Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer, la décharge, d'une part, des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes et, d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement nos 1701796 - 1701705 du 7 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour
I. - Par une requête, enregistrée le 12 février 2019 sous le n° 19LY00593, et un mémoire, enregistré le 30 septembre 2019, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 décembre 2018 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations primitives d'impôt sur le revenu mis à sa charge au titre des années 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes ainsi que des contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2008 et 2009 et des majorations correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat aux dépens de l'instance.
M. D... soutient que :
- la procédure d'imposition d'office mise en oeuvre par l'administration est irrégulière dès lors que celle-ci n'a pas été précédée de la mise en demeure préalable exigée par l'article L. 67, L. 68 et L. 73 du livre des procédures fiscales ;
- la taxation d'office des crédits bancaires d'origine indéterminée est irrégulière dès lors qu'elle n'a pas été précédée de la demande de justifications exigée par l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ;
- c'est à tort que l'administration fiscale l'a regardé comme ayant transféré le lieu de sa résidence fiscale dès le 1er janvier 2008, ce transfert ayant eu lieu seulement le 1er avril 2008 ;
- dès lors qu'il était résident fiscal suisse au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 mars 2008, l'administration ne pouvait réintégrer dans les bases imposables ni les salaires perçus en tant qu'entraîneur de football en Suisse, ni les honoraires perçus en tant que courtier immobilier en Suisse ;
- il a fait l'objet d'une imposition sur le revenu en Suisse au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 mars 2008 si bien que l'administration ne pouvait lui refuser le bénéfice du crédit d'impôt sur ces revenus au titre de l'année 2008 ;
- au titre de l'année 2009 il ne disposait d'aucun établissement stable en France concernant son activité de courtier en immobilier, celle-ci étant exercée exclusivement en Suisse.
Par des mémoires, enregistrés le 29 juillet 2019 et le 9 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Le ministre de l'action et des comptes publics soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions présentées par M. D... dans son mémoire en réplique tendant à la décharge des rappels de TVA et des compléments de contributions sociales, ainsi que des majorations et intérêts de retard les assortissant, sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables.
II. - Par une requête, enregistrée le 12 février 2019 sous le n° 19LY00594, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 décembre 2018 ;
2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat aux dépens de l'instance.
M. D... soutient que :
- il n'a pas exercé d'activité occulte ;
- l'administration fiscale n'était pas fondée à mettre en oeuvre le droit de reprise spécial de l'article L. 176 du livre des procédures fiscales dès lors qu'il avait déclaré son activité ;
- il a, en tout état de cause, commis une erreur justifiant qu'il ne se soit pas acquitté de ses obligations déclaratives en France.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juillet 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Le ministre de l'action et des comptes publics soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention du 9 septembre 1966 entre la France et la Suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et la fortune, modifiée ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A..., première conseillère,
- et les conclusions de Mme Conesa-Terrade, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme D..., de nationalité suisse, ont fait l'objet, en 2011, d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle portant sur les années 2008 et 2009 au cours duquel ils ont souscrit, à la suite d'une mise en demeure de l'administration, des déclarations de revenus portant la mention " néant " pour chacune des deux années. A l'issue de ce contrôle, l'administration a taxé d'office à l'impôt sur le revenu, sur le fondement du 1° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, les rémunérations perçues en 2008 par M. D... en qualité d'entraineur de l'équipe de football de Carouge (Suisse), les commissions qu'il a perçues en 2008 et jusqu'au 30 septembre 2009 à raison d'une activité indépendante de courtier en immobilier effectuée principalement pour le compte de la société suisse Primogefi, la rémunération salariée qu'il a perçue, après cette date, de cette même société et des sommes créditées sur leurs comptes bancaires qu'elle a regardées comme des revenus d'origine indéterminée. M. D... a, parallèlement, fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre d'une activité occulte d'intermédiaire immobilier portant sur les années 2007, 2008 et 2009 à l'issue de laquelle l'administration a, d'une part, selon la procédure d'évaluation d'office prévue au 1° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, soumis à l'impôt sur le revenu, au titre de l'année 2008, une commission versée par la société française ECC en tant qu'intermédiaire pour la vente d'un terrain situé à Boissey et, d'autre part, taxé d'office cette opération à la taxe sur la valeur ajoutée sur le fondement du 3° de l'article L. 66 du même livre. En conséquence de ces contrôles, M. et Mme D... ont été assujettis, au titre des années 2008 et 2009, à des cotisations d'impôt sur le revenu, lesquelles ont été assorties de la majoration de 40 % prévue au a) du 1 de l'article 1728 du code général des impôts, applicable en cas de défaut de déclaration dans le délai imparti par une mise en demeure. Les droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de M. D... ont été assortis de la majoration de 80 % pour découverte d'une activité occulte prévue au c) du même article. Par un jugement du 7 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble, après les avoir jointes, a rejeté les demandes de M. D... tendant, l'une, à la décharge de l'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes et, l'autre, à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes. Par la requête n° 19LY00593, M. D... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande relative à l'impôt sur le revenu et aux pénalités. Par la requête n° 19LY00594, il relève appel de ce même jugement en tant qu'il a rejeté sa demande relative à la taxe sur la valeur ajoutée et aux pénalités.
2. Les requêtes n° 19LY00593 et n° 19LY00594 concernent le même contribuable et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur les cotisations d'impôt sur le revenu établies au titre des années 2008 et 2009 :
En ce qui concerne l'imposition en France au titre de la période du 1er janvier au 31 mars 2008 :
3. Si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition. Par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer - en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office - si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale.
S'agissant de l'application de la loi fiscale française :
4. Aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française ". Aux termes du 1 de l'article 4 B du même code : " Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a) Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; / b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques. (...) ". Pour l'application des dispositions précitées du a du 1 de l'article 4 B, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles, et le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où celui-ci ne dispose pas de foyer.
5. Il résulte de l'instruction, et notamment des termes non contestés de la proposition de rectification, que M. D... a fait construire en 2007 une maison d'habitation en France à Bossey (Haute-Savoie) dont la livraison est intervenue en novembre 2007 et que M. D... et son épouse ont reçu régulièrement leur courrier à leur adresse en France à compter de 2008, sans qu'aucun ordre de réexpédition n'ait été donné. En outre, les intéressés ont, dans les déclarations de revenus qu'ils ont souscrites en France au titre des années 2008 et 2009 au cours du contrôle, déclaré qu'ils résidaient à l'adresse de Bossey au 1er janvier 2008 sans mentionner un changement d'adresse en cours d'année dans la rubrique prévue à cet effet. La mise en oeuvre par l'administration de son droit de communication a par ailleurs permis de constater qu'un contrat d'abonnement pour la distribution d'eau a été conclu dès le 9 février 2007 auprès de la société Véolia par les époux D..., des consommations significatives ayant été constatées avant le 31 mars 2008, et, qu'un contrat d'abonnement à l'électricité a été souscrit auprès de la société Electricité de France (EDF) pour une mise en service au 18 janvier 2008. Eu égard à la faible distance entre Carouge et Bossey, la circonstance que les enfants de M. D... auraient continué à être scolarisés en Suisse n'est pas déterminante. Enfin, l'attestation de l'office cantonal de la population certifiant que celui-ci a résidé sur le territoire du canton de Genève du 19 septembre 1965 au 31 mars 2008 et les deux bordereaux établis par l'administration fiscale suisse faisant état d'une imposition en Suisse au titre de la période courant du 1er janvier 2008 au 31 mars 2008, concernant d'ailleurs une adresse à Genève, et non à Carouge, où le requérant soutient avoir résidé jusqu'à cette dernière date, ne permettent pas de considérer que la maison d'habitation de Bossey n'était pas le lieu du foyer de M. D... ainsi que les époux l'ont mentionné dans leur déclaration des revenus de l'année 2008. Il suit de là que M. D... doit être regardé comme ayant eu, dès le 1er janvier 2008, son foyer en France au sens du a) du 1 de l'article 4 B du code général des impôts.
S'agissant de l'application de la convention fiscale franco-suisse :
6. Aux termes de l'article 4 de la convention conclue le 9 septembre 1966 entre la France et la Suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune : " 1. Au sens de la présente convention l'expression " résident d'un Etat contractant " désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. 2. Lorsque, selon la disposition du paragraphe 1, une personne physique est considérée comme résident de chacun des Etats contractants, le cas est résolu d'après les règles suivantes : a) Cette personne est considérée comme résident de l'Etat contractant où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent, cette expression désignant le centre des intérêts vitaux, c'est-à-dire le lieu avec lequel les relations personnelles sont les plus étroites ; b) Si l'Etat contractant où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, ou si elle ne dispose d'un foyer d'habitation permanent dans aucun des Etats contractants, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant où elle séjourne de façon habituelle ; / c) Si cette personne séjourne de façon habituelle dans chacun des Etats contractants ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, elle est considérée comme résident de l' Etat contractant dont elle possède la nationalité (...) / 4. Lorsqu'une personne physique a transféré définitivement son domicile d'un Etat contractant dans l'autre, elle cesse d'être assujettie dans le premier Etat aux impôts pour lesquels le domicile fait règle dès l'expiration du jour où s'est accompli le transfert du domicile. L'assujettissement aux impôts pour lesquels le domicile fait règle commence dans l'autre Etat à compter de la même date. (...). La notion de foyer d'habitation permanent mentionné à cet article doit être définie en fonction d'éléments d'appréciation relatifs à la personne du contribuable. Si des éléments patrimoniaux peuvent éventuellement être pris en compte, ils ne peuvent l'être qu'à titre accessoire ".
7. Ainsi qu'il a été dit au point 5 ci-dessus, M. D... doit être regardé comme ayant disposé d'un foyer d'habitation permanent en France dès le 1er janvier 2008. S'il a produit deux bordereaux établis par l'administration fiscale suisse révélant une imposition en Suisse au titre de la période courant du 1er janvier 2008 au 31 mars 2008, ceux-ci sont insuffisants pour estimer qu'il est imposé en Suisse à raison de son domicile ou de sa résidence, et ainsi le faire regarder comme ayant eu au cours de ladite période la qualité de résident suisse au sens du 1 de l'article 4 de la convention fiscale franco-suisse. Dès lors, le moyen tiré de ce qu'il aurait également la qualité de résident suisse au sens de cette convention au titre de la période du 1er janvier au 31 mars 2008 doit être écarté.
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
8. Aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : 1° à l'impôt sur le revenu, les contribuables qui n'ont pas déposé dans le délai légal la déclaration d'ensemble de leurs revenus (...) sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 67 ". L'article L. 67 du même livre dispose que : " La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure ". Aux termes de l'article L. 68 du même livre : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure ".
9. Si M. D... conteste avoir reçu des mises en demeure lui impartissant un délai de trente jours aux fins de souscrire ses déclarations d'impôt sur le revenu au titre des années 2008 et 2009, et soutient, qu'en tout état de cause, l'administration ne démontre pas leur date de notification, l'administration a produit, une nouvelle fois, à l'appui de son mémoire du 9 octobre 2019 une copie de ces mises en demeure, mentionnant le délai de trente jours à compter de leur réception, et faisant chacune apparaître de façon manuscrite qu'elles ont été remises en mains propres le 25 janvier 2011, M. D... ayant apposé sa signature sous cette mention. Ainsi, lorsque l'administration a réceptionné les déclarations de revenus de M. D... le 28 février 2011, le délai imparti pour les souscrire était expiré et l'administration était ainsi fondée à mettre en oeuvre la procédure de taxation d'office.
10. M. D... n'ayant, par ailleurs, pas fait l'objet d'une taxation d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, le moyen tiré de ce que la procédure serait irrégulière faute d'envoi de la demande de justifications prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales doit être écarté.
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
11. Aux termes de l'article 25 de la convention franco-suisse déjà mentionnée : " Il est entendu que la double imposition sera évitée de la manière suivante : A. En ce qui concerne la France : 1. Nonobstant toute autre disposition de la présente convention, les revenus qui sont imposables ou ne sont imposables qu'en Suisse conformément aux dispositions de la convention, et qui constituent des revenus imposables d'un résident de France, sont pris en compte pour le calcul de l'impôt français lorsqu'ils ne sont pas exemptés de l'impôt sur les sociétés en application de la législation interne française. Dans ce cas, l'impôt suisse n'est pas déductible de ces revenus, mais le résident de France a droit, sous réserve des conditions et limites prévues aux a) et b), à un crédit d'impôt imputable sur l'impôt français. Ce crédit d'impôt est égal : a) pour les revenus non mentionnés au par. 1, b, au montant de l'impôt français correspondant à ces revenus à condition que le résident de France soit soumis à l'impôt suisse à raison de ces revenus ; b) pour les revenus visés à l'al. 2 du par. 2 de l'art. 6, pour les revenus soumis à l'impôt français sur les sociétés visés à l'art. 7 et pour les revenus visés aux art. 11 et 13, aux par. 1 et 2 de l'art. 15, au par. 3 de l'art. 17, à l'art. 18, et aux par. 1 et 2 de l'art. 19, au montant de l'impôt payé en Suisse, conformément aux dispositions de ces articles ; toutefois, ce crédit d'impôt ne peut excéder le montant de l'impôt français correspondant à ces revenus. (...) ".
12. En premier lieu, s'agissant des salaires perçus de la société Primogefi, l'administration a admis que M. D... avait été imposé à l'impôt sur le revenu à ce titre et lui a accordé un crédit d'impôt en vue d'éliminer la double imposition, en application de l'article 25 de la convention, ce que M. D... ne critique pas.
13. En deuxième lieu, s'agissant des honoraires perçus de la société Primogefi et de son activité d'entraîneur de l'équipe de football de Carouge, M. D... se prévaut du 4 de l'article 4 de la convention franco-suisse déjà mentionnée, aux termes duquel : " Lorsqu'une personne physique a transféré définitivement son domicile d'un Etat contractant dans l'autre, elle cesse d'être assujettie dans le premier Etat aux impôts pour lesquels le domicile fait règle dès l'expiration du jour où s'est accompli le transfert du domicile. ". Toutefois, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, son domicile a été transféré en France dès le 1er janvier 2008. Le moyen tiré de la méconnaissance de cette stipulation est donc inopérant. M. D... ne soutient par ailleurs pas avoir disposé de façon habituelle d'une base fixe en Suisse pour l'exercice de cette activité conformément au 1 de l'article 16 de la même convention. Le moyen tiré de ce que les sommes perçues pendant cette période au titre de ces activités doivent être soustraites de ses bases imposables doit, par suite, être écarté.
14. En dernier lieu, s'agissant de son activité de courtier en immobilier, M. D... se prévaut de l'article 7 de la convention franco-suisse, aux termes duquel : " Les bénéfices d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise exerce son activité d'une telle façon, les bénéfices de l'entreprise sont imposables dans l'autre Etat, mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables audit établissement stable ". Devant être regardé, ainsi qu'il a été dit, comme résident fiscal français à compter du 1er janvier 2008, il ne peut utilement soutenir qu'il ne disposait pas, au cours des années en litige, d'un établissement stable en France au sens de ces dispositions. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que M. D... aurait disposé d'un établissement stable en Suisse pour l'exercice de son activité de courtier en immobilier.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... a été à bon droit imposé en France à raison des revenus mentionnés ci-dessus au titre des années 2008 et 2009.
Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008 :
16. Pour taxer d'office M. D... à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, l'administration a retenu que l'intéressé s'était vu payer par la société ECC, à laquelle il avait eu recours pour faire construire sa maison d'habitation à Bossey, des honoraires comme apporteur d'affaires, réglés sous la forme d'avantages en nature en 2007 et en 2008, sans qu'il ait déposé, dans le délai légal, les déclarations qu'il était tenu de souscrire ou n'ait fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce.
17. Aux termes de l'article L. 176 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable : " Pour les taxes sur le chiffre d'affaires, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible conformément aux dispositions du 2 de l'article 269 du code général des impôts. (...) Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle la taxe est devenue exigible conformément aux dispositions du 2 de l'article 269 du code général des impôts (...) lorsque le contribuable exerce une activité occulte. L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite ".
18. Dans le cas où un contribuable n'a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, l'administration doit être réputée apporter la preuve, qui lui incombe, de l'exercice occulte de l'activité professionnelle si le contribuable n'est pas lui-même en mesure d'établir qu'il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ses obligations déclaratives.
19. Il résulte de la combinaison des dispositions des articles 256, 256 A et 259 A du code général des impôts, dans leurs rédactions applicables, d'une part, que sont notamment soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel, c'est-à-dire, notamment, les personnes qui effectuent de manière indépendante une activité économique, quels que soient leur statut juridique, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention et, d'autre part, qu'est situé en France le lieu des prestations de services se rattachant à un bien immeuble situé en France. Aux termes de l'article 269 du même code, dans sa rédaction applicable : " 1. Le fait générateur de la taxe se produit : a) Au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué ; (...) 2. La taxe est exigible : (...) c) Pour les prestations de services, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits ".
20. En l'espèce, il résulte de l'instruction, que M. D... est intervenu comme apporteur d'affaires au bénéfice de la société ECC, dans le cadre de la construction d'un bien immobilier situé en France et a perçu en contrepartie de cette prestation une rémunération de 65 963,48 euros en 2007 et de 19 036,52 euros en 2008. Une telle prestation de service, qui présente un lien suffisamment direct avec un bien immeuble, relève de celles se rattachant à un bien immeuble au sens de l'article 259 A du code général des impôts. M. D... était donc soumis à des obligations déclaratives à raison de cette activité au titre des années 2007 et 2008. Il est constant que M. D... n'a souscrit aucune déclaration de taxe sur la valeur ajoutée auprès du service des impôts compétent en France, ni n'a déclaré cette activité auprès d'un centre de formalité des entreprises ou au greffe d'un tribunal de commerce.
21. En invoquant les termes des dispositions des articles 290 et 852 du code général des impôts, dont le contenu ne pouvait raisonnablement lui laisser penser qu'il était dispensé de déclarer son activité en France, et le caractère isolé de l'opération en cause, M. D..., qui a facturé les sommes en cause d'un montant élevé et qui est professionnel de l'intermédiation en matière immobilière, ne peut être regardé comme justifiant que son manquement à ses obligations déclaratives résulterait d'une erreur. Dans ces conditions, l'administration était fondée à regarder l'activité de M. D... comme une activité occulte rendant applicable le droit de reprise spécial jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle la taxe était devenue exigible.
22. Si M. D... entend se prévaloir de l'instruction administrative du 12 septembre 2012, BOI-CF-PGR-10-70 n° 20, qui dispose que : " dans l'hypothèse où le contribuable a effectué la déclaration auprès d'un centre différent de celui dont il relevait, le délai spécial ne s'applique pas ", la " caisse cantonale genevoise de compensation " auprès de laquelle M. D... est affilié depuis le 5 janvier 2008 ne constitue pas un " centre de formalités des entreprises " au sens de l'annexe II au code général des impôts dont la doctrine précitée ne donne pas de définition autonome. Dans ces conditions, à défaut de remplir l'ensemble des conditions posées par celle-ci, M. D... n'est pas fondé à demander l'application de la mesure de tempérament qu'il invoque.
23. Il suit de là que le délai de reprise spécial n'était pas expiré, le 10 octobre 2011, date à laquelle les droits de taxe sur la valeur ajoutée en litige ont été mis à la charge de M. D... par avis de mise en recouvrement.
24. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, et en tout état de cause, ses conclusions tendant à la décharge des contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2008 et 2009 et des majorations correspondantes. Doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que, en tout état de cause, celles relatives aux dépens de l'instance.
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. D... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 18 mars 2021, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Evrard, présidente assesseure,
Mme A..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2021.
Nos 19LY00593 - 19LY00594 2
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