Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 septembre 2012 sous le n° 12MA03836, présentée par le ministre de l'intérieur, qui demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1101245 du 12 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Bastia l'a condamné à verser à M. A...B...une indemnité en principal de 5 240,88 euros ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi modifiée n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2014 :
- le rapport de M. Brossier, rapporteur,
- les conclusions de Mme Hogedez, rapporteur public ;
1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M.B..., gardien de la paix affecté à Corte, a été muté d'office le 12 mars 1996 à Marseille ; que par le jugement attaqué, qui n'est pas contesté sur ce point, le Tribunal administratif de Bastia a retenu la responsabilité de l'État du fait de l'illégalité fautive de cette mutation ; que s'agissant de la réparation, par l'article 1er du jugement attaqué, le Tribunal a condamné l'État à verser à M. B...une indemnité en principal de 5 240,88 euros, ce montant en principal étant augmenté des intérêts au taux légal à compter du
3 octobre 2007, les intérêts portant eux-mêmes à compter du 3 octobre 2008 ; que par son appel principal, et compte-tenu de son argumentation, le ministre de l'intérieur doit être regardé comme demandant à la Cour de réformer ce montant de 5 240,88 euros en l'abaissant à 4 240,88 euros ; que par son appel incident, M. B...demande à la Cour de réformer ce montant de 5 240,88 euros en le portant à un total en principal de 23 190,16 euros (609,18 + 1 631,70 + 15 000 + 949,28 + 5 000) ;
Sur l'appel principal :
2. Considérant qu'il ressort de la lecture même des motifs du jugement attaqué que le Tribunal, pour indemniser M.B..., a retenu les sommes de 609,18 euros et 1 631,70 euros au titre du préjudice matériel, et la somme de 2 000 euros au titre du préjudice moral, soit un total en principal de 4 240,88 euros, montant total explicitement mentionné par le considérant récapitulatif dudit jugement ; que le dispositif du jugement attaqué a toutefois condamné l'État à verser la somme en principal de 5 240,88 euros ; que le recours en rectification d'erreur matérielle intenté par le ministre de l'intérieur devant le Tribunal a été rejeté pour tardiveté par ordonnance du 3 septembre 2012 ; que ledit ministre, qui ne conteste devant la Cour ni la principe de l'engagement de sa responsabilité, ni le quantum de 4 240,88 euros susmentionné, soutient qu'il ne peut être condamné à verser une indemnité d'un montant en principal supérieur à 4 240,88 euros ; que l'État ne peut être effectivement condamné à verser une somme qu'il ne doit pas et que, dans ces conditions, par son appel, le ministre est fondé à demander à la Cour de réformer le dispositif du jugement attaqué ;
Sur l'appel incident :
3. Considérant que M.B..., qui ne conteste pas les sommes en principal de 609,18 euros et 1 631,70 euros alloués par le jugement attaqué au titre respectivement de frais d'énergie (électricité-gaz) et de frais de transport, soutient que le Tribunal aurait sous-estimé l'indemnisation de son préjudice moral et aurait écarté à tort l'indemnisation, d'une part, de frais de téléphonie, d'autre part, de sa perte chance d'être promu au grade de brigadier ;
4. Considérant toutefois qu'il résulte de l'instruction que, s'agissant du préjudice moral, le Tribunal a porté une juste appréciation des circonstances de l'espèce, incluant la situation familiale de l'intéressé, son état de santé et la durée pendant laquelle il a été séparé de sa famille, en indemnisant ledit préjudice moral à hauteur de 2 000 euros ;
5. Considérant par ailleurs, et s'agissant de la perte de chance d'être promu, qu'il résulte de l'instruction que M. B...n'apporte devant la Cour aucun élément de nature à établir un lien de causalité suffisamment direct et certain entre la mutation dont il a été l'objet, qui était une sanction déguisée illégale, et le fait qu'il n'a pas été promu brigadier à la différence d'autres collègues, dès lors qu'une telle promotion au grade supérieur n'est pas automatique mais se réalise à la discrétion de l'administration compte-tenu des mérites respectifs de ses agents ;
6. Considérant enfin, et s'agissant des frais de téléphonie, qu'il résulte de l'instruction que M. B...ne démontre toujours pas que le montant de 949,28 euros de tels frais soit en lien suffisamment direct et certain avec l'illégalité fautive en litige ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, par son appel principal, le ministre de l'intérieur est fondé à demander à la Cour de réformer le jugement attaqué en ramenant le montant en principal de 5 240,88 euros de la condamnation qu'il prononce au montant alloué par les motifs du jugement attaqué, à savoir 4 240,88 euros ; que doit en revanche être rejeté l'appel incident de M. B...tendant à ce que le montant en principal de son indemnisation soit porté à un montant en principal de 23 190,16 euros, M. B...ayant par ailleurs déjà obtenu du jugement attaqué l'octroi des intérêts au taux légal à compter du
3 octobre 2007 et le produit de leur capitalisation à compter du 3 octobre 2008, qu'il convient donc d'appliquer à la somme en principal de 4 240,88 euros ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. B...la somme qu'il demande au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le montant en principal de 5 240,88 € (cinq mille deux cent quarante euros et quatre-vingt huit centimes) de l'indemnité allouée à M. B...par l'article 1er du jugement attaqué susvisé est ramené à la somme en principal de 4 240,88 € (quatre mille deux cent quarante euros et quatre-vingt huit centimes).
Article 2 : Le jugement attaqué n° 1101245 rendu le 12 juillet 2012 par le tribunal administratif de Bastia est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Les conclusions indemnitaires incidentes de M. B...sont rejetées, ensemble ses conclusions au remboursement de ses frais exposés et non compris dans les dépens.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...B....
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N° 12MA038362