Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Dijon de leur accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010, 2011 et 2012 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1403042 du 12 novembre 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 janvier 2016 et 26 janvier 2017, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 12 novembre 2015 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- en dépit des nombreuses démarches effectuées, il n'a pu vendre son habitation principale afin de pouvoir procéder à la construction du nouveau logement ; le dépôt d'une déclaration d'achèvement des travaux n'est pas requis par l'article 200 quaterdecies du code général des impôts ;
- conformément à ce que prévoit la doctrine exprimée dans l'instruction 5 B-14-08 n° 35 du 10 avril 2008, il a mis en oeuvre toutes les diligences utiles pour respecter l'engagement d'occuper le logement à titre de résidence principale dans les délais requis ;
- le contrat de prêt datant de 2009, l'administration ne pouvait exercer son droit de reprise que jusqu'en 2011, sans méconnaître le VI de l'article 200 quaterdecies du code général des impôts.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er juillet 2016 et 2 mars 2017, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;
- les intéressés n'ont pas respecté l'engagement d'affecter à l'habitation principale, au plus tard le 31 décembre de la deuxième année qui suit la conclusion du prêt, le logement devant être construit ; les dispositions de l'article 200 quaterdecies du code général des impôts n'ont pas été respectées ;
- le requérant n'invoque aucun évènement extérieur l'ayant mis dans l'impossibilité de vendre sa résidence principale afin de pouvoir financer la construction d'une maison ; en outre, il ne fournit aucun justificatif permettant de démontrer qu'il aurait passé des annonces en vue de la vente de son habitation principale ; il ne peut se prévaloir de la doctrine exprimée dans l'instruction 5 B-14-08 n°35 du 10 avril 2008 ;
- l'administration bénéficiait du délai de reprise prévu par l'article L. 169 du livre des procédures fiscales.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public ;
1. Considérant que M. et Mme A... ont souscrit le 3 octobre 2009 un contrat de prêt d'un montant de 171 500 euros en vue de l'acquisition d'un terrain sis à Hauteville (21121) en vue de construire leur nouvelle résidence principale ; qu'en application des dispositions de l'article 200 quaterdecies du code général des impôts, ils ont mentionné dans leurs déclarations de revenus des années 2010, 2011 et 2012, au titre des charges ouvrant droit à crédit d'impôt, les sommes de, respectivement, 6 373 euros, 5 915 euros et 5 439 euros, représentant des intérêts d'emprunt, pour lesquelles ils ont obtenu des crédits d'impôt de, respectivement, 2 549 euros, 1 183 euros et 1 088 euros ; qu'à l'issue d'un contrôle sur pièces dont ils ont fait l'objet, par une proposition de rectification du 12 novembre 2013, l'administration a remis en cause ces crédits d'impôt au motif que le logement n'avait pas été affecté à l'habitation principale des intéressés au 31 décembre 2011 ; que l'administration n'ayant fait que partiellement droit à leur réclamation, M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Dijon de leur accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010, 2011 et 2012 et des pénalités correspondantes ; que M. A... relève appel du jugement du 12 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 200 quaterdecies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années des impositions en litige : " I.-Les contribuables fiscalement domiciliés en France au sens de l'article 4 B qui acquièrent un logement affecté à leur habitation principale, directement ou par l'intermédiaire d'une société non soumise à l'impôt sur les sociétés qui le met gratuitement à leur disposition, peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt sur le revenu au titre des intérêts des prêts contractés auprès d'un établissement financier à raison de cette opération, tels que définis à l'article L. 312-2 du code de la consommation. / Le premier alinéa s'applique également aux contribuables qui font construire un logement destiné à être affecté, dès son achèvement, à leur habitation principale. Dans cette situation, les prêts mentionnés au premier alinéa s'entendent de ceux qui sont contractés en vue de financer l'acquisition du terrain et les dépenses de construction. / (...) VI. -Le I s'applique à la condition que le logement faisant l'objet du prêt soit, à la date de paiement des intérêts, affecté à l'usage d'habitation principale du contribuable. / Toutefois, le I s'applique également aux intérêts versés avant l'achèvement du logement que le contribuable fait construire ou qu'il acquiert en l'état futur d'achèvement, lorsque celui-ci prend l'engagement d'affecter ce logement à son habitation principale au plus tard le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de la conclusion du contrat de prêt. / Lorsque cet engagement n'est pas respecté, le crédit d'impôt obtenu par le contribuable fait l'objet d'une reprise au titre de l'année au cours de laquelle l'engagement n'a pas été respecté et au plus tard au titre de la deuxième année qui suit celle de la conclusion du contrat de prêt. Il est fait application, le cas échéant, des sanctions prévues à l'article 1729. (...) " ;
3. Considérant qu'en application de ces dispositions, le bénéfice du crédit d'impôt attaché aux intérêts d'un emprunt contracté pour l'acquisition d'une habitation principale est subordonné à la condition que le logement soit occupé à ce titre à la date de paiement des intérêts d'emprunt ; que, toutefois, le deuxième alinéa du VI de l'article 200 quaterdecies institue une dérogation permettant d'accorder le bénéfice de ce crédit d'impôt aux acquéreurs d'un logement à usage d'habitation principale qui n'est pas encore achevé, à la condition que les intéressés s'engagent à occuper ledit logement au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de la conclusion du contrat de prêt immobilier ;
Sur l'application de la loi fiscale :
4. Considérant, en premier lieu, que M. et Mme A... ont souscrit un contrat de prêt, le 3 octobre 2009, en vue d'acquérir un terrain pour construire leur nouvelle résidence principale ; que pour pouvoir bénéficier du crédit d'impôt prévu par les dispositions du I de l'article 200 quaterdecies du code général des impôts au titre des intérêts de leur emprunt, les intéressés se sont engagés à occuper leur nouveau logement à titre de résidence principale, au plus tard, le 31 décembre 2011 ; que toutefois, il est constant qu'à cette date M. A... avait encore sa résidence principale au 17 rue Albert Thomas à Chenôve ; qu'ainsi, l'intéressé ne remplissait pas, au 31 décembre 2011, la condition d'affectation du logement en cause à son habitation principale ; que s'il fait valoir qu'en dépit de nombreuses démarches, il n'a pas réussi à vendre sa résidence principale, ce qui constituait un préalable à l'engagement des travaux de construction de sa nouvelle résidence, une telle circonstance demeure sans influence sur l'absence de respect, par l'intéressé, des conditions fixées par la loi pour bénéficier du crédit d'impôt en litige ; que dans ces conditions, et alors même, ainsi qu'il le fait valoir, que l'administration ne pouvait légalement exiger qu'il produise une déclaration d'achèvement des travaux, M. A... n'est pas fondé à se prévaloir de l'article 200 quaterdecies du code général des impôts pour obtenir la décharge des impositions en litige ;
5. Considérant, en second lieu, qu'en l'espèce, le contrat de prêt ayant été conclu en 2009 et l'engagement pris par M. A...n'ayant jamais été respecté, l'administration pouvait, comme elle l'a fait, exercer son droit de reprise du crédit d'impôt des années 2010, 2011 et 2012, et non, comme le soutient le contribuable, des seules années 2010 et 2011 ;
Sur l'interprétation administrative de la loi fiscale :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. (...). " ;
7. Considérant que le requérant entend se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des dispositions du paragraphe n° 35 de l'instruction fiscale n° BOI 5 B-14-08 qui instituent une tolérance quant au non-respect de la condition d'affectation du logement à l'habitation principale dès lors que le contribuable a " mis en oeuvre toutes les diligences utiles pour respecter son engagement " ;
8. Considérant que M. A..., qui résidait encore dans sa maison située au 17 rue Albert Thomas à Chenôve, fait valoir que, malgré ses nombreuses démarches, il n'est pas parvenu à vendre cette maison, alors même qu'il s'agissait d'un préalable indispensable à la construction de son nouveau logement ; que s'il produit plusieurs annonces concernant la vente de ce bien, publiées au cours de l'année 2011, ainsi qu'une réponse à l'annonce publiée sur le site Le Bon Coin, demandant des précisions sur ce bien, ces documents ne suffisent pas à établir que l'intéressé a accompli toutes les diligences pouvant justifier le défaut de respect de son engagement d'avoir fait de son nouveau logement sa résidence principale au 31 décembre de la deuxième année suivant la souscription de l'emprunt immobilier ; que, par suite, le requérant ne remplissait pas les conditions requises pour bénéficier de la tolérance instituée par l'instruction précitée :
9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que par voie de conséquence, doivent être rejetées, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'ayant pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 3 mai 2017 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Pourny, président-assesseur,
Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 mai 2017.
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N° 16LY00130