Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 17 septembre 1999 sous le n° 99MA01868, présentée pour les sociétés SOVATRAM et DRAGUI-TRANSPORTS dont le siège est ZI St Hermentaire, ..., représentées par leur président-directeur général, par Me X..., avocat ;
Les sociétés demandent à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 974828 en date du 29 juin 1999 par lequel le Tribunal administratif de Nice a refusé de faire droit à leur demande tendant à la condamnation de la commune de St-Tropez à leur payer une somme de 3.194.708,50 F en règlement de l'évacuation de déchets entreposés sur un site situé sur le territoire de la commune ;
Classement CNIJ : 39 02 04
C
2°/ de condamner la commune de St-Tropez à leur payer ladite somme de 3.194.708,50 F ;
3°/ de la condamner à leur payer la somme de 40.000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Elles soutiennent qu'elles n'avaient pas la charge de l'assainissement du site en cause ; que l'enlèvement des déchets s'imposait d'urgence pour des raisons de sécurité et de salubrité ; qu'il a été demandé par la commune ; qu'en l'absence de contrat régulier passé par celle-ci elle doit tout de même payer les prestations qui ont été accomplies par les exposantes sur le fondement juridique de l'enrichissement sans cause ; que la commune a dans un premier temps envisagé de régler le prix de ces prestations et leur a fait savoir puis dans un deuxième temps s'y est refusée ; que ce changement d'attitude constitue une faute de nature à ouvrir droit à indemnité ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires enregistrés le 7 décembre 1999 et le 19 janvier 2000, présentés pour la commune de St-Tropez agissant par son maire dûment habilité, par Me Y..., avocat ; la commune conclut au rejet de la requête, à la condamnation des sociétés requérantes à lui payer une indemnité de 100.000 F à titre de dommages intérêts pour requête abusive et une somme de 50.000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Elle soutient que la société SOVATRAM étant liée par contrat avec la commune ne peut utilement rechercher sa responsabilité extra-contractuelle pour des faits non détachables du contrat et que ses conclusions de ce chef sont irrecevables ; qu'en ce qui concerne la société DRAGUI-TRANSPORTS il en va de même dès lors qu'elle est comme SOVATRAM une filiale du groupe PIZZORNO ; que ces deux filiales forment en réalité une seule société ; que, par suite le marché signé avec l'une est opposable à l'autre ; qu'au fond, les deux sociétés requérantes étaient responsables de l'état du site, qu'il leur appartenait d'en traiter les déchets suite au contrat passé le 20 août 1979 ; que par la suite par le bail du 6 mai 1991 elles ont accepté la responsabilité de ce site en connaissance de cause et sa dépollution restait à leur charge ; que si la commune exposante a effectivement envisagé de faire appel aux sociétés requérantes pour dépolluer le site et de financer cette action elle y a renoncé et les sociétés requérantes ont décidé de leur propre chef d'évacuer les déchets sans aucune contrainte administrative ; que si elles ont décidé de les évacuer au lieu de produire un compost venolable comme engrais c'est là une décision de gestion dont elles doivent supporter le coût ; que son changement d'attitude à propos d'un éventuel contrat pour l'enlèvement des déchets ne peut en aucun cas être considéré comme une faute dès lors qu'aucun contrat n'était régulièrement possible ; qu'à titre subsidiaire si elle était condamnée de ce chef il y aurait lieu de condamner la société SOVATRAM à la garantir de cette condamnation dans la mesure où c'est à la suite des manoeuvres de cette dernière qu'elle aurait passé un tel contrat illicite ; que les conclusions fournies contre l'exposante sur le fondement de l'enrichissement sans cause ne peuvent qu'être rejetées dès lors que les conditions de mise en oeuvre de ce fondement juridique ne sont pas réunies ; qu'en effet les sociétés requérantes ont procédé à l'enlèvement des déchets en cause dans leur intérêt et à leurs risques et périls ; qu'enfin le recours des sociétés requérantes est abusif et ouvre droit à des dommages intérêts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative entré en vigueur le 1er janvier 2001 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mars 2004 :
- le rapport de M. DUBOIS, premier conseiller ;
- les observations de Me Y... pour la commune de St-Tropez ;
- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que par acte en date du 6 mai 1991 constituant bail emphytéotique consenti par le syndicat intercommunal du Golfe de St-Tropez au profit des sociétés SOVATRAM et DRAGUI-TRANSPORTS le preneur s'engageait à prendre : l'immeuble loué dans son état actuel, sans pouvoir exercer aucun recours contre le bailleur pour quelque cause que ce soit... ; que par suite ces deux sociétés se trouvaient en principe responsables des nuisances éventuellement causées par l'état du terrain en cause ;
Considérant qu'il est constant que la présence de déchets sur ce terrain était source de diverses nuisances pour le voisinage et que les sociétés SOVATRAM et DRAGUI-TRANSPORTS ont procédé à une remise en état des lieux ; qu'elles demandent à la commune de St-Tropez la prise en charge du coût de cette remise en état ;
Considérant, en premier lieu, qu'il echêt de relever que les sociétés requérantes n'invoquent en aucune manière un droit à réparation contre la commune de St-Tropez constitué au profit de leur bailleur, le syndicat intercommunal du Golfe de St-Tropez et qui leur aurait été transféré par le bail en date du 6 mai 1991 ;
Considérant, en deuxième lieu, que d'une part si la société SOVATRAM entend soutenir sur le fondement du marché en date du 24 avril 1978 passé entre elle, l'OTV et la commune de St-Tropez, et exécuté jusqu'au 24 avril 1991, que l'entreposage sur le site en cause de déchets en provenance de la commune aurait constitué une faute contractuelle, elle n'apporte aucun élément de nature à établir que la livraison de ces déchets aurait été faite dans des conditions fautives, alors surtout que la réception et le traitement des déchets déposés sur le site en cause étaient précisément l'objet du marché passé avec la commune ; que, d'autre part si la société DRAGUI-TRANSPORTS, qui n'était pas partie au marché du 24 avril 1978 entend soutenir que l'entreposage par la commune des déchets sur le site constituerait une faute extra-contractuelle, elle ne saurait utilement demander réparation, pour son propre compte, de faits survenus avant la prise à bail par elle, len6 mai 1991 de ce site ;
Considérant, en troisième lieu, que les sociétés requérantes soutiennent que la remise en état du site en cause par l'enlèvement des déchets qui le polluaient serait source d'enrichissement sans cause pour la commune et qu'elles réclament à ce titre une indemnisation ;
Considérant qu'il est constant, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté en appel que la dépollution du site par l'élimination des boues en cause n'était l'objet d'aucune obligation contractuelle spécifique existant entre la commune et les sociétés requérantes ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'élimination des boues en cause, qui n'a abouti qu'à remettre le site dans un état normal, compte tenu des obligations générales qui étaient celles de la commune et, d'autre part, celles des sociétés occupant et gérant ce site, ait apporté un enrichissement de la commune ;
Considérant enfin, en quatrième lieu, que les sociétés requérantes soutiennent que l'attitude de la commune qui a dans un premier temps envisagé de passer avec elles un contrat dont l'objet aurait été de réaliser la dépollution du site par l'enlèvement des déchets qui s'y trouvaient avant de renoncer à la conclusion de cet acte serait une faute de nature à engager sa responsabilité à leur égard ;
Considérant que s'il est constant que la commune a envisagé la passation d'un marché aux fins d'obtenir l'assainissement du site en cause, ses démarches à cette fin auprès des deux sociétés requérantes qui en application du bail du 6 mai 1991 avaient la responsabilité de la gestion du site doivent, être regardées comme des mesures de police prises dans l'intérêt de la salubrité publique ; que dans ces conditions, d'une part aucun contrat ayant un tel objet n'était régulièrement possible entre la commune et les deux sociétés requérantes gestionnaires du site, d'autre part et surtout les deux sociétés requérantes avaient en toute hypothèse l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour que le site en cause ne porte pas atteinte à la salubrité publique ; que, par suite, le fait que la commune ait envisagé, dans un premier temps, de leur imposer le respect de ces obligations par le biais d'un contrat, puis qu'elle y ait ensuite renoncé, ne saurait être considéré comme une faute de nature à engager sa responsabilité à leur égard ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les sociétés SOVATRAM et DRAGUI-TRANSPORTS ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Nice a refusé de faire droit à leur demande ;
Considérant que la requête des sociétés SOVATRAM et DRAGUI-TRANSPORTS ne saurait être regardée comme abusive et de nature à engager en cela leur responsabilité à l'égard de la commune de St-Tropez ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Sur les conclusions des sociétés SOVATRAM et DRAGUI-TRANSPORTS :
Considérant que les dispositions susvisées de l'article L.761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la commune de St-Tropez, qui n'est pas dans présente instance la partie perdante soit condamnée à rembourser aux sociétés requérantes les frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions de la commune de St-Tropez :
Considérant que dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de condamner les sociétés SOVATRAM et DRAGUI-TRANSPORTS à payer à la commune de St-Tropez une somme de 2.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête des sociétés SOVATRAM et DRAGUI-TRANSPORTS est rejetée.
Article 2 : Les sociétés SOVATRAM et DRAGUI-TRANSPORTS sont condamnées à payer à la commune de St-Tropez une somme de 2.000 euros (deux mille euros) au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié aux sociétés SOVATRAM et DRAGUI-TRANSPORTS, à la commune de St-Tropez et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
Délibéré à l'issue de l'audience du 16 mars 2004, où siégeaient :
M. BERNAULT, président de chambre,
M. DUCHON-DORIS, président assesseur,
M. DUBOIS, premier conseiller,
assistés de M. AGRY, greffier ;
Prononcé à Marseille, en audience publique le 13 avril 2004.
Le président, Le rapporteur,
Signé Signé
François BERNAULT Jean DUBOIS
Le greffier,
Signé
Pierre AGRY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
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N° 99MA01868