Vu la requête, enregistrée le 4 juin 2009, présentée pour M. et Mme A, domiciliés ..., par Me Chopin ;
M. et Mme A demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0703210 du 31 mars 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu au titre des années 2001, 2002 et 2003 et leur refusant le versement d'intérêts moratoires ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions à hauteur de 1 083 euros pour 2001, 945 euros pour 2002, 455 euros pour 2003 et 485 euros pour 2004 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 octobre 2012 :
- le rapport de M. Lemaitre, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;
Considérant qu'à la suite d'un contrôle sur pièces des revenus de M. et Mme A pour les années 2001 à 2003, l'administration fiscale a partiellement remis en cause la déduction des frais réels pratiquée par Mme A au titre de l'exercice de sa profession d'enseignante ; que les intéressés ont fait l'objet de redressements similaires au titre de l'année 2004 ; que les requérants relèvent appel du jugement du 31 mars 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'impôt sur le revenu au titre de ces années ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que les requérants font valoir que les premiers juges n'ont pas pris connaissance du mémoire daté du 15 novembre 2008 ; qu'il résulte de l'instruction que celui-ci a été enregistré le 20 novembre 2008 au greffe du tribunal mais qu'il n'a pas été visé dans le jugement qui est attaqué ; que pour ce motif, ce dernier est entaché d'irrégularité et doit par suite être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme A devant le tribunal administratif de Montpellier ;
Sur la fin de non recevoir partielle opposée par l'administration :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales : " Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service... " ; que si M. et Mme A demandent la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu portant sur les années 2001 à 2004, l'administration soutient sans être contredite, que leur réclamation du 23 décembre 2006 ne portait que sur les impositions supplémentaires des années 2001 à 2003, et les visas du jugement attaqué, relèvent d'ailleurs que les intéressés ont étendu, en cours d'instance, la portée de leurs conclusions à l'année 2004 dans le cadre de leur mémoire enregistré le 30 septembre 2008, sans verser aux débats en première instance ni leur réclamation concernant cette année ni la décision du 3 septembre 2008 l'admettant partiellement ; que les conclusions de M. et Mme A, en tant qu'elles portent sur l'année 2004, sont ainsi irrecevables ;
Sur le surplus des conclusions :
En ce qui concerne la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, que dans leurs écritures de première instance, M. et Mme A soutiennent avoir fait l'objet d'un contrôle suivi d'un redressement qu'ils imputent aux relations conflictuelles qui existeraient entre M. A, agent des impôts, et son supérieur hiérarchique, et mettent ainsi en cause l'impartialité de l'administration ; que ce moyen ne peut qu'être écarté dès lors que, d'une part, l'administration, qui est tenue d'appliquer la loi fiscale, est en droit de contrôler en vertu de l'article L. 10, alinéas 1 et 2, du livre des procédures fiscales les déclarations ainsi que les actes utilisés pour l'établissement des impôts, droits, taxes et redevances de tout contribuable et que, d'autre part, le dossier fiscal de M. et Mme A a été examiné par plusieurs services, y compris par le conciliateur fiscal de l'Aude ;
Considérant, en second lieu, que la mention, dont se prévalent les requérants, selon laquelle le contrôle sur pièces a été opéré " au vu des documents et des informations détenus par le service ", ne saurait, par elle-même, révéler l'exercice du droit de communication par l'administration, laquelle nie y avoir recouru ; qu'il ne ressort d'ailleurs pas du dossier que cette dernière se soit appuyée sur des éléments obtenus auprès de tiers pour fonder les impositions litigieuses et que les requérants en aient demandé la communication avant la mise en recouvrement ; que ce moyen doit être également écarté ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article 83 du code général des impôts : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : (...) 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut (...) elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu (...) Les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels (...) ;
Considérant que l'administration a limité le montant des frais de transport domicile-travail admis en déduction des revenus imposables et a remis en cause " l'amortissement " de la pièce que Mme A a déclaré utiliser dans sa résidence principale pour l'exercice de sa profession ;
Quant aux frais de déplacement concernant le trajet domicile-travail :
Considérant que les frais de transport exposés par les contribuables pour se rendre à leur lieu de travail et en revenir sont, en règle générale, inhérents à leur fonction ou à leur emploi et doivent, par suite, en principe, lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales, être admis en déduction de leur revenu en vertu des dispositions de l'article 83 du code général des impôts ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour pouvoir déduire ses frais réels, le contribuable doit fournir des justifications suffisamment précises permettant d'apprécier le montant des frais effectivement exposés par lui à l'occasion de l'exercice de sa profession ; que les contribuables qui prétendent obtenir la déduction de plus d'un aller-retour quotidien entre leur lieu de travail et leur domicile doivent justifier de circonstances particulières permettant de faire regarder les frais ainsi exposés comme inhérents à leur fonction ou leur emploi ;
Considérant, en premier lieu, qu'en ce qui concerne l'année scolaire 2000/2001, les requérants ont accepté, dans leurs observations du 24 janvier 2005, le kilométrage retenu par l'administration, soit la somme de 4 320 kms correspondant au kilométrage parcouru au titre de six demi-journées de travail habituel par semaine, de 660 kms, et de 480 kms pour la participation respectivement à trente-trois conseils de classe et à vingt-quatre réunions de parents d'élèves ; que le litige est circonscrit au kilométrage pour se rendre à " 86 réunions diverses " représentant 1 720 kms selon les contribuables, alors que l'administration a retenu 1 000 kms pour 50 réunions diverses ; que pour contester ce point, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir du planning hebdomadaire d'enseignement de Mme A qui ne fait pas mention de ces réunions diverses ; que l'existence de ces dernières n'est justifiée par aucun commencement de preuve ; que les requérants ne démontrent pas qu'en retenant 50 " réunions diverses ", l'administration aurait sous-évalué le kilométrage professionnel parcouru par Mme A pendant l'année scolaire 2000/2001 ;
Considérant que les requérants, qui dans leurs observations du 23 août 2005 n'ont présenté aucune critique à l'encontre du kilométrage retenu par l'administration au titre des déplacements professionnels de Mme A pendant les années scolaires 2001/2002 et 2002/2003, soutiennent dans leur mémoire du 14 mars 2008 présenté devant les premiers juges, que la prise en compte de 1,79 aller-retour quotidien serait insuffisante au regard des 2, 92 allers-retours par jour qu'elle a déclarés ; que toutefois, si l'administration a pris en compte les sujétions professionnelles de l'intéressée pour admettre le caractère déductible des dépenses se rapportant à près de deux allers-retours quotidiens concernant le trajet domicile-travail, les requérants ne produisent aucun justificatif pour établir la réalité des 2, 92 trajets quotidiens qu'ils revendiquent, et démontrer l'existence de circonstances particulières permettant de faire regarder cette fréquence très élevée d'aller-retour quotidien entre le lieu de travail et le domicile, comme inhérent aux fonctions de Mme A ; que dans ces circonstances, le surplus des trajets qui est en litige doit être regardé comme n'ayant pas été accompli pour des motifs professionnels et les dépenses s'y rapportant ne sont pas déductibles du revenu imposable de l'intéressée ;
Considérant que l'instruction administrative 5F-2541 du 10 février 1999 se borne à recommander au service de faire preuve de souplesse dans l'appréciation de la justification des frais réels par les contribuables ; que la doctrine ainsi exprimée ne contient, dès lors, aucune interprétation de la loi fiscale dont M. et Mme A puissent se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A. du livre des procédures fiscales ; que, de même, la réponse ministérielle à M. Debré, député, du 25 mai 1987, selon laquelle : " (...) la production d'un agenda professionnel précis et détaillé pourrait justifier du kilométrage parcouru à titre professionnel " n'ajoute rien à la loi fiscale et ne comporte aucune interprétation de celle-ci, alors d'ailleurs que les requérants ne produisent aucune justification de cette nature ;
Considérant enfin que si les requérants soutiennent, en se référant au prix de revient kilométrique dont fait état la presse spécialisée dans l'automobile, que le barème ne tient pas compte de la réalité du coût d'utilisation de ce type de véhicule, les critiques qu'ils formulent sur ce point sont sans portée dès lors qu'il leur appartient de justifier des frais réels que Mme A a personnellement supportés, en produisant notamment tous documents utiles ; qu'ils n'apportent pas cette preuve ;
Quant à de l'amortissement du bureau utilisé par Mme A :
Considérant qu'aux termes du 1. de l'article 13 du code général des impôts : " Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu " et qu'aux termes du 3° de l'article 83 du même code : " (...) Le montant des frais réels à prendre en compte au titre de l'acquisition des immeubles, des véhicules et autres biens dont la durée d'utilisation est supérieure à un an s'entend de la dépréciation que ces biens ont subie au cours de l'année d'imposition " ;
Considérant que l'opération consistant, pour un salarié, à amortir un bien sur la durée probable d'utilisation de ce bien n'entraîne pas pour lui une dépense pouvant être regardée comme au nombre des frais réels exposés par le contribuable dont la déduction, pour les salariés, est seule autorisée par les dispositions précitées ; que si le 3° de l'article 83 du code général des impôts, issu de l'article 12 de la loi de finances rectificative pour l'année 1988, a introduit la possibilité de déduire, au titre des frais réels, la dépréciation annuelle de l'immeuble dans lequel le salarié, qui en est propriétaire, exerce sa profession, c'est à la condition qu'il établisse que cette dépréciation trouve son origine dans l'exercice de son activité professionnelle et qu'elle ait été ainsi générée dans le cadre de l'acquisition et de la conservation de son revenu, au sens de l'article 13 du code général des impôts ;
Considérant qu'il suit de là que, s'il n'est pas contesté que Mme A utilisait pendant les années litigieuses, pour exercer sa profession d'enseignante, un bureau dans sa résidence principale, dont elle est propriétaire, elle ne saurait demander sur la base du " tableau d'amortissement " de ce local qu'elle a versé aux débats en première instance, la déduction de son revenu imposable des années 2001, 2002 et 2003, des sommes correspondant respectivement au montant de cet amortissement annuel calculé sur la valeur d'acquisition de ce local ; que par ailleurs, les requérants, qui entendent se prévaloir de l'ajout, opéré par la loi de finances rectificative pour l'année 1988, au 3° de l'article 83 du code général des impôts, n'apportent pas la preuve qui leur incombe que la valeur de leur résidence principale aurait subi une dépréciation annuelle, qu'ils n'ont au surplus pas chiffrée, qui aurait été générée par l'activité professionnelle partiellement exercée à domicile par Mme A ; que par suite, ils ne sont fondés à se prévaloir, sur le fondement du 3° de l'article 83 du code général des impôts, ni d'une déduction à raison d'un amortissement, ni d'une déduction au titre d'une dépréciation ;
Considérant que la circonstance que certaines professions libérales qui peuvent opter pour l'assujettissement à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires, avec la possibilité de pratiquer un amortissement sur les biens qu'ils utilisent sans pour autant qu'il leur soit demandé de prouver une quelconque dépréciation comme le font observer les requérants, résulte de l'obligation qui leur est faite de tenir une comptabilité à laquelle les salariés ne sont pas soumis ; que cette possibilité de pratiquer un amortissement comptable sur leur actif professionnel, ne saurait constituer un " traitement fiscal différent " qui méconnaîtrait le principe d'égalité au détriment des salariés, contrairement à ce qu'affirment les requérants ; qu'il n'appartient pas au juge de l'impôt de se prononcer sur l'équité de la loi fiscale ;
Considérant que dans ses propositions de rectification des 22 décembre 2004 portant sur l'année 2001 et 11 juillet 2005 concernant les années 2002 et 2003, l'administration a admis la déduction au titre des frais réels supportés par Mme A au prorata de la superficie que représente le bureau concerné par rapport à la surface totale de sa résidence, soit 15 %, la déduction des frais de chauffage, d'électricité et des taxes d'habitation et foncière se rapportant à cette pièce, soit respectivement, au total, 590 euros, 755 euros et 888 euros pour les années 2001, 2002 et 2003 ; que les requérants n'établissent pas que ces montants seraient insuffisants ;
Quant aux intérêts de retard :
Considérant que l'article L. 62 du livre des procédures fiscales permet aux contribuables de réparer les erreurs, inexactitudes, omissions ou insuffisances commises de bonne foi et constatées à l'occasion d'une vérification de comptabilité, moyennant le paiement d'un intérêt de retard ; que les requérants, qui ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces, n'entrent pas dans le champ d'application de ces dispositions légales ; qu'ils ne sauraient utilement soutenir que ces dernières, qui opèrent une distinction entre des contribuables qui ne sont pas dans une situation comparable, méconnaîtraient le principe d'égalité ; qu'il n'appartient pas au juge de l'impôt de se prononcer sur le caractère équitable de la loi fiscale ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. et Mme A la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 31 mars 2009 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. et Mme A devant le tribunal administratif de Montpellier et le surplus des conclusions de leur requête sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme PELLIGRINI et au ministre de l'économie et des finances.
Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal sud-est.
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N°09MA01945