Vu la requête, enregistrée le 17 septembre 2007, présentée pour Mme Marie-France A, élisant domicile ... par Me Morel a l'Huissier, avocat ; Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler partiellement l'ordonnance n° 0504420 de la présidente de la 1ère chambre du tribunal administratif de Marseille, en date du 18 juillet 2007, en tant qu'elle a rejeté, pour irrecevabilité, sa demande en annulation de la décision implicite de rejet de sa réclamation indemnitaire en date du 15 décembre 2002 adressée au préfet des Hautes-Alpes ;
2°) d'annuler la décision litigieuse et d'accueillir sa demande indemnitaire et de condamner l'Etat à réparer le préjudice subi en lui versant une somme de 129 000 euros portant intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande ;
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Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
Vu le décret n° 96-856 du 26 septembre 1996 fixant les conditions d'intégration dans la fonction publique hospitalière de personnels d'établissements privés à caractère sanitaire et social ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 octobre 2009 :
- le rapport de Mme Gaultier, rapporteur,
- les conclusions de M. Brossier, rapporteur public,
- et les observations de Me Amar, du cabinet droit public consultants, substituant
Me Vivien, pour le centre hospitalier de Briançon ;
Considérant que Mme A fait appel partiel de l'ordonnance du 18 juillet 2007 par laquelle la présidente de la 1ère chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation solidaire de l'Etat et du centre hospitalier de Briançon à lui verser une indemnité de 129 000 euros, à parfaire, en réparation des préjudices qu'elle aurait subis lors du transfert de son emploi du centre médical Les Neiges au centre hospitalier de Briançon, effectué le 1er janvier 1996 ; que seule la responsabilité de l'Etat est recherchée en appel sur le double fondement des droits qui résulteraient de l'article L. 122-12 du code du travail et des promesses de l'Etat non tenues ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
Considérant que l'article R. 222-1 du code de justice administrative dispose : ... les présidents de formation de jugement des tribunaux administratifs... peuvent, par ordonnance : 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens... ; que, par l'ordonnance attaquée, la présidente de la 1ère chambre du tribunal administratif de Marseille a longuement motivé le rejet prononcé par la circonstance que la créance dont se prévalait Mme A était couverte par la prescription quadriennale ; que cette question relève, en tout état de cause, de l'examen au fond d'une requête indemnitaire, et ne constitue pas un motif d'irrecevabilité manifeste de nature à permettre à un président de formation de tribunal administratif de rejeter une telle requête par ordonnance, sur le fondement des pouvoirs qu'il tient de la disposition précitée du code de justice administrative ; qu'il suit de là que l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité et doit être annulée, dans la mesure où elle a rejeté les conclusions indemnitaires présentées par Mme A à l'encontre de l'Etat ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande indemnitaire présentée par Mme A à l'encontre de l'Etat ;
Sur la demande indemnitaire présentée par Mme A et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'exception de prescription quadriennale opposée au nom de l'Etat :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SA Les Neiges, dont l'Etat était devenu actionnaire à 99,70 % en 1945, exploitait une établissement médical de moyen séjour destiné principalement aux personnels civils et militaires du ministère de la défense ; que Mme A y exerçait ses fonctions sous couvert d'un contrat de travail de droit privé ; que pour des raisons à la fois économiques et juridiques, l'Etat a décidé la dissolution de la société exploitante et la fermeture de cet établissement médical ; qu'après des négociations au cours desquelles l'Etat s'est engagé à maintenir les emplois existants en procédant au reclassement des salariés concernés dans des établissements publics ou privés de la région, ou en favorisant ce reclassement, la fermeture définitive du centre médical Les Neiges a pris effet le 31 décembre 1995 ; que Mme A a été recrutée par le centre hospitalier de Briançon selon contrat de travail à durée indéterminée de droit public prenant effet le 1er janvier 1996 ; qu'à la suite de l'entrée en vigueur du décret susvisé du 26 septembre 1996 fixant les conditions exceptionnelles d'intégration dans la fonction publique hospitalière de personnels d'établissements privés à caractère sanitaire et social, dont le centre médical Les Neiges, une proposition de recrutement comme agent titulaire de la fonction publique hospitalière a été faite à Mme A qui l'a refusée ; que le 15 décembre 2002, Mme A a adressé au préfet des Hautes-Alpes une réclamation indemnitaire destinée à couvrir la perte d'avantages financiers en termes d'ancienneté, de rémunération, et de couverture prévoyance et mutuelle qu'elle estime avoir indument subis à l'occasion du transfert de son emploi, en dépit des engagements qui auraient été pris par l'Etat ;
Considérant, en premier lieu, que l'article L. 122-12 du code du travail, dans sa rédaction alors en vigueur, disposait : ... S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ; qu'il n'est plus contesté que ce principe, contenu également dans l'article 3 de la directive n° 77/187/CEE du Conseil du 14 février 1977, est applicable lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est reprise par une personne publique gérant un service public ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que l'Etat, actionnaire a décidé la fermeture du centre médical Les Neiges et s'est seulement efforcé d'assurer le reclassement des salariés concernés auprès de différents établissements de santé publics et privés ; que l'entité économique en cause n'ayant été reprise ni par l'Etat ni par une autre personne morale, le principe posé par les dispositions précitées n'est pas applicable en l'espèce ; qu'il suit de là que Mme A n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de l'Etat sur le fondement des droits qu'elle tiendrait des dispositions précitées ;
Considérant qu'il ressort de l'examen des pièces produites que le ministre de la santé et le préfet des Hautes-Alpes ont pris l'engagement de maintenir la totalité des emplois des salariés du centre médical Les Neiges, sans interruption d'activité, soit selon contrats de travail à durée indéterminée de droit public avec maintien de la rémunération et reprise de l'ancienneté pour les salariés reclassés dans des structures publiques, soit selon contrat de travail à durée indéterminée de droit privé conclu dans les mêmes conditions pour les salariés rejoignant une structure de droit privé et de prendre les mesures réglementaires permettant la titularisation des intéressés dans la fonction publique hospitalière ; qu'il résulte toutefois de l'instruction et notamment des précisions fournies par le préfet des Hautes-Alpes le 8 décembre 2005 qu'au cas où le maintien de l'ancienneté conduirait, compte tenu de la grille de salaires du nouvel organisme dans lequel le salarié était intégré, à un niveau de rémunération supérieur à l'existant, il y aurait lieu de privilégier le maintien de la rémunération en adaptant l'ancienneté en conséquence ; que Mme A a été reclassée selon contrat de travail de droit public au centre hospitalier de Briançon avec maintien de sa rémunération ; qu'elle a refusé la proposition d'intégration dans la fonction publique hospitalière qui lui a été faite, en application du décret 26 septembre 1996 fixant les conditions d'intégration dans la fonction publique hospitalière de personnels d'établissements privés, à caractère sanitaire et social, dont la SA Les Neiges, et a poursuivi sa carrière comme agent contractuel de droit public régi par les dispositions du décret 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements publics hospitaliers ; qu'il n'est pas établi que le décret du 26 septembre 1996 qui comporte des dispositions exceptionnelles de dispense de stage et d'indemnité compensatrice n'ait pas été conforme aux engagements pris ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, l'Etat ne s'est pas engagé à ce que la carrière d'un salarié de la SA Les Neiges reclassé au sein du centre hospitalier de Briançon et restant agent contractuel soit identique à celle qui aurait été la sienne au sein de la SA Les Neiges ni à ce qu'il conserve les avantages spécifiques en matière de prévoyance, santé et autres découlant de son contrat de travail antérieur ; qu'il suit de là que Mme A n'est aucunement fondée à rechercher la responsabilité de l'Etat à raison de ce que son déroulement de carrière ne serait pas conforme aux promesses qui lui auraient été faites ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande indemnitaire de Mme A à l'encontre de l'Etat ne peut qu'être rejetée ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions précitées en condamnant Mme A à verser au centre hospitalier de Briançon une indemnité au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1er : L'ordonnance susvisée en date du 18 juillet 2007 est annulée en tant qu'elle statue sur la demande indemnitaire de Mme A à l'encontre de l'Etat.
Article 2 : La demande indemnitaire de Mme A est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de Briançon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Marie-France A, au centre hospitalier de Briançon et au ministre de la santé et des sports.
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N° 07MA038502