Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 7 février 2002, sous le n° 02MA00225, présentée par la SCP Delmas, Rigaud, Lévy, Jonquet, avocats, pour M. Régis X, élisant domicile ... ; M. Régis X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 21 novembre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier l'a condamné à verser à la commune de Villerouge-Termenes la somme de 300.000 F, assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 1998, ainsi que la somme de 5.000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter la demande indemnitaire de la commune de Villerouge-Termenes comme étant présentée devant une juridiction incompétente pour en connaître et, subsidiairement, comme étant infondée ;
3°) de condamner la commune de Villerouge-Termenes à lui verser 1.000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 novembre 2004 :
- le rapport de M. Gonzales, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Firmin, commissaire du gouvernement ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant que la commune de Villerouge-Termenes est propriétaire d'un château médiéval classé monument historique qu'elle a aménagé en musée de l'époque cathare, ouvert au public ; qu'elle a décidé de créer dans une partie de ce château une structure de restauration originale, sous la forme d'une rôtisserie médiévale, où la cuisine proposée aux convives dans la salle des banquets, serait confectionnée selon les méthodes de l'époque médiévale ; qu'à cette fin, elle a conclu le 21 février 1994 une convention de maîtrise d'oeuvre avec M. X, architecte, agissant comme mandataire commun d'un groupement conjoint de co-traitants, en vue de l'aménagement des salles de restauration et de stockage des aliments, ainsi que de la construction d'un four et d'une cheminée de style médiéval ; que cette convention, relative à l'exécution de travaux immobiliers pour le compte d'une personne publique dans un but d'intérêt général, revêt le caractère d'un contrat administratif ; qu'il en va de même de la convention ultérieure, en date du 19 janvier 1998, passée par les cocontractants en vue du financement de travaux complémentaires à réaliser sur les immeubles concernés, qui constitue l'accessoire de la convention du 21 février 1994 ; que le présent litige, opposant les parties sur les conditions d'exécution de ces deux conventions, ressortit ainsi, contrairement à ce que soutient M. X, à la compétence de la juridiction administrative ;
Sur la recevabilité de l'appel incident :
Considérant que le jugement attaqué a été notifié à M. X le 11 décembre 2001 ; que la requête de ce dernier, enregistrée au greffe de la Cour le 7 février 2002, a été présentée dans le délai d'appel courant contre ce jugement et n'est donc, contrairement à ce que soutient la commune de Villerouge-Termenes, nullement tardive ;
Sur le bien fondé des condamnations prononcées contre M. X :
Considérant que de graves désordres ont empêché le fonctionnement du four et de la cheminée médiévaux commandés par la commune au groupement de maîtrise d'oeuvre ; qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est pas contesté par les parties, que ces désordres sont exclusivement imputables à un vice de conception desdits équipements ; qu'ils se sont révélés en cours d'exécution du marché et ont été réparés antérieurement à la réception des travaux, prononcée sans réserve les 13 mars, 10 et 12 avril 1998 ;
Considérant qu'il ressort clairement des écritures de première instance de la commune que celle-ci a entendu rechercher la responsabilité contractuelle de M. X à raison de ces désordres, non seulement en sa qualité de mandataire commun du groupement de maîtrise d'oeuvre, mais également en sa qualité propre d'architecte ; que si M. X se prévaut de l'intervention de la réception des travaux, cette circonstance ne saurait pour autant le soustraire à sa responsabilité contractuelle dès lors que les effets de la réception, qui interdisent en principe au maître d'ouvrage d'invoquer des désordres apparus antérieurement à celle-ci et dont il est réputé avoir renoncé à demander la réparation, ne sauraient s'étendre aux droits et obligations nés à raison de désordres révélés en cours d'exécution du marché et réparés avant la réception des travaux ; qu'en l'espèce au demeurant, le protocole d'accord signé par les parties le 19 janvier 1998, et dont l'article 8 leur ouvrait, en l'absence de solution amiable, la possibilité d'utiliser toute voie de droit pour obtenir réparation de leur préjudice, doit être regardé comme ayant entendu leur permettre de poursuivre la recherche du règlement définitif du litige indépendamment de la réception ; qu'ainsi, dès lors qu'il n'est pas allégué et qu'il ne résulte pas de l'instruction que le décompte définitif du marché ait été établi depuis lors selon les modalités prévues par les documents contractuels, la commune de Villerouge-Termenes était fondée à rechercher devant le tribunal la responsabilité contractuelle de M. X ;
Considérant, à cet égard, que le tribunal, après avoir relevé à juste titre que M. X n'établissait pas que la commune avait une part de responsabilité dans les erreurs de conception des ouvrages litigieux, a retenu la responsabilité intégrale du groupement et, à ce titre, a condamné M. X, en qualité de mandataire solidaire de ses co-traitants, à rembourser la commune du coût de réparation des désordres s'élevant à la somme non contestée de 300.000 F (45.734,71 euros), assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 1998 ;
Considérant toutefois, sur ce point, que la convention litigieuse passée entre la commune et le groupement conjoint de co-traitants ayant désigné M. X comme mandataire, ne comporte aucune stipulation instituant une quelconque solidarité entre ces derniers, ou prévoyant que le mandataire commun serait solidaire de ses co-traitants, et ne se réfère à aucun autre document prescrivant une telle solidarité ; qu'elle est d'ailleurs assortie d'une tableau de répartitions des missions et des rémunérations entre chacun des membres dudit groupement ; que, dans ces conditions, la commune de Villerouge-Termenes ne pouvait rechercher la responsabilité de M. X qu'en sa seule qualité d'architecte, à raison des fautes contractuelles qu'il a éventuellement commises, et que c'est donc à tort que le tribunal a condamné ce dernier au titre d'une prétendue solidarité avec le groupement de maîtrise d'oeuvre qu'il représentait ;
Considérant qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les conclusions indemnitaires de la commune de Villerouge-Termenes dirigées devant le tribunal administratif contre M. X en sa qualité d'architecte ;
Considérant que ni le protocole d'accord conclu le 19 janvier 1998 entre les parties au marché litigieux en vue du préfinancement de la réparation des désordres, ni aucune autre pièce du dossier ne fournissent d'indications sur la part qu'aurait prise chaque membre du groupement de maîtrise d'oeuvre dans la survenance des désordres en cause, et ne permettent donc pas d'établir l'éventuelle responsabilité encourue par M.X, mais contestée par lui, au titre de ses fonctions d'architecte ; que par suite il y a lieu, avant de statuer, d'ordonner une expertise en vue de déterminer la nature exacte des vices de conception à l'origine de ces désordres, qu'ils soient d'ordre architectural, technique ou relèvent d'un défaut de contrôle technique, et de préciser ceux qui procèdent d'un manquement aux règles de l'art par M. X ;
Sur l'appel incident :
Considérant, en premier lieu, que pour rejeter la demande indemnitaire que lui a présentée la commune de Villerouge-Termenes, d'un montant de 150.000 F (22.867,35 euros), en vue de la réparation de l'effet désastreux du mauvais fonctionnement de l'ouvrage auprès des clients, agences de voyage et autres médias, le tribunal administratif a estimé que la commune n'apportait aucun élément précis sur la nature et l'étendue du préjudice qu'elle alléguait avoir subi ; que dans ces conditions, et contrairement à ce que soutient la commune, le jugement attaqué comporte une motivation explicite et suffisante de rejet de sa demande et n'est entachée sur ce point d'aucune irrégularité ;
Considérant, en second lieu, que la commune, qui n'a apporté en cause d'appel aucun éclaircissement supplémentaire sur les motifs de la même demande, ne l'avait en effet assortie, devant les premiers juges, d'aucune précision suffisante pour leur permettre d'en apprécier la portée ; que la commune de Villerouge-Termenes n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que ceux-ci ont rejeté cette demande ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu de réserver les conclusions des parties fondées sur cet article jusqu'en fin d'instance ;
DECIDE
Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la requête de M. Régis X, procédé à une expertise aux fins précisées ci-après.
Article 2 : L'expert sera désigné par le président de la Cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R.621-2 à R.621-14 du code de justice administrative.
Article 3 : Il aura pour mission de déterminer la nature exacte des vices de conception à l'origine des désordres ayant affecté le four et la cheminée médiévaux de la salle de restauration du château de Villerouge-Termenes, de distinguer entre ceux qui sont d'ordre architectural ou technique ou qui relèvent d'un défaut de contrôle technique ; il précisera ceux qui procèdent d'un manquement au règles de l'art par M. Régis X ; il fera, s'il y a lieu, toutes autres constatations nécessaires, enregistrera les observations de tout intéressé et annexera à son rapport tous documents utiles.
Article 4 : Les frais d'expertise sont réservés pour qu'il y soit statué en fin d'instance.
Article 5 : L'appel incident présenté par la commune de Villerouge-Termenes est rejeté.
Article 6 : Les conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont réservées pour qu'il y soit statué en fin d'instance.
Article7 : Le présent arrêt sera notifié à M. Régis X, à la commune de Villerouge-Termenes et au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.
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