Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 2005, présentée pour la SELAFA IDEPIM, dont le siège est 12 avenue Jean Moulin à Toulon (83000), par Me Danjard ; la SELAFA IDEPIM demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0102711 du 2 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés pour la période comprise entre le 1er janvier 1995 et le 30 décembre 2000 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 avril 2008,
- le rapport de Mme Mariller, rapporteur ;
- les observations de Me Danjard, représentant la SELAFA IDEPIM ;
- et les conclusions de M. Emmanuelli, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société d'exercice libéral à forme anonyme (SELAFA) IDEPIM a été créée en 1993 et a pour objet social l'exercice en commun de la profession d'infirmier ; qu'elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le vérificateur lui a notamment notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée sur la période comprise entre le 1er janvier 1995 et le 31 décembre 1997 ; qu'à la suite d'un contrôle sur pièces, le service lui a également notifié des rappels de taxe sur les recettes encaissées pendant la période comprise entre le 1er janvier 1998 et le 31 décembre 1999 ; que la société conteste, à titre principal, le principe de son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée en faisant valoir que son activité n'entre pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'elle soutient, à titre subsidiaire, qu'elle en est expressément exonérée par plusieurs dispositions du code général des impôts ;
Sur le principe de l'assujettissement de la SELAFA IDEPIM à la taxe sur la valeur ajoutée :
Considérant qu'aux termes de l'article 256.I du code général des impôts : « Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel.... » ; qu'aux termes de l'article 256 A du même code dans sa version applicable au litige : « Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée, les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au troisième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. (...) Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est notamment considérée comme activité économique, une opération comportant l'exploitation d'un bien meuble corporel ou incorporel en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence. » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les recettes afférentes aux actes réalisés par les infirmiers et infirmières associés au sein de la SELAFA IDEPIM ne sont pas encaissées par la société elle-même mais par les praticiens qui ne sont pas salariés de la société et qui soumettent ces sommes à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ; qu'il en est ainsi pour les prestations effectuées hors du cadre conventionnel qui sont payées directement aux actionnaires par les clients ; que pour les prestations exécutées dans le cadre conventionnel et qui bénéficient en majorité du système de tiers payant, la caisse primaire d'assurance maladie reverse les honoraires directement entre les mains des infirmiers associés ; que chacun des associés reverse à la société, 19 % des honoraires qu'il a encaissés ; qu'en contrepartie, la SELAFA IDEPIM assure une permanence téléphonique pour les soins infirmiers et organise le planning de travail de chacun de ses associés ; que cette activité de prestation de service est exercée à titre onéreux et entre dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée tel qu'il est défini par les articles 256 I et 256 A précités ; que c'est par suite à juste titre que le vérificateur a soumis les recettes encaissées par la société et provenant des reversements effectués par ses associés à la taxe ;
Sur les exonérations de la taxe sur la valeur ajoutée :
Sur le fondement des dispositions de l'article 261-4 du code général des impôts :
Considérant qu'aux termes de l'article 261-4 du code général des impôts : « Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : 1° Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées, et par les psychologues, psychanalystes et psychothérapeutes titulaires d'un des diplômes requis, à la date de sa délivrance, pour être recruté comme psychologue dans la fonction publique hospitalière ainsi que les travaux d'analyse de biologie médicale et les fournitures de prothèses dentaires par les dentistes et les prothésistes ; 1° bis. les frais d'hospitalisation et de traitement, y compris les frais de mise à disposition d'une chambre individuelle, dans les établissements de santé privés, titulaires de l'autorisation mentionnée à l'article L.712-8 du code de la santé publique. » ;
Considérant, d'une part, que compte tenu des conditions d'exercice par la société IDEPIM de son activité telles qu'elles sont ci-dessus décrites, ladite société, bien qu'elle soit constituée sous forme d'une société d'exercice libéral et agréée par la préfecture depuis le 29 mars 1993 en vue de l'exercice de la profession d'infirmier, ne peut, pour l'ensemble de la période en litige, être regardée comme ayant exercé elle-même cette profession ; qu'elle ne peut donc bénéficier des dispositions de l'article 261-4-1° du code général des impôts qui exonèrent de la taxe, les professions paramédicales, et, notamment, la profession d'infirmier ;
Considérant, d'autre part, que la SELAFA IDEPIM, qui ne gère pas un établissement de santé privé, n'entre pas dans le champ d'application des dispositions de l'article 261-4-1 bis ; que, de plus, si la doctrine administrative (D. adm. 3 A-3122 n° 19, 20) invoquée par la société requérante admet que les groupements de soins infirmiers à domicile, quelle que soit leur forme, qui constituent une alternative à l'hospitalisation, bénéficient de l'exonération prévue par l'article 261, 4-1° bis du code général des impôts dans les mêmes conditions que les établissements hospitaliers, la SELAFA IDEPIM n'établit pas être titulaire de l'autorisation mentionnée à l'article L.6122-1 du code de la santé publique ; qu'elle ne rentre donc pas dans le champ d'application de cette doctrine ;
Sur le fondement de l'article 261-7 1 b du code général des impôts :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 261-7-1°, sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : « b. Les opérations faites au bénéfice de toutes personnes par des oeuvres sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée, lorsque les prix pratiqués ont été homologués par l'autorité publique ou que des opérations analogues ne sont pas couramment réalisées à des prix comparables par des entreprises commerciales, en raison notamment du concours désintéressé des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées dont ils bénéficient. » ;
Considérant que la société IDEPIM est constituée sous la forme d'une société anonyme, perçoit de ses associés, des rémunérations pour les services rendus et a, au titre des années 1995 et 1996, procédé à des distributions de bénéfices ; qu'elle n'établit, ni son absence de but lucratif, ni le caractère social ou philanthropique de son activité, ni le caractère désintéressé de sa gestion ; que le caractère déficitaire des exercices postérieurs ne permet pas d'établir qu'elle remplit les conditions posées par les dispositions précitées ;
Sur le fondement des dispositions de l'article 261 B du code général des impôts :
Considérant qu'aux termes de l'article 261 B du code général des impôts : « Les services rendus à leurs adhérents par les groupements constitués par des personnes physiques ou morales exerçant une activité exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée ou pour laquelle elles n'ont pas la qualité d'assujetti, sont exonérées de cette taxe à la condition qu'ils concourent directement et exclusivement à la réalisation de ces opérations exonérées ou exclues du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et que les sommes réclamées aux adhérents correspondent exactement à la part leur incombant dans les dépenses communes. » ;
Considérant que, dans la mesure où elle fournit, à l'aide de ses moyens propres en personnel et en matériel, les services ci-dessus indiqués aux membres d'un groupement dont elle-même ne fait pas partie, la SELAFA IDEPIM ne peut, contrairement à ce qu'elle soutient, être regardée comme leur dispensant des prestations entrant dans les prévisions de l'article 261 B précité du code général des impôts ; que, vis-à-vis des membres du groupement, son activité est demeurée, au contraire, celle d'un tiers, prestataire de services, dont les opérations sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'en outre, la société n'établit pas que les sommes qu'elle réclamait à ses associés, même si le montant pouvait évoluer, correspondent exactement à la part leur incombant dans les dépenses communes ;
Sur le fondement de la notion de lien direct :
Considérant enfin que si la société se prévaut de l'existence d'un lien direct, cette notion dégagée par la Cour de justice des communautés européennes a seulement pour conséquence d'exclure du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, un service ne présentant pas de lien direct entre le fournisseur et son bénéficiaire, et n'a, ni pour objet, ni pour effet, d'étendre à la situation de la société IDEPIM l'exonération dont bénéficient les soins infirmiers ; qu'en outre, le moyen tiré de la doctrine 3 CA-94 du 8 septembre 1994 n'est pas suffisamment précis pour permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SELAFA IDEPIM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions de la SELAFA IDEPIM tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SELAFA IDEPIM la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SELAFA IDEPIM est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SELAFA IDEPIM et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
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N° 05MA02409