Vu la requête, enregistrée le 18 juillet 2012, présentée pour Mme A...B..., domiciliée..., par Me Marchiani ;
Mme B...demande à la Cour
1°) d'annuler le jugement n° 1201729 en date du 4 juillet 2012, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 3 février 2012 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé un titre de séjour, a assorti ce rejet d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 3 février 2012 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ", subsidiairement d'ordonner qu'il lui soit délivré une autorisation provisoire de séjour, et plus subsidiairement encore, d'ordonner au préfet du département des Bouches-du-Rhône de réexaminer sa situation dans l'intérêt supérieur de l'enfant ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 196 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à verser à Me Marchiani, qui s'engage à renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er avril 2014 :
- le rapport de Mme Paix, président-assesseur ;
- et les observations de Me Marchiani pour Mme B...;
1. Considérant que MmeB..., de nationalité algérienne, est entrée en France le 13 juillet 2008 avec deux de ses enfants nés respectivement en 2001 et 2003, sous couvert d'un visa de 60 jours ; qu'elle a demandé une autorisation provisoire de séjour en tant que parent d'enfant malade pour son filsC..., souffrant d'autisme sévère ; qu'elle a obtenu plusieurs autorisations provisoires de séjour les 2 août 2009, 15 février 2010, 1er octobre 2010 et 18 juillet 2011 ; que, toutefois, un refus a été opposé, le 3 février 2012, par le préfet du département des Bouches-du-Rhône à sa demande de titre de séjour ; qu'elle interjette régulièrement appel du jugement en date du 4 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement :
Sur la décision de refus de séjour :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des certificats médicaux produits au dossier que le jeune C...B...né le 24 mars 2001, présente un syndrome autistique avec agitation psychomotrice, hyperactivité, bizarrerie du comportement et troubles du langage ; que si le tribunal administratif de Marseille a retenu, pour écarter le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que C...B...bénéficie à la date de la décision attaquée, d'un traitement spécialisé ou d'une orientation dans une structure spécialisée, une telle analyse est contredite par le certificat médical établi le 13 janvier 2012 par le docteur Kiss, psychiatre agréé de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales ; qu'il résulte en effet de ce certificat qu'au mois de janvier 2012 le jeune C...B...était, certes, en attente de prise en charge dans une structure de type médico-éducatif, laquelle a été possible à partir du mois de mai 2012 mais était déjà suivi en milieu hospitalier, au centre médico-psychologique Saint-André du Littoral à Marseille, où il était reçu en hôpital de jour, deux fois par semaine depuis le 5 janvier 2012 ; que le même médecin spécialiste attestait de la nécessité de prolonger le séjour de l'enfant pour une année afin de pouvoir cerner un projet thérapeutique cohérent ;
4. Considérant, par ailleurs, que le préfet du département des Bouches-du-Rhône ne produit aucun élément permettant d'établir qu'une prise en charge de la pathologie très lourde de cet adolescent serait possible en Algérie, alors que Mme B...a produit, en première instance, un article de presse stigmatisant le manque de structures adaptées en Algérie pour les jeunes autistes ; que, par suite, c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté le moyen tiré par Mme B...de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
Sur l'obligation de quitter le territoire :
5. Considérant que l'obligation de quitter le territoire est, compte tenu de ce qui précède, dépourvue de base légale et doit être annulée ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;
7. Considérant que le présent arrêt, qui annule la décision de refus de titre de séjour du 3 février 2012 du préfet des Bouches-du-Rhône et les décisions subséquentes, implique nécessairement, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que le préfet délivre le titre sollicité à la requérante ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de la présente décision, des éléments de droit ou de fait nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose à la demande de Mme B...une décision de refus ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " à Mme B...dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
9. Considérant que Mme B...été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 196 euros au profit de Me Marchiani, avocat de la requérante, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1201729 du 4 juillet 2012 du tribunal administratif de Marseille et la décision du 3 février 2012 du préfet du département des Bouches-du-Rhône sont annulés.
Article 2 : Le préfet des Bouches du Rhône délivrera à Mme B...dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ".
Article 3 : L'Etat versera à Me Marchiani la somme de 1 196 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que celui-ci renonce à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.
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N° 12MA029532
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