Vu la requête, enregistrée le 3 juillet 2002, présentée pour M. et Mme X, élisant domicile ..., par Me Châteaureynaud, avocat ; M. et Mme X demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 99-2448 du 29 mars 2002 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Beaucaire à leur verser une somme de 650 000 F en réparation des préjudices qu'ils ont subis du fait de l'inondation de leur maison d'habitation dont la construction a été autorisée par un permis de construire ne comportant aucune prescription relative au risque d'inondation ;
2°) de condamner la commune de Beaucaire à leur verser une somme de 989 000 euros, soit 15 000 euros au titre de la réparation du préjudice matériel, 61 000 euros au titre de la dépréciation de leur habitation et 22 900 euros au titre de leur préjudice moral ;
3°) de condamner la commune de Beaucaire à leur verser une somme de 4 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2005,
- le rapport de Mme Buccafurri, rapporteur ;
- les observations de Me Picardo de LLC et Associés pour M. Jean Luc X ;
- et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. et Mme X qui avaient acquis, en 1993, un terrain situé 53 rue de Comps, sis sur le territoire de la commune de Beaucaire, ont obtenu, afin d'y édifier une maison à usage d'habitation, un permis de construire délivré le 7 juin 1993 par le maire de la commune de Beaucaire sur le fondement du plan d'occupation des sols de la commune approuvé le 1er juillet 1982 et révisé le 1er décembre 1988 ; que leur propriété ayant été inondée en janvier 1994, à la suite d'une forte crue du Rhône, alors que leur habitation était en cours de construction, ils ont demandé devant le Tribunal administratif de Montpellier, la condamnation de la commune de Beaucaire à réparer les préjudices qu'ils ont subis à raison des fautes que ladite collectivité aurait commises tant lors de l'élaboration de son plan d'occupation des sols (POS) classant en zone constructible ledit terrain que lors de la délivrance du permis de construire précité qui ne comportait aucune prescription particulière relative au risque d'inondation et ont sollicité l'indemnisation de la perte de valeur vénale de leur propriété du fait du classement de leur terrain en zone inconstructible au plan de prévention des risques naturels de confluence du Rhône-Gardon-Briançon ; que M. et Mme X relèvent appel du jugement précité en date du 29 mars 2002 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir et l'exception de prescription quadriennale opposées à la demande de première instance par la commune de Beaucaire :
Considérant, en premier lieu, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, que le secteur dans lequel est située la propriété de M. et Mme X n'était pas compris dans les zones de submersibilité flagrante situées en bordure immédiate du Rhône, telles que délimitées par le plan des surfaces submersibles du Rhône d'Avignon à la mer, approuvé par le décret du 3 septembre 1911 ; que si les appelants font valoir que ce secteur devait être regardé comme faisant partie de telles zones, le document qu'ils ont versé au dossier intitulé «Statistiques des plus fortes crues du Rhône», qui fait état uniquement des constatations des débits du Rhône, lors des plus fortes crues, pour l'ensemble de la commune de Beaucaire, n'est pas de nature à démontrer que le secteur particulier où est situé leur terrain était compris dans une zone de submersibilité flagrante ; que si M. et Mme X ont produit, en outre, un constat d'huissier faisant état de l'existence, à proximité immédiate de leur propriété, d'une plaque mentionnant une crue survenue en 1900 d'une même hauteur d'eau que celle survenue en janvier 1994, ni ce phénomène survenu une seule fois et quatre-vingt quatorze ans plus tôt ni les débits constatés pour l'ensemble du territoire de la commune de Beaucaire par le document statistique susmentionné, ne sont de nature à démontrer, eu égard aux aménagements réalisés dont notamment le barrage de Valabrèges, que de telles crues, à des hauteurs d'eau comparables, étaient susceptibles de se renouveler dans ce secteur à la date à laquelle les autorités communales ont approuvé le POS en vigueur lors de la délivrance du permis de construire en litige ; que, par suite, ainsi que l'ont à bon droit estimé les premiers juges, en classant le terrain en cause en zone constructible, les auteurs du POS alors en vigueur n'ont pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard du risque d'inondation ; qu'ainsi, aucune faute ne peut être retenue de ce chef à l'encontre de la commune de Beaucaire ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction, et M. et Mme X n'établissent pas, par les deux documents précités, qu'à la date à laquelle la demande de permis de construire présentée par les intéressés a été instruite, les autorités communales étaient informées que le terrain d'assiette de la construction était soumis à un risque d'inondation , notamment compte tenu de sa situation par rapport aux rives du Rhône ; que les correspondances versées au dossier, faisant état de ce risque d'inondation, sont postérieures aux crues qui se sont déroulées en octobre 1993 et janvier 1994 ; qu'ainsi en n'assortissant pas le permis de construire qui leur a été délivré le 7 juin 1993 de prescription particulière relative au risque d'inondation, le maire de la commune de Beaucaire n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en l'état des informations dont les autorités communales disposaient à cette date ; que, par suite, aucune faute ne peut être retenue à l'encontre de ladite commune de ce chef ;
Considérant, en troisième lieu, que le risque d'inondation auquel était soumis le terrain d'assiette en cause n'étant pas connu des autorités communales avant les inondations d'octobre 1993 et janvier 1994, M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que les services municipaux auraient commis une faute en ne les informant pas de ce risque, lors de l'acquisition de leur terrain ou lors de la délivrance du permis de construire du 7 juin 1993 ;
Considérant, enfin, que si M. et Mme X font valoir que leur propriété a subi une dépréciation importante du fait du classement de leur terrain en zone inondable dans le plan de prévention des risques naturels applicable sur la commune de Beaucaire, cette dernière ne peut, en tout état de cause, voir sa responsabilité engagée à raison d'un classement décidé par les autorités de l'Etat ;
Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 29 mars 2002, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de M. et Mme X le paiement à la commune de Beaucaire de la somme de 1 000 euros qu'elle réclame au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.
Article 2 : M. et Mme X verseront à la commune de Beaucaire une somme de 1 000 euros (mille euros) sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme X, à la commune de Beaucaire et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
N° 02MA01224 2