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16/11/2023 | FRANCE | N°23LY00298

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 16 novembre 2023, 23LY00298


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les arrêtés du 29 mars 2022 par lesquels le préfet du Puy-de-Dôme les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi, les a assignés à résidence et a prononcé à leur encontre des interdictions de retour sur le territoire français.

Par un jugement nos 2201135 - 2201137 du 28 octobre 2022, la magistrate désignée du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a an

nulé les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français et a reje...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les arrêtés du 29 mars 2022 par lesquels le préfet du Puy-de-Dôme les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi, les a assignés à résidence et a prononcé à leur encontre des interdictions de retour sur le territoire français.

Par un jugement nos 2201135 - 2201137 du 28 octobre 2022, la magistrate désignée du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français et a rejeté le surplus des conclusions de leurs demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 24 janvier 2023, M. et Mme C..., représentés par Me Shveda, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à leur demande.

2°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme d'examiner la situation personnelle des requérant et de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

M. et Mme C... soutiennent que :

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- le signataire de l'obligation de quitter le territoire français n'était pas compétent ;

- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de leur situation personnelle ;

- elle méconnait l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle méconnaît l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- ils ont été privés de leur droit à un recours effectif sur un refus d'asile opposé à un ressortissant d'un pays sûr selon des dispositions qui méconnaissent l'article 46 de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ainsi que de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation à l'égard de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de l'assignation à résidence :

- la décision ordonnant son assignation à résidence est insuffisamment motivée ;

- elle se fonde sur les dispositions abrogées de l'article L. 722-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant du pays de renvoi :

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;

- elle méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 19-2 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, la requête a été dispensée d'instruction.

Par une décision du 11 janvier 2023, M. et Mme C... ont a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ;

- la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Laval, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C..., ressortissants albanais, sont entrés en France à la date alléguée du 25 août 2021. Ils ont chacun présenté des demandes d'asile auprès des autorités françaises le 1er octobre 2021, lesquelles ont été rejetées par deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 19 janvier 2022. Par deux arrêtés du 29 mars 2022, le préfet du Puy-de-Dôme les a obligés à quitter le territoire français, a fixé l'Albanie comme pays de renvoi, a pris des assignations à résidence pour vérifier le respect des décisions prises à leur encontre et a prononcé à leur encontre des interdictions de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Ils ont contesté, le 11 avril 2022, les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides devant la Cour national du droit d'asile. Par un jugement du 28 octobre 2022, la magistrate désignée du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français et a rejeté le surplus des conclusions de la demande des intéressés. Ils relèvent appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à leur demande d'annulation des arrêtés.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la légalité des obligations de quitter le territoire français :

2. M. et Mme C... reprennent en appel les moyens qu'ils avaient invoqués en première instance et tirés de l'incompétence du signataire des arrêtés. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Clermont-Ferrand au point 2 de son jugement.

3. Les décisions d'éloignement litigieuses visent le 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionnent les décisions de rejet relatives aux demandes d'asile des intéressées ainsi que les éléments de fait portés alors à la connaissance du préfet relatifs à la situation des requérants dont ne fait pas partie le droit autonome au séjour de la fille des requérants, demandeurs d'asile. Par suite, les décisions d'obligation de quitter le territoire français attaquées énoncent les éléments de fait et de droit qui sur lesquelles elles reposent et ne sont pas insuffisamment motivées.

4. Il ressort des dispositions de l'article L. 614-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français. Dès lors, les articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration, qui fixent les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu des articles L. 211-2 et suivants du même code, ne sauraient être utilement invoqués à l'encontre de décisions portant obligation de quitter le territoire français ne peuvent qu'être écartés.

5. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte précitée : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union. (...) ".

6. Ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans ses arrêts C-166/13 et C-249/13 des 5 novembre et 11 décembre 2014, le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Il n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français ou sur la décision le plaçant en rétention dans l'attente de l'exécution de la mesure d'éloignement, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement.

7. Le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français non prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne.

8. Une violation des droits de la défense, en particulier du droit d'être entendu, n'entraîne l'annulation de la décision prise au terme de la procédure administrative en cause que si, en l'absence de cette irrégularité, cette procédure pouvait aboutir à un résultat différent.

9. M. et Mme C... qui se bornent à citer les dispositions de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ne font valoir, à ce titre, aucune circonstance quelconque de leur situation faisant obstacle à l'éloignement.

10. Aux termes de l'article L. 542-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 542-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin : 1° Dès que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a pris les décisions suivantes : d) une décision de rejet dans les cas prévus à l'article L. 531-24 et au 5° de l'article L. 531-27 ; (...) ". Aux termes de l'article L. 531-24 du même code : " L'Office français de protection des réfugiés et apatrides statue en procédure accélérée dans les cas suivants : 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr au sens de l'article L. 531-25 ; (...) ".

11. D'une part, il résulte des dispositions précitées qu'un ressortissant étranger issu d'un pays sûr dont la demande d'asile a été rejetée selon la procédure accélérée ne bénéficie pas du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur son recours. En l'espèce, il n'est pas contesté que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a procédé à l'examen de la demande d'asile présentée par M. et Mme C... selon la procédure accélérée en application du d) du 1° de l'article L. 542-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

12. D'autre part aux termes de l'article L. 752-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont le droit au maintien sur le territoire a pris fin en application des b ou d du 1° de l'article L. 542-2 et qui fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français peut, dans les conditions prévues à la présente section, demander au tribunal administratif la suspension de l'exécution de cette décision jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. ".

13. L'étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement qui forme un recours contre celle-ci peut, en application des articles précités, saisir le tribunal administratif de conclusions aux fins de suspension de cette mesure. A l'appui de ses conclusions, il peut se prévaloir d'éléments apparus et de faits intervenus postérieurement à la décision de rejet ou d'irrecevabilité de sa demande de protection ou à l'obligation de quitter le territoire français, ou connus de lui postérieurement. La mesure d'éloignement ne peut être mise à exécution pendant l'examen par le juge de la demande de suspension.

14. Ainsi, le demandeur d'asile dispose-t-il d'un recours juridictionnel effectif, conformément aux exigences du paragraphe 6 de l'article 46 de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative aux procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale, qui permet aux États membres, dans une série d'hypothèses qui correspondent à celles qui sont prévues par les dispositions précitées, de déroger au principe du caractère suspensif du recours, à condition qu'une juridiction, saisie d'office ou par le demandeur, puisse se prononcer sur le droit au maintien sur le territoire de ce dernier jusqu'à la décision de la juridiction compétente pour se prononcer sur la demande d'asile. Par suite, le moyen tiré de ce que l'article L. 542-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile serait incompatible avec les objectifs et dispositions de la directive 2013/32/UE du 26 juin 2013 ne peut qu'être écarté.

15. En l'espèce, il n'est pas contesté que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a procédé à l'examen de la demande d'asile présentée par M. et Mme C... selon la procédure accélérée en application du d) du 1° de l'article L. 542-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le droit à un recours effectif n'implique pas que l'étranger, dont la demande d'asile a fait l'objet d'un examen en procédure accélérée puisse se maintenir sur le territoire français jusqu'à l'issue de son recours devant la Cour nationale du droit d'asile et ce alors qu'il peut solliciter la suspension de l'exécution de son éloignement et se faire représenter devant cette juridiction. M. et Mme C... qui n'ont pas, en tout état de cause, sollicité la suspension de la décision d'éloignement jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile statue sur leur recours n'établissent pas avoir été privés de la possibilité de le faire. Il suit delà qu'ils ne disposaient plus du droit de se maintenir sur le territoire français à la date de notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 9 février 2022, rejetant leurs demandes et pouvaient faire l'objet d'une mesure d'éloignement sans que le préfet soit tenu d'attendre que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur le recours introduit par les intéressés.

16. Il résulte de tout ce qui précède que le moyen tiré de ce que le préfet du Puy-de-Dôme aurait privé M. et Mme C... d'un droit au recours effectif protégé par l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne et l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

17. Dans le cas où le préfet se borne à rejeter une demande d'autorisation de séjour présentée uniquement au titre de l'asile, sans examiner d'office d'autres motifs d'accorder un titre de séjour à l'intéressé, ce dernier ne peut utilement soulever, devant le juge de l'excès de pouvoir saisi de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus du préfet, des moyens de légalité interne sans rapport avec la teneur de la décision contestée. M. et Mme C... ne peuvent utilement exciper de l'illégalité d'un refus d'examiner le droit au séjour de M. C... au titre de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont il ne s'était pas prévalu.

18. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. "

19. M. C... est entré en France avec son épouse et sa fille le 25 août 2021, moins d'un an avant les décisions contestées. L'intéressé et sa compagne sont en situation irrégulière du fait du rejet de leurs demandes d'asile pour lesquelles ils n'ont pas été privé de l'exercice d'un recours. Ils ne peuvent utilement invoquer les risques encourus dans leur pays d'origine à l'égard d'une obligation de quitter le territoire français qui n'emporte pas fixation du pays de destination. M. C... ne saurait invoquer à ce titre son état de santé par des allégations insuffisamment étayées. M. et Mme C... soutiennent que leur fille est scolarisée et souhaite terminer sa scolarité en France Toutefois rien ne s'oppose à ce que l'enfant des requérants reparte avec ses parents dans son pays d'origine, où sa scolarité pourra être poursuivie. Eu égard à la brièveté du séjour de la famille en France, où elle n'a pas été créée de liens d'une portée significative, au fait que M. C... n'est pas dépourvu d'attaches familiales effectives en Albanie et au fait que la mesure d'éloignement n'a pas pour conséquence de séparer les membres de sa cellule familiale, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions attaqués ont porté une atteinte disproportionnée à leur vie privée et familiale ou à l'intérêt supérieur de leur enfant. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être également écarté.

En ce qui concerne la légalité des mesures de contraintes :

20. Aux termes de l'article L. 721-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel un délai de départ volontaire a été accordé peut, dès la notification de la décision portant obligation de quitter le territoire français, être contraint de résider dans le lieu qui lui est désigné par l'autorité administrative. Cette décision est prise pour une durée qui ne peut se poursuivre au-delà de l'expiration du délai de départ volontaire. ". Aux termes de l'article L. 721-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel un délai de départ volontaire a été accordé peut, dès la notification de la décision portant obligation de quitter le territoire français, être astreint à se présenter à l'autorité administrative ou aux services de police ou aux unités de gendarmerie pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ. Cette décision est prise pour une durée qui ne peut se poursuivre au-delà de l'expiration du délai de départ volontaire. "

21. Si les décisions fondées sur les articles L. 721-6 et L. 721-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont le caractère de décisions distinctes de l'obligation de quitter le territoire français, elles tendent à assurer que l'étranger accomplit les diligences nécessaires à son départ dans le délai qui lui est imparti et concourent à la mise en œuvre de l'obligation de quitter le territoire français. Dans ces conditions, si l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration impose que ces décisions soient motivées au titre des mesures de police, cette motivation peut, outre la référence aux articles L. 721-6 et L. 721-7, se confondre avec celle de l'obligation de quitter le territoire français assortie d'un délai de départ volontaire.

22. Les décisions se fondent sur les articles précités et non sur l'article L. 722-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que sur les motifs des obligations de quitter le territoire français. Elles sont, par suite, suffisamment motivées.

23. Contrairement à ce que prétendent les requérants, les mesures de contraintes susvisées ne relèvent pas les mesures d'assignations à résidence prises en vertu de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elles ne sont pas subordonnées à l'existence d'un risque de fuite. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit, par suite, être écarté.

En ce qui concerne la légalité des décisions fixant le pays de destination :

24. Les décisions par lesquelles le préfet du Puy-de-Dôme a désigné le pays à destination duquel M. et Mme C... pourraient être éloignés d'office visent l'article L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que le préfet a examiné. Elles rappellent également la nationalité albanaise de ces derniers et la reconduite dans le pays de leur nationalité. Le moyen tiré d'une insuffisante motivation des décisions fixant le pays de destination doit être écarté.

25. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes du 2° de l'article 19 de la charte sur les droits fondamentaux de l'Union européenne : " Nul ne peut être éloigné, expulsé ou extradé vers un État où il existe un risque sérieux qu'il soit soumis à la peine de mort, à la torture ou à d'autres peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

26. Les requérants soutiennent qu'ils craignent que la vie de M. C... ne soit en danger en cas de retour en Albanie du fait de menaces prononcées par son frère. Toutefois, les requérants ne produisent aucune pièce probante, autre que celles de la demande d'asile qui a été rejetée, ni n'apportent aucune précision au soutien de ces allégations. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 19-2 de la Charte sur les droits fondamentaux de l'Union européenne doivent être écartés.

27. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M.et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... et Mme A... C....

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet du Puy-de-Dôme.

Délibéré après l'audience du 24 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost , président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

M. Laval, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 novembre 2023.

Le rapporteur,

J.-S. Laval

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY00298


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00298
Date de la décision : 16/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Jean-Simon LAVAL
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : SHVEDA

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-11-16;23ly00298 ?
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