Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2002, présentée pour M. Paul X, demeurant ..., par Me Pozzo Di Borgo ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9704895 du 11 octobre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes, qui lui ont été réclamées au titre des années 1990, 1991 et 1992 ainsi qu'au prélèvement social de 1 % mis à sa charge au titre des mêmes années ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes, ainsi que du prélèvement et de condamner le Trésor Public au versement d'intérêts moratoires ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 7 000 euros au titre de
l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu la convention franco-monégasque du 18 mai 1963 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mai 2005 :
- le rapport de Mme Mariller, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Bonnet, commissaire du gouvernement ;
Sur le principe de l'assujettissement de M. X à l'impôt sur le revenu en France :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : « les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus… » que la convention franco-monégasque du 18 mai 1963 dispose en son article 7-1 : « les personnes physiques de nationalité française… qui ne peuvent justifier de cinq ans de résidence habituelle dans la Principauté à la date du 13 octobre 1962 sont considérées comme fiscalement domiciliées en France et y sont assujetties à l'impôt sur le revenu dans les conditions de droit commun » ;
Considérant que M. X qui revendique la nationalité italienne ne conteste pas avoir acquis la nationalité française du fait de la naturalisation de ses parents ; que le certificat de résidence qu'il a obtenu des autorités monégasques le 22 avril 2004 relate qu'il réside en principauté depuis le 1er mai 1957 avec interruption du 10 août 1961 au 1er octobre 1964 ; qu'ainsi ce certificat ne lui permet pas de justifier de cinq années de résidence habituelle dans la Principauté au 13 octobre 1962 ; que si le requérant soutient qu'il a toujours vécu à Monaco de 1955 à 1958 dans un foyer tenu par des ecclésiastiques, puis chez son père de 1958 à 1960, puis à nouveau au foyer de 1961 à 1963, il ne produit aucun élément de nature à prouver ses allégations qui ne sont notamment pas plus établies par la production l'acte de décès de son grand-père et de son père à Monaco, ni par les fait que ses parents étaient domiciliés à sa naissance à Monaco ; qu'il doit ainsi être regardé comme fiscalement domicilié en France au sens des dispositions précitées de la convention franco-monégasque ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes du second alinéa de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales : « Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente » ; que M. X se prévaut des articles 15 et 17 d'une instruction du 12 décembre 1995 (14 B-1-95) qui prévoient sous certaines conditions qu'elle détermine que les personnes qui ont une double nationalité française et étrangère et qui ont transporté leur résidence à Monaco avant le 8 juillet 1978 ou avant la date de publication de l'instruction sont placées hors du champ d'application de l'article 7-1 de la convention franco-monégasque ; que cependant, les impositions en litige se rapportant à des années antérieures à la date de publication de ladite instruction, le requérant ne peut s'en prévaloir sur le fondement de l'article L.80-A précité du livre des procédures fiscales ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que M. X a été avisé à son domicile le 7 juillet 1993 du dépôt de l'avis de vérification ; que le pli a été retourné à l'administration fiscale avec la mention « non réclamé - retour à l'envoyeur » ; que les mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe permettent d'établir la régularité de la notification de l'avis de vérification, sans que la production d'une attestation de l'administration postale soit nécessaire ; que le moyen tiré de ce que le requérant n'aurait pas été régulièrement avisé de la vérification en violation des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales manque ainsi en fait ;
Considérant, d'autre part, que si M. X soutient qu'il n'a pas été destinataire de la Charte du contribuable vérifié, il résulte de l'instruction qu'un exemplaire de ce document lui a été adressé en recommandé avec accusé de réception, en même temps que l'avis de vérification ; qu'à défaut d'avoir retiré le pli en instance, le requérant n'est pas fondé à se plaindre de ce que la Charte ne lui a alors pas été remise ; qu'en outre, il résulte d'une mention manuscrite figurant sur une lettre du vérificateur datée du 28 août 1993 que ce document lui a ultérieurement été remis en main propre le 3 mai 1994 ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Sur les prêts familiaux :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le compte de M. X ouvert à la banque Sudaméris a été crédité le 8 juillet 1990 d'une somme de 353.980,32 francs par un virement en provenance de Mme , nièce du requérant ; que l'administration fait cependant valoir sans être contredite que la somme dont s'agit n'a fait, au centime près, que transiter par le compte de Mme sur lequel elle a été créditée la veille du virement effectué en faveur de M. X ; que dans ces conditions c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que l'origine de la somme litigieuse n'était pas établie ;
Considérant, par ailleurs, que le compte de M. X a également été crédité en décembre 1991 d'un chèque de 103.830 francs tiré sur la Banque Nationale de Paris ; que si le requérant soutient qu'il s'agit d'un prêt consenti par sa soeur, Mme , l'attestation établie par cette dernière datée du 2 décembre 1991 relate que le prêt a été consenti au moyen d'un chèque tiré sur le Crédit foncier de Monaco ; que le certificat produit par le requérant selon lequel le compte de sa soeur a été crédité le 6 mars 1995 de la somme de 110 000 francs, ne permet pas d'établir en l'absence de production du débit du compte du requérant qu'il correspondrait au remboursement du prêt ; que compte tenu de ces incohérences, de l'absence de production du chèque litigieux et de preuve du remboursement de ce prêt, l'administration doit être regardée comme établissant l'origine indéterminée de la somme de 103.830 francs ;
Considérant, enfin, que le compte de M. X a été crédité en 1990 d'une somme de 100 000 francs par la remise d'un chèque émanant de Mme Marinelli avec laquelle il n'a aucun lien de parenté ; que le requérant n'établit pas la réalité de ce prêt par la seule production d'une attestation de Mme Marinelli qui n'a pas date certaine ;
Sur les versements espèces :
Considérant que M. X soutient qu'il a retiré en liquide le 18 juillet 1990, jour de l'acquisition d'une villa à Roquebrune, la somme de 540 000 francs afin de régler les acomptes exigés par les entreprises chargées de travaux de rénovation de sa propriété ; qu'il allègue qu'il a été contraint de renoncer à ses projets et qu'il a redéposé la somme en liquide sur ses comptes en plusieurs versements jusqu'au mois de mars 1991 ; qu'en l'absence de toute preuve de ses allégations et même de toute précision quant à ses projets de rénovation et aux motifs pour lesquels il a été contraint d'y renoncer, la somme de 540 000 francs ne peut être considérée comme à l'origine des versements espèce constatés postérieurement sur son compte ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le dernier versement espèce a été constaté à la fin du mois de mars 1991 ; que l'administration a accepté de considérer qu'une somme de 14.490 francs en espèce correspondait à l'encaissement en liquide par M. X des trois premiers loyers mensuels de 4830 francs chacun et a imposé cette somme dans la catégorie des revenus fonciers ; qu'en l'absence de tout versement espèce constaté après le 31 mars 1991, le requérant n'est pas fondé à demander que le montant des neufs autres loyers encaissés au cours de l'année 1991 soient imputés sur les versements espèce constatés avant le 31 mars ;
Sur l'assujettissement de M. X au prélèvement social de 1 % :
Considérant que les dispositions précitées de l'article 7-1 de la convention franco-monégasque du 18 mai 1963 permettent seulement l'imposition des nationaux à l'impôt sur le revenu, à l'exclusion du prélèvement social qui constitue une contribution distincte ; que, par suite, M. X est fondé à demander la décharge du prélèvement social auquel il a été assujetti au titre des années 1990, 1991 et 1992 ; qu'en l'absence de litige né et actuel avec le comptable du Trésor, les conclusions tendant au paiement des intérêts moratoires dus sur ces sommes ne sont pas recevables ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des sommes mises à sa charge au titre du prélèvement social de 1 % et à demander, dans cette mesure, son annulation ;
Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel, à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il est accordé à M. X la décharge du prélèvement social de 1 % mis à sa charge au titre des années 1990, 1991 et 1992.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Nice du 11 octobre 2001 est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Paul X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
N° 02MA00102 2