Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SA Groupe Multitransports a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007 et 2008 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1201750 du 18 février 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 avril 2014 et des mémoires enregistrés les 6 août et 25 septembre 2014, la SA Groupe Multitransports, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 février 2014 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle contestées et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le calcul du chiffre d'affaires effectué en application de l'article 1647 E du code général des impôts n'intègre pas les produits de cessions d'immobilisations ;
- l'article 1647 B sexies du code général des impôts n'intègre pas les plus-values de cession d'immobilisation dans le calcul de la valeur ajoutée, cette intégration n'ayant été opérée que par la loi de finances pour 2010 sous l'article 1586 sexies du code général des impôts ;
- il résulte de la jurisprudence issue d'une décision du Conseil d'Etat du 6 décembre 2006 n° 280800 SA Algeco, intégrée par la loi de finances pour 2010 à l'article 1586 sexies du code général des impôts et commentée par l'instruction administrative 6 E-1-10 publiée au bulletin officiel des impôts que l'intégration des plus-values dans le calcul de la valeur ajoutée ne peut être automatique lorsque la société concernée a une activité de location, mais qu'elle doit résulter d'une analyse économique factuelle ;
- si une société de location amortit un tracteur sur trente-six mois et le cède à l'issue de cette période, elle pratique elle-même un amortissement de cinq à six ans sur le prix d'acquisition sans déduction d'une valeur résiduelle, les charges d'entretien du matériel étant de ce fait plus élevées que dans le cadre des entreprises de location puisqu'elle utilise les véhicules plus longtemps, le taux de rotation des véhicules étant de 10 % par an ;
- une indemnité d'assurance ne peut être regardée comme un élément constitutif de plus-value ;
- la plus-value de 1 961 190 euros réalisée en 2008 présente un caractère exceptionnel, au sens du 1 ter de l'article 39 quaterdecies du code général des impôts qui permet un étalement d'imposition, l'option pour l'étalement figurant dans l'imprimé 2059 B.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 25 juillet 2014 et le 15 septembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le chiffre d'affaires s'entend de l'ensemble des recettes résultant de l'exploitation normale et courante de la société ;
- la requérante a une activité de loueur de poids lourds et la vente des véhicules préalablement affectés à la location constitue des produits de gestion courante pour les sociétés de location ;
- les cessions de véhicules usagés relèvent de l'activité habituelle et ordinaire de la société et représentent en moyenne 13 % de la valeur des immobilisations inscrites à l'actif.
Par une ordonnance du 31 août 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 septembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pourny,
- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public,
- les observations de Me Bouillon, avocat de la SA Groupe Multitransports.
1. Considérant que la SA Groupe Multitransports exerce une activité de location de véhicules au profit d'entreprises de transports routiers qui sont ses filiales ; qu'elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, portant sur les années 2007, 2008 et 2009, à l'issue de laquelle elle a été assujettie à des impositions supplémentaires en matière de cotisation minimum de taxe professionnelle au titre des années 2007 et 2008, l'administration fiscale ayant estimé que ses ventes de véhicules après location devaient être intégrées dans son chiffre d'affaires et que les plus-values réalisées lors de ces ventes devaient être prises en compte pour le calcul de la valeur ajoutée produite par l'entreprise ; que la SA Groupe Multitransports relève appel du jugement du 18 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1647 E du code général des impôts, alors en vigueur : " I. - La cotisation de taxe professionnelle des entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 7 600 000 euros est au moins égale à 1,5 % de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie au II de l'article 1647 B sexies. Le chiffre d'affaires et la valeur ajoutée à prendre en compte sont ceux de l'exercice de douze mois clos pendant l'année d'imposition ou, à défaut d'un tel exercice, ceux de l'année d'imposition (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, le chiffre d'affaires s'entend du montant hors taxes des recettes réalisées par le redevable dans le cadre de son activité professionnelle normale et courante
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SA Groupe Multitransports avait pour activité la location de véhicules de transports routiers à ses filiales, exploitant des entreprises de transports routiers, et la revente des véhicules loués en fin de location, ces locations ayant une durée moyenne de cinq ans ; que, dans le cadre de son activité, elle procédait chaque année à la revente d'une partie de ses véhicules en tant que véhicules d'occasion, afin d'anticiper les évolutions des normes routières et d'obtenir un prix élevé lors de la revente par la cession de véhicules encore rares sur le marché de l'occasion, ces ventes, concernant plus d'une centaine de véhicules chaque année, sauf en 2008 où une partie d'entre eux a été détruite par un sinistre ; que, même si la durée d'utilisation et d'amortissement des véhicules pratiquée par la requérante était supérieure à celle habituellement constatée chez les loueurs de véhicules, la revente des véhicules concernés en tant que véhicules d'occasion s'inscrivait dans le cadre de son activité professionnelle normale et courante ; que, par suite, les recettes provenant de ces ventes devaient être prises en compte pour la détermination de son chiffre d'affaires au sens de l'article 1647 E du code général des impôts, la requérante entrant de ce fait dans le champ d'application de l'article 1647 E du code général des impôts pour chacune des années d'imposition en litige ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années en litige : " I. Sur demande du redevable, la cotisation de taxe professionnelle de chaque entreprise est plafonnée en fonction de la valeur ajoutée produite au cours de l'année au titre de laquelle l'imposition est établie ou au cours du dernier exercice de douze mois clos au cours de cette même année lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l'année civile. La valeur ajoutée est définie selon les modalités prévues au II. / Le taux de plafonnement est fixé à 3,5 % de la valeur ajoutée produite. / (...). II. 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. / 2. Pour la généralité des entreprises, la production de l'exercice est égale à la différence entre : / D'une part, les ventes, les travaux, les prestations de services ou les recettes ; les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ; les transferts de charges mentionnées aux troisième et quatrième alinéas ainsi que les transferts de charges de personnel mis à disposition d'une autre entreprise ; les stocks à la fin de l'exercice ; / Et, d'autre part, les achats de matières et marchandises, droits de douane compris ; les réductions sur ventes ; les stocks au début de l'exercice. / Les consommations de biens et services en provenance de tiers comprennent : les travaux, fournitures et services extérieurs (...) " ; que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle ; que pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux dispositions du plan comptable général dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée ;
5. Considérant que, comme cela a été exposé ci-dessus, les opérations de ventes de véhicules en fin de location constituent pour la requérante une source de revenus réguliers et relèvent de son activité ordinaire, telle qu'elle est définie par son objet social et son exploitation courante ; que, par suite, le produit de cession de ces véhicules devait être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée au sens des dispositions de l'article 1647 B sexies du code général des impôts ;
6. Considérant, en troisième et dernier lieu, que si la requérante soutient que la valeur ajoutée de l'entreprise ne pouvait intégrer la plus-value de 1 961 190 euros réalisée en 2008 lors de la perception d'une indemnité d'assurance consécutive à la destruction d'une partie de ses véhicules lors d'un sinistre, cette indemnité compensant une perte de recettes qui aurait été prise en compte dans le calcul de la valeur ajoutée de l'entreprise, devait également être prise en compte dans ce calcul ; que la circonstance que la requérante ait opté pour l'étalement de l'imposition à l'impôt sur les sociétés de cette plus-value en application des dispositions du 1 ter de l'article 39 quaterdecies du code général des impôts est sans incidence sur le montant des cotisations de taxe professionnelle mises à sa charge en application des dispositions de l'article 1647 E du code général des impôts ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA Groupe Multitransports n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que les conclusions qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent par voie de conséquence être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SA Groupe Multitransports est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Groupe Multitransports et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 8 décembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Pourny, président-assesseur,
Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 décembre 2016.
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N° 14LY01434