Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge partielle de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2016.
Par un jugement n° 1901146 du 30 juin 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 27 août 2021 et deux mémoires, enregistrés les 9 novembre 2022 et 21 mars 2023, M. A... représenté par Me Bonnet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la réduction de ces impositions et la décharge des pénalités appliquées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il remplit les conditions prévues au a) du 1° B du 1 quater du I de l'article 150-0 D du code général des impôts pour bénéficier de l'abattement renforcé de 85 % pour le calcul de l'ensemble de la plus-value réalisée lors de la cession des titres en 2016 dès lors que la SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision - SUD Précision, dont il a cédé les titres, exerçait depuis 2006 une activité d'administration d'entreprises ;
- le refus d'appliquer l'abattement renforcé de 85 % aux titres reçus en échange, lors de l'opération de fusion-absorption de 2012, alors qu'est admis le même taux d'abattement aux titres reçus en 2016, crée une rupture d'égalité devant les charges publiques ;
- ce refus porte atteinte au principe de neutralité fiscale des opérations de fusion qui prévaut tant en droit français qu'européen ;
- la majoration de 10 % appliquée aux impositions n'est pas motivée.
Par un mémoire, enregistré le 10 octobre 2022 et un mémoire complémentaire enregistré le 20 janvier 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 21 mars 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 5 avril 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laval, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Par acte du 9 mars 2016, M. B... A..., qui était l'un des associés de la SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision - SUD Précision, a cédé à cette société les 4 238 titres qu'il détenait, au prix de 436 514 euros, dans le cadre d'une opération de réduction de capital par voie de rachat de ses propres titres menée par cette société. M. A... a fait l'objet d'un contrôle sur pièces portant sur l'année 2016 à l'issue duquel l'administration a soumis à l'impôt sur le revenu, sur le fondement du 6 du II de l'article 150-0 A du code général des impôts, la plus-value constatée à cette occasion qu'il n'avait pas déclarée. Pour calculer la plus-value taxable, l'administration a appliqué à 343 des 4 238 titres cédés par M. A... l'abattement pour durée de détention dit " renforcé " de 85 % prévu au 3° du 1 quater A de l'article 150-0 D du code général des impôts et aux 3 895 autres titres cédés l'abattement pour durée de détention de 65 % prévu à cet article au motif que la SAS d'Usinage Drômoise de Précision - SUD Précision étant issue d'une restructuration d'activités préexistantes intervenue en 2012, ces derniers titres ne pouvaient bénéficier de l'abattement renforcé. En conséquence de la taxation de cette plus-value, M. A... a été assujetti, selon la procédure contradictoire, à des compléments d'impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, au titre de l'année 2016, auxquels a été appliquée la majoration de 10 % prévue au I de l'article 1758 A du code général des impôts ainsi qu'aux contributions sociales. Il relève appel du jugement du 30 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions tendant à la réduction de ces impositions et à la décharge de la majoration de 10 % appliquée correspondantes.
Sur le bien-fondé des impositions :
2. Aux termes de l'article 150-0 D du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " 1(...)Les gains nets résultant de la cession à titre onéreux ou retirés du rachat d'actions, de parts de sociétés, de droits démembrés portant sur ces actions ou parts, ou de titres représentatifs de ces mêmes actions, parts ou droits, mentionnés à l'article 150-0 A, ainsi que les distributions mentionnées aux 7,7 bis et aux deux derniers alinéas du 8 du II du même article, à l'article 150-0 F et au 1 du II de l'article 163 quinquies C sont réduits d'un abattement déterminé dans les conditions prévues, selon le cas, au 1 ter ou au 1 quater du présent article (...). 1 ter. L'abattement mentionné au 1 est égal à : a) 50 % du montant des gains nets ou des distributions lorsque les actions, parts, droits ou titres sont détenus depuis au moins deux ans et moins de huit ans à la date de la cession ou de la distribution ; b) 65 % du montant des gains nets ou des distributions lorsque les actions, parts, droits ou titres sont détenus depuis au moins huit ans à la date de la cession ou de la distribution (...) 1 quater. A. -Par dérogation au 1 ter, lorsque les conditions prévues au B sont remplies, les gains nets sont réduits d'un abattement égal à : 1° 50 % de leur montant lorsque les actions, parts ou droits sont détenus depuis au moins un an et moins de quatre ans à la date de la cession ; 2° 65 % de leur montant lorsque les actions, parts ou droits sont détenus depuis au moins quatre ans et moins de huit ans à la date de la cession ; 3° 85 % de leur montant lorsque les actions, parts ou droits sont détenus depuis au moins huit ans à la date de la cession. B. -L'abattement mentionné au A s'applique : 1° Lorsque la société émettrice des droits cédés respecte l'ensemble des conditions suivantes : a) Elle est créée depuis moins de dix ans et n'est pas issue d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension ou d'une reprise d'activités préexistantes. Cette condition s'apprécie à la date de souscription ou d'acquisition des droits cédés ; ".
3. Il résulte de l'instruction que M. A... était l'un des associés fondateurs de la SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision ayant pour activité des travaux d'usinage et de mécanique, créée en 1996, dont il détenait 851 actions. Il a créé, en 2006, une société holding, la SAS Sogefisud, à laquelle il a apporté, outre 2 224 euros de capital en numéraire, 72 actions de la SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision en échange desquelles il a reçu 343 actions de la SAS Sogefisud. Le 5 novembre 2012, la SAS Sogefisud a absorbé par fusion, sa filiale, la SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision et a changé de dénomination sociale, devenant la SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision - SUD Précision. Lors de l'opération, les 779 actions que M. A... avait conservées dans le capital de la SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision ont été annulées et l'intéressé a reçu en échange 3 895 actions de la SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision - SUD Précision. Ainsi qu'il a été dit au point 1 ci-dessus, la SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision - SUD Précision a racheté à M. A... les 4 238 actions de cette société qu'il détenait dans le cadre d'une opération de réduction de son capital.
4. La fusion-absorption du 5 novembre 2012 a eu pour effet de transférer à la SAS Sogefisud, devenue SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision - SUD Précision, les moyens d'exploitation de la SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision permettant ainsi à cette société d'exercer l'activité précédemment exercée par son ancienne filiale, ce qu'elle a fait après l'opération. Compte tenu des liens privilégiés entre la nouvelle société et l'entreprise préexistante, la SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision - SUD Précision a été, à juste titre, regardée par l'administration comme issue de la restructuration d'activités préexistantes, ce que ne conteste d'ailleurs pas sérieusement M. A.... Il en résulte que, si la SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision - SUD Précision respectait bien la condition d'être créée depuis moins de dix ans à cette date, elle ne satisfaisait pas à l'autre condition requise par le a) du 1 quater B de l'article 150-0 D du code général des impôts, appréciée à la même date, pour l'application du régime de l'abattement dit renforcé aux titres reçus dans le cadre de cette opération. Dès lors que ces dispositions subordonnent l'application du taux d'abattement plus favorable qu'elles prévoient à la condition que les titres aient été détenues sur une période minimale, M. A... ne saurait utilement, pour obtenir l'application du taux renforcé à l'ensemble des titres cédés, se prévaloir de l'objectif de neutralité au plan fiscal des opérations de restructuration sur le fondement de l'article 210 A du code général des impôts ou de l'article 150-0 B du même code impliquant de ne tenir aucun compte d'une opération intercalaire d'apport ou de fusion. C'est dès lors par une exacte application de ces dispositions que, pour le calcul du montant de la plus-value en litige, l'administration a appliqué l'abattement renforcé de 85 % aux 343 actions détenues par M. A... depuis 2006, date de création de la société holding, et l'abattement de 65 % aux 3 895 actions de la SAS Société d'Usinage Drômoise de Précision - SUD Précision qu'il avait reçues en 2012 sans que l'intéressé puisse utilement invoquer la méconnaissance du principe d'égalité devant l'impôt pour faire échec aux impositions dès lors que la plus-value a été calculée conformément à la loi fiscale.
5. M. A... n'est, en tout état de cause, pas fondé, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, à se prévaloir des énonciations des paragraphes 60 et 90 de la documentation administrative référencée BOI-RPPM-PVBMI-20-30-10 dans sa version en vigueur à compter du 20 décembre 2019 qui ne donnent pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il est fait application. Il n'est pas davantage fondé à se prévaloir de celle référencée BOI-BIC-CHAMP-80-10-10-20, à laquelle renvoie ce paragraphe 90 uniquement pour la définition des notions de concentration, restructuration, extension ou reprise d'activités préexistantes. Enfin, il ne peut pas non plus se prévaloir de la réponse ministérielle n° 39, publiée au Journal officiel le 7 septembre 2017 postérieure à l'année d'imposition et qui concerne l'acquisition d'un fonds de commerce.
Sur la majoration de 10 % :
6. Aux termes de L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens des articles L. 211-2 à L. 211-7 du code des relations entre le public et l'administration, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. / (...). "
7. La proposition de rectification du 20 novembre 2017, qui reproduit les dispositions du I de l'article 1758 A du code général des impôts selon lesquelles : " Le retard ou le défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l'impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, donnent lieu au versement d'une majoration égale à 10 % des droits mis à la charge du contribuable ou de la créance indue " et mentionne que M. A... s'est abstenu de déclarer les plus-values de cession de titres en litige, est suffisamment motivée.
8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 12 octobre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Courbon présidente-assesseure,
M. Jean-Simon Laval, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2023.
Le rapporteur,
J.-S. Laval
Le président,
D. PruvostLa greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY02891