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17/10/2007 | FRANCE | N°05MA00047

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 17 octobre 2007, 05MA00047


Vu la requête, enregistrée le 12 janvier 2005, présentée pour la société civile immobilière CORIN (SCI CORIN), représentée par son gérant en exercice, et dont le siège est 10 rue Blacos à Nice (06000), par la SCP Orts et associés, avocat ;

La SCI CORIN demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n°0200053 en date du 10 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Bastia, tout en reconnaissant la responsabilité de la commune de Piana, a rejeté sa demande tendant à obtenir la condamnation de cette collectivité à lui verser la somme de 339

961,40 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la délivrance,...

Vu la requête, enregistrée le 12 janvier 2005, présentée pour la société civile immobilière CORIN (SCI CORIN), représentée par son gérant en exercice, et dont le siège est 10 rue Blacos à Nice (06000), par la SCP Orts et associés, avocat ;

La SCI CORIN demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n°0200053 en date du 10 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Bastia, tout en reconnaissant la responsabilité de la commune de Piana, a rejeté sa demande tendant à obtenir la condamnation de cette collectivité à lui verser la somme de 339 961,40 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la délivrance, le 27 novembre 1999, d'un permis de construire illégal ;

2°) de condamner la commune de Piana à lui verser la somme totale de 347 155,02 euros, outre les intérêts capitalisés à compter de la date du recours indemnitaire préalable, et se décomposant comme suite :
- la somme de 182 510 euros au titre de la dépréciation du terrain,
- la somme de 27 440,80 euros au titre des frais d'acquisitions foncières et de libération du sol,
- la somme de 38 112,30 euros au titre des frais d'étude et de gestion,
- la somme de 22 867,40 euros au titre des honoraires d'architecte et du bureau d'étude inhérents au dépôt du permis de construire,
- la somme de 76 224,50 euros au titre de la privation des bénéfices et de la commercialisation du projet immobilier,




3°) de condamner la commune de Piana à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

…………………………..

Vu le jugement attaqué ;


Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 juin 2006, présenté pour la commune de Piana, représentée par son maire en exercice, par Me Vanzo ;

Elle conclut :

1) à titre principal au rejet de la requête ;
2) à titre subsidiaire à la condamnation de l'Etat à la relever et garantir de toute condamnation, en principal et intérêts, qui serait prononcée à son encontre,
3) à la condamnation de tout succombant à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
…………………………

Vu le mémoire enregistré par télécopie le 27 février 2007 et régularisé le 5 mars 2007, présenté par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ;

Il conclut au rejet de la requête et de l'appel en garantie formé par la commune de Piana à l'encontre de l'Etat ;

…………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2007 :

- le rapport de M. Laffet, rapporteur ;

- les observations de Me Vanzo de la SCP Vanzo et Ribibou pour la commune de Piana ;

- et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;


Considérant que, par jugement en date du 10 novembre 2004, le Tribunal administratif de Bastia, après avoir reconnu la faute de la commune de Piana susceptible d'engager la responsabilité de cette dernière envers la SCI CORIN pour lui avoir illégalement délivré un permis de construire au regard des dispositions de la loi « littoral », a écarté l'indemnisation de l'ensemble des chefs de préjudice en tant que ceux-ci, soit étaient dépourvus de tout lien de causalité avec l'illégalité commise, soit, ne revêtaient qu'un caractère éventuel ; que la SCI CORIN relève appel de ce jugement ;

Sur la responsabilité de la commune de Piana :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 7 juillet 1997, le maire de la commune de Piana a délivré à la SCI Tuffeli un certificat d'urbanisme positif pour un terrain cadastré section D n°333, 338, 340 341 et 342 qu'elle envisageait de vendre, en faisant état de la constructibilité de ce terrain pour sa partie située en zone NB au plan d'occupation des sols de la commune ; qu'au vu de ce certificat, la SCI CORIN a acquis le terrain en cause le 4 novembre 1997, puis demandé, le 23 novembre 1998, un permis de construire en vue de réaliser une maison d'habitation de 439 m2 de surface hors oeuvre brute ; que cette autorisation lui a été délivrée le 27 novembre 1999 par le maire de Piana ; que ce terrain étant situé sur un promontoire rocheux dominant la mer immédiatement à l'Ouest de la plage d'Arone, ce certificat d'urbanisme positif a été délivré en violation de l'article L-146.4 du code de l'urbanisme qui n'autorise, dans les espaces proches du rivage, que l'extension de l'urbanisation en continuité avec les agglomérations et villages existant ou la création de hameaux nouveaux intégrés à l'environnement ; qu'il en est de même du permis de construire qui a été annulé pour ce motif, à la demande du préfet de la Corse-du-Sud, par jugement du Tribunal administratif de Bastia en date du 18 mai 2000, confirmé par un arrêt de la Cour de céans rendu le 3 juin 2004 ; qu'en délivrant un certificat d'urbanisme positif et en accordant le permis de construire sollicité par la SCI CORIN, le maire de la commune de Piana a ainsi commis des fautes de nature à engager la responsabilité entière de cette collectivité envers la SCI CORIN sans que les circonstances que cette société ait déposé sa demande de permis de construire après l'expiration du délai de validité du certificat d'urbanisme positif délivré le 7 juillet 1997 ou qu'elle ait acquis le terrain sans assortir cet achat d'une condition suspensive liée à l'octroi d'un permis de construire, puissent exonérer, même pour partie, la responsabilité de cette collectivité ;

Sur le préjudice :

En ce qui concerne le préjudice résultant de l'acquisition du terrain :

Considérant que, si le préjudice résultant de l'acquisition du terrain ne présente aucun lien direct avec la délivrance illégale du permis de construire, il résulte de l'instruction qu'il est, en revanche, la conséquence directe de la délivrance fautive du certificat d'urbanisme positif au vu duquel la SCI a acquis ce terrain ;

Considérant, toutefois, que dans sa demande préalable adressée le 24 octobre 2001 au maire de Piana et dans sa requête introductive d'instance enregistrée le 21 janvier 2002 devant le Tribunal administratif de Bastia, la SCI CORIN demandait à être indemnisée du préjudice résultant du permis de construire qui lui avait été illégalement délivré le 27 novembre 1999 par le maire de Piana ; que, dans un nouveau mémoire présenté au Tribunal administratif de Bastia, enregistré le 7 octobre 2004, la SCI CORIN a modifié le contenu de ses conclusions, reprises en cause d'appel, et demandé à être indemnisée du préjudice résultant du certificat d'urbanisme positif lui-même illégal en date du 7 juillet 1997 ; que ces dernières conclusions qui tendent à la réparation d'un préjudice distinct de celui invoqué dans la demande initiale n'ont pas été précédées d'une décision administrative susceptible de lier le contentieux et n'ont pas donné lieu à une réponse au fond de la commune de Piana au cours de l'instance devant le Tribunal administratif ; que, devant la Cour de céans, la commune de Piana n'a pas défendu au fond sur ce point mais a invoqué l'irrecevabilité de ces dernières conclusions ; que celles-ci sont donc irrecevables pour défaut de liaison du contentieux ;

En ce qui concerne le préjudice lié aux frais d'études et de gestion :

Considérant que, si la SCI CORIN réclame à ce titre une somme de 38 112,30 euros, elle n'établit nullement que ces frais étaient nécessaires à la constitution du dossier de demande de permis de construire, alors même qu'elle ne produit à l'appui de sa demande qu'une facture établie le 27 juillet 1998 par un expert en hydrogéologie, d'un montant de 3 786,84 francs ; que ce chef de préjudice ne saurait donc être indemnisé ;

En ce qui concerne le préjudice résultant des frais d'architecte et de bureau d'études :

Considérant que les pièces versées au dossier ne démontrent pas que la SCI CORIN ait acquitté les honoraires d'architecte et de bureau d'études dont elle demande l'indemnisation ; que, dès lors, sa demande devra, sur ce point, être écartée ;

En ce qui concerne le préjudice lié à la privation des bénéfices de la commercialisation du projet :

Considérant que du fait de l'annulation pour excès de pouvoir du permis de construire qu'elle avait obtenu le 27 novembre 1999, la SCI CORIN doit être regardée comme n'ayant jamais obtenu un droit à construire ; que, par suite, le bénéfice, au demeurant éventuel, qu'elle aurait pu retirer de la construction envisagée, serait résulté d'une opération elle-même illégale ; que ladite société ne saurait dès lors prétendre à être indemnisée du chef de la privation des bénéfices attendus ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCI CORIN n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia, après avoir admis le principe de la responsabilité de la commune de Piana, a rejeté sa demande indemnitaire ;

Sur l'appel en garantie formée contre l'Etat par la commune de Piana :

Considérant que, dès lors qu'aucune condamnation n'est prononcée à l'encontre de la commune de Piana, les conclusions de cette collectivité tendant à être garantie par l'Etat des condamnations prononcées contre elle sont devenues sans objet ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Piana, qui n'est pas la partie perdante, dans la présente instance, le versement de la somme que demande la SCI CORIN au titre des sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens ;


Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la SCI CORIN la somme que demande la commune de Piana au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;


DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI CORIN est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur l'appel en garantie formé par la commune de Piana à l'encontre de l'Etat.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Piana tendant au bénéfice de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.


Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI CORIN, à la commune de Piana et au ministre de l'écologie et du développement et de l'aménagement durables.

N° 05MA00047
2

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 05MA00047
Date de la décision : 17/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: M. Bernard LAFFET
Rapporteur public ?: M. CHERRIER
Avocat(s) : SCP ORTS ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2007-10-17;05ma00047 ?
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