Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... D... et M. B... D... ont demandé au tribunal administratif de Dijon :
1°) d'annuler la délibération du 14 décembre 2013 par laquelle la commission administrative de l'association foncière de Grosbois-les-Tichey a refusé de faire droit à leur demande tendant au déplacement, sur les parcelles ZA23 et ZA34, du fossé existant en bordure des parcelles ZA49 et ZA52, ensemble la décision du 9 avril 2014 ayant rejeté leur recours gracieux ;
2°) d'enjoindre à l'association, sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'effectuer les travaux de déplacement, sous astreinte ;
3°) de condamner l'association à leur verser une indemnité de 26 000 euros à raison du retard pris par l'association foncière dans l'exécution des travaux ;
4°) de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1401978 du 23 novembre 2015, le tribunal administratif de Dijon a annulé la délibération du 14 décembre 2013 et la décision du 9 avril 2014, a mis à la charge de l'association foncière de Grosbois-les-Tichey le versement d'une somme globale de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens et a rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 21 janvier 2016 et le 27 juillet 2016, MM. A... et B... D..., représentés par Me Clemang, avocat, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 23 novembre 2015 en tant qu'il a rejeté leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
2°) d'enjoindre, sur le fondement de ces dispositions, à l'association foncière de Grosbois-les-Tichey de réaliser les travaux de déplacement du fossé dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard en cas d'inexécution ;
3°) de mettre à la charge de l'association foncière de Grosbois-les-Tichey une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que
- leur requête est recevable ;
- c'est à bon droit que les premiers juges ont annulé pour incompétence la délibération du 13 décembre 2014 et la décision du 9 janvier 2014 ;
- cette délibération et cette décision sont illégales, dès lors que l'association foncière de Grosbois-les-Tichey était tenue, en application des articles 25 et 27 du code rural, de réaliser les travaux décidés par la commission communale d'aménagement foncier en 1987 ;
- 1'association étant en situation de compétence liée à l'égard des décisions prises par la commission communale de remembrement, c'est à tort que les premiers juges ont rejeté les conclusions de leur demande tendant à ce qu'il lui soit enjoint de procéder à l'exécution des travaux connexes au remembrement décidés par la commission communale d'aménagement foncier en 1987 et consistant en la création d'un fossé sur la parcelle ZA 34.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 12 avril 2016 et le 7 septembre 2016, l'association foncière de Grosbois-les-Tichey, représentée par Me Robbe (SCP Desilets-Robbe-Roquel), avocat, conclut :
1°) à titre principal, au rejet pour irrecevabilité de la requête ;
2°) à titre subsidiaire, à ce que la cour :
- renvoie, en tant que de besoin, au juge judiciaire la question préjudicielle de la propriété de l'assiette du fossé existant ;
- constate que la prescription quadriennale est acquise à compter du 24 février 2010 ;
- annule le jugement du tribunal administratif de Dijon du 23 novembre 2015 en ce qu'il a annulé la délibération du 14 décembre 2013 et la décision du 9 janvier 2014 et en ce qu'il l'a condamnée à verser à MM. D... la somme de 1 000 euros en application de 1'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
- rejette les demandes de MM. D... ;
- mette à la charge de MM. D... une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête est irrecevable en ce que les requérants n'ont pas produit le jugement attaqué ;
- c'est à tort que les premiers juges ont annulé pour incompétence la délibération du 14 décembre 2013 alors qu'elle a été adoptée par l'assemblée délibérante, régulièrement composée et convoquée, et que l'original de cette délibération a été signée par l'ensemble des membres du bureau ; la décision du 9 avril 2014 n'avait pas à être contresignée par un autre membre que le président de l'association foncière, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une délibération ;
- à supposer même établi le vice de procédure relevé par les premiers juges, il n'a pas privé les intéressés d'une garantie et n'a pas affecté le sens de la délibération en litige ;
- le moyen tiré de la méconnaissance des articles 25 et 27 du code rural est inopérant, ces articles ayant été abrogés par la loi n° 92-1283 du 11 décembre 1992 ;
- la délibération et la décision en litige sont légales, en ce que le document présenté comme étant le procès verbal de remembrement de la commune n'est pas suffisamment précis pour fonder une obligation de réalisation de travaux pesant sur l'association foncière ;
- MM. D...ne prouvent pas que le fossé dont ils demandent le déplacement se situe sur leur propriété.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code rural et de la pêche maritime ;
- l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires ;
- le décret n° 2006-504 du 3 mai 2006 portant application de l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère,
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me C... substituant Me Robbe, avocat (SCP Desilets-Robbe-Roquel), pour l'association foncière de Grosbois-les-Tichey ;
1. Considérant que M. A... D... et son frère, M. B... D..., sont propriétaires des parcelles boisées cadastrées ZA 49 et ZA 52 situées sur le territoire de la commune de Grosbois-les-Tichey, que longe un fossé creusé par la commune en 1980 pour résorber les inondations ; qu'en juillet 2012, MM. D... ont demandé à l'association foncière de Grosbois-les-Tichey de procéder au déplacement de ce fossé sur les parcelles cadastrées ZA23 et ZA34 appartenant à l'association et situées sur la rive opposée du fossé ; que, par délibération du 14 décembre 2013, le bureau de l'association a refusé de donner une suite favorable à cette demande ; que le recours gracieux exercé par les intéressés contre cette délibération a été rejeté par décision du président de l'association foncière du 9 avril 2014 ; que MM. D... relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Dijon du 23 novembre 2015 en tant qu'il a rejeté leurs conclusions tendant à ce qu'en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, il soit enjoint à l'association foncière d'exécuter les travaux demandés ; que l'association foncière d'aménagement foncier de Grosbois-les-Tichey présente des conclusions incidentes tendant à l'annulation de ce jugement en tant qu'il a annulé la délibération de son bureau du 14 décembre 2013 et la décision de son président du 9 avril 2014 et mis à sa charge le versement d'une somme globale de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Sur la recevabilité de la requête :
2. Considérant que MM. D... ont accompagné leur requête introductive d'instance du jugement attaqué ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par l'association foncière de Grosbois-les-Tichey, tirée de ce que la requête aurait été présentée en méconnaissance des dispositions combinées des articles R. 811-13 et R. 412-1 du code de justice administrative doit être écartée ;
Sur la légalité de la délibération du 14 décembre 2013 et de la décision du 9 janvier 2014 :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-8 du code rural et de la pêche maritime : " La commission communale d'aménagement foncier a qualité, dans le respect des équilibres naturels, pour décider à l'occasion des opérations et dans leur périmètre : (...) 3° Tous travaux d'amélioration foncière connexes à l'aménagement foncier agricole et forestier, tels que ceux qui sont nécessaires à la sauvegarde des équilibres naturels, à la protection des sols ou à la remise en bon état des continuités écologiques (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 133-1 du même code : " Il est constitué entre les propriétaires des parcelles incluses dans un périmètre d'aménagement foncier agricole et forestier, une association foncière chargée de la réalisation, de l'entretien et de la gestion des travaux ou ouvrages mentionnés aux articles L. 123-8 et L. 133-3 à L. 133-5 et, le cas échéant, du recouvrement de la participation des intéressés dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 121-15. (...) " ;
4. Considérant que MM. D... soutiennent que, dans le cadre des opérations de remembrement rural de la commune de Grosbois-les-Tichey, achevé en 1987, la commission communale d'aménagement foncier avait décidé que le fossé situé sur leurs propriétés serait déplacé sur les parcelles cadastrées ZA34 "Bois Richard" ainsi que sur une portion de la parcelle ZA23 et que ces travaux n'ont cependant jamais été réalisés par l'association foncière de Grosbois-les-Tichey ; qu'il résulte du procès verbal de remembrement de la commune que les parcelles ZA23 et ZA34 ont été attribuées à l'association foncière et que l'objet de cette attribution était un "fossé" ; que l'association foncière fait valoir que ces parcelles lui ont été attribuées non en vue d'y déplacer le fossé mais pour y créer une bande de trois mètres le long de l'ouvrage afin de lui permettre d'en assurer l'entretien ; que, toutefois, il résulte du courrier du préfet de la Côte d'Or du 16 avril 2013 adressé aux requérants que le président de l'association foncière lui a confirmé par téléphone que les travaux de déplacement du fossé sur les parcelles ZA23 et ZA34 "sont bien des travaux connexes arrêtés par la commission communale à l'époque du remembrement liant ainsi l'intervention de l'association foncière pour leur réalisation" ; que, par suite, et alors que MM. A... et B... D... démontrent être propriétaires des terrains sur lesquels est situé le fossé, l'association foncière de Grosbois-les-Tichey n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par son jugement du 23 novembre 2015, le tribunal administratif de Dijon a annulé la délibération du 14 décembre 2013 et la décision du 9 février 2014 ;
Sur la prescription quadriennale :
5. Considérant qu'il ressort des écritures des consorts D... que ceux-ci ne contestent pas, en appel, le jugement du tribunal administratif de Dijon du 23 novembre 2015 en tant qu'il a rejeté leurs conclusions indemnitaires, auxquelles ils renoncent expressément en cause d'appel ; que, par suite, les conclusions de l'association foncière de Grosbois-les-Tichey tendant à ce que leur soit opposée la prescription quadriennale doivent être rejetées ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ;
7. Considérant qu'eu égard au motif qui fonde l'annulation de la délibération du 14 décembre 2013 et de la décision du 9 février 2014, MM. D... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leurs conclusions à fin d'injonction présentées sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre à l'association foncière de Grosbois-les-Tichey de procéder aux travaux de déplacement du fossé litigieux des parcelles cadastrées ZA49 et ZA52 sur les parcelles cadastrées ZA23 et ZA34 dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les frais liés au litige :
8. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'association foncière de Grosbois-les-Tichey tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Dijon en tant qu'il a mis à sa charge le versement à MM. D... d'une somme globale de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
9. Considérant, en second lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de MM. D..., qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, le versement de la somme que demande l'association foncière de Grosbois-les-Tichey au titre des frais non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association foncière de Grosbois-les-Tichey la somme que demandent MM. D... en application de ces dispositions dans la présente instance ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'article 3 du jugement du tribunal administratif de Dijon du 23 novembre 2015 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions à fin d'injonction présentées par MM. D... sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative.
Article 2 : Il est enjoint à l'association foncière de Grosbois-les-Tichey de procéder aux travaux de déplacement du fossé situé dans la commune de Grosbois-les-Tichey sur les parcelles cadastrées ZA49 et ZA52 vers les parcelles ZA23 et ZA34.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à M. B... D... et à l'association foncière de Grosbois-les-Tichey.
Copie en sera adressée au préfet de la Côte d'Or.
Délibéré après l'audience du 6 mars 2018, à laquelle siégeaient :
M. Hervé Drouet, président de la formation de jugement,
M. Marc Clément, premier conseiller,
Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère.
Lu en audience publique, le 27 mars 2018.
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N° 16LY00250
mg