Vu la requête, enregistrée le 23 juillet 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 08MA03513, présentée pour la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES, dont le siège est Avenue de la Breisse ZAC du Puits d'Ordet à Challes les Eaux (73190), par la SCP Arrue Berthiaud Duflot Putanier, avocat ;
la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0504253 du 21 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de Briançon soit condamnée à lui verser la somme de 147 980,94 euros en réparation de son préjudice issu de l'allongement de la durée d'exécution du marché ;
2°) de condamner la commune de Briançon à lui verser la somme de 147 980,94 euros TTC au titre du règlement du lot n° 14 du marché relatif à la construction d'un centre aquatique sur le territoire de la commune, ainsi que les intérêts au taux légal capitalisables à compter du 1er décembre 2003 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Briançon la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mai 2011 :
- le rapport de Mme E. Felmy, conseiller,
- les conclusions de M. Marcovici, rapporteur public,
- et les observations de Me Revol, avocat, représentant la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES et de Me Dion, avocat, représentant la commune de Briançon ;
Considérant que la commune de Briançon a confié la maîtrise d'oeuvre de la construction d'un centre aquatique et de loisirs au groupement composé des sociétés Japac, Muraillat et Girus ; que par un marché à forfait conclu le 17 mars 2000, la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES a été attributaire du lot n° 14 Revêtements de sols et muraux carrelés pour un montant global de 2 081 707,11 francs TTC (317 534,20 euros) porté à 2 162 877,85 francs TTC (329 728,60 euros) le 25 avril 2000 pour tenir compte de la modification du taux de la taxe sur la valeur ajoutée du 1er avril 2000 et intégrer les options qu'elle avait retenues ; que la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES a adressé au maître d'ouvrage le 17 octobre 2003 un projet de décompte final d'un montant de 455 138,83 euros TTC intégrant les préjudices subis du fait de l'augmentation des coûts du marché liée à la prolongation des délais d'exécution des travaux ; qu'elle a ensuite présenté, le 19 décembre 2003, un mémoire en réclamation au maître d'oeuvre et un mémoire en réclamation à la commune sur décompte général pour un montant de 148 108,12 euros TTC intégrant le règlement du montant modifié, l'augmentation des coûts du marché et les frais financiers ; qu'en l'absence de réponse du maître d'ouvrage, la société a, conformément à l'article 50 du CCAG travaux, saisi le comité consultatif interrégional de règlement amiable des litiges en matière de marchés publics de travaux qui a rendu un avis le 4 avril 2005 ; que la commune n'ayant pas suivi cet avis, la société a saisi le tribunal administratif de Marseille à fin de condamnation de la commune au versement de 147 980,94 euros outre intérêts à taux légal capitalisables à compter du 1er décembre 2003 au titre du règlement du litige ; que la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES interjette appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Marseille a notamment rejeté les conclusions de la société tendant à la condamnation de la commune de Briançon à lui verser la somme précitée au titre du règlement du marché au motif que le préjudice financier allégué par la société n'était pas établi ;
Sur la responsabilité de la commune de Briançon du fait de la prolongation du délai d'exécution du marché :
Considérant que la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES soutient que l'allongement de la durée du chantier est imputable au comportement fautif de la commune et de la maîtrise d'oeuvre ; qu'à cette occasion, elle a dû mobiliser durant sept mois supplémentaires son petit matériel, un équipe technique et une équipe d'encadrement ainsi qu'une équipe particulière, qu'elle a dû effectuer des avances pour la bonne conduite des travaux ayant entraîné des frais financiers à hauteur de 28 665,93 euros TTC, que son immobilisation sur le chantier l'a empêchée d'accepter d'autres chantiers lui causant une perte de chiffre d'affaire, que l'immobilisation de ses équipes et le vol de matériel ont été à l'origine d'une perte de productivité évaluée à 119 307,57 euros TTC ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la commune de Briançon a accusé un retard dans le règlement de situations de travaux des diverses entreprises intervenant dans la réalisation de l'ouvrage, ainsi que dans la prise de certaines décisions concernant le chantier ; qu'également, la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES a été dans l'impossibilité d'exécuter les obligations issues de son contrat en raison de la carence d'autres entreprises intervenant au marché, de la désorganisation du chantier qui en est résultée et des modifications apportées à l'ouvrage en cours d'exécution ; que la société requérante n'a toutefois pas répondu aux mises en demeure de réintégrer le chantier qui lui avait été adressées, de sorte qu'elle doit être regardée comme responsable de la moitié des conséquences dommageables du retard du chantier dont elle demande réparation ;
Considérant que si la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES établit l'existence de frais de personnel et de matériel qu'elle a immobilisé durant la prolongation du chantier, elle n'en justifie toutefois pas le chiffrage exact en l'absence notamment de pièces probantes ; qu'elle ne démontre pas le montant des pertes de frais généraux, de bénéfice, de productivité et sur fournitures dont elle demande le paiement ainsi que le contenu et l'étendue du montant des frais financiers supplémentaires ; que dans ces circonstances, il sera fait une juste appréciation du préjudice invoqué en l'évaluant à la somme de 30 000 euros ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation du préjudice causé par son maintien sur le chantier au-delà de la durée contractuellement prévue ; qu'il y a lieu de l'annuler et de condamner la commune de Briançon à verser à la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES la somme de 15 000 euros en raison du partage de responsabilité retenu ci-dessus ;
Sur l'appel en garantie :
Considérant que si la commune de Briançon demande à être garantie de ses condamnations par le groupement de maîtrise d'oeuvre composé de la SARL Japac, de la société d'architecture Muraillat et de la société Girus, elle ne met pas la Cour à même d'apprécier les fautes de ce dernier en se bornant à rappeler qu'il assurait seul la direction des travaux ; que, par suite, les conclusions d'appel en garantie présentées par la commune de Briançon doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la commune de Briançon au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a en revanche lieu de mettre à la charge de la commune de Briançon la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société requérante et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées sur ce fondement par la SARL Japac et la société d'architecture Muraillat contre la commune de Briançon doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille n° 0504253 du 21 mai 2008 est annulé.
Article 2 : La commune de Briançon est condamnée à verser à la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice causé par son maintien sur le chantier au-delà de la durée contractuellement prévue.
Article 3 : Les conclusions d'appel en garantie de la commune de Briançon sont rejetées.
Article 4 : La commune de Briançon versera à la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions de la SARL Japac, de la société d'architecture Muraillat et de la commune de Briançon tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE MIGNOLA CARRELAGES, à la SARL Japac, la société d'architecture Muraillat, la commune de Briançon et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
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