Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme E... A... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 dans les rôles de la commune d'Heyrieux et des pénalités correspondantes et de mettre à la charge de l'Etat les dépens de l'instance et la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1502221 du 18 mai 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 18 juillet 2017, M. et Mme E...A..., représentés par Me C..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 18 mai 2017 ;
2°) de leur accorder la décharge des impositions contestées et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la procédure est irrégulière au regard des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, faute pour l'administration fiscale, dès l'envoi de la proposition de rectification, d'avoir annexé ou reproduit les éléments issus du droit de communication ;
- la procédure est irrégulière au regard des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales en ce que, en réponse à la demande du contribuable, l'administration a joint à sa réponse aux observations du contribuable une annexe ne mentionnant en aucun cas les G...détenues ;
- l'administration entend donc fonder un rappel d'imposition important, d'une part, au moyen d'un rapprochement infondé entre les G...détenues par les époux A...et de prétendues SARL PVOLETUS 17, 18 et 19 et, d'autre part, sur la seule base d'un document inexploitable communiqué par EDF et qui, au demeurant, ne mentionne jamais les G...détenues par les époux A...(G...PV122, 123 et 124) ;
- il résulte tant de la loi que de la doctrine administrative 5 B-2-07 du 30 janvier 2007 que la notion même d'investissement productif implique l'acquisition ou la création de moyens d'exploitation permanents ou durables capable de fonctionner de manière autonome ;
- sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, ils sont fondés à se prévaloir de la prise de position formelle résultant d'une décision de dégrèvement du 22 octobre 2015 pour un investissement réalisé dans les mêmes conditions pour l'année 2009.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 janvier 2018 le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête ; il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Menasseyre, présidente assesseure,
- les conclusions de M. Jean-Paul Vallecchia, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant M. et Mme A... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme A... ont imputé sur leur impôt sur le revenu des années 2009 et 2010, sur le fondement des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, une réduction d'impôt résultant d'investissements productifs réalisés en outre-mer par des sociétés en participation PV 122, PV 123, et PV 124 dont ils sont associés, consistant en l'acquisition de panneaux photovoltaïques exploités par les sociétés à responsabilité limitée Pvolteus 17, Pvolteus 18 et Pvolteus 19. A la suite d'un contrôle sur pièces, ces réductions d'impôt ont été remises en cause par l'administration fiscale au motif que ces panneaux photovoltaïques n'ayant ni reçu d'attestation de conformité à la réglementation en vigueur, ni été raccordés au réseau électrique avant la fin de l'année 2009 ou 2010, ils ne pouvaient ouvrir droit à une réduction d'impôt au titre des années 2009 et 2010. M et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 et des pénalités correspondantes. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 18 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. L'article L. 76 B du livre des procédures fiscales dispose : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications.
3. La proposition de rectification en date du 13 décembre 2012 adressée à M. et Mme A... précise, après avoir présenté de façon détaillée et sans opérer de confusion entre les G...dont ils sont associés et la SARL Erivam, chargée de leur gestion, l'opération d'investissement à laquelle les intéressés ont souscrit portant sur des panneaux photovoltaïques, les règles de droit applicables, l'impôt concerné, les années d'imposition ainsi que les motifs de fait sur lesquels l'administration s'est fondée pour remettre en cause les réductions d'impôt accordées au titre de ces investissements. La circonstance que cette proposition de rectification ne précise pas la dénomination sociale des G...est sans incidence sur le caractère suffisant de sa motivation dès lors que cette absence de précision n'a pas pu induire en erreur les contribuables sur la nature des redressements opérés par le service ni ne les a privés de la possibilité de présenter leurs observations, ce qu'ils ont d'ailleurs fait le 12 février 2013. Aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'administration d'annexer à la proposition de rectifications ou d'y reproduire les documents ou renseignements obtenus de tiers et utilisés par le vérificateur pour fonder les rectifications.
4. Il résulte des termes mêmes de la proposition de rectification, notamment de sa page 4, qu'elle comportait l'origine et la teneur des renseignements obtenus auprès d'EDF le 5 juillet 2012. Si M. et Mme A... reprochent à l'administration de ne pas leur avoir communiqué la liste complète des sociétés exploitantes dénommées Pvolteus, ce document leur a été communiqué en annexe de la réponse aux observations du contribuable dont ils n'ont pas retiré le pli et, en tout état de cause le 13 novembre 2013, soit avant la mise en recouvrement intervenue le 31 janvier 2014. Par suite, l'administration n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, ni manqué à son devoir de loyauté.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne la loi fiscale :
5. Aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer, [...] dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 [...]/ La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé . [...] ". Aux termes de l'article 95 K de l'annexe II du même code : " Les investissements productifs neufs réalisés dans les départements d'outre-mer, [...] qui ouvrent droit à la réduction d'impôt prévue au 1 de l'article 199 undecies B du code général des impôts sont les acquisitions ou créations d'immobilisations corporelles, neuves et amortissables, affectées aux activités relevant des secteurs éligibles en vertu des dispositions du I de cet article. ". Aux termes de l'article 95 Q de la même annexe II : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail. ".
6. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B est la date de la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d'outre-mer ; que, dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus. Par suite, s'agissant de l'acquisition de centrales photovoltaïques installées sur les toits des habitations des particuliers et données en location à des sociétés en nom collectif en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique, la date à retenir est celle du raccordement des installations au réseau public d'électricité, dès lors que les centrales photovoltaïques, dont la production d'électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, ne peuvent être effectivement exploitées et par suite productives de revenus qu'à compter de cette date.
7. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable ou à l'administration, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si des dépenses sont éligibles au dispositif de la réduction d'impôt prévue par les dispositions précitées et la date à laquelle le droit à réduction est né.
8. Des panneaux photovoltaïques ne peuvent être effectivement exploités sans être intégrés dans une installation et raccordés au réseau électrique. Après le dépôt d'une demande de raccordement auprès d'Electricité de France (EDF), la conformité aux normes en vigueur de cette installation doit être attestée par le comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité (Consuel), avant qu'une demande de raccordement au réseau électrique ne puisse être déposée. Il résulte de l'instruction, ainsi que l'a indiqué l'administration dans la proposition de rectification adressée à M. et Mme A..., que les centrales photovoltaïques acquises par les sociétés en participation n'étaient pas raccordées au réseau électrique au 31 décembre 2010 et qu'elles n'avaient pas reçu l'attestation de conformité du Consuel. En opposant un tel motif, l'administration n'a pas ajouté de critères aux conditions fixées par la loi fiscale applicable aux années litigieuses mais s'est bornée à mettre en oeuvre les conditions légales auxquelles les investissements réalisés outre-mer sont soumis pour pouvoir être regardés comme étant réalisés au sens des dispositions du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts. M. et Mme A... se bornent à faire valoir la nature des investissements, éligibles au dispositif, ce qui n'est pas contesté, la date à laquelle ils ont procédé aux investissements et la date à laquelle les installations ont été livrées et mises à disposition des sociétés exploitantes, mais ne contestent pas que les investissements en cause ne pouvaient pas être effectivement exploités, donc n'étaient pas productifs de revenus à la date du 31 décembre 2010. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a estimé qu'ils n'étaient pas éligibles au titre de ces années à la réduction d'impôt prévue par l'article 199 undecies B du code général des impôts.
En ce qui concerne la prise de position formelle résultant de la décision de dégrèvement du 22 octobre 2015 :
9. Les contribuables ne sont en droit d'invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, que les prises de position ou appréciations formulées par l'administration avant l'établissement des impositions primitives. Sont dès lors sans portée utile, dans le litige relatif au rehaussement d'une imposition antérieure, les décisions de dégrèvement d'impositions analogues à celle en litige, lorsqu'elles sont postérieures à la mise en recouvrement de l'imposition primitive.
10. Par suite, M. et Mme A... ne sont pas fondés à se prévaloir d'une décision de dégrèvement du 22 octobre 2015, intervenue postérieurement à la mise en recouvrement de l'imposition primitive de l'année 2010, pour contester les cotisations supplémentaires d'impôt sur le reveu auxquelles ils ont été assujettis au titre de cette dernière année.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. et Mme A... la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme E... A...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 25 septembre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Menasseyre, présidente assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
Mme F..., première conseillère,
Mme D..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 16 octobre 2018.
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N° 17LY02801
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