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28/03/2017 | FRANCE | N°15LY02661

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 28 mars 2017, 15LY02661


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Les Balcons de Belle Plagne a demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juillet 2008 au 31 août 2011.

Par un jugement n° 1306607 du 1er juin 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2015, la SARL Les balcons de Belle Plagne, représentée par Me André Morand, avoc

at, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 1er ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Les Balcons de Belle Plagne a demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juillet 2008 au 31 août 2011.

Par un jugement n° 1306607 du 1er juin 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2015, la SARL Les balcons de Belle Plagne, représentée par Me André Morand, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 1er juin 2015 ;

2°) de la décharger de ces impositions ;

3°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution du jugement ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SARL Les Balcons de Belle Plagne soutient que :

- c'est à tort que l'administration a considéré que les commissions qu'elle a perçues au titre des contrats d'assurance annulation séjour, assurés par la Compagnie Mondiale Assurance, n'étaient pas exonérées en application du 2° de l'article 261 C du code général des impôts au motif que ces prestations d'assurance étaient accessoires à son activité principale de location ;

- elle aurait tout au plus pu admettre que la taxe sur la valeur ajoutée soit rappelée sur les commissions et pas sur le montant des souscriptions au contrat d'assurance souscrit par ses clients qui eux sont par nature exonérés en application du 2° de l'article 261 C du code général des impôts ;

- c'est à tort que l'administration a remis en cause l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée sur les sommes encaissées dans le cadre des contrats de prestations d'enseignement du ski assurées par l'Ecole Français du Ski dès lors qu'elle agit en qualité d'intermédiaire transparent pour le compte de l'Ecole du Ski Français, la taxe ne peut porter sur la totalité des sommes encaissées pour le compte de l'Ecole de Ski Français mais seulement sur les commissions qu'elle a perçues de cette société.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre de l'économie et des finances soutient que :

- c'est à bon droit que l'administration a remis en cause l'exonération que la société requérante a appliquée aux prestations d'assurance-annulation des séjours payées par ses clients dans le cadre de leur séjour car la prestation rendue est accessoire à son activité principale de location ; la SARL Les Balcons de Belle Plagne avait enregistré au compte 707196 " ventes assurances-annulation " les primes d'assurance versées par les clients ; cette assurance est une prestation facultative, proposée aux clients en cas d'annulation de leur séjour ; contractée dès la réservation, elle est ensuite facturée aux clients avec la prestation d'hébergement et la demi-pension ;

- la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait exercé cette activité en qualité d'intermédiaire transparent ;

- c'est à bon droit que l'administration a considéré que les cours dispensés par l'école de ski français constituaient des prestations accessoires aux prestations d'hébergement et a soumis ces prestations de taxe sur la valeur ajoutée au taux normal de la taxe ; la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle a exercé cette activité accessoire en qualité d'intermédiaire transparent.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 24 février 2017, la SARL Les Balcons de Belle Plagne persiste dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et soutient, en outre, que :

- les commissions qu'elle perçoit sur les contrats d'assurance sont des accessoires de la prestation principale assurée par un assureur et doivent par suite être exonérées comme accessoire de l'activité d'assurance.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2006/112 du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mear, président-assesseur,

- les conclusions de M. Besse, rapporteur public,

- et les observations de Me André Morand, représentant La SARL Les Balcons de Belle Plagne ;

1. Considérant que la SARL Les Balcons de Belle Plagne, qui exploite une résidence de tourisme et un hôtel sis à La Plagne, vend des séjours à la montagne comprenant des prestations de location d'hébergement et de demi-pension avec, en sus, à titre facultatif, notamment des prestations relatives à la conclusion de contrats d'assurance annulation du séjour et réservation de cours de ski ; que cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre, de la période du 1er juillet 2007 au 31 août 2011 en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'à l'issue de ce contrôle, effectué selon la procédure de rectification contradictoire, l'administration a remis en cause, d'une part, l'exonération appliquée par la société aux prestations d'assurance annulation payées par ses clients dans le cadre de leur séjour et, d'autre part, l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée aux prestations de réservation de cours de ski dispensés par l'Ecole de Ski Français ; que ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été assortis d'intérêts de retard ; que la SARL Les Balcons de Belle Plagne relève appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble qui a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne les prestations d'assurance-annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) " ; qu'aux termes de l'article 261 C du même code : " Sont exonérés de taxes sur la valeur ajoutée : (...) / 2° les opérations d'assurance et de réassurance ainsi que les prestations de services afférentes à ces opérations effectuées par les courtiers et les intermédiaires d'assurance " ;

3. Considérant, d'une part, que lorsqu'une opération économique soumise à la taxe sur la valeur ajoutée est constituée par un faisceau d'éléments et d'actes, il y a lieu de prendre en compte toutes les circonstances dans lesquelles elle se déroule aux fins de déterminer si l'on se trouve en présence de plusieurs prestations ou livraisons distinctes ou d'une prestation ou livraison complexe unique ; que chaque prestation ou livraison doit en principe être regardée comme distincte et indépendante ; que, toutefois, l'opération constituée d'une seule prestation sur le plan économique ne doit pas être artificiellement décomposée pour ne pas altérer la fonctionnalité du système de la taxe sur la valeur ajoutée ; que, de même, dans certaines circonstances, plusieurs opérations formellement distinctes, qui pourraient être fournies et taxées séparément, doivent être regardées comme une opération unique lorsqu'elles ne sont pas indépendantes ; que, tel est le cas lorsque, au sein des éléments caractéristiques de l'opération en cause, certains éléments constituent la prestation principale, tandis que les autres, dès lors qu'ils ne constituent pas pour les clients une fin en soi mais le moyen de bénéficier dans de meilleures conditions de la prestation principale, doivent être regardés comme des prestations accessoires partageant le sort fiscal de celle-ci ; que, tel est le cas, également, lorsque plusieurs éléments fournis par l'assujetti au consommateur, envisagé comme un consommateur moyen, sont si étroitement liés qu'ils forment, objectivement, une seule opération économique indissociable, le sort fiscal de celle-ci étant alors déterminé par celui de la prestation prédominante au sein de cette opération ;

4. Considérant que l'administration a assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée les prestations d'assurance proposées par la SARL Les Balcons de Belle Plagne en sus de son activité de location d'hébergement au motif que ces prestations constituent une activité accessoire suivant le sort fiscal de la prestation principale de location d'hébergement et par suite ne peut bénéficier de l'exonération prévue par le 2° de l'article 261 C du code général des impôts ; que la SARL Les Balcons de Belle Plagne considère que les prestations d'assurance constituent une activité indépendante exonérée de taxe sur la valeur ajoutée sur le fondement du 2° de l'article 261 C du code général des impôts et que, si elle devait être considérée comme imposable, elle ne devrait l'être que sur le montant de ses commissions et pas sur le montant des souscriptions de ses clients au contrat d'assurance dont les prestations sont rendues par une compagnie d'assurance ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société requérante propose lors de la réservation à sa clientèle, en sus de prestations d'hébergement et de pension, une prestation complémentaire tenant à la souscription auprès d'une compagnie d'assurance, lors de la réservation du séjour, d'une assurance annulation de ce séjour ; que l'administration fiscale a constaté lors du contrôle que cette prestation était facturée aux clients avec la prestation d'hébergement et de pension et que les montants versés en contrepartie de ces prestations d'assurance était enregistrés par la société requérante au compte 707196 " ventes assurances-annulation " ;

6. Considérant que la prestation de la société requérante, dont il n'est pas contesté qu'elle n'est offerte qu'à titre facultatif, ne constitue pas une prestation indispensable à l'exercice de l'activité principale de la SARL Les Balcons de Belle Plagne de location d'hébergement et de pension ; qu'elle constitue dès lors une fin en soit pour ses clients ; que, par suite, l'activité exercée à ce titre par la société requérante est une activité indépendante de son activité principale ;

7. Considérant, d'autre part, que, pour bénéficier de l'exonération prévue le 2° de l'article 261 C du code général des impôts, reprenant les dispositions de l'article 135 § 1-a, de la directive 2006/112 susvisée, la qualité formelle de courtier ou d'intermédiaire d'assurance d'une société n'est pas déterminante ; que le prestataire doit être en relation avec l'assureur et avec l'assuré ; que cette relation peut être indirecte si le prestataire est un sous-traitant du courtier ou de l'intermédiaire ; que, cependant, son activité doit recouvrir des aspects essentiels de la fonction d'intermédiaire d'assurance, tels que la recherche de prospects et la mise en relation de ceux-ci avec l'assureur ;

8. Considérant que la SARL Les Balcons de Belle Plagne propose à sa clientèle la conclusion d'un contrat avec une compagnie d'assurance et justifie que ces contrats sont conclus par ses clients directement avec cet assureur ; que si la société requérante ne réalise pas ainsi directement une prestation d'assurance, elle réalise une prestation liée à la recherche de prospects et à la mise en relation de ces derniers avec un assureur en vue de la conclusion de contrats d'assurance ; qu'une telle activité relève des prestations visées au 2° de l'article 261 C du code général des impôts, reprenant les dispositions de l'article 135 § 1-a, de la directive 2006/112 ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que l'administration fiscale a remis en cause l'exonération dont s'est prévalue la société requérante au titre de ces prestations sur le fondement de l'article 261 C du code général des impôts ; que, par suite, la société requérante est fondée à demander à être déchargée des droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de cette rectification pour la période du 1er juillet 2008 au 30 juin 2011 ;

En ce qui concerne les prestations d'enseignement du ski :

10. Considérant qu'aux termes de l'article 267 du code général des impôts : " I. Sont à comprendre dans les bases d'imposition : (...) 2° Les frais accessoires aux livraisons de biens ou prestations de services tels que commissions, intérêts, frais d'emballage de transport et d'assurance demandés aux clients. II. ne sont pas à comprendre dans la base d'imposition : (...) 2° Les sommes remboursées aux intermédiaires, autres que les agences de voyage et organisateurs de circuits touristiques, qui effectuent des dépenses au nom et pour le compte de leurs commettants, portent ces dépenses dans leur comptabilité dans des comptes de passage et justifient auprès de l'administration des impôts de la nature ou du montant exact de ces débours ; " ;

11. Considérant que l'administration a remis en cause l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée que la société requérante a appliqué au titre d'une prestation de réservation de cours de ski et a soumis cette prestation au taux normal de taxe sur la valeur ajoutée au motif que les cours dispensés par l'école de ski français constituaient des prestations accessoires aux prestations d'hébergement réalisées par la société requérante et a soumis ces prestations de taxe sur la valeur ajoutée au taux normal de la taxe ; que la SARL Les Balcons de Belle Plagne ne conteste que la base de son imposition en faisant valoir qu'elle a agi en tant " qu'intermédiaire transparent " et que, dès lors, elle n'est imposable que sur le montant de ses commissions et non sur la totalité des sommes encaissées " au nom et pour le compte de l'Ecole de Ski Français " ;

12. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SARL Les Balcons de Belle Plagne a offert, à titre facultatif, à ses clients une prestation consistant en la réservation de cours de ski auprès de l'Ecole de Ski Français ; qu'il ne résulte pas des pièces du dossier, notamment du contrat produit au dossier, conclu au demeurant postérieurement aux impositions en litige, que la société requérante aurait réalisé ses prestations au nom et pour le compte de l'Ecole de ski français, soit en qualité de mandataire de cette dernière ; qu'en outre, elle a comptabilisé dans un compte d'exploitation " Ventes Cours ESF " le montant des cours de ski qu'elle a facturé à ses clients et encaissé de ces derniers ; que le montant exact de ses débours n'est pas davantage établi ; que, par ailleurs, la société requérante ne peut bénéficier du régime de l'imposition sur la marge prévue par l'article 266 1. e) pour les opérations d'entremise effectuées par les agences de voyages et les organisateurs de circuits touristiques dès lors que son activité ne consiste pas en l'organisation de voyages ou de circuits touristiques comportant des prestations diverses en contrepartie d'un forfait ; que, dès lors, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'a exercé cette activité qu'en tant qu'intermédiaire transparent et, par suite, qu'elle ne devrait être imposée que sur le montant de ses commissions ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Les Balcons de Belle Plagne est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la rectification relative aux prestations d'assurance-annulation pour la période du 1er juillet 2008 au 30 juin 2011 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, le versement à la SARL Les balcons de Belle Plagne de la somme de 1 200 euros qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La SARL Les Balcons de Belle Plagne est déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la rectification relative aux prestations d'assurance-annulation pour la période du 1er juillet 2008 au 30 juin 2011.

Article 2 : Le jugement n° 1306607 du tribunal administratif de Grenoble en date du 1er juin 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à la SARL Les Balcons de Belle Plagne la somme de 1 200 (mille-deux-cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la SARL Les Balcons de Belle Plagne est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Les Balcons de Belle Plagne et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2017 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Terrade, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 mars 2017.

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N° 15LY02661

gt


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY02661
Date de la décision : 28/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-02-08-01 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Base d'imposition.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Josiane MEAR
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : MORAND

Origine de la décision
Date de l'import : 11/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-03-28;15ly02661 ?
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