Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...A...'hon a demandé au tribunal administratif de Grenoble, d'une part, d'annuler la décision du 24 octobre 2011 par laquelle le préfet de la Drôme a rejeté sa demande tendant à faire usage du titre de psychothérapeute, ensemble la décision de rejet de son recours hiérarchique du 17 février 2012 et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de la Drôme de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification du jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 1202089 du 13 juin 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 17 juillet 2014 et 2 juin 2015, présentés pour Mme B...A...'hon, il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 13 juin 2014 ;
2°) d'annuler la décision du 24 octobre 2011 par laquelle le préfet de la Drôme a rejeté sa demande tendant à faire usage du titre de psychothérapeute, ensemble la décision de rejet de son recours hiérarchique du 17 février 2012 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de procéder à une nouvelle instruction de la demande d'autorisation dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le préfet, comme le ministre et le tribunal, ont commis une erreur de droit en faisant une interprétation erronée et restrictive de la notion d'équivalence prévue à l'article 16 du décret du 20 mai 2010 ;
- le ministre s'est estimé lié par le refus du préfet pour rejeter son recours hiérarchique ;
- les décisions sont entachées d'une erreur d'appréciation dès lors qu'elle justifie d'une formation et d'une expérience équivalentes aux exigences prévues à l'article 16 du décret du 20 mai 2010 ;
- les décisions méconnaissent le principe constitutionnel d'égalité.
Par ordonnance en date du 4 juin 2015 la clôture d'instruction a été fixée au 30 juin 2015, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 ;
- le décret n° 2010-534 du 20 mai 2010 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 5 novembre 2015 :
- le rapport de M. Segado, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public,
- et les observations de Me Cozon, avocat de MmeA...'hon.
Une note en délibéré présentée pour MmeA...'hon a été enregistrée le 5 novembre 2015.
1. Considérant que Mme A...'hon a demandé son inscription dérogatoire sur le registre national des psychothérapeutes par un courrier en date du 29 avril 2011 aux fins de pouvoir faire usage du titre de psychothérapeute ; qu'à la suite de sa réunion du 8 septembre 2011, la commission régionale d'inscription des psychothérapeutes a émis un avis défavorable à l'unanimité à cette demande d'autorisation au motif que " les formations validées par l'intéressée et son expérience professionnelle ne peuvent être admises ni en équivalence de la formation initiale en psychopathologie prévue à l'article 1er du décret du 20 mai 2010, ni d'un diplôme prévu à l'article 6 dudit décret " ; qu'à la suite de cet avis, le préfet de la Drôme a, par une décision du 24 octobre 2011, rejeté la demande de Mme A...'hon tendant à faire usage du titre de psychothérapeute ; que l'intéressée a formé ensuite un recours hiérarchique par un courrier du 19 décembre 2011, reçu le 22 décembre 2011 qui a été rejeté par le ministre du travail, de l'emploi et de la santé par une décision en date du 17 février 2012 ; que MmeA...'hon relève appel du jugement du 13 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 52 de la loi du 9 août 2004 susvisée : " L'usage du titre de psychothérapeute est réservé aux professionnels inscrits au registre national des psychothérapeutes. / (...)Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du présent article et les conditions de formation théorique et pratique en psychopathologie clinique que doivent remplir les professionnels souhaitant s'inscrire au registre national des psychothérapeutes. (...) / L'accès à cette formation est réservé aux titulaires d'un diplôme de niveau doctorat donnant le droit d'exercer la médecine en France ou d'un diplôme de niveau master dont la spécialité ou la mention est la psychologie ou la psychanalyse. / (...) Le décret en Conseil d'Etat précise également les dispositions transitoires dont peuvent bénéficier les professionnels justifiant d'au moins cinq ans de pratique de la psychothérapie à la date de publication du décret. " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 20 mai 2010 susvisé, dans sa rédaction alors applicable: " L'inscription sur le registre national des psychothérapeutes mentionné à l'article 52 de la loi du 9 août 2004 susvisée est subordonnée à la validation d'une formation en psychopathologie clinique de 400 heures minimum et d'un stage pratique d'une durée minimale correspondant à cinq mois effectué dans les conditions prévues à l'article 4. L'accès à cette formation est réservé aux titulaires d'un diplôme de niveau doctorat donnant le droit d'exercer la médecine en France ou d'un diplôme de niveau master dont la spécialité ou la mention est la psychologie ou la psychanalyse " ; qu'aux termes de l'article 16 dudit décret, dans sa rédaction alors en vigueur: " I. Les professionnels justifiant d'au moins cinq ans de pratique de la psychothérapie à la date de publication du présent décret peuvent être inscrits sur la liste départementale mentionnée à l'article 7 alors même qu'ils ne remplissent pas les conditions de formation et de diplôme prévues aux articles 1er et 6 du présent décret. Cette dérogation est accordée par le préfet du département de la résidence professionnelle du demandeur après avis de la commission régionale d'inscription. Le professionnel présente cette autorisation lors de sa demande d'inscription sur la liste départementale des psychothérapeutes. / II. (...) La commission s'assure que les formations précédemment validées par le professionnel et son expérience professionnelle peuvent être admises en équivalence de la formation minimale prévue à l'article 1er et, le cas échéant, du diplôme prévu à l'article 6. Elle définit, si nécessaire, la nature et la durée de la formation complémentaire nécessaire à l'inscription sur le registre des psychothérapeutes. (...) " ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes mêmes de la décision du préfet de la Drôme litigieuse que, contrairement à ce que soutient la requérante, ledit préfet a appliqué les critères d'équivalence du régime dérogatoire prévu par les dispositions précitées de l'article 16 du décret du 20 mai 2010 et non les critères mentionnés à l'article 1er et relatifs au régime de droit commun ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A...'hon, titulaire d'une licence de psychologie depuis 1989, a suivi une formation auprès de l'Association franco-suisse de thérapie centrée sur la personne (AFTCP) entre 1992 et 1996 comprenant notamment un enseignement en psychopathologie clinique pour 75 heures ; qu'elle a suivi ensuite des cours de " décodage biologique avec analyse psychosomatique " en 2002 ; qu'elle a été également inscrite, au titre de l'année universitaire 2007-2008, en master 1 de psychopathologie générale et psychologie clinique à l'université Lyon II ; qu'elle y a notamment suivi et validé les unités d'enseignements théoriques relatifs à la psychopathologie ; qu'il ressort des pièces du dossier que compte tenu de ces différentes formations, l'intéressée justifiait, comme elle le fait valoir, de 211 heures consacrées à la psychopathologie ; que la requérante se prévaut, par ailleurs, au titre de son expérience professionnelle, de son activité salariée de guide au sein du service " d'aide et de guidance " de l'association " secours et détresse mentale " qu'elle a exercée entre 1990 et 1993, laquelle association avait pour objet d'assurer un service d'accompagnement des personnes adultes handicapées par des troubles mentaux consistant, pour les guides comme MmeA...'hon, à assurer le suivi de plusieurs handicapés dans le cadre d'une insertion sociale et d'animer des activités de sports et de loisirs ; que la requérante se prévaut également de son activité salariée exercée entre 1994 et 1996 auprès de la " société valentinoise d'entraide et de réadaptation " au sein de laquelle elle avait pour mission d'animer un lieu d'expression artistique pour un public en difficulté sociale et/ou psychologique et d'animer et d'accompagner des personnes issues de soins psychiatriques en difficulté d'insertion ou isolées dans la cité en proposant un lieu de rencontre et un accompagnement sécurisant aidant à leur réinsertion hors du milieu protégé de l'hôpital psychiatrique ; que toutefois, la requérante ne produit pas d'élément précis quant au contenu de ces différentes interventions et quant à l'exercice d'une pratique professionnelle de psychothérapie durant ces périodes ; que si Mme A...'hon soutient en outre qu'elle exerce en cabinet libéral depuis les années 1995 et 1996 l'activité de psychothérapeute et qu'elle suit à ce titre des patients en liaison avec leurs médecins, les éléments produits par l'intéressée, dont certains portent sur une période postérieure à la décision en litige, ne permettent pas de connaître le nombre et la nature précise de ces interventions et de cette pratique professionnelle ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier que, comme le soutient la requérante, qui se prévaut aussi d'un important travail d'introspection personnelle menée depuis plusieurs années, elle intervenait depuis 1995, dans le cadre de son activité libérale, en qualité de " psychothérapeute vacataire ", auprès du Diaconat Protestant afin d'assurer un soutien psychologique et une psychothérapie auprès des personnes accueillies à l'Entraide, cette intervention étant cependant limitée en moyenne à 8 heures par semaine et les documents produits ne permettent pas de connaître les modalités de sa pratique de la psychothérapie ; qu'il ressort, en outre, des pièces du dossier qu'elle n'a pas validé son master 1 de psychopathologie générale et psychologie clinique à l'université Lyon II, l'intéressée ayant été déclarée " défaillante ", notamment au cours du second semestre pour les épreuves relatives aux cours magistraux en " psychologie clinique " et en " déontologie dans les pratiques professionnelles du psycho " ainsi que pour le " stage clinique " ; que les éléments et documents produits au dossier et dont fait ainsi état la requérante ne suffisent pas à la regarder comme ayant acquis à la date de la décision litigieuse les connaissances théoriques, cliniques et pratiques équivalentes à celles exigées par les dispositions précitées de l'article 16 du décret du 20 mai 2010 ; que, par suite, le préfet de la Drôme n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant, après avoir été éclairé par l'avis défavorable émis par la commission régionale d'inscription des psychothérapeutes, que MmeA...'hon ne remplissait pas, pour ce motif, les conditions requises pour se voir autoriser, à titre dérogatoire, à faire usage du titre de psychothérapeute même avec une formation complémentaire ;
5. Considérant, en dernier lieu, que la requérante ne peut utilement se prévaloir ni de la circonstance que le directeur général de l'agence régionale de la santé de Provence-Alpes Côte d'Azur a autorisé à user du titre de psychothérapeute l'une de ses consoeurs, dont au demeurant il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait dans une situation comparable à celle de la requérante, ni de l'application qui serait faite par les différentes autorités compétentes des dispositions précitées du décret du 20 mai 2010 pour déterminer, dans chaque cas qui leur serait présenté, si les conditions d'équivalence requises pour être autorisé à faire usage à titre dérogatoire du titre de psychothérapeute sont remplies, pour soutenir que la décision litigieuse du préfet de la Drôme méconnaîtrait le principe d'égalité ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...'hon n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 24 octobre 2011 du préfet de la Drôme rejetant sa demande tendant à faire usage du titre de psychothérapeute ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées les conclusions dirigées contre la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la santé publique rejetant son recours hiérarchique formé contre la décision du préfet, sans que les vices propres dont cette décision serait entachée puissent être utilement invoqués ; que doivent être également rejetées par voie de conséquence les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par MmeA...'hon, ainsi que celles qu'elle a présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...'hon est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...'hon et au ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Copie en sera adressée au préfet de la Drôme et au directeur de l'agence régionale de santé de Rhône-Alpes.
Délibéré après l'audience du 5 novembre 2015 à laquelle siégeaient :
M. Seillet, président,
M. Segado et MmeC..., premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 26 novembre 2015.
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N° 14LY02311