Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 16 août 2000 sous le n°'00MA01847 présentée pour M. Belkacem X, demeurant ...), par Me Henri VERNIERS, avocat ;
Classement CNIJ : 335-02-04
C
M. Belkacem X demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 001317 et 001319 du 29 juin 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de la décision en date du 29 novembre 1999 rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, et tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un certificat de résidence dans les 4 mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 500 F par jour de retard, astreinte courant pour un délai de 3 mois après lequel elle pourra être liquidée et une nouvelle astreinte fixée, à titre subsidiaire, d'ordonner au préfet de prendre une décision à son égard dans les 4 mois suivant la notification du jugement sous astreinte de 500 F par jour de retard courant pour un délai de 3 mois à l'issue duquel elle pourra être liquidée, tendant à ce que l'Etat lui verse une somme de 10.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, et tendant également à ce qu'il soit sursis à l'exécution de la décision et à ce que l'Etat lui verse une somme de 3.500 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2°/ d'annuler ladite décision ;
3°/ de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Il soutient : que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation, qu'il ne pouvait pas refuser le renouvellement du certificat de résidence pour un motif d'ordre public, que la décision a méconnu l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme, que le préfet a violé l'article 7 bis de la convention franco algérienne dès lors qu'il vit depuis plus de 15 ans en France ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 8 janvier 2001 présenté au nom de l'Etat par le ministre de l'intérieur ; le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête ; il soutient que le requérant n'apporte aucun élément en appel susceptible d'infirmer la décision du tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2003 :
- le rapport de M. MARCOVICI, premier conseiller ;
- les observations de Me VERRIER substituant Me VERNIERS pour M. X ;
- et les conclusions de M. TROTTIER, premier conseiller ;
Considérant que M. Belkacem X, ressortissant algérien, demande à la Cour d'annuler la décision en date du 29 novembre 1999 rejetant sa demande d'admission exceptionnelle au séjour dans le cadre de la circulaire du 24 juin 1997 ;
Sur la recevabilité :
Considérant que la décision en date du 29 décembre 1999 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de délivrer un certificat de résidence à M. Belkacem X lui a été notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception ; que toutefois, M. Belkacem X soutient qu'il n'a pas été avisé de cet envoi ; que les mentions figurant sur l'enveloppe adressée à M. X, eu égard à leur imprécision, ne suffisent pas à établir que le pli a fait l'objet d'un avis de passage au domicile du contribuable avant d'être retourné au service expéditeur ; que l'administration qui ne fait état d'aucune attestation émanant de l'administration des postes du dépôt d'un avis de passage au domicile de l'intéressé n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de la régularité de la notification de la décision en cause ; que la décision lui a, de nouveau, été notifiée en préfecture le 11 janvier 2000 ; que dès lors, la requête qui a été déposée le 10 mars 2000 au greffe du tribunal administratif n'était pas tardive ; qu'il suit de là que c'est à tort que par le jugement attaqué, ledit tribunal a rejeté la requête de M. Belkacem X ;
Sur la légalité de la décision du 29 décembre 1999 :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et des libertés d'autrui ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Belkacem X est né à Marseille, dans les Bouches-du-Rhône, en 1959 ; qu'il s'est marié le 6 juillet 1990 ; que son épouse est de nationalité française, comme ses trois enfants nés en 1983, 1987 et 1990 ; qu'il vit en France de façon continue depuis sa naissance ; que, s'il a été condamné à plusieurs reprises pour des faits de recel de vols, d'usage de fausse plaque d'immatriculation et de mise en circulation de véhicule muni de plaque, de vol avec destruction ou dégradation, le préfet a porté au droit de l'intéressé une atteinte excessive à sa vie privée et familiale au but en vue duquel la décision attaquée a été prise ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Belkacem X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande d'annulation de la décision susvisée ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution ;
Considérant que le présent arrêt implique nécessairement qu'il soit délivré un certificat de résidence à M. Belkacem X ; qu'il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à M. Belkacem X un certificat de résidence dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a toutefois pas lieu d'assortir cette mesure d'une astreinte ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code des tribunaux administratifs et de cours administratives d'appel : Dans les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative de condamner l'Etat à payer à M. X la somme de 1.000 euros qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement en date du 29 juin 2000, ensemble la décision du 29 novembre 1999 sont annulés.
Article 2 : L'Etat (ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales) est condamné à payer une somme de 1.000 euros (mille euros) à M. X au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à M. Belkacem X un certificat de résidence dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Belkacem X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
Copie en sera notifiée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré à l'issue de l'audience du 3 avril 2003, où siégeaient :
M. DARRIEUTORT, président de chambre,
M. GUERRIVE, président assesseur,
M. MARCOVICI, premier conseiller,
assistés de Melle MARTINOD, greffier.
Prononcé à Marseille, en audience publique le 30 avril 2003.
Le président, Le rapporteur,
Signé Signé
Jean-Pierre DARRIEUTORT Laurent MARCOVICI
Le greffier,
Signé
Isabelle MARTINOD
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
N° 00MA01847 6