Vu le recours, enregistré le 3 octobre 2003, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;
Le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 99-3847 en date du 19 mai 2003 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des intérêts de retard y afférents à laquelle M. et Mme Jean-Marc X ont été assujettis au titre de l'année 1994 ;
2°) de rétablir M. et Mme X au rôle de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1994 à raison des droits et intérêts de retard dont la décharge a été ordonnée par les premiers juges ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire présenté le 5 mars 2004 pour M. et Mme X, par la SCP d'avocats J.P. et R. Leperre ;
M. et Mme X demandent à la Cour :
1°de rejeter le recours du ministre et de confirmer l'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Marseille ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 763 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le mémoire, enregistré le 13 septembre 2004, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, qui demande à la Cour de rejeter les conclusions des contribuables tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mai 2007 ;
- le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;
- les observations de Me Cordoliani, substituant la SCP d'avocats JP et R - Leperre pour M. et Mme X ;
- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité de l'activité de « vente de prestations de services de travaux administratifs » exercée par Mme X sous la dénomination « B.T.S. Bureautique Télé Services », l'administration fiscale a entendu requalifier l'activité exercée par l'intéressée et a imposé dans la catégorie des traitements et salaires, au titre de l'année 1994, les produits de l'activité de Mme X, déclarés par celle-ci en tant que bénéfices industriels et commerciaux, exonérés en l'occurrence par application des dispositions de l'article 44 sexies du code général des impôts ; que, par l'article 1er d'un jugement en date du 19 mai 2003, le Tribunal administratif de Marseille a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des intérêts de retard y afférents à laquelle M. et Mme Jean-Marc X ont été assujettis au titre de l'année 1994 en conséquence de cette requalification ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour d'annuler l'article 1er de ce jugement et de rétablir M. et Mme X au rôle de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1994 à raison des droits et intérêts de retard dont la décharge a été ordonnée par les premiers juges ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 120-3 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur en l'espèce : « Les personne physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés (…) sont présumées ne pas être liées par un contrat de travail dans l'exécution de l'activité donnant lieu à cette immatriculation. Toutefois, l'existence d'un contrat de travail peut être établie lorsque les personnes citées au premier alinéa fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d'ouvrage dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard de celui-ci » ;
Considérant que l'activité de « vente de prestations de services de travaux administratifs (secrétariat, bureautique, commercialisation de tous produits non réglementés) » exercée par Mme X en 1994, sous le nom commercial de « B.T.S. Bureautique Télé Services » a fait l'objet d'une inscription au registre du commerce et des sociétés depuis sa création en 1993 ; qu'il incombe, dès lors, à l'administration fiscale de renverser la présomption de travail non-salarié instituée par l'article L. 120-3 du code du travail ;
Considérant que, si l'administration fiscale soutient que Mme X se serait trouvée en fait dans une situation de subordination vis-à-vis de la SARL « Incitations » et d'une seconde entreprise dirigée par M. Geslin, gérant majoritaire de la SARL « Incitations », l'entreprise « Geslin Consultants», dont la contribuable était auparavant salariée, il résulte de l'instruction et notamment des stipulations du contrat de prestations de services conclu le 28 avril 1993 entre la SARL « Incitations » et l'entreprise « B.T.S. Bureautique Télé Services » dirigée par Mme X relatives aux conditions d'exécution de ce contrat que l'entreprise de Mme X « détermine seule les moyens qu'elle estime nécessaires à la réalisation des travaux qui lui sont confiés et les personnels qu'elle estime avoir à mettre en oeuvre pour y parvenir » ; que le contrat prévoyait expressément qu'aucune des parties ne pouvait revendiquer l'exclusivité de la prestation et qu'il pouvait être rompu par chacune des parties par le simple envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception trois mois au moins avant son échéance ; que, par suite, les termes de ce contrat, alors même que Mme X était amenée à utiliser du papier à en-tête de la SARL « Incitations » pour les correspondances de cette société avec les tiers, laissaient à l'intéressée le soin d'organiser son activité sans contrainte horaire ou soumission à de quelconques directives ; qu'en outre, même si Mme X réalisait plus de 95 % de son chiffre d'affaires avec la SARL « Incitations » et l'entreprise « Geslin Consultants», elle était libre de diversifier son activité en recherchant d'autres clients, comme elle l'a fait dès avril 1993 avec des résultats certes limités mais témoignant de la liberté d'organisation qui caractérise une activité commerciale indépendante ;
Considérant qu'il résulte également de l'instruction que l'entreprise « B.T.S. Bureautique Télé Services » dirigée par Mme X disposait d'un local professionnel donné en location par la SCI « La Cascade », différent, même s'il était implanté sur le même site, du bureau que l'intéressée occupait auparavant lorsqu'elle était salariée de l'entreprise « Geslin Consultants» ; que l'administration fiscale ne soutient pas que la SCI « La Cascade » aurait eu des liens de droit ou des intérêts communs avec la SARL « Incitations » et l'entreprise « Geslin Consultants» ; que Mme X procédait elle-même et à partir des fonds de son entreprise aux achats de matériels de bureau nécessaires à son activité ; qu'enfin, si la rémunération servie à l'entreprise « B.T.S. Bureautique Télé Services » par la SARL « Incitations » ne pouvait, aux termes du contrat de prestations de services conclu le 28 avril 1993 entre les deux sociétés excéder 13 % du chiffre d'affaires de la SARL « Incitations », ce mode de rémunération n'est pas de nature à ôter à l'activité de l'entreprise dirigée par Mme X son caractère indépendant ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les premiers juges ont retenu à bon droit que les éléments de fait invoqués par l'administration fiscale n'étaient pas de nature à renverser la présomption de travail non salarié instituée par les dispositions de l'article L. 120-3 du code du travail ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que l'activité de Mme X relèverait de la catégorie des bénéfices non commerciaux ; que, par suite, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des intérêts de retard y afférents à laquelle M. et Mme Jean-Marc X ont été assujettis au titre de l'année 1994 ;
Sur les frais exposés par M. et Mme X et non compris dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 763 euros au titre des frais exposés par M. et Mme X et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme X la somme de 763 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'EMPLOI et à M. et Mme Jean-Marc .
Copie en sera adressée à la SCP d'avocats J.P. et R. Leperre.
N°03MA02049 2