Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des pénalités y afférentes.
Par un jugement n° 1201507 du 27 mars 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 juin 2014 et des mémoires, enregistrés le 18 février 2015 et le 1er avril 2015, MmeD..., représentée par la Selarl Touttée conseil et associes, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 27 mars 2014 ;
2°) de lui accorder la décharge des impositions restant à sa charge et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les rectifications ayant été refusées, c'est l'administration fiscale qui supporte la charge de la preuve ;
- les travaux dont elle demande la déduction en charges ont été réalisés en deux phases autonomes dans le temps et dans l'espace (2003/2004 et 2005/2006) ;
- la deuxième phase a été réalisée en 2005 et 2006 et comportait des travaux dans la " maison des chasseurs " (bâtiment A), comprenant en 2005, des travaux de remise en état de la bibliothèque et en 2006, des travaux d'isolation du grenier et des travaux de traitement de la charpente, des travaux communs de déplacement d'une fosse septique et des canalisations attenantes, de mise en place d'une chaudière à bois déchiqueté, d'assainissement et d'électricité ont été réalisés en 2005 et 2006, la création d'un studio de 35 m2 environ (bâtiment D), dans l'ancienne cave voûtée située sous le gîte du bas (bâtiment C), c'est-à-dire sous l'appartement de MmeC..., un agrandissement du logement" famille d'accueil" (bâtiment B), à savoir la création de deux chambres et de sanitaires dans la partie grange (dénommée grenier), d'une surface de 55 m2 ;
- elle demande la déduction des seuls travaux relatifs à la partie "maison des chasseurs" (bâtiment A), soit la remise en état de la bibliothèque (2 221 euros TTC en 2005 et 1 749 TTC en 2006), la réfection de la charpente et de l'isolation (10 070 euros TTC en 2006), les travaux de remise en état de la partie "famille d'accueil" (bâtiment B) réalisés en 2004 et payés en 2005, soit avant les travaux d'agrandissement (5 703 euros TTC), les travaux communs aux parties louées qui sont (bâtiments A, B, C) les travaux de déplacement et mise aux normes de la fosse septique réalisés en 2004 et payés en 2005 (16 842 euros TTC) et l'installation d'une chaudière à bois déchiqueté en 2005 (16 419 TTC) ;
- ces dépenses effectuées en 2004 et 2005, sont dissociables des autres et se rapportaient uniquement à des travaux d'entretien, de réparation et d'amélioration.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 17 octobre 2014 et le 10 mars 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Le ministre fait valoir que :
- conformément aux dispositions de l'article 31-1-1° code général des impôts seules sont déductibles du revenu brut foncier les dépenses de réparation et d'entretien et les dépenses d'amélioration à l'exclusion des dépenses de construction, de reconstruction et d'agrandissement ;
- en l'espèce, eu égard à leur ampleur, les travaux litigieux doivent être regardés comme constituant des dépenses de reconstruction au sens des dispositions de l'article 31-l-1° du code général des impôts, dès lors qu'ils font partie d'un même projet global de réhabilitation de la ferme de Saint-Moirans ;
- même s'ils ne constituent la deuxième tranche de travaux, rien ne permet de considérer que les travaux réalisés en 2005 et 2006 ne s'intègrent pas au projet global d'agrandissement, ces deux phases successives compte tenu de leur continuité dans le temps n'étant pas autonomes, contrairement aux allégations de la requérante ;
- s'agissant, des travaux effectués sur le bâtiment A " Maison des Chasseurs ", le contenu de la demande de permis de construire, ainsi que celui des déclarations modèle H1 contredisent l'affirmation selon laquelle les travaux entrepris n'auraient conduit qu'à l'aménagement d'une bibliothèque, sans agrandissement et, en l'absence d'élément de preuve contraire, l'ensemble des travaux revendiqués ne peuvent qu'être regardés comme effectués à l'occasion de cet agrandissement, et comme étant indissociables de celui-ci ;
- s'agissant des travaux effectués sur le bâtiment B "FamilleB...", la requérante rejoint la position de l'administration selon laquelle les travaux effectués sur le bâtiment B " Famille B... " ont consisté en des travaux d'agrandissement (création de deux pièces et aménagement des sanitaires dans le grenier engendrant une augmentation de surface habitable de 55 m2, selon ses propres termes) et sont nécessairement indissociables de l'opération globale d'agrandissement ;
- s'agissant des travaux communs aux parties louées, constituées du bâtiment A ("Maison des Chasseurs"), du bâtiment B ("FamilleB...") et du bâtiment D, qui est le studio aménagé en 2005 sous la partie réservée à l'habitation de la propriétaire (bâtiment C), à défaut de preuve contraire, rien ne permet de considérer que les travaux de déplacement de la fosse sceptique et d'installation d'une chaudière à bois (33 261 euros) seraient dissociables des travaux d'agrandissement, étant précisé que l'opération de réhabilitation incluait notamment la réalisation de sanitaires comme le démontre la demande de permis de construire.
Par une ordonnance en date du 3 avril 2015 la clôture d'instruction a été fixée au 29 avril 2015, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bourrachot, président,
- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.
1. Considérant que Mme A...D...est propriétaire d'un ensemble immobilier situé sur la commune de Chastel-Arnaud (26), dénommé " La ferme de Saint-Moirans " ; que cet ensemble immobilier est constitué de plusieurs corps de bâtiments, dont certains sont productifs de revenus fonciers ; que Mme D...occupe le bâtiment C dénommé le " Gîte d'en bas " tandis que le bâtiment A dénommé " la maison des chasseurs " et le bâtiment B dénommé " Famille d'accueil " sont loués à l'association " Maison de l'amitié " ; qu'à l'issue du contrôle sur pièces de son dossier, une proposition de rectification lui a été adressée le 21 juillet 2008 par le centre des impôts de Die qui a remis en cause la déductibilité des dépenses de travaux déclarées au titre des années 2005 (113 212 euros) et 2006 (21 140 euros) pour les bâtiments A et B loués à l'association " Maison de l'Amitié " ; que l'administration fiscale a, en effet, considéré que les opérations réalisées ne pouvaient être regardées comme de simples travaux d'entretien, de réparation et d'amélioration, mais qu'elles avaient la nature de travaux d'agrandissement non déductibles des revenus fonciers ; que par ailleurs, d'autres rectifications ont également été notifiées mais n'ont pas été contestées ; qu'en réponse aux observations de la contribuable en date du 24 septembre 2008, les rectifications ont été confirmées par lettre en date du 18 août 2009 ; qu'à l'issue du contrôle, les rappels d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ont été mis en recouvrement respectivement le 30 octobre 2009 et le 31 janvier 2010 ; que par courrier du 28 décembre 2011, Mme D... a demandé le dégrèvement des impositions correspondant à la remise en cause par l'administration fiscale des dépenses de travaux sur ses revenus fonciers ; que cette réclamation a fait l'objet d'une décision de rejet le 10 janvier 2012 ; que Mme D...a alors saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande de décharge enregistrée le 12 mars 2012 ; que par un jugement du 27 mars 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande ; que Mme D...relève appel de ce jugement ;
2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 28 du code général des impôts : " Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété " ; qu'aux termes du I de l'article 31 du même code, dans sa version alors en vigueur : " Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° Pour les propriétés urbaines : a) Les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportés pa r le propriétaire ; b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (...) " ; que doivent être regardés comme des travaux de construction ou de reconstruction, au sens des dispositions précitées, les travaux comportant la création de nouveaux locaux d'habitation, notamment dans des locaux auparavant affectés à un autre usage, ainsi que les travaux ayant pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre de locaux d'habitation existants ou les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction ; que doivent être regardés comme des travaux d'agrandissement, au sens des mêmes dispositions, les travaux ayant pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable de locaux existants ;
3. Considérant qu'il appartient au contribuable qui entend déduire de son revenu brut les dépenses constituant, selon lui, des charges de la propriété, de justifier de la réalité, de la consistance et par suite du caractère déductible de ces charges alors même qu'il a refusé les rectifications qui lui ont été proposées ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, que la réalisation d'une première phase de travaux a consisté en 2003 et en 2004, outre la création d'une mezzanine, en un réaménagement complet des espaces intérieurs, en la destruction de deux escaliers ainsi qu'en des travaux de zinguerie, toiture, menuiserie et réfection électrique, en la mise en place du chauffage central, en un raccordement aux réseaux de gaz et d'électricité, en des dépenses de maçonnerie, toiture, menuiserie, plâtrerie, isolation, électricité, plomberie, carrelage et faïence, en la démolition d'un escalier maçonné et celle d'un escalier extérieur en pierres, en la modification et la création d'ouvertures dans un mur porteur, la réalisation de dallages béton et la pose d'un velux ; que d'autres travaux ont conduit à la réfection de la toiture ; que Mme D...a réalisé une deuxième phase de travaux ; que les travaux effectués sur le bâtiment A " Maison des Chasseurs ", les travaux de réfection de la charpente de ce bâtiment et d'isolation (10 070 euros TTC en 2006) ne peuvent être regardés comme de simples travaux de réparation, d'entretien ou d'amélioration ; que si la requérante demande également la déduction des seuls travaux relatifs à la remise en état de la bibliothèque (2 221 euros TTC en 2005 et 1 749 TTC en 2006), cette bibliothèque ne figure ni dans la déclaration H1 avant travaux ni même dans celle souscrite après travaux ; qu'ainsi de tels travaux ne peuvent être regardés comme une réparation ou une amélioration d'une pièce existante ; que les travaux effectués sur le bâtiment B " Famille B... ", constituent des travaux d'agrandissement (création de deux pièces et aménagement des sanitaires dans le grenier engendrant une augmentation de surface habitable de 55 m2) dont les travaux de remise en état sont nécessairement indissociables ; que s'agissant des travaux communs aux parties louées, constituées du bâtiment A ("Maison des Chasseurs"), du bâtiment B (" FamilleB... ") et du bâtiment D, qui est le studio aménagé en 2005 sous la partie réservée à l'habitation de la propriétaire (bâtiment C), à défaut de tout élément en sens contraire, les travaux de déplacement de la fosse sceptique et d'installation d'une chaudière à bois sont également indissociables de l'ensemble de l'opération qui comporte des travaux de reconstruction et des travaux d'agrandissement ; que si pris isolément, certains travaux déduits par la requérante pourraient être regardés comme des travaux de réparation rendus nécessaires par l'état du bâtiment et de ses abords, il résulte de l'instruction que les importants travaux portant sur les parties extérieures de l'ensemble immobilier, dont la contribuable a entendu déduire le coût mis à sa charge de ses revenus fonciers, réalisés simultanément aux aménagements intérieurs, ont participé à l'économie d'un projet global dont ils ne peuvent être dissociés et doivent dès lors être regardés en totalité comme des travaux de reconstruction au sens de l'article 31 du code général des impôts précité ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à Mme D...une somme au titre des frais d'instance exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 5 avril 2016 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 mai 2016.
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N° 14LY01758