Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... C...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 27 février 2015 par lesquelles le préfet de la Côte-d'Or a refusé de l'admettre au séjour au titre de l'asile, lui a refusé le renouvellement de son autorisation de séjour sur le fondement de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé.
Par un jugement n° 1501126 du 28 septembre 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 décembre 2015, Mme B...C..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 28 septembre 2015 ;
2°) d'annuler ces décisions du préfet de la Côte d'Or du 27 février 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son avocat en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de renonciation de sa part au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- concernant le refus de titre, c'est à tort que le tribunal a estimé que l'état de santé de son enfant requiert des soins dont le défaut ne serait pas susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité alors que le préfet n'a pas invoqué un tel motif pour justifier son refus ;
- le refus d'admission au séjour est entaché d'erreur d'appréciation dès lors qu'elle justifie que son enfant ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ; le préfet a ainsi méconnu l'intérêt supérieur de son enfant protégé par l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'obligation de quitter le territoire est illégale en raison de l'illégalité du refus d'admission au séjour ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il viole les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2016, le préfet de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens de la requérante ne sont pas fondés.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 novembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Segado, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme C..., ressortissante géorgienne, est entrée irrégulièrement en France avec son fils né en 2010, le 21 décembre 2011 selon ses déclarations ; qu'elle a sollicité le bénéfice de l'asile le 2 juillet 2012 ; que cette demande a été rejetée par décision du 25 mars 2013 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 9 octobre 2013 ; que l'intéressée a ensuite demandé la délivrance d'une autorisation en qualité d'accompagnant d'enfant malade sur le fondement de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par décisions du 27 février 2015 le préfet de la Côte-d'Or a refusé l'admission au séjour de Mme C..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé ; que, Mme C... relève appel du jugement du 28 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;
Sur la légalité du refus d'admission au séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui (...) / L'autorisation provisoire de séjour mentionnée au premier alinéa, qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé (...) dans les conditions prévues au 11° de l'article L. 313-11. (...) " ; qu'aux termes de cet article L. 313-11 : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). " ;
3. Considérant, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des certificats médicaux établis en France et en Géorgie produits par la requérante, que son fils souffre d'un " syndrome polymalformatif " associé avec un retard de développement ; qu'à la date de la décision en litige, il présentait ainsi une hypoplasie du corps cailleux et du mésencéphale, une hyperthyroïdie d'origine périphérique et une cardiopathie étagée du coeur gauche avec un isthme aortique et un rétrécissement mitral modéré nécessitant une surveillance annuelle, l'enfant ayant été opéré de sa malformation cardiaque en Géorgie avant son arrivée en France ; que selon l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 27 février 2015, si l'état de santé de cet enfant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ainsi que la présence de sa mère, il peut bénéficier d'un traitement approprié en Géorgie ; que la requérante produit des certificats médicaux établis par le praticien hospitalier du centre hospitalier de Dijon suivant cet enfant et des médecins spécialistes en Géorgie, qui font état de la nécessité d'une prise en charge multidisciplinaire et qui recommandent la poursuite de ce traitement sous surveillance multidisciplinaire assurée en France ; que si l'un de ces médecins géorgiens, pédiatre, mentionne qu'il n'est pas possible en Géorgie d'assurer une gestion complète et unifiée de la prise en charge que requiert l'état de l'enfant et " qu'il est uniquement possible de gérer des composants séparés ce qui ne peut être efficace ", il ressort du certificat médical d'un autre de ces médecins géorgiens, le docteur Gordeladze, spécialisé en endocrinologie pédiatrique, qu'il est " possible de gérer chaque composant de cet état séparément en Géorgie ", même si selon ce même médecin " la gestion et le suivi de la réhabilitation complexe-harmonieuse, neurologique, psychologique, cardiologique sera difficile à effectuer ", le troisième médecin n'ayant pour sa part porté aucune indication quant à une impossibilité de prise en charge adaptée en Géorgie ; que ni ces documents, ni les autres pièces produites par Mme C... ne suffisent ainsi à remettre en cause l'appréciation portée par le préfet, au vu de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, quant à l'existence en Géorgie d'un traitement approprié à l'état de l'enfant pour la prise en charge de ses différentes pathologies, même si sa mise en oeuvre s'avère difficile dans ce pays ; que, dès lors, le préfet n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que l'enfant de Mme C... pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ; que dans ces conditions, l'autre motif sur lequel se sont également fondés les premiers juges et qui est tiré de ce que le défaut de prise en charge n'aurait pas des conséquences d'une exceptionnelle gravité, a un caractère surabondant ; que, par suite, le moyen selon lequel les premiers juges ne pouvaient se fonder sur un tel motif qui n'avait pas été invoqué par le préfet, ne saurait être accueilli ;
4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions concernant les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'au regard des éléments d'appréciation mentionnés au point 3 et de l'existence en Géorgie d'une prise en charge appropriée à l'état de l'enfant de la requérante, la décision du préfet refusant d'admettre celle-ci au séjour ne peut être regardée comme méconnaissant les exigences de ces stipulations ;
Sur l'obligation de quitter le territoire :
5. Considérant qu'il résulte de ce qui est dit aux points 2 à 4 ci-dessus, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
6. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. " ; que selon le dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ;
7. Considérant que la requérante soutient qu'elle encourt des risques pour sa vie ou sa liberté au sens des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Géorgie, compte tenu notamment des persécutions dont elle a fait l'objet, avec son mari, pharmacien, de la part de concurrents, de poursuites pénales infondées engagées à son encontre, du défaut d'impartialité de la justice de son pays à son égard et du fait que cette situation pourrait la conduire à être séparée de son enfant dont l'état de santé implique sa présence constante à ses côtés ; que, toutefois, ces indications de la requérante ne s'appuient sur aucun élément probant suffisamment circonstancié de nature à établir qu'elle pourrait être directement et personnellement exposée aux risques ainsi allégués ; que, par suite, ses moyens selon lesquels, en raison de ces risques, le préfet aurait méconnu les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant citées au point 4, doivent être écartés ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C..., et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.
Délibéré après l'audience du 4 octobre 2016, à laquelle siégeaient :
M. Boucher, président de chambre,
M. Gille, président-assesseur,
M. Segado, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 novembre 2016.
2
N° 15LY03794
mg