Vu la requête, enregistrée le 14 août 2013, au greffe de la Cour, et le mémoire complémentaire, enregistré le 15 janvier 2014, présentés pour M. A...B..., domicilié ... ;
M. B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1301374 du 10 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 avril 2013 du préfet de Saône-et-Loire lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;
2°) d'annuler ledit arrêté pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet de Saône-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à défaut de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
M. B...soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en tant qu'il n'a pas répondu à l'ensemble des branches du moyen tiré du défaut d'examen réel et sérieux de sa demande ;
- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé ;
- le préfet de Saône-et-Loire n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa demande ;
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté litigieux a été pris en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont illégales par exception de l'illégalité de celle lui refusant le droit au séjour ;
- la décision fixant le pays de destination a méconnu les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la décision du 19 septembre 2013, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 décembre 2014 :
- le rapport de Mme Samson, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Levy Ben Cheton, rapporteur public ;
1. Considérant que M.B..., de nationalité russe, entré en France le 8 juillet 2010, a sollicité le 19 septembre suivant son admission au séjour en qualité de demandeur d'asile ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande par décision du 23 novembre 2011, confirmée le 30 janvier 2013 par la Cour nationale du droit d'asile ; que, par arrêté du 29 avril 2013, le préfet de Saône-et-Loire a refusé à M. B... la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que M. B...relève appel du jugement du 10 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " et qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;
3. Considérant que la décision du 29 avril 2013 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. B...a été prise en réponse à sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile ; que, dès lors que par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 23 novembre 2011, confirmée le 30 janvier 2013 par la Cour nationale du droit d'asile, le statut de réfugié a été refusé à M.B..., le préfet de Saône-et-Loire était tenu de refuser à ce dernier la délivrance du titre de séjour prévu au 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et à l'article L. 313-13 du même code sans avoir à porter une appréciation sur les faits de l'espèce ; que le préfet de Saône-et-Loire se trouvant ainsi en situation de compétence liée pour refuser le titre de séjour sollicité, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée n'est pas opérant ; que, dès lors, il doit être écarté ;
4. Considérant, il est vrai, que la décision litigieuse, emporte, subsidiairement, absence de régularisation de la situation de M. B...;
5. Considérant que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est loisible au préfet d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation sur le fondement d'une autre disposition de ce code ; qu'il peut, en outre, exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui appartient, dès lors qu'aucune disposition expresse ne le lui interdit, de régulariser la situation d'un étranger en lui délivrant le titre qu'il demande ou un autre titre, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, dont il justifierait ;
6. Considérant que M.B..., qui ne justifie pas avoir demandé un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'est pas fondé à soutenir que la décision qu'il conteste aurait été prise en méconnaissance desdites dispositions ; que si le requérant soutient qu'il a fait l'objet de menaces de mort relatives à une vendetta contre sa famille ainsi que de violences physiques et psychologiques de la part de son père, le préfet de la Saône-et-Loire, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation, n'a pas, en refusant de régulariser la situation de M. B...au motif qu'une telle mesure ne répondait ni à des motifs humanitaires ni à des circonstances exceptionnelles, entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
7. Considérant qu'en relevant que M. B...n'était pas titulaire d'un visa d'entrée sur le territoire, le préfet de Saône-et-Loire n'a pas entendu refuser le droit au séjour sur cette circonstance ;
8. Considérant qu'aux termes qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., né le 18 août 1993, est entré irrégulièrement sur le territoire français le 8 juillet 2010 avec sa mère et ses frères et soeurs mineurs ; qu'il est célibataire et sans charge de famille en France ; que sa mère a également fait l'objet d'un refus de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dont la légalité est confirmée par la Cour de céans, par arrêt de ce jour ; que, dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour de l'intéressé en France, et nonobstant sa volonté et ses capacités d'insertion sociale, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, en conséquence, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;
11. Considérant que M. B...s'étant vu refuser, par décision du 29 avril 2013, la délivrance d'un titre de séjour, il entrait dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;
12. Considérant que M. B...fait valoir qu'en visant l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, le préfet de Saône-et-Loire s'est volontairement soumis à l'obligation posée par cet article d'engager une procédure contradictoire et qu'en adoptant une décision l'obligeant à quitter le territoire sans lui permettre de présenter des observations écrites ou orales, l'autorité administrative a méconnu ces dispositions ; que, toutefois, il ressort de l'ensemble des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment de son article L. 512-1, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; que, dès lors, et alors même que la décision portant obligation de quitter le territoire français comporte le visa de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, M. B...ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions ;
13. Considérant qu'il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
Sur la légalité de la décision désignant le pays de destination :
14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision lui refusant le droit au séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision désignant le pays de destination ;
15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l' entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1°) A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'office français de protection des réfugiés et apatrides ou la commission de recours des réfugiés lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2°) Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3°) Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
16. Considérant que si M. B...soutient qu'en cas de retour en Russie, il craint d'être victime d'une vendetta menée à l'encontre de sa famille ainsi que de violences causées par son père, il n'apporte pas d'élément probant de nature à établir la réalité et la gravité des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour dans ce pays ni ne justifie ne pas pouvoir être protégé par les autorités de son pays ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;
17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 9 décembre 2014 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Samson, président-assesseur,
M. Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 janvier 2015.
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N° 13LY02287