Vu l'ordonnance n° 357410 du 5 juillet 2012, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 16 juillet 2012, sous le n° 12MA02968, par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a renvoyé à la Cour la requête de M. D... A...;
Vu la requête susmentionnée, enregistrée au greffe de la Cour le 2 février 2012 sous le n° 12MA00428 et, après renvoi du Conseil d'Etat, sous le n° 12MA02968, présentée pour M. D...A..., demeurant ... par la S.C.P. d'avocats Delaporte, Briard et Trichet ; M. A...demande l'annulation du jugement n° 1000086 du 1er décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de La Môle du 13 novembre 2009 s'opposant à sa déclaration préalable portant sur la division de son terrain en deux lots à bâtir ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 juin 2013 :
- le rapport de Mme Ségura, première conseillère ;
- les conclusions de M. Massin, rapporteur public ;
- et les observations de Me C...substituant Me B...du cabinet LLC et Associes - Avocats pour commune de La Môle ;
1. Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de M. A...tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de La Môle du 13 novembre 2009 s'opposant à sa déclaration préalable portant sur la division de son terrain en deux lots à bâtir ;
Sur la légalité de la décision du 13 novembre 2009 :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme : " Constitue un lotissement l'opération d'aménagement qui a pour objet ou qui, sur une période de moins de 10 ans, a eu pour effet la division, qu'elle soit en propriété ou en jouissance, qu'elle résulte de mutations à titre gratuit ou onéreux, de partage ou de locations, d'une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments " ; qu'aux termes de l'article 2 AU 1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune : " Toutes les occupations et utilisations du sol non mentionnées à l'article 2 sont interdites. " ; qu'aux termes de l'article 2 AU 2 dudit règlement : " Occupations et utilisations du sol soumises à des conditions particulières / (...) 2.3 Les constructions nouvelles à usage d'habitation et leurs dépendances à raison d'une construction par unité foncière sans la limité de 350 m² de SHOB dès lors que les équipements internes ont été réalisés. (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'elles interdisent dans la zone 2 AU les divisions des unités foncières en vue de l'implantation de constructions nouvelles sur les lots ainsi créés ; que, par suite, contrairement à ce que soutient M.A..., les premiers juges n'ont pas fait une interprétation inexacte desdites dispositions en considérant qu'elles interdisaient le lotissement, lequel, en vertu de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme précité, constitue une division d'une ou plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments ;
4. Considérant, toutefois, que le livre IV du code de l'urbanisme fixe le régime des constructions, aménagements et démolitions et définit notamment les procédures administratives d'autorisation ou de déclaration auxquelles ils sont préalablement soumis ; qu'en vertu de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée, le règlement du plan local d'urbanisme a pour objet de fixer les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés, dans sa rédaction applicable au litige, à l'article L. 121-1, lesquelles peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimitent les zones à urbaniser ou à protéger et définissent, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l'implantation des constructions ; qu'il ne ressort, en revanche, ni de ces dispositions ni d'aucune autre disposition législative que les auteurs du règlement d'un plan local d'urbanisme ont compétence pour interdire par principe ou pour limiter la faculté reconnue aux propriétaires de procéder, dans les conditions prévues au livre IV susmentionné du code de l'urbanisme, à la division d'une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments, faculté qui participe de l'exercice de leur droit à disposer de leurs biens, dont il appartient au seul législateur de fixer les limites ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en interdisant par principe les lotissements dans la zone 2 AU qu'il délimite, le règlement du plan local d'urbanisme de la commune de La Môle édicte des règles qui excèdent celles que la loi l'autorise à prescrire ; que, dès lors, M.A..., qui excipe en appel de l'illégalité de l'article 2 AU 2, est fondé à soutenir que ledit article est illégal et que, dès lors, le maire ne pouvait légalement fonder son opposition sur l'interdiction des lotissements par ledit règlement ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit que, comme le soutient le requérant, le maire de La Môle ne se trouvait pas en situation de compétence liée ; que, par suite les moyens tirés de l'insuffisance de motivation, du détournement de pouvoir et de l'absence d'insuffisance des équipements internes étaient opérants ;
7. Considérant que la décision attaquée précise les textes et les éléments de fait sur lesquels elle est fondée ; que, dès lors, elle est, contrairement à ce que soutient M.A..., suffisamment motivée ;
8. Considérant que la circonstance que M. A...a été titulaire en 2005 d'un permis de construire pour un projet différent n'emportant pas de division foncière, que ce permis a été retiré en 2007 et que ce retrait a été lui-même rapporté n'est pas de nature à établir l'existence d'un détournement de pouvoir ; que, par ailleurs, le requérant n'établit pas que des permis de construire auraient été délivrés pour des constructions nouvelles sur des parcelles voisines de sa propriété, sous l'empire du plan local d'urbanisme ; que, dans ces conditions, le moyen tiré du détournement de pouvoir doit être écarté ;
9. Considérant que le règlement du plan local d'urbanisme de la commune définit la zone 2 AU comme correspondant à " des zones insuffisamment équipées notamment au regard des exigences de défense incendie et/ou de raccordement au réseau public communal d'eau potable " et précise que " les constructions nouvelles seront autorisées au fur et à mesure de la réalisation de ces équipements internes " ; que le maire de la commune de La Môle a également opposé à la déclaration préalable du requérant le caractère insuffisamment équipé de la zone 2 AU, notamment au regard des exigences de défense incendie et du raccordement au réseau d'eau potable ; que, contrairement à ce que soutient M. A..., la circonstance que l'article 2 NA 4 du règlement susmentionné autorise une alimentation par captage, forage ou puits particulier n'impose au maire ni d'examiner d'office la possibilité, sur le terrain concerné, d'une alimentation par un de ces dispositifs ni de demander au pétitionnaire de compléter son dossier sur ce point ; que le maire n'avait pas davantage à assortir sa décision d'une prescription ; que, toutefois, dans son attestation du 4 août 2011, le maire de La Môle a précisé que lors de la réalisation de la conduite d'eau de la route du Canadel, qui borde la propriété de M.A..., des réservations avaient été mises en place pour alimenter les riverains mais qu'il n'y avait eu ni mise en place de compteur ni signature de contrat pour le terrain appartenant à M.A... ; qu'il ressort en outre des photographies produites par le requérant que des regards sont implantés sur son terrain ; qu'il ressort de ces éléments que le réseau communal d'eau potable passe à proximité du terrain de M.A... ; que si le maire a également indiqué que le réseau était insuffisant pour assurer la desserte de la propriété du requérant, la commune ne justifie aucunement son allégation, laquelle est discutée par M. A... ; que la commune n'établit pas non plus que l'équipement actuel de la zone ne répondrait pas aux exigences de la défense incendie posées par les dispositions précitées du règlement du plan local d'urbanisme ; que, dès lors, le maire ne pouvait se fonder sur le caractère insuffisamment équipé de la zone pour s'opposer à la déclaration préalable de M. A..., nonobstant la définition sus-rappelée de la zone 2 AU par le règlement du plan local d'urbanisme ;
10. Considérant, enfin, que la commune de La Môle demande une substitution de motifs en faisant valoir que le maire aurait pu légalement fonder sa décision sur le motif tiré de l'absence d'autorisation de défrichement ;
11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 311-1 de l'ancien code forestier alors en vigueur ; " Est un défrichement toute opération volontaire ayant pour effet de détruire l'état boisé d'un terrain et de mettre fin à sa destination forestière. Est également un défrichement toute opération volontaire entraînant indirectement et à terme les mêmes conséquences, sauf si elle est entreprise en application d'une servitude d'utilité publique. La destruction accidentelle ou volontaire du boisement ne fait pas disparaître la destination forestière du terrain, qui reste soumis aux dispositions du présent titre. / Nul ne peut user du droit de défricher ses bois sans avoir préalablement obtenu une autorisation. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 441-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés nécessitent une autorisation de défrichement en application des articles L. 311-1 ou L. 312-1 du code forestier, la demande de permis d'aménager est complétée par la copie de la lettre par laquelle le préfet fait connaître au demandeur que son dossier de demande d'autorisation de défrichement est complet. " ; qu'aux termes de l'article R. 441-10 dudit code : " Le dossier joint à la déclaration comprend : (...) Il est complété, s'il y a lieu, par les documents mentionnés aux articles R. 441-6 à R. 441-8. " ;
12. Considérant que la seule circonstance, invoquée par la commune de La Môle, que le terrain d'assiette du projet de M. A...se trouve à l'intérieur du périmètre des zones susceptibles d'être soumises à autorisation de défrichement, délimité par la direction départementale de l'agriculture et de la forêt du Var et qui recouvre quasiment tout le territoire de ce département, ne suffit pas à établir que le projet de M. A...nécessitait la délivrance par le préfet du Var d'une autorisation de défrichement ; que, dans ces conditions, la substitution de motifs demandée ne saurait être accueillie ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande ; que, dès lors, il y a lieu d'annuler le jugement et l'arrêté litigieux du 13 novembre 2009 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
15. Considérant qu'en application des dispositions précitées, les conclusions présentées sur leur fondement par la commune de La Môle doivent être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à sa charge une somme de 2 000 euros à verser à M. A...au titre desdites dispositions ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1000086 du 1er décembre 2011 du tribunal administratif de Toulon est annulé. L'arrêté du maire de la commune de La Môle du 13 novembre 2009 est annulé.
Article 2 : La commune de La Môle versera à M. D...A...une somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de la commune de La Môle tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...et à la commune de La Môle.
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