Vu la requête, enregistrée le 17 mars 2004, présentée pour M. Gilbert X élisant domicile ...), par la SCP Robert, avocats ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 010675 du 29 janvier 2004 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser, en sa qualité d'ayant-cause de Melle Y, des intérêts moratoires sur l'indemnité représentative de traitements et sur les arrérages de pension qui lui étaient dus à la suite de la demande de reconstitution de la carrière de Melle Y, ainsi que la somme de 10.000 F (1.524,49 euros) au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 112.792,91 euros au titre des intérêts moratoires, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt, et la somme de 2.000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens ; à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à lui payer la même somme au titre des intérêts compensatoires ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-1283 du 15 juin 1945 ;
Vu la loi n° 82-1021 du 3 décembre 1982 modifiée par la loi n° 87-503 du 8 juillet 1987 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 octobre 2006 :
- le rapport de Mme Steck-Andrez, premier conseiller,
et les conclusions de Mme Paix, commissaire du gouvernement ;
Sur la demande d'intérêts moratoires :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Melle Y a présenté le 12 novembre 1983 une demande de reconstitution de carrière en application des dispositions de l'article 9 de la loi du 3 décembre 1982, relative au règlement de certaines situations résultant des évènements d'Afrique du Nord, de la guerre d'Indochine ou de la seconde guerre mondiale ; que l'administration a fait droit à cette demande par une décision du 25 novembre 1992 et a versé les sommes correspondantes à M. X, ayant-droit de l'intéressée, en 1999 et en 2000 ; que M. X a demandé le versement d'intérêts moratoires sur ces sommes ; que le ministre de l'économie et des finances et le ministre de l'éducation nationale ont opposé un refus à cette demande ;
Considérant, d'une part, que les sommes dues par l'administration ne produisent intérêts, sauf dispositions contraires, qu'à compter de la date à laquelle les intéressés en ont réclamé le paiement ; qu'il est constant que la demande que Melle Y a présentée le 12 novembre 1983 n'était pas assortie d'une demande expresse tendant au rappel des traitements et arrérages de pension consécutifs à la demande de reconstitution de carrière sollicitée ; qu'une telle demande de paiement n'a été présentée par M. X que le 14 mars 2001, alors que l'administration lui avait spontanément versé les sommes correspondantes ;
Considérant, d'autre part, que M. X se prévaut des dispositions de l'article 3 de la loi du 8 juillet 1987, modifiant l'article 9 de la loi du 3 décembre 1982 selon lesquelles les reclassements prévus entraîneront un effet pécuniaire rétroactif à compter de la date du fait générateur, pour soutenir que la demande de reconstitution de carrière de Melle Y valait sommation de payer les sommes dues en raison de ce reclassement et qu'elle a, par suite, fait courir les intérêts sur les rappels de traitements et de pension qui lui ont été versés ;
Mais considérant qu'aux termes de l'article 4 de la même loi : Le bénéfice des dispositions de l'article précédent peut être demandé dans le délai d'un an suivant la promulgation de la présente loi ; que Melle Y, qui avait demandé le bénéfice de l'article 9 de la loi du 3 décembre 1982 le 12 novembre 1983, n'avait pas sollicité dans le délai d'un an suivant la promulgation de la loi du 8 juillet 1987 le bénéfice de cette dernière loi, comme l'exigeait son article 4 ; qu'ainsi sa demande de reclassement n'a pu faire courir des intérêts sur les sommes correspondantes ;
Considérant, en outre, que M. X, qui ne saurait utilement invoquer le bénéfice d'une réponse ministérielle du 13 septembre 1994, ni les dispositions d'une circulaire du ministre du budget du 24 novembre 1980, contraires à la loi, se prévaut également des dispositions de plusieurs décrets publiés en 1946, pris pour l'application de l'ordonnance du 15 juin 1945 susvisée ; que, toutefois, les dispositions de ces décrets, qui régissaient la situation de personnels des administrations centrales, ne sont en tout état de cause pas applicables aux personnels visés par l'article 9 de la loi du 3 décembre 1982 ;
Considérant, enfin, que M. X soutient que la loi du 3 décembre 1982 ouvre aux fonctionnaires qu'elle vise le bénéfice des dispositions de l'ordonnance du 15 juin 1945 prévoyant leur reclassement assorti d'un effet pécuniaire rétroactif ; que, cependant, à la date de la demande de Mme Y, ni les dispositions de l'ordonnance du 15 juin 1945, ni celles de l'article 9 de la loi du 3 décembre 1982, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire en vigueur ne permettaient de la faire bénéficier du rappel rétroactif des sommes dues ;
Considérant, par ailleurs, que la circonstance que d'autres fonctionnaires aient pu bénéficier de dispositions plus favorables, qui n'étaient pas en vigueur à la date de la demande de Melle Y, ou n'étaient pas applicables à sa situation, n'est pas constitutive d'une rupture d'égalité des citoyens devant la loi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande d'intérêts moratoires ;
Sur la demande d'intérêts compensatoires :
Considérant que la demande susvisée, présentée pour la première fois en appel, est nouvelle et donc irrecevable ; qu'elle doit, par suite, être rejetée ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à M. X une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Sur la demande de remboursement des dépens :
Considérant que la présente instance n'a pas donné lieu à des dépens ; que les conclusions de M. X tendant au remboursement de dépens est dès lors sans objet ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
N° 04MA00580 2