Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013, 2014 et 2015 ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1801535 du 31 décembre 2019, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a réduit les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de Mme A... au titre des années en litige, à hauteur de la différence entre le montant des charges de loyers déductibles déterminées par le jugement au titre de la location du cabinet situé à Montluçon et le montant retenu par l'administration, a déchargé l'intéressée des impositions et pénalités correspondant aux réductions de base ainsi définies et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 19 février 2020, le 12 janvier 2021 et le 18 janvier 2021, Mme A..., représentée par Me Moreu, demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et des pénalités correspondantes restant à sa charge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle n'a pas reçu notification de la proposition de rectification du 9 décembre 2016 ;
- les prétendues irrégularités relevées par le vérificateur ne sauraient justifier un rejet global de la comptabilité de son activité de masseure-kinésithérapeute ;
- la méthode de reconstitution de ses recettes et charges est incomplète ; la méthode employée par le service n'est ni objective ni détaillée ;
- les relevés SNIR sur lesquels s'est fondée l'administration pour reconstituer ses recettes ne correspondent pas strictement aux sommes qu'elle a réellement perçues ;
- les frais de restauration qu'elle a déduits constituent des dépenses professionnelles ;
- la méthode utilisée par elle pour le calcul de ses frais de repas est contestable mais elle est exclusive de toute volonté de fraude ou d'éluder l'impôt ; dans tous les cas, ces dépenses ne constituent pas des dépenses personnelles ;
- c'est elle qui utilise le téléphone portable et l'abonnement souscrit au nom de son époux ; les dépenses correspondantes constituent donc bien des dépenses professionnelles ;
- les dépenses correspondant à l'achat de deux stylos de marque ont été engagées dans le but d'acquérir un outil lié à l'exercice de sa profession ; l'administration n'apporte pas la preuve contraire ; au demeurant, elles ne constituent pas des dépenses somptuaires au sens de l'article 39-4 du code général des impôts ;
- s'agissant du montant du loyer de son local professionnel situé à Montluçon, il serait plus raisonnable, à titre de comparaison, de tenir compte, au regard des éléments transmis par le service, d'un tarif de 300 euros /m² ; s'agissant du montant du loyer de son local professionnel situé à Boussac, il semble plus vraisemblable de retenir un tarif de 200 euros /m² ; elle n'a pas eu la volonté d'éluder l'impôt.
Par des mémoires, enregistrés le 30 octobre 2020 et le 15 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 19 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 21 février 2022 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code des postes et des communications électroniques ;
- l'arrêté du 7 février 2007 pris en application de l'article R. 2-1 du code des postes et des communications électroniques et fixant les modalités relatives au dépôt et à la distribution des envois postaux ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lesieux, première conseillère,
- et les conclusions de Mme Vinet, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., qui exerce la profession de masseure-kinésithérapeute, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, à l'issue de laquelle l'administration, après avoir écarté sa comptabilité comme non probante, a procédé à la reconstitution de ses bénéfices non commerciaux au titre de la période vérifiée. Mme A... a en conséquence été assujettie, selon la procédure contradictoire, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2013, 2014 et 2015, auxquelles ont été appliquées des intérêts de retard, et les majorations de 40 et 10 % prévues respectivement par le a de l'article 1729 du code général des impôts et par l'article 1758 A de ce code. Mme A... relève appel du jugement du 31 décembre 2019 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités correspondantes.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 7 février 2007 visé ci-dessus : " En cas d'absence du destinataire à l'adresse indiquée par l'expéditeur lors du passage de l'employé chargé de la distribution, un avis du prestataire informe le destinataire que l'envoi postal est mis en instance pendant un délai de quinze jours à compter du lendemain de la présentation de l'envoi postal à son domicile ainsi que du lieu où cet envoi peut être retiré. / Au moment du retrait par le destinataire de l'envoi mis en instance, l'employé consigne sur la preuve de distribution les informations suivantes : (...) - la date de distribution. / La preuve de distribution comporte également la date de présentation de l'envoi (...) ".
4. En cas de contestation de la notification à un contribuable d'une proposition de rectification, il incombe à l'administration fiscale d'établir qu'une telle notification a été régulièrement adressée au contribuable et, lorsque le pli contenant cette notification a été renvoyé par le service postal au service expéditeur, de justifier de la régularité des opérations de présentation à l'adresse du destinataire. La preuve qui lui incombe ainsi peut résulter soit des mentions précises, claires et concordantes figurant sur les documents, le cas échéant électroniques, remis à l'expéditeur conformément à la réglementation postale, soit, à défaut, d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve établissant la délivrance par le préposé du service postale d'un avis de passage prévenant le destinataire de ce que le pli est à sa disposition au bureau de poste.
5. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 9 décembre 2016 a été envoyée au domicile de Mme A..., le jour même, par un pli recommandé qui n'a pas été retiré par son destinataire et a été retourné à l'administration avec la mention " pli avisé et non réclamé " et le volet " avis de passage du facteur " mentionnant une date de vaine présentation du 9 décembre 2016. La circonstance même que le volet " avis de passage " a été retourné au service expéditeur implique nécessairement, quand bien même il comporte une date de vaine présentation, que le destinataire n'a pas été informé qu'un envoi postal à son attention avait été mis en instance au bureau de poste ainsi que le prévoit l'article 5 de l'arrêté du 7 février 2007 précité. L'administration, qui se borne à produire les documents, insuffisamment probants, que lui a retournés le service postal et à soutenir qu'une copie de la proposition de rectification a été envoyée au conseil de l'appelante, par un courrier du 11 avril 2017, soit, en tout état de cause, postérieurement à la date de mise en recouvrement des impositions en litige, ne verse à l'instance aucun autre élément de preuve de nature à justifier de la régularité de la notification à Mme A... du pli recommandé contenant la proposition de rectification du 9 décembre 2016. Il suit de là que l'intéressée soutient à bon droit que les impositions ont été irrégulièrement établies.
6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 de son jugement, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013, 2014 et 2015 et des pénalités correspondantes.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme A... C... la somme de 1 500 euros au titre des frais du litige.
DÉCIDE :
Article 1er : L'article 3 du jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 31 décembre 2019 est annulé.
Article 2 : Mme A... est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013, 2014 et 2015 ainsi que des pénalités correspondantes.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 3 mars 2022 à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président,
Mme Evrard, présidente-assesseure,
Mme Lesieux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 mars 2022.
La rapporteure,
S. Lesieux Le président,
D. Pruvost
La greffière,
M.-Th. Pillet
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY00697