Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme D... A... et M. E... A... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1702127 du 21 janvier 2020, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 mars 2020 et le 30 novembre 2020, M. et Mme A..., représentés par Me Blanc, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) à titre principal, de prononcer la décharge de cette imposition et des pénalités correspondantes et, à titre subsidiaire, de prononcer la décharge des intérêts de retard pour un montant de 654 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, les dispositions du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts ne sont pas applicables au présent litige ;
- le 2° quater du II de l'article 156 du code général des impôts ne prévoit aucune condition restrictive à son application autre que celle d'un plafond annuel de 25 000 euros ; au surplus, la doctrine administrative admet que les nus-propriétaires peuvent déduire de leur revenu global les dépenses dont ils supportent effectivement la charge même lorsqu'elles ne leur incombent pas ;
- en appliquant des intérêts de retard, l'administration a méconnu le 2° du II de l'article 1727 du code général des impôts.
Par des mémoires, enregistrés le 5 octobre 2020 et le 27 septembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 28 septembre 2021 la clôture d'instruction a été fixée au 28 octobre 2021 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lesieux, première conseillère,
- et les conclusions de Mme Vinet, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Dans leurs déclarations d'impôt sur le revenu, souscrites au titre des années 2012 et 2013, M. et Mme A... ont porté en charges déductibles de leurs revenus imposables, dans la limite du plafond annuel de 25 000 euros prévu au 2° quater du II de l'article 156 du code général des impôts alors applicable, les dépenses de grosses réparations supportées par leurs deux enfants rattachés au foyer fiscal, Simon pour l'année 2012, et F..., pour les deux années, à raison d'un immeuble situé à Gimeaux (Puy-de-Dôme) dont chacun détenait 1/9ème de la nue-propriété en indivision à la suite d'une donation-partage consentie par leur grand-mère. A l'issue d'un contrôle sur pièces, l'administration estimant que les enfants n'étaient tenus aux charges qu'à proportion de leurs droits respectifs dans l'indivision a, d'une part, réintégré dans la base imposable de M. et Mme A... de l'année 2013 la différence entre les charges déduites au titre des dépenses de grosses réparations supportées par Pierre-Louis et le montant correspondant à sa quote-part d'indivision et, d'autre part, annulé le report sur l'année 2013 de l'excédent de charges déductibles de l'année 2012 remis en cause pour les deux enfants. Le complément d'impôt sur le revenu en résultant pour M. et Mme A... au titre de l'année 2013 a été assorti des intérêts de retard et de la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du code général des impôts. Par un jugement du 21 janvier 2020, dont M. et Mme A... relèvent appel, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande tendant à la décharge de cette imposition et des pénalités correspondantes.
Sur les conclusions principales concernant l'impôt sur le revenu :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 13 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu. / 2. Le revenu global net annuel servant de base à l'impôt sur le revenu est déterminé en totalisant les bénéfices ou revenus nets visés aux I à VII bis et au 1 du VII ter de la 1re sous-section de la présente section ainsi que les plus-values et créances mentionnées à l'article 167 bis, compte tenu, le cas échéant, du montant des déficits visés aux I et I bis de l'article 156, des charges énumérées au II dudit article et de l'abattement prévu à l'article 157 bis. / 3. Le bénéfice ou revenu net de chacune des catégories de revenus visées au 2 est déterminé distinctement suivant les règles propres à chacune d'elles. / Le résultat d'ensemble de chaque catégorie de revenus est obtenu en totalisant, s'il y a lieu, le bénéfice ou revenu afférent à chacune des entreprises, exploitations ou professions ressortissant à cette catégorie et déterminé dans les conditions prévues pour cette dernière (...) ". Le I. de l'article 156 de ce code autorise, sous certaines conditions, que soit déduit du revenu global d'un contribuable, le " déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ". Le II. de cet article énumère les charges qui sont déductibles du revenu global " lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories ".
3. Il résulte de ces dispositions que, d'une part, le revenu net global annuel servant de base à l'impôt sur le revenu est déterminé en totalisant les bénéfices ou revenus nets catégoriels perçus par chacun des membres du foyer fiscal, d'autre part, les bénéfices ou revenus nets de chaque catégorie sont déterminés distinctement d'après les règles propres à chacune d'elles et enfin, ne sont directement déductibles du revenu global que les charges limitativement énumérées par le II. de l'article 156.
4. A cet égard, l'article 156 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose que : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés et aux capitaux que possèdent les membres du foyer fiscal désignés aux 1 et 3 de l'article 6, aux professions qu'ils exercent, aux traitements, salaires, pensions et rentes viagères dont ils jouissent ainsi qu'aux bénéfices de toutes opérations lucratives auxquelles ils se livrent, sous déduction : (...) II. Des charges ci-après lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories : (...) 2° quater Sur option irrévocable du contribuable entraînant renoncement à leur prise en compte pour l'évaluation de ses revenus fonciers, les dépenses effectivement supportées par les nus-propriétaires au titre de travaux payés en application de l' article 605 du code civil, lorsque le démembrement de propriété d'un immeuble bâti résulte de succession ou de donation entre vifs, effectuée sans charge ni condition et consentie entre parents jusqu'au quatrième degré inclusivement. Ces dépenses peuvent être déduites dans la limite annuelle de 25 000 €. La fraction des dépenses excédant cette limite peut être déduite, dans les mêmes conditions, au titre des dix années suivantes (...) ".
5. Il résulte de l'instruction que Mme C... B... a, en 2008, consenti, à deux de ses enfants et trois de ses petits-enfants, une donation-partage portant sur la nue-propriété d'un ensemble immobilier bâti à Gimeaux (Puy-de-Dôme). En 2012, Simon et F..., enfants majeurs G... A... et de M. E... A..., rattachés au foyer fiscal de leurs parents et détenant chacun 1/9ème de l'indivision, ont financé des travaux de grosses réparations sur ce bien à hauteur de 28 872 euros. En 2013, F... a pris à sa charge 18 385 euros au titre de travaux de grosses réparations réalisés sur ce même ensemble immobilier. Au titre de l'année 2012, M. et Mme A... ont déduit de leur revenu global, les charges supportées par leurs deux enfants dans la limite des 25 000 euros annuels prévus par le 2° quater du II de l'article 156 du code général des impôts et ont reporté sur l'année suivante, la déduction de la somme de 3 872 euros. Au titre de l'année 2013, M. et Mme A... ont également déduit de leur revenu global les frais supportés par leur fils F... au cours de cette même année. Il est constant que Simon et F... ont exposé, chacun en ce qui le concerne au titre des années 2012 et/ou 2013, des dépenses de travaux de grosses réparations excédant leurs droits dans l'indivision. Or, les copropriétaires d'un immeuble indivis ne sont tenus aux charges de la propriété qu'à proportion de leurs droits dans l'indivision. Ainsi, en prenant à leur charge des dépenses excédant leurs quotes-parts, Simon et F..., s'ils pouvaient se prévaloir de créances sur l'indivision pour la partie qui excède leur part, ces dernières ne pouvaient étendre les droits à déduction qu'ils tiennent du 2° quater du II. de l'article 156 du code général des impôts au-delà de leurs droits dans l'indivision et sont demeurées sans influence sur le montant du revenu global imposable de leurs parents au titre de l'année litigieuse. Il s'en déduit que c'est à bon droit que l'administration fiscale a partiellement remis en cause les déductions de charges opérées par M. et Mme A... au titre de l'année 2013, correspondant aux travaux de grosses réparations prises en charge par leurs enfants au-delà de leur quote-part dans l'indivision.
6. En second lieu, M. et Mme A... invoquent, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le paragraphe 30 de la doctrine administrative référencée BOI-RFPI-SPEC-30-20-20 relative aux modalités de déduction applicables aux monuments historiques et assimilés lorsque l'immeuble ne procure aucune recette imposable, et dont il résulte notamment qu'" en cas de démembrement du droit de propriété de l'immeuble, chacun des nu-propriétaires et usufruitiers ne peut en principe déduire dans les conditions et limites visées au § 1 que les dépenses dont le paiement lui incombe en vertu des articles 605 et suivants du code civil. Il en résulte notamment que le nu-propriétaire est seulement autorisé, le cas échéant, à demander la déduction des frais de grosses réparations définis à l'article 606 du code civil et des intérêts des emprunts contractés pour le paiement de ces travaux. / Il est toutefois admis qu'ils puissent déduire les dépenses dont ils supportent effectivement la charge même lorsqu'elles ne leur incombent pas en application des dispositions précitées du code civil ". Toutefois, l'ensemble immobilier dont Simon et Pierre-Louis A... sont nus-propriétaires en vertu d'une donation-partage consentie par leur grand-mère, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait la nature d'un monument historique ou assimilés, n'entre pas dans le champ d'application de cette doctrine, au demeurant invoquée dans sa version du 19 décembre 2018, postérieure à l'année d'imposition en litige.
Sur les conclusions subsidiaires concernant les intérêts de retard :
7. Aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : " I. - Toute créance de nature fiscale, dont l'établissement ou le recouvrement incombe aux administrations fiscales, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard. A cet intérêt s'ajoutent, le cas échéant, les sanctions prévues au présent code. / II. - L'intérêt de retard n'est pas dû : (...) 2. Au titre des éléments d'imposition pour lesquels un contribuable fait connaître, par une indication expresse portée sur la déclaration ou l'acte, ou dans une note annexée, les motifs de droit ou de fait qui le conduisent à ne pas les mentionner en totalité ou en partie, ou à leur donner une qualification qui entraînerait, si elle était fondée, une taxation atténuée, ou fait état de déductions qui sont ultérieurement reconnues injustifiées (...) ".
8. M. et Mme A... soutiennent, sans être contestés, que lors de l'établissement de leur déclaration de revenus de l'année 2013, ils ont indiqué le montant total des dépenses effectuées par leur fils en 2013 au titre des travaux de grosses réparations, soit 36 771 euros ainsi que la quote-part déduite de 18 385 euros. Ils font valoir que par cette seule précision, l'administration fiscale a pu ajuster la base imposable à hauteur de la seule part virile de l'indivisaire nu-propriétaire et que les intérêts de retard appliqués l'ont été en méconnaissance du 2. du II. de l'article 1727 du code général des impôts. Néanmoins, il ne résulte pas de l'instruction que M. et Mme A... ont fourni dans leur déclaration ou dans une note annexée à cette déclaration, les motifs de droit ou de fait pour lesquels ils déduisaient les charges supportées par leur fils pour un montant excédant sa quote-part dans l'indivision. Par suite, M. et Mme A... ne remplissent pas les conditions exigées pour se voir accorder l'exonération des intérêts de retard mis à leur charge du fait du rehaussement de leur revenu global au titre de l'année 2013 par l'effet de la réintégration de la part des charges excédant les droits de leur fils dans l'indivision.
9. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. et Mme A... la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A..., à M. E... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 27 janvier 2022 à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président,
Mme Evrard, présidente-assesseure,
Mme Lesieux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 février 2022.
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N° 20LY00958