Vu la requête transmise par télécopie, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 07MA03732, le 8 septembre 2007, présentée pour la société civile immobilière (SCI) LES CHENES BLANCS, représentée par son gérant en exercice, dont le siège social est sis ZAC de Nicolopis, à Brignoles (83170), par Me Ghigo, avocat ;
La SCI LES CHENES BLANCS demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0304292 du 14 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération en date du 31 octobre 2002 par laquelle le conseil municipal de la commune de Brignoles a autorisé le maire de la commune à signer les actes relatifs à la résolution de la vente d'une parcelle de terrain, sise ZAC de Nicopolis à Brignoles, au lieu-dit Grand Clos de la Rouge , et cadastrée section BW n° 19 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite délibération ;
3°) de condamner la commune de Brignoles à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'aux entiers dépens ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 2010 :
- le rapport de Mme Buccafurri, rapporteur,
- les conclusions de Mlle Josset, rapporteur public,
Considérant que, par un acte notarié du 16 avril 1998, la SCI LES CHENES BLANCS a acquis de la commune de Brignoles, à titre onéreux, une parcelle de terrain, cadastrée section BW n° 19, située au lieu-dit Grand Clos de la Rouge , faisant partie d'un parc d'activités dénommé Parc d'activités de Nicopolis , créé sous forme de zone d'aménagement concerté (ZAC), par un arrêté préfectoral du 24 mai 1984 ; que, par une délibération en date du 31 octobre 2002, le conseil municipal de la commune de Brignoles a, d'une part, décidé de faire prononcer la résolution de la vente du terrain en cause à raison des manquements de la SCI LES CHENES BLANCS à ses obligations contractuelles et, d'autre part, autorisé le maire de la commune à signer les actes relatifs à cette résolution et à engager cette procédure de résolution devant le Tribunal de Grande Instance compétent ; que la SCI LES CHENES BLANCS relève appel du jugement du 14 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ladite délibération ;
Sur les fins de non recevoir opposées à la requête d'appel par la commune de Brignoles :
Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des dispositions combinées des articles R. 412-1 et R. 811-13 du code de justice administrative, les requêtes d'appel doivent, à peine d'irrecevabilité, être accompagnées d'une copie du jugement attaqué ; que, si la commune de Brignoles fait valoir que la SCI LES CHENES BLANCS n'a pas produit la copie du jugement attaqué lors du dépôt de sa requête d'appel et que ladite société s'est, dans ces conditions, exposée à voir sa requête immédiatement rejetée comme irrecevable faute de s'être acquittée de l'obligation impartie par les dispositions ci-dessus mentionnées du code de justice administrative, le dossier de première instance, incluant une copie du jugement attaqué, a été fourni par le greffe du Tribunal administratif à la demande de la Cour et a été joint au dossier de la requête d'appel par le greffe de la Cour de céans avant qu'elle ne statue ; que, par suite, la fin de non recevoir opposée à ce titre par la commune de Brignoles doit être écartée ;
Considérant, en deuxième lieu, que la SCI LES CHENES BLANCS a, par un mémoire, enregistré au greffe de la Cour le 7 mai 2000, produit les extraits K bis du registre du commerce et des sociétés, lesquels établissent que M. Michel est le gérant de cette société ; que, par suite, la fin de non recevoir, tirée du défaut de qualité pour agir du représentant de la société appelante, manque en fait et ne peut, dès lors, qu'être écartée ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant que la délibération attaquée a, d'une part, pour objet de décider de la résolution de la vente du terrain concerné, lequel fait partie du domaine privé de la commune, et, d'autre part, d'autoriser le maire de la commune à saisir le juge judiciaire afin que la décision de résolution de la vente soit publiée à la conservation des hypothèques ;
Considérant, en premier lieu, qu'il appartient au seul juge judiciaire de se prononcer sur la validité et l'exécution d'un contrat de vente relatif, comme en l'espèce, à une dépendance du domaine privé d'une commune, sauf dans l'hypothèse où l'acquéreur participe à l'exécution du service public ou dans le cas où ledit contrat comporte des clauses exorbitantes de droit commun ; qu'il en va notamment ainsi lorsque le contrat en litige se réfère à un cahier des charges qui lui-même comprend une clause exorbitante du droit commun ; que constituent de telles clauses celles ayant pour effet de conférer aux parties des droits et obligations étrangers par leur nature à celles qui sont susceptibles d'être librement consenties par quiconque dans le cadre des lois civiles et commerciales ;
Considérant que le contrat de vente ici en litige renvoie à un cahier des charges qui comporte, en son article 7, une clause selon laquelle lorsque le constructeur, la SCI LES CHENES BLANCS, souhaitera céder le terrain, l'aménageur, en l'occurrence la commune de Brignoles, pourra exiger que ce bien lui soit rétrocédé ou soit cédé à un acquéreur désigné par elle ou ayant reçu son agrément ; qu'une telle clause , qui permet à la collectivité d'exercer un pouvoir de contrôle sur son cocontractant, lequel n'a pas la liberté de choisir l'acquéreur du terrain lui appartenant, est exorbitante du droit commun et confère, par suite, au contrat de vente conclu entre la SCI LES CHENES BLANCS et la commune de Brignoles un caractère administratif ; que le contentieux relatif à son exécution ressortit donc à la seule compétence de la juridiction administrative ; que, dès lors, il n'appartient qu'à la juridiction administrative de statuer sur les conclusions dirigées contre la délibération attaquée en tant qu'elle a pour objet de décider de la résolution de la vente du terrain concerné ;
Considérant, en second lieu, et, en revanche, qu'en tant que la délibération attaquée a pour objet d'autoriser le maire de la commune de Brignoles à saisir le juge judiciaire afin que la décision de résolution de la vente soit publiée à la conservation des hypothèques, cet acte est indissociable de cette procédure judiciaire ; que, par suite, les conclusions dirigées contre cette délibération, en tant qu'elle a cet objet, ne sont pas au nombre de celles dont il appartient à la juridiction administrative de connaître ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif s'est implicitement considéré comme compétent pour y statuer ; que, dès lors, lesdites conclusions doivent être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître et le jugement attaqué réformé dans cette mesure ;
Sur les conclusions dirigées contre la délibération attaquée en tant qu'elle a pour objet de décider de la résolution de la vente du terrain :
Sur la fin de non recevoir opposée par la commune de Brignoles :
Considérant que la délibération attaquée, en tant qu'elle a pour objet de décider de la résolution de la vente du terrain en cause, présente le caractère d'un acte contractuel qui n'est pas détachable dudit contrat ; que le cocontractant de l'administration n'est pas recevable à demander l'annulation d'un tel acte mais peut seulement, s'il s'y croit fondé, réclamer une indemnisation des préjudices qui résulteraient de la dite résolution ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres fins de non recevoir opposées par la commune de Brignoles, cette dernière est fondée à soutenir que les conclusions susvisées sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ; que, dès lors, la SCI LES CHENES BLANCS n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté lesdites conclusions ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Brignoles, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à la SCI LES CHENES BLANCS, une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a également lieu de rejeter la demande présentée à ce titre par la commune de Brignoles ;
DÉ C I D E :
Article 1er : Les conclusions présentées devant le Tribunal administratif de Nice par la SCI LES CHENES BLANCS à l'encontre de la délibération du conseil municipal de la commune de Brignoles du 31 octobre 2002, en tant que ladite délibération a pour objet d'autoriser le maire de la commune de Brignoles à saisir le juge judiciaire afin que la décision de résolution de la vente soit publiée à la conservation des hypothèques, sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 2 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Nice du 14 juin 2007 est réformé en ce qu'il est contraire à l'article 1er du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus de la requête de la SCI LES CHENES BLANCS est rejeté.
Article 4 : Les conclusions présentées, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par la commune de Brignoles sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI LES CHENES BLANCS, à la commune de Brignoles et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
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N° 07MA03732 2
jb