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31/03/2008 | FRANCE | N°06MA02308

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 31 mars 2008, 06MA02308


Vu la requête, enregistrée le 3 août 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 06MA02308, présentée par la SCP d'avocats Grillat-Pagnoni, avocat, pour M. Philippe X, domicilié ... ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0105486 en date du 16 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant d'une part à l'annulation de la décision en date du 19 octobre 2001 par laquelle le directeur de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) du Var lui a demandé de reverser la somme de 18 094,32 euro

s (118 690,95 F) du fait du dépassement, au titre de l'année 2000, ...

Vu la requête, enregistrée le 3 août 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 06MA02308, présentée par la SCP d'avocats Grillat-Pagnoni, avocat, pour M. Philippe X, domicilié ... ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0105486 en date du 16 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant d'une part à l'annulation de la décision en date du 19 octobre 2001 par laquelle le directeur de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) du Var lui a demandé de reverser la somme de 18 094,32 euros (118 690,95 F) du fait du dépassement, au titre de l'année 2000, du seuil d'efficience prévu par la convention nationale des infirmiers en date du 11 juillet 1997, d'autre part à la condamnation de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Var à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative et enfin à la condamnation de la caisse primaire d'assurance maladie du Var aux entiers dépens ;

2°) d'annuler ladite décision et de condamner la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Var à lui verser la somme de 1 525 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 ;

Vu le décret n° 93-221 du 16 février 1993 ;

Vu la convention nationale des infirmiers approuvée le 31 juillet 1997 ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;



Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mars 2008 :

- le rapport de M. Francoz, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Paix, commissaire du gouvernement ;

Sur l'application et le bénéfice de la loi d'amnistie :

Considérant qu'en vertu de l'article 11 de la loi susvisée du 6 août 2002, les faits commis avant le 17 mai 2002 sont amnistiés en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles à l'exception de ceux qui constituent des manquements à la probité, aux bonnes moeurs ou à l'honneur ;

Considérant qu'il résulte de l'article 11 de la convention nationale des infirmiers du 11 juillet 1997, approuvée par arrêté interministériel du 31 juillet 1997, que les infirmiers adhérant à cette convention s'engagent à respecter un seuil annuel d'activité individuelle ou seuil d'efficience qui a notamment pour objet de garantir la qualité des soins dispensés par les professionnels conventionnés et au-delà duquel ils reversent à l'assurance maladie une partie du dépassement constaté ; que le reversement ainsi prévu constitue une sanction réprimant l'inobservation de l'une des règles déterminant les conditions d'exercice de la profession d'infirmier ; qu'il suit de là que le dépassement du seuil d'efficience par un infirmier doit être regardé comme une faute passible d'une sanction professionnelle au sens des dispositions précitées de l'article 11 de la loi du 6 août 2002, susceptible, comme telle, d'entrer dans le champ de l'amnistie ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, sans que cela soit valablement contesté par l'intéressée, que M. X a accompli en 2000 des actes correspondants à 30 417 coefficients AMI/AIS alors que le seuil annuel d'activité ressortissant aux stipulations de l'article 11 de la convention nationale des infirmiers, également appelé « seuil d'efficience », s'élevait à 24 000 coefficients ; qu'eu égard à l'importance du dépassement ainsi constaté et au caractère répété des dépassements qui ont été attribués à l'intéressée au titre des années précédentes par application des mêmes prescriptions conventionnelles, lesquelles ont pour objectif, outre la maîtrise des dépenses de santé, de garantir aux assurés des soins de qualité, ainsi que l'a exactement jugé le Tribunal administratif de Nice, les faits reprochés au requérant sont constitutifs d'un manquement à l'honneur et à la probité et n'entrent pas dans le champ de l'amnistie prononcée par l'article 11 de la loi du 6 août 2002 pour les fautes professionnelles passibles de sanctions disciplinaires ; que, par suite, le moyen fondé sur les dispositions de ladite loi doit être écarté en toutes ses branches et l'entrée en vigueur de la loi d'amnistie, alors même que la décision litigieuse de reversement n'a pas reçu de commencement d'exécution au moment de l'introduction de sa demande d'annulation par M. X, n'a pas privé d'objet les conclusions présentées par cette dernière à fin d'annulation de la décision du 19 octobre 2001 ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision en date du 19 octobre 2001 :

Sur la légalité externe :

Considérant que si M. X soutient que la décision est irrégulière dès lors qu'il n'a pas été informé de son droit à se faire assister d'un avocat ou d'une infirmière libérale, au cours de la procédure devant la commission paritaire départementale, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas allégué qu'une telle assistance lui ait été refusée par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie ; que le respect des droits de la défense n'imposait pas à ladite caisse d'aviser M. X de la possibilité qu'il avait de se faire assister d'un défenseur ; que les commissions paritaires départementales, ne présentant pas le caractère d'organismes disciplinaires, M. X ne peut utilement se prévaloir d'une violation par la convention des dispositions de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques qui réservent aux avocats le droit de plaider devant de tels organismes ;

Considérant qu'aux termes de l'article 11-3 de la convention du 11 juillet 1997 : « Le suivi du seuil est effectué au moins une fois par an, à partir des relevés individuels transmis par la caisse primaire à chaque professionnelle, dans le courant du troisième trimestre pour l'activité du premier semestre de l'année considérée (suivi intermédiaire), dans le courant du premier trimestre de l'année suivante pour l'activité de l'ensemble de l'année considérée (suivi de fin d'exercice). Les relevés indiquent le montant total des actes exprimés en coefficients et les honoraires réalisés par chaque professionnelle et/ou son remplaçant. Il indique par ailleurs les montants, correspondant à ces coefficients, pris en charge par les régimes d'assurance maladie »; et qu'aux termes de l'article 19 paragraphe 3 de ladite convention : « (...) la caisse primaire transmet le dossier de l'infirmière concernée à la commission paritaire départementale pour avis. Elle en informe par ailleurs les autres régimes. La commission dispose d'un délai de quarante-cinq jours à compter de sa saisine pour examiner les dossiers, prendre connaissance, le cas échéant, des observations écrites et/ou orales des intéressées, transmettre - avec son avis dûment motivé - les dossiers à la caisse, qui décidera, s'il y a lieu, de procéder à l'application de la procédure de reversement.(...) » ; qu'en vertu des stipulations du paragraphe 5 de l'article 11 de la convention nationale des infirmiers du 11 juillet 1997, approuvée par arrêté interministériel en date du 31 juillet 1997, la notification du reversement dû en cas de dépassement du « seuil d'efficience » est effectuée à l'infirmier intéressé par lettre recommandée avec accusé de réception, dans les quinze jours suivant l'avis rendu par la commission paritaire départementale ; qu'aucun texte ne fait obligation à la commission d'adresser son avis à l'infirmier ni à la caisse de joindre à sa décision l'avis de la commission ; qu'il ressort par ailleurs du procès-verbal d'audition des infirmiers par la commission en date du 2 juillet 2001 que celle-ci a rendu un avis motivé sur le dossier de M. X ; que, dès lors, la commission paritaire départementale a émis un avis motivé au sens des dispositions conventionnelles précitées et les moyens tirés tant de l'absence de transmission de l'avis motivé de la commission que de l'absence de motivation dudit avis doivent être écartés ;

Considérant que M. X ne soutient ni même n'allègue que les caisses primaires d'assurance maladie ne lui auraient pas communiqué les relevés périodiques de son activité au cours de l'année 2000, ainsi que le prévoit l'article 11-3 de la convention du 11 juillet 1997 ; que M. X qui a fait le choix de ne pas contester les relevés qui lui étaient adressés et de ne pas présenter des observations orales ou écrites devant la commission, n'a demandé la communication du détail de son relevé d'activité que le 12 novembre 2001, soit postérieurement à la date de l'acte attaqué ; qu'en tout état de cause, et comme cela a été relevé par les premiers juges, le relevé annuel, qui ne constitue qu'un document récapitulant pour chaque professionnel les remboursements de ses soins effectués au cours de l'année civile considérée, est le seul document prescrit par la convention pour déterminer l'existence d'un dépassement du « seuil d'efficience » et le montant du reversement à opérer et n'a pas à être accompagné de pièces justificatives ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que le détail du relevé individuel d'activité devait lui être transmis par la caisse primaire d'assurance maladie ;

Sur la légalité interne :

Considérant que si M. X conteste les modalités du calcul du dépassement qui lui est reproché, en ce qu'il prendrait en compte des soins prodigués à des assurés du régime militaire, il n'assortit ces allégations d'aucune précision notamment chiffrée qui serait susceptible de démontrer le caractère erroné des bases retenues par la caisse ; que, notamment, il n'établit pas que l'assiette du calcul du reversement dû au titre de l'année 2000 aurait pris en compte d'autres actes que ceux ayant donné lieu à remboursement par le régime général d'assurance maladie, ni que les actes relevant du régime militaire auraient provoqué le dépassement constaté ; que, par suite, le moyen tiré de l'existence d'erreurs tenant à la prise en compte de soins dispensés à des assurés du régime militaire dans le calcul du « seuil d'efficience » ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'en vertu de l'article 30 du décret du 16 février 1993 susvisé, l'infirmier qui a accepté d'effectuer des soins est tenu d'en assurer la continuité sous réserve des dispositions de l'article 41 ; qu'aux termes de l'article 40 dudit décret : « (...) L'infirmier ou l'infirmière est toutefois libre de dispenser des soins gratuitement » ; qu'enfin, aux termes de l'article 41 du même texte : « Si l'infirmier ou l'infirmière décide, sous réserve de ne pas nuire à un patient, de ne pas effectuer des soins, ou se trouve dans l'obligation de les interrompre, il doit en expliquer les raisons à ce patient et, à la demande de ce dernier ou de ses proches, lui remettre la liste départementale des infirmiers (...) » ; qu'en conséquence, eu égard aux règles d'exercice de la profession d'infirmier qui permettent aux professionnels qui ont atteint ledit seuil, soit de dispenser des soins gratuitement, soit d'adresser leurs patients à leurs confrères, le requérant ne saurait sérieusement soutenir que la mise en place d'une procédure sanctionnant les dépassements d'un seuil maximum d'activité serait, en elle-même, de nature à porter atteinte au principe d'assistance à personne en danger et n'allègue par ailleurs nullement que le dépassement qui lui est reproché aurait eu pour seul motif le respect de ce principe ;

Considérant que si M. X conteste les modalités de calcul du dépassement qui lui est reproché, il s'en tient à une argumentation générale et à une critique abstraite du document dénommé « relevé SNIR » mais n'assortit ses allégations d'aucune précision notamment chiffrée ou tirée de sa propre comptabilité qui serait susceptible de démontrer le caractère erroné des bases retenues par la caisse ; qu'en toute hypothèse, aucune des stipulations de la convention qui lui était applicable n'était susceptible de permettre l'édiction d'un seuil d'efficience supérieur à celui de 24 000 AMI/AIS qui lui a en définitive été reconnu ; qu'il résulte des stipulations du paragraphe 1 de l'article 11 de la convention du 11 juillet 1997, que l'activité prise en compte pour le calcul du « seuil d'efficience » est celle de l'infirmière libérale conventionnée remboursée au cours de l'année civile considérée ; que, dès lors, la circonstance que certains remboursements effectués en 1999 concerneraient des actes de soins exécutés par M. X au cours de l'année précédente est sans incidence sur le calcul opéré pour déterminer le « seuil d'efficience » ;qu'il s'ensuit que le moyen tiré l'inexactitude des chiffre retenu par la caisse primaire d'assurance maladie doit être écarté ;

Considérant, qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 6 janvier 1978 ...aucune décision administrative ou privée impliquant une appréciation sur un comportement humain ne peut avoir pour seul fondement un traitement automatisé d'informations donnant une définition du profil ou de la personnalité de l'intéressé ; qu'il ressort des pièces du dossier que la commission paritaire départementale, saisie des données concernant le requérant a établi son avis en tenant compte de l'ensemble des informations relatives à la situation propre de l'infirmier ; qu'ainsi, et en tout état de cause, ni cet avis, ni la décision de reversement que la caisse d'assurance maladie a prononcé à l'encontre de M. X n'ont pour seul fondement un traitement automatisé d'informations donnant une définition de son profil ou de sa personnalité ; que, dès lors, ils ne contreviennent pas aux dispositions précitées de la loi du 6 janvier 1978 ;

Considérant que M. X soutient que la décision de reversement est fondée sur un mode de calcul qui n'est pas prévu par le code de la sécurité sociale ; qu'il est néanmoins établi par les pièces du dossier, sans qu'aucun élément discordant ne soit avancé pour en remettre en cause le bien fondé, que le calcul opéré par la caisse primaire d'assurance maladie du var pour asseoir la situation de l'intéressée au titre de l'année 2000 résulte d'une application régulière des dispositions des articles 11-2 et 11-4 de la convention nationale de la profession d'infirmier approuvée le 31 juillet 1997 et définitivement validée et de celles qui sont codifiées aux articles L.162-12-2 et L.162-12-3 du code de la sécurité sociale ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la non-conformité de la procédure de reversement au code de la sécurité sociale doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions relatives aux dépens :

Considérant que, dans la présente instance, les dépens sont inexistants ; que, par suite, les conclusions de M. X tendant à ce que la caisse primaire d'assurance maladie du Var soit condamnée aux entiers dépens ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Var, qui n'est pas la partie perdante, soit condamnée à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais engagés et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X, sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, à verser à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Var une somme de 1 600 euros au titre des frais engagés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : M. X versera à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Var une somme de 1 600 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Philippe X et à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Var.
N° 06MA02308 2

mp


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06MA02308
Date de la décision : 31/03/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONMATI
Rapporteur ?: M. Patrick FRANCOZ
Rapporteur public ?: Mme PAIX
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS GRILLAT PAGNONI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-03-31;06ma02308 ?
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