Vu la requête enregistrée le 22 juin 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 10MA02351, présentée pour Mme Sylvie A, demeurant ..., par Me Salord, avocat ;
Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0708117 du 11 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 22 octobre 2007 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a, d'une part, annulé la décision de l'inspecteur du travail du 30 avril 2007 refusant l'autorisation de la licencier et, d'autre part, autorisé son licenciement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir ladite décision ;
2°) de mettre à la charge de tous succombants une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 février 2012 :
- le rapport de Mme Buccafurri, président assesseur,
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me Leydier, substituant Me Salord, pour Mme A, et de Me Savelli de la SCP d'avocats BBLM et associés, pour l'ADDAP 13 ;
Considérant que Mme Pluchino épouse A, qui a été engagée, le 1er mars 1993, par l'Association départementale pour le développement des actions de prévention des Bouches-du-Rhône (ADDAP 13), en qualité d'éducatrice spécialisée, exerçait les fonctions de délégué syndical depuis 2001 et de conseiller du salarié depuis avril 2004 et s'était présentée aux élections des délégués du personnel et du comité d'entreprise organisées en mars 2007 par son employeur ; qu'à la suite d'un malaise survenu sur son lieu de travail, Mme A a été placée en congé de maladie pour accident de travail, prolongé jusqu'au 1er janvier 2007 ; que, dans le cadre de l'examen médical de reprise, le médecin du travail, après avoir examiné Mme A, a émis, le 5 janvier 2007, un avis aux termes duquel la reprise du travail par l'intéressée était impossible, une inaptitude au poste était à prévoir et la salariée devait être examinée à nouveau le 18 janvier 2007 ; que, par un second avis du 19 janvier 2007, le médecin du travail a constaté l'inaptitude de Mme A à son poste et qu'aucune proposition de reclassement ou d'aménagement du poste n'était possible ; que, par un courrier en date du 26 janvier 2007, son employeur lui a toutefois proposé trois postes de reclassement qu'il a également soumis à l'avis du médecin du travail ; que, par un courrier du 30 janvier 2007, le médecin du travail a confirmé à l'employeur les termes de son avis rendu le 19 janvier 2007 selon lequel aucun reclassement n'était possible et, par un courrier du 1er février 2007, Mme A a refusé ces propositions de reclassement en se référant à l'avis du médecin du travail ayant conclu à l'impossibilité de son reclassement et en relevant que ces postes étaient placés sous l'autorité des personnes responsables du harcèlement moral dont elle s'estimait victime ; que, le 9 mars 2007, l'ADDAP 13 a sollicité de l'inspection du travail l'autorisation de licencier Mme A pour inaptitude médicale et impossibilité de reclasser l'intéressée du fait des refus opposés par l'intéressée et le médecin du travail à ces propositions ; que, par une décision du 30 avril 2007 l'inspecteur du travail de la 3ème section des Bouches-du-Rhône a refusé l'autorisation de licencier Mme A ; que, saisi par l'ADDAP 13 d'un recours hiérarchique formé le 15 juin 2007 à l'encontre de cette décision, le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a, par une décision du 22 octobre 2007, d'une part, annulé la décision de l'inspecteur du travail et, d'autre part, autorisé le licenciement de l'intéressée ; que Mme A relève appel du jugement n° 0708117 du 11 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision ministérielle du 22 octobre 2007 ;
Considérant que pour autoriser, par la décision contestée, le licenciement de Mme A, le ministre, se fondant sur les deux avis précités du médecin du travail et la confirmation ultérieure par ce dernier de l'impossibilité de reclassement de l'intéressée ainsi que sur les refus, opposés aux trois propositions de reclassement de l'employeur, par Mme A et par le médecin du travail, a estimé que l'employeur avait satisfait à son obligation de recherche de reclassement ; que, le ministre a, en outre, estimé, qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que la salariée ait été victime d'un harcèlement moral et qu'il n'existait pas de lien entre les fonctions représentatives exercées par l'intéressée et la procédure de licenciement dont elle faisait l'objet ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-24-4 du code du travail, dans sa rédaction applicable au présent litige : " A l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident, si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. / Le contrat de travail du salarié peut être suspendu pour lui permettre de suivre un stage de reclassement professionnel. / Si le salarié n'est pas reclassé dans l'entreprise à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail ou s'il n'est pas licencié, l'employeur est tenu de verser à l'intéressé, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail. / Les dispositions prévues à l'alinéa précédent s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail. " ; qu'aux termes de l'article L. 241-10-1 du même code : " Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs. / Le chef d'entreprise est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite. / En cas de difficulté ou de désaccord, la décision est prise par l'inspecteur du travail après avis du médecin inspecteur du travail. " ; que l'article R. 241-51 de ce code dispose : " Les salariés doivent bénéficier d'un examen par le médecin du travail après une absence pour cause de maladie professionnelle, après un congé de maternité, après une absence d'au moins huit jours pour cause d'accident du travail, après une absence d'au moins vingt et un jours pour cause de maladie ou d'accident non professionnel et en cas d'absences répétées pour raisons de santé. / Cet examen a pour seul objet d'apprécier l'aptitude de l'intéressé à reprendre son ancien emploi, la nécessité d'une adaptation des conditions de travail ou d'une réadaptation du salarié ou éventuellement de l'une et de l'autre de ces mesures. " ; qu'aux termes de l'article R. 241-51-1 dudit code : " Sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l'intéressé ou celles des tiers, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude du salarié à son poste de travail qu'après une étude de ce poste et des conditions de travail dans l'entreprise et deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés, le cas échéant, des examens complémentaires mentionnés à l'article R. 241-52. / Le médecin du travail peut, avant d'émettre son avis, consulter le médecin inspecteur régional du travail et de la main-d'oeuvre. Les motifs de son avis doivent être consignés dans le dossier médical du salarié. " ;
Considérant que, dans le cas où une demande de licenciement d'un salarié protégé est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge, si cette inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement envisagé ; que la circonstance que l'avis du médecin du travail, auquel il incombe de se prononcer sur l'aptitude du salarié à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment ou à exercer d'autres tâches existantes, déclare le salarié protégé " inapte à tout emploi dans l'entreprise " ne dispense pas l'employeur, qui connaît les possibilités d'aménagement de l'entreprise et peut solliciter le groupe auquel, le cas échéant, celle-ci appartient, de rechercher toute possibilité de reclassement dans l'entreprise ou au sein du groupe, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations des postes de travail ou aménagement du temps de travail ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que la circonstance que le médecin du travail ait conclu, dans ses deux avis, à l'inaptitude de Mme A à tout poste dans l'association ne dispensait pas l'employeur de satisfaire à son obligation de reclassement de cette salariée protégée au sein de l'association ou au sein du groupe d'associations auquel, le cas échéant, elle aurait appartenu et oeuvrant dans le même secteur d'activité ; que, par suite, c'est à tort, que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a considéré que le ministre du travail était tenu d'annuler la décision de l'inspecteur du travail et d'autoriser le licenciement de l'intéressée au motif que cette dernière n'avait pas contesté les deux avis d'inaptitude du médecin du travail et a, en conséquence, écarté, comme étant inopérants, les moyens invoqués par la requérante tirés, d'une part, de ce que son inaptitude trouvait son origine dans le harcèlement moral dont elle aurait été victime, d'autre part, de l'absence de respect par l'employeur de son obligation de reclassement et enfin du caractère discriminatoire du licenciement ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'employeur, lequel doit prendre en compte les préconisations du médecin du travail, a, à juste titre, cherché à reclasser l'intéressée uniquement dans des postes administratifs et non dans d'autres postes d'éducateur spécialisé, emplois pour lesquels le médecin du travail avait constaté l'inaptitude de l'intéressée ; qu'ainsi, Mme A n'est pas fondée à soutenir que les emplois administratifs proposés n'étaient pas comparables à l'emploi qu'elle occupait précédemment et entraînaient des modifications importantes de son contrat de travail ; qu'il ressort, en outre, des pièces du dossier, notamment du courrier adressé le 26 janvier 2007 par l'employeur à Mme A que, pour les trois postes proposés par l'ADDAP 13 à l'intéressée, cette dernière conservait son salaire, sa grille salariale et sa qualification ; que, pour deux des postes proposés, la salariée était affectée au siège social de l'association et, ainsi, dans un autre secteur que celui où elle exerçait antérieurement ses fonctions ; que si, pour un des trois postes proposés, Mme A était affectée physiquement dans le même service que celui où elle exerçait initialement ses fonctions, l'ADDAP 13 soutient, sans être sérieusement contestée sur ce point, que, concernant ce poste, elle n'était plus placée sous l'autorité hiérarchique des personnes dont elle soutient qu'elles la harcelaient ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que les missions confiées à Mme A, pour les trois postes proposées, ne correspondraient pas à des fonctions réelles et qu'ainsi les postes proposés ne constitueraient pas de véritables postes de travail ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'ils n'auraient pas été adaptés à ses capacités ; que, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, Mme A n'est pas fondée à soutenir que les propositions de reclassement qui lui ont été faites par son employeur n'étaient pas sérieuses et que ce dernier n'aurait pas respecté son obligation de recherche de reclassement ;
Considérant, en troisième lieu, que, comme l'a relevé le ministre, dans la décision contestée, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'expertise menée à la demande du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) par un organisme extérieur à l'association, que, si des conflits existaient entre Mme A et ses supérieurs hiérarchiques, aucune situation de harcèlement moral de l'intéressée n'a été constatée ;
Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le licenciement de Mme A serait en lien avec l'exercice par cette dernière de ses mandats syndicaux ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué du 11 mai 2010, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision ministérielle susvisée du 22 octobre 2007 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme A une somme au titre des frais exposés par l'Association départementale pour le développement des actions de prévention des Bouches-du-Rhône et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'Association départementale pour le développement des actions de prévention des Bouches-du-Rhône sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Sylvie A, à l'Association départementale pour le développement des actions de prévention des Bouches-du-Rhône et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
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