Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Le syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et le syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères" ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2013 par lequel le maire de la commune de Saint-Bon-Tarentaise a délivré un permis de construire à Mme E... en vue de régulariser la démolition d'un chalet et la construction d'un immeuble d'habitation sur un terrain situé au lieu-dit Petit Morion.
Par un jugement n° 1304662 du 7 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ce permis de construire.
Procédure devant la cour
I) Par une requête et des mémoires en réplique enregistrés les 5 août 2015, 4 avril 2016 et 12 décembre 2017 sous le n° 15LY02748, la commune de Saint-Bon-Tarentaise, devenue commune nouvelle de Courchevel, représentée par la SELARL Lex Urba, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 juillet 2015 ;
2°) de rejeter la demande du syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et du syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères" devant le tribunal administratif de Grenoble tendant à l'annulation du permis de construire du 16 juillet 2013 ;
3°) de mettre à la charge du syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et du syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères" une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :
- c'est à tort que le tribunal administratif a retenu les moyens tirés de la méconnaissance du plan d'occupation des sols (POS) de 2006 remis en vigueur du fait de l'annulation du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune alors que la cour a annulé le jugement du tribunal administratif de Grenoble qui avait annulé la délibération du 17 novembre 2011 portant approbation du PLU ;
- les moyens des intimés relatifs à la violation par le projet du PLU de 2011 ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense enregistrés les 10 décembre 2015 et 18 décembre 2017 et un mémoire enregistré le 5 janvier 2018 qui n'a pas été communiqué, le syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et le syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères", représentés par la SCP d'avocats CGCB et associés, concluent au rejet de la requête et demandent qu'une somme de 2 000 euros leur soit respectivement versée par la commune de Saint-Bon-Tarentaise au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent, dans le dernier état de leurs écritures, que :
- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
- le projet autorisé méconnaît les articles UC3, UC7, UC9, UC10 et UC12 du règlement du PLU approuvé le 17 novembre 2011, modifié le 3 avril 2013.
Par des mémoires enregistrés les 12 juillet et 19 décembre 2017, ainsi qu'un mémoire enregistré le 5 janvier 2018 qui n'a pas été communiqué, Mme C... E..., représentée par la SELARL CDMF Avocats affaires publiques, demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 juillet 2015, de rejeter la demande du syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et du syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères" dirigée contre le permis de construire du 16 juillet 2013 et de mettre à leur charge solidaire une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a annulé son permis de construire à raison de la violation du POS remis en vigueur alors que le jugement ayant annulé le PLU de la commune a lui-même été annulé ;
- que les moyens de la demande du syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et du syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères" ne sont pas fondés, la production du jugement du tribunal de grande instance d'Albertville du 31 mars 2017 permettant en tout état de cause de régulariser le projet au regard des exigences de l'article 3 du règlement de la zone.
II) Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 3 septembre 2015 et 19 décembre 2017 sous le n° 15LY03033, ainsi qu'un mémoire enregistré le 5 janvier 2018 qui n'a pas été communiqué, Mme C... E..., représentée par la SELARL CDMF Avocats affaires publiques, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 juillet 2015 ;
2°) de rejeter la demande du syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et du syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères" devant le tribunal administratif de Grenoble tendant à l'annulation du permis de construire du 16 juillet 2013 ;
3°) de mettre à la charge solidaire du syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et du syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères" la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :
- la cour ayant annulé le jugement du tribunal administratif de Grenoble qui avait annulé la délibération du 17 novembre 2011 approuvant le PLU de la commune, c'est à tort que le tribunal administratif a retenu les moyens tirés de la méconnaissance du POS de 2006 remis en vigueur du fait de ce jugement ;
- les moyens des intimés relatifs à la méconnaissance des articles R. 431-7 a) et R. 431-10 du code de l'urbanisme et à la violation par le projet du PLU de 2011 ne sont pas fondés, la production du jugement du tribunal de grande instance d'Albertville du 31 mars 2017 permettant en tout état de cause de régulariser le projet au regard des exigences de l'article 3 du règlement de la zone.
Par des mémoires en défense enregistrés les 10 décembre 2015 et 18 décembre 2017 et un mémoire enregistré le 5 janvier 2018 qui n'a pas été communiqué, le syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et le syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères", représentés par la SCP d'avocats CGCB et associés, concluent au rejet de la requête et demandent qu'une somme de 2 000 euros leur soit respectivement versée par Mme E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent, dans le dernier état de leurs écritures, que :
- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
- le projet autorisé méconnaît les articles UC3, UC7, UC9, UC10 et UC12 du PLU approuvé le 17 novembre 2011, modifié le 3 avril 2013.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;
- et les observations de Me D... pour la commune nouvelle de Courchevel, celles de Me A... pour Mme E..., ainsi que celles de Me B... pour le syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et le syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères" ;
Et après avoir pris connaissance des notes en délibéré présentées dans les deux instances pour Mme E..., enregistrées le 12 février 2018 ;
1. Considérant que, par arrêté du 16 juillet 2013, le maire de la commune de Saint-Bon-Tarentaise, à laquelle s'est substituée la commune nouvelle de Courchevel le 1er janvier 2017, a délivré un permis de construire à Mme E... en vue de la régularisation de la démolition d'un chalet existant et de la construction d'un immeuble de six logements sur un terrain situé au lieu-dit Petit Morion, en zone UC du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune approuvé par délibération du 17 novembre 2011 ; que la commune nouvelle de Courchevel et Mme E... relèvent chacune appel du jugement du 9 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé ce permis de construire à la demande du syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et du syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères" ;
2. Considérant que les deux requêtes sont relatives au même projet, sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par le même arrêt ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Considérant que, pour annuler le permis de construire du 16 juillet 2013 délivré sous l'empire du PLU de Saint-Bon-Tarentaise approuvé le 17 novembre 2011, le tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur l'annulation, par un jugement du 22 avril 2014, de la délibération ayant approuvé ce PLU et sur la méconnaissance par le projet des dispositions du règlement de la zone UD du plan d'occupation des sols de 1996 ainsi remis en vigueur ; que, cependant, la cour a, par un arrêt du 7 novembre 2017, annulé ce jugement du 22 avril 2014 et rejeté les demandes dirigées contre le PLU de Saint-Bon-Tarentaise approuvé en 2011 ; que, par suite, la commune nouvelle de Courchevel et Mme E... sont fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur la méconnaissance des articles 7, 10 et 14 du règlement de la zone UD du POS de 1996 pour annuler le permis de construire en litige ;
4. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et le syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères" ;
Sur les autres moyens soulevés par les intimés :
En ce qui concerne l'implantation des constructions :
5. Considérant qu'aux termes de l'article UC7 du plan local d'urbanisme de Saint-Bon-Tarentaise relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives et aux pistes de ski : " 1. Les constructions doivent être implantées à une distance qui, comptée horizontalement entre tous points de la construction et le point le plus proche de la limite séparative, est supérieure ou égale à la moitié de la différence d'altitude entre ces deux points sans pouvoir être inférieure à 4 mètres (...). / 3. A l'exception des secteurs UC11, UC12, UC13 et UClm, peuvent en outre être implantées jusqu'en limite séparative : / 3.1 - les constructions n'excédant pas à la fois 3,5 mètres de hauteur par rapport au terrain naturel et le niveau du terrain naturel en limite séparative / 3.2 - les passerelles d'accès aux constructions et les escaliers à l'air libre / 3. - les constructions, travaux ou ouvrages hors champ d'application du permis de construire (...) / 6. Pour l'application du présent article, ne sont pas pris en compte : / 6.1 - les parties enterrées des constructions sous le terrain naturel (...). / 6.2 - les débords de toit et de balcon, les marquises, auvents, vérandas, oriels, porches, décors architecturaux et en général tous éléments architectoniques dans la limite d'un mètre (...). / 6.3 - les éléments techniques tels que cheminées, systèmes de ventilation et de climatisation, antennes, ainsi que les machineries et cages d'ascenseur... ainsi que les éléments décoratifs tels que épis, clochetons... " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier de la notice, du plan de masse PC2/A et du plan de façade PC5/C produits à l'appui de la demande de permis de construire en litige, que le projet prévoit la réalisation, par rehaussement et enrochement du terrain naturel sur une emprise de plus de 45 m², d'un ouvrage à usage de parking extérieur ; que, contrairement à ce que soutient Mme E..., cet ouvrage, alors même que sa construction impose la réalisation d'un mur de soutènement, n'est pas au nombre de ceux que les dispositions de l'article R. 421-3 du code de l'urbanisme dispensent de toute formalité ; que cet ouvrage est situé à moins de 4 m des limites séparatives nord et ouest du terrain d'assiette du projet en litige et excède de plusieurs mètres le niveau du terrain naturel en limite séparative ; que, dans ces conditions, les syndicats de copropriétaires intimés sont fondés à soutenir que le permis de construire du 16 juillet 2013 a été délivré en méconnaissance des dispositions de l'article UC7 du PLU applicable ;
En ce qui concerne l'emprise des constructions :
7. Considérant qu'aux termes de l'article UC9 du règlement du PLU de Saint-Bon-Tarentaise approuvé le 17 novembre 2011 : " Le coefficient d'emprise au sol est de 0,25 " ; qu'en l'absence de prescriptions particulières dans le document d'urbanisme précisant la portée de cette notion, l'emprise au sol s'entend, en principe, comme la projection verticale du volume de la construction, tous débords et surplombs inclus ; qu'en vertu du point 16 de l'article 9 des dispositions générales du PLU de Saint-Bon-Tarentaise dans sa rédaction résultant de la délibération du 19 juillet 2012 portant modification simplifiée n° 2 de ce PLU, l'emprise au sol " correspond à la surface de la construction édifiée au sol calculée au nu extérieur de la construction " ; que si une délibération du 3 avril 2013 portant modification n°1 de ce PLU a entendu préciser en d'autres termes la notion d'emprise au sol, cette délibération a été annulée par un jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 juin 2015 devenu définitif ;
8. Considérant que s'il est constant que le projet faisant l'objet du permis de construire en litige retient une emprise au sol de 230 m² correspondant au quart de la superficie de son terrain d'assiette, il ressort des pièces du dossier, notamment du plan de masse PC2/A, du plan de rez-de-chaussée PC2/C, du plan du 1er étage PC2/D et du plan de coupe nord-sud PC3/B que ce calcul ne prend pas en compte les terrasses et l'espace de stationnement mentionné au point 6, que surplombent, sur une quarantaine de m², divers éléments de construction en saillie formant par leur aspect un ensemble qui s'incorpore au gros-oeuvre de la construction, notamment les balcons et terrasses couverts du premier étage ; que ce calcul ne prend pas davantage en compte l'espace destiné au stationnement de deux véhicules auquel mène une courte rampe d'accès, lequel, s'il se trouve sous le niveau du terrain naturel et est partiellement recouvert, ne saurait être regardé, ainsi qu'il ressort notamment des plans de coupe nord-sud PC3/B et de façade nord PC5/C le faisant apparaître à un niveau inférieur de quelques dizaines de centimètres seulement au rez-de-chaussée de la construction projetée, comme un ouvrage en sous-sol ; que ces éléments du bâti sont au nombre de ceux qui, eu égard à la généralité des dispositions du PLU ne permettant pas notamment d'exclure la prise en compte des éléments en surplomb, devaient être pris en considération pour déterminer l'emprise au sol de la construction au sens et pour l'application de l'article UC 9 de son règlement ; que sur ces bases et ainsi que le relèvent les intimés, l'emprise au sol de la construction en cause est supérieure à la limite définie à l'article UC 9 précité ;
9. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, les autres moyens soulevés par le syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et le syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères" ne sont pas susceptibles, en l'état du dossier, de fonder l'annulation du permis de construire du 16 juillet 2013 ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune nouvelle de Courchevel et Mme E... ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ce permis de construire ;
Sur les frais d'instance :
11 Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions que la commune nouvelle de Courchevel et Mme E... présentent sur leur fondement à l'encontre des intimés, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge respective de la commune nouvelle de Courchevel et de Mme E... le versement aux intimés d'une somme globale de 2 000 euros au titre des frais que ceux-ci ont exposés ;
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes et conclusions de la commune nouvelle de Courchevel et de Mme E... sont rejetées.
Article 2 : La commune nouvelle de Courchevel et Mme E... verseront, chacune, une somme globale de 2 000 euros au syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et au syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères" au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune nouvelle de Courchevel, à Mme C... E..., au syndicat des copropriétaires de la résidence "les bleuets" et au syndicat des copropriétaires de la résidence "les primevères".
Délibéré après l'audience du 6 février 2018, à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre ;
M. Antoine Gille, président-assesseur ;
Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 mars 2018.
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N° 15LY02748, 15LY03033
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