... à l'encontre des décisions attaquées, ont implicitement rejeté la demande de ceux-ci tendant à ce qu'il soit fait injonction au préfet de produire l'intégralité de leur dossier ; que, ce faisant, les premiers juges n'ont pas, contrairement à ce que soutiennent en appel M. et Mme B..., entaché leur jugement d'une irrégularité pour défaut de réponse à cette demande ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, que les décisions attaquées ont été signées par
M. D...A...du Payrat, secrétaire général de la préfecture, qui disposait à cet effet d'une délégation de signature par arrêté n° 2012212-0001 du 30 juillet 2012, publié au recueil spécial n° 31 des actes administratifs de la préfecture de la Haute-Savoie et produite par le préfet devant le Tribunal ; que le moyen tiré de ce que les arrêtés attaqués auraient été signés par une autorité incompétente manque donc en fait et doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que M. et Mme B...reprennent en appel le moyen, déjà soulevé devant le Tribunal administratif de Grenoble, tiré de ce que la décision portant refus de séjour méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard de l'ancienneté de leur séjour en France d'une durée de trois ans, de la présence de leurs trois enfants scolarisés sur le territoire français qui devraient à leur majorité bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en application de l'article L. 313-11 2° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des nombreux liens qu'ils ont pu nouer avec leur entourage et de la persistance de la symptomatologie sévère que présente Mme B... ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par les mêmes motifs que ceux qui ont été retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la Cour, d'adopter ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention ''vie privée et familiale'' est délivrée de plein droit : 7° A l'étranger (...) qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et MmeB..., entrés en France le 28 avril 2009 aux âges respectifs de trente-et-un et trente ans, sont de même nationalité et tous deux en situation irrégulière ; que rien ne s'oppose à ce que leur cellule familiale se reconstitue dans leur pays d'origine où ils ont vécu jusque là ; que s'ils font valoir que la pathologie dont souffre MmeB..., qui serait directement en lien avec les événements que les requérants ont vécus au Kosovo, ne peut être soignée dans ce pays et qu'un retour au Kosovo entraînerait pour la requérante une aggravation importante de sa maladie en ravivant le stress post traumatique qui en est à l'origine, les certificats médicaux produits par les intéressés ne permettent pas d'établir que la poursuite d'une thérapie en France serait la seule voie possible pour traiter le traumatisme subi par Mme B...et que celle-ci serait dans l'impossibilité de bénéficier de façon effective de soins appropriés à son état de santé dans son pays d'origine ; que, dès lors, M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que les arrêtés litigieux ont porté une atteinte excessive à leur vie privée et familiale et ont ainsi méconnu tant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'eu égard aux mêmes circonstances, le préfet de la Haute-Savoie n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle des intéressés ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que M. et Mme B...reprennent en appel le moyen, déjà soulevé devant le Tribunal administratif de Grenoble, tiré du vice de procédure qui entache l'acte en litige en raison de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour prévue par les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par les mêmes motifs que ceux qui ont été retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la Cour, d'adopter ;
8. Considérant, en dernier lieu, que la circonstance que deux de leurs trois enfants aient été accueillis en crèche ou en école maternelle et que l'aînée de leur fille ait pu être scolarisée en France ne suffit pas à établir que le préfet de la Haute-Savoie n'aurait pas pris en compte l'intérêt supérieur des enfants, dont il n'est pas établi qu'ils ne pourraient poursuivre leur éducation au Kosovo, en opposant aux requérants un refus de titre de séjour ;
En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi :
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les décisions de refus de titre de séjour ne sont pas illégales ; que, pour les mêmes motifs que ceux retenus pour rejeter les conclusions tendant à l'annulation du refus de séjour, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et des articles 3-1 et 9-1 de la convention de New York relative aux droits de l'enfant doivent être écartés ;
10. Considérant que M. et MmeB..., dont les demandes d'asile ont été par deux fois rejetées, n'établissent pas, en l'absence de tout élément nouveau, qu'un retour dans leur pays d'origine les exposerait personnellement à des risques de traitements inhumains et dégradants ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, soulevé à l'encontre des décisions fixant le pays de destination, ne peut qu'être rejeté ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande ; que leurs conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par eux et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme E...B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...B..., à Mme F...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.
Délibéré après l'audience du 24 avril 2014 à laquelle siégeaient :
M. Wyss, président de chambre,
M. Gazagnes, président-assesseur
M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur.
Lu en audience publique, le 22 mai 2014.
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N° 13LY02867