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17/05/2016 | FRANCE | N°14LY00875

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 17 mai 2016, 14LY00875


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...et le GAEC de la Beaume ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner l'Etat à leur verser une indemnité de 206 995,58 euros en réparation d'une perte patrimoniale et d'une perte d'exploitation résultant de l'absence de remise d'une noyeraie en état d'exploitation attribuée par la commission départementale d'aménagement foncier de l'Allier dans le cade des travaux connexes à une opération d'aménagement liée à la réalisation d'une déviation de la R.N. 7, en remplac

ement d'une noyeraie existante.

Par jugement n° 1201276 du 21 janvier 2014 le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...et le GAEC de la Beaume ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner l'Etat à leur verser une indemnité de 206 995,58 euros en réparation d'une perte patrimoniale et d'une perte d'exploitation résultant de l'absence de remise d'une noyeraie en état d'exploitation attribuée par la commission départementale d'aménagement foncier de l'Allier dans le cade des travaux connexes à une opération d'aménagement liée à la réalisation d'une déviation de la R.N. 7, en remplacement d'une noyeraie existante.

Par jugement n° 1201276 du 21 janvier 2014 le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 mars et 11 septembre 2014, M. E... et le GAEC de la Beaume, représentés par MeD..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 21 janvier 2014 ;

2°) de condamner l'Etat à leur verser une indemnité de 206 995,58 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision de la commission départementale d'aménagement foncier du 6 juin 2005 qui prévoit la reconstitution de leur noyeraie, au lieu du versement d'une soulte pour la perte des arbres en application des dispositions de l'article L. 123-4 du code rural et de la pêche maritime est entachée d'une illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; la reconstitution d'une noyeraie productive au profit d'un propriétaire situé dans le périmètre de l'opération concernée n'était légalement pas possible dans le cadre des travaux connexes ; la commission départementale d'aménagement foncier aurait du rejeter sa demande ;

- la faute de l'Etat est directement à l'origine de la perte de l'indemnité qu'il aurait dû percevoir ;

- le préjudice subi s'élève à la somme de 206 995,58 euros.

Par un mémoire, enregistré le 26 juin 2014, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le préjudice dont se prévalent les requérants ne trouve pas son origine dans la décision de la commission départementale d'aménagement foncier du 6 juin 2005, mais dans la mauvaise exécution des travaux connexes visant à la reconstitution de la noyeraie, et notamment dans l'absence d'entretien des plants par la société prestataire avec laquelle la commune de Bessay-sur-Allier avait passé un marché public ;

- M. C...a expressément demandé à la commission, en lieu et place d'une soulte, que sa noyeraie soit reconstituée sur l'une de ses parcelles d'attribution ; dès lors que le financement des travaux connexes était mis à la charge du maître d'ouvrage du projet d'élargissement de la R.N. 7, et non pas de l'ensemble des propriétaires situés dans le périmètre du remembrement, la commission n'a pas commis d'illégalité ;

- M. E...bénéficie d'une convention temporaire d'occupation des parcelles sur lesquelles se situe la noyeraie existante, dans les mêmes conditions qu'avant l'intervention de la décision du 6 juin 2005 ; il ne saurait invoquer un quelconque préjudice d'exploitation à ce titre ; les conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice tiré de la perte patrimoniale n'ont pas pour objet de l'indemniser de la perte de valeur de sa parcelle d'apport, mais uniquement d'assurer le financement de la reconstitution de sa noyeraie sur les parcelles attribuées.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Clément, rapporteur public ;

- et les observations de MeB..., pour M. E...et le GAEC de la Beaume.

1. Considérant que M. E...et le GAEC de la Beaume relèvent appel du jugement du 21 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser une indemnité en réparation de préjudices résultant de ce qu'ils n'ont pas reçu la noyeraie en état d'exploitation qui devait leur être remise au titre des travaux connexes liés à une opération d'aménagement foncier ordonnée en vue d'un projet d'élargissement à deux fois deux voies de sections de la R.N. 7, concernant notamment le territoire de la commune de Bessay-sur-Allier ;

Sur le principe de responsabilité :

2. Considérant que, lors de sa séance du 6 juin 2005, la commission départementale d'aménagement foncier a décidé de reconstituer la noyeraie exploitée par les requérants sur la parcelle dont ils se trouvaient dépossédés, sur un nouveau terrain situé sur le territoire de la commune de Bessay-sur-Allier ; que la maîtrise d'ouvrage de ces travaux a été assurée par la commune, avec le concours financier de l'Etat ; qu'ayant constaté un défaut d'entretien de la nouvelle plantation, les intéressés ont saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand qui a ordonné une expertise, le 14 janvier 2011 ; que l'expert a remis son rapport, le 16 septembre 2011 ; que M. E...et le GAEC de la Beaume dont il est le co-gérant, ont demandé au préfet de l'Allier de les indemniser des préjudices qu'ils imputent au fait qu'ils n'ont pas reçu la noyeraie en état de production qui devait leur être remise ;

3. Considérant que la décision de la commission départementale d'aménagement foncier mentionnée au point 2, constitue, vis-à-vis des requérants, un engagement de l'Etat de réaliser des travaux qui ne pouvaient avoir le caractère de travaux connexes au sens des dispositions de l'article L. 123-8 du code rural et de la pêche maritime, alors même que leur réalisation a été confiée à la commune de Bessay-sur-Allier, maître d'ouvrage de ces travaux connexes ; que ces travaux doivent en effet être regardés comme visant à compenser la perte résultant, pour le propriétaire, de l'inclusion d'une noyeraie en état d'exploitation dans l'emprise de travaux d'élargissement d'une voie routière ; que, dans ces conditions, l'engagement pris par la commission départementale d'aménagement foncier ne saurait engager que la seule responsabilité de l'Etat vis-à-vis des requérants, sans qu'il puisse utilement leur opposer l'existence d'une faute de la commune à laquelle il avait confié l'exécution des travaux ; que la remise d'une noyeraie rendue inexploitable en raison d'un épisode de gel et d'un défaut d'entretien, en méconnaissance de l'engagement pris le 6 juin 2005, constitue, dès lors, une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Sur le préjudice :

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les requérants bénéficient d'une convention temporaire leur permettant de continuer à exploiter l'ancienne noyeraie située sur le terrain inclus dans l'emprise des travaux routiers dont la réalisation n'a pas commencé ; que dans ces conditions, ils ne peuvent se prévaloir d'aucun préjudice au titre de pertes subies du fait de l'impossibilité d'exploiter la nouvelle noyeraie à la date prévue pour sa remise ; que dès lors qu'il leur a été attribué un terrain ayant vocation à être replanté en noyeraie, ils ne peuvent davantage se prévaloir d'un préjudice patrimonial résultant de la perte de l'ancienne noyeraie ; qu'en revanche, ils justifient, au titre des travaux nécessaires pour obtenir une noyeraie en état d'exploitation, d'un préjudice qui peut être évalué à la somme 90 000 euros TTC, sur la base d'un devis du 26 avril 2012 qui n'est pas contesté ; qu'il y a lieu d'indemniser M. E..., bénéficiaire de la décision de la commission d'aménagement foncier, à hauteur de ce montant ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E...et le GAEC de la Beaume sont fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande d'indemnisation et à demander la condamnation de l'Etat à verser à M. E...une indemnité de 90 000 euros ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

6. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par les requérants et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 21 janvier 2014 est annulé.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. E...une somme de 90 000 (quatre-vingt-dix mille) euros.

Article 3 : L'Etat versera à M. E...et au GAEC de la Beaume une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié M. A...E..., au GAEC de la Beaume et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Délibéré après l'audience du 6 avril 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Boucher, président de chambre ;

- M. Drouet, président-assesseur ;

- Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 mai 2016.

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N° 14LY00875


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00875
Date de la décision : 17/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-02 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité pour faute.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : SCP VOLAT - GARD - RECOULES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-05-17;14ly00875 ?
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