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19/06/2015 | FRANCE | N°13MA05157

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 19 juin 2015, 13MA05157


Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2013, présentée pour la SCI Mas du Juge, dont le siège est Mas du Juge 765, chemin de Junas à Aubais (30250), représentée par sa gérante en exercice, par la SCP d'avocats Dombre ;

La SCI Mas du Juge demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200047 du 18 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du 7 novembre 2011 par laquelle le conseil municipal d'Aubais a approuvé le plan local d'urbanisme communal ;

2°) d'annuler cette délibération

;

3°) d'annuler, par voie d'exception, la délibération du conseil municipal d'Aubais ...

Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2013, présentée pour la SCI Mas du Juge, dont le siège est Mas du Juge 765, chemin de Junas à Aubais (30250), représentée par sa gérante en exercice, par la SCP d'avocats Dombre ;

La SCI Mas du Juge demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200047 du 18 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du 7 novembre 2011 par laquelle le conseil municipal d'Aubais a approuvé le plan local d'urbanisme communal ;

2°) d'annuler cette délibération ;

3°) d'annuler, par voie d'exception, la délibération du conseil municipal d'Aubais du 2 septembre 2010 annulant la procédure de révision générale du plan d'occupation des sols prescrite le 5 mai 2004 et prescrivant la nouvelle procédure de révision générale du plan d'occupation des sols, valant prescription d'un plan local d'urbanisme ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Aubais la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la délibération mentionne en page 3 que l'intégralité des réserves du commissaire enquêteur a été prise en compte ; or, plusieurs réserves émises par le commissaire enquêteur n'ont pas été levées, de sorte que l'avis du commissaire enquêteur devait être réputé défavorable, et que la délibération comporte ainsi une mention erronée ;

- le rapport de présentation du plan local d'urbanisme comporte des contradictions internes et est insuffisant ;

- l'élaboration du plan local d'urbanisme est entachée de détournement de procédure ;

- la procédure de passation d'un marché public avec le bureau d'études Adele SFI sans publicité préalable et sans mise en concurrence était irrégulière ; le tribunal administratif de Nîmes a écarté ce moyen sans motivation ; il a également écarté sans motivation l'application de la théorie des opérations complexes ;

- le plan local d'urbanisme est incompatible avec le plan de prévention des risques d'inondation, et ce manque de cohérence entre ces deux documents révèle un détournement de pouvoir ;

- le schéma directeur d'assainissement pluvial et le plan local d'urbanisme sont affectés de contradiction interne, ce qui révèle une carence du plan local d'urbanisme dans la prévision de la gestion des eaux pluviales ; cette question n'a pas été examinée par le commissaire enquêteur, ce qui entache d'irrégularité l'enquête publique ; et le tribunal administratif de Nîmes n'a pas répondu à ce moyen ;

- le classement de la propriété du Mas du Juge en zone N est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement des principaux bâtiments du Mas du Juge en secteur Nh est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; l'article N2 du règlement du plan local d'urbanisme ne comporte aucune disposition particulière applicable au secteur Nh, en contradiction avec l'article N1, qui interdit les constructions destinées à l'habitat, hormis dans le secteur Nh dans les conditions définies à l'article N2 ; l'article N2, qui prévoit la possibilité de faire des travaux d'aménagement et d'entretien des constructions existantes sous réserve qu'il n'y ait pas de changement de destination, réduit à néant les possibilités de construire prévues en zone Nh par l'article N1 ; l'article N2 autorise les travaux de rénovation et réhabilitation des éléments de bâtis repérés aux plans de zonage au titre de l'article L. 123-1 7° du code de l'urbanisme, mais le Mas du Juge n'est pas répertorié parmi ces éléments ; la reconstruction à l'identique des bâtiments détruits n'est pas spécifique au secteur Nh ; les possibilités d'extensions mesurées prévues en p. 168 du rapport de présentation sont inexistantes de fait en zone Nh ; et le tribunal administratif de Montpellier n'a pas répondu sur ce point et n'a pas vérifié, en l'absence de preuves contraires fournies par la partie adverse, l'exactitude de la déclaration de la SCI Mas du Juge sur les surfaces de plancher des bâtiments existants ;

- le tribunal administratif de Montpellier n'a pas motivé son jugement en ce qui concerne le détournement de pouvoir ;

- la transformation d'une zone 1AU d'urbanisation future stricte en zone 2AU d'urbanisation future à règlement alternatif immédiatement urbanisable ne pouvait être décidée après l'enquête publique, car elle porte atteinte à l'économie générale du plan local d'urbanisme ; et le tribunal administratif de Nîmes ne s'est pas prononcé sur ce moyen ; en outre, un conseiller municipal était intéressé par cette modification ;

- l'extension des espaces boisés classés côté nord-ouest et côté sud-est de la pointe du Mas du Juge ne correspond à aucune logique et est constitutive dès lors d'un détournement de pouvoir; les demandeurs de première instance avaient développé des arguments précis sur l'illégalité des dispositions générales du plan local d'urbanisme, de sorte que le tribunal administratif de Nîmes ne pouvait se borner à répondre que le moyen n'était pas assorti de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien fondé ;

- les dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme sont illégales en ce qu'elles assimilent constructions et installations et en ce qu'elles n'assimilent pas les piscines aux constructions ; les dispositions sur le calcul de la hauteur sont également illégales au regard de la référence à la bordure du terrain naturel ;

Vu le jugement et l'acte attaqués ;

Vu l'ordonnance du 22 juillet 2014 modifiée, fixant la clôture de l'instruction au 3 novembre 2014, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 26 septembre 2014, présenté pour la commune d'Aubais, représentée par son maire en exercice, par la Selarl d'avocats Lysias Partners ;

La commune d'Aubais conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SCI Mas du Juge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens ;

Elle fait valoir que :

- toutes les réserves émises par le commissaire enquêteur ont été levées ;

- le rapport de présentation ne comporte aucune contradiction ni insuffisance ; la commune n'a pas souhaité voir se créer un nouveau quartier ; en aucun cas, le rapport de présentation n'indique que le règlement du plan local d'urbanisme ne comportera aucune disposition de caractère général ; il prend en compte le risque de feux de forêts ;

- les moyens relatifs aux règles de passation des marchés publics sont étrangers aux règles d'urbanisme et inopérants ;

- le projet de plan local d'urbanisme arrêté le 22 janvier 2010 comportait des lacunes et a fait l'objet pour ce motif de nombreux avis défavorables des personnes publiques associées ; aucun détournement de procédure n'a été commis ;

- les modifications apportées au projet de plan local d'urbanisme après l'enquête publique ne portaient pas atteinte à l'économie générale du plan local d'urbanisme ;

- il n'existe aucune incompatibilité entre le plan de prévention des risques d'inondation et le plan local d'urbanisme de la commune d'Aubais ;

- le plan local d'urbanisme prend en compte les contraintes du réseau d'assainissement ;

- le classement en zone Nh n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation, pas plus que le classement en zone N ;

- le détournement de pouvoir n'est pas établi ;

- les dispositions générales du règlement ne sont pas entachées d'illégalités ; elles se bornent à éclairer le lecteur du plan local d'urbanisme sur le sens des termes utilisés ; le croquis figurant au règlement du plan local d'urbanisme explicite la méthode pour apprécier la hauteur des bâtiments autorisés ;

- subsidiairement, il y aura lieu pour la Cour de faire application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme ;

Vu le mémoire enregistré le 17 octobre 2014, présenté pour la SCI Mas du Juge, qui conclut aux mêmes fins que sa requête susvisée, par les mêmes moyens ;

Elle expose en outre que :

- les dispositions de l'article 2AUa2 qui imposent que l'urbanisation du secteur se fasse dans le cadre d'une opération d'ensemble et couvre la totalité du périmètre instituent une règle de forme qui ne peut pas figurer légalement au règlement du plan local d'urbanisme et portent une atteinte excessive au droit de propriété ;

- le moyen tiré de ce qu'un conseiller municipal a participé à la délibération en litige est abandonné ;

Vu le mémoire enregistré le 3 novembre 2014, présenté pour la commune d'Aubais, non communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire enregistré le 1er décembre 2014, présenté par la SCI Mas du Juge, non communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mai 2015 :

- le rapport de M. Portail, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public ;

- et les observations de MmeB..., gérante de la SCI Mas du Juge, ainsi que celles de Me A...pour la commune d'Aubais ;

1. Considérant que par une délibération du 7 novembre 2011, le conseil municipal d'Aubais a approuvé la révision du plan d'occupation des sols communal, valant plan local d'urbanisme ; que par un jugement du 18 octobre 2013, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de la SCI Mas du Juge tendant à l'annulation de cette délibération ; que la SCI Mas du Juge relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'en vertu de l'article L. 9 du code de justice administrative, les jugements doivent être motivés ;

3. Considérant, en premier lieu, que la SCI Mas du Juge soutient que le tribunal administratif de Nîmes n'a pas motivé sa réponse au moyen selon lequel la délibération par laquelle le conseil municipal a annulé une procédure de révision en cours et décidé de prescrire une nouvelle procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme a été prise après la désignation d'un bureau d'études chargé de la conduite de l'élaboration du plan local d'urbanisme en violation des règles du code des marchés publics ;

4. Considérant qu'en relevant que la circonstance que le bureau d'études chargé de l'élaboration du plan local d'urbanisme de la commune d'Aubais aurait été désigné en violation des règles de mise en concurrence prescrites par le code des marchés publics est en elle-même inopérante, le tribunal administratif de Nîmes a suffisamment motivé son jugement ;

5. Considérant en deuxième lieu que la SCI Mas du Juge soutient que le tribunal administratif de Nîmes n'a pas répondu au moyen tiré de l'absence de prise en compte par le plan local d'urbanisme des contraintes d'évacuation des eaux pluviales ;

6. Considérant que la SCI Mas du Juge soutenait en première instance, d'une part, que le schéma d'assainissement pluvial, qui est une annexe du plan local d'urbanisme, comporte une erreur, en faisant état d'un ruissellement direct sur la route, alors que les flèches censées illustrer ce ruissellement traversent sa propriété, d'autre part, que le plan local d'urbanisme n'aurait pas pris en compte les contraintes de l'évacuation des eaux pluviales, en ne prévoyant pas d'ouvrage spécifique destiné à les recueillir, ce qui était prévu à l'ancien plan d'occupation des sols ;

7. Considérant que le tribunal administratif de Nîmes mentionne dans son jugement, d'une part, que la SCI Mas du Juge n'établit pas que les dispositions du schéma d'assainissement pluvial, notamment en ce qui concerne le ruissellement sur le chemin du Junas, ne seraient pas suffisamment prises en compte par le règlement et le zonage du plan local d'urbanisme ; qu'il précise, d'autre part, que le rapport de présentation comporte des développements détaillés sur le ruissellement des eaux pluviales et qu'en tout état de cause, en application de l'article R. 123-14 du code de l'urbanisme, les annexes sanitaires dont le schéma d'assainissement pluvial fait partie, n'ont qu'une portée informative ; qu'il a ainsi suffisamment motivé sa réponse aux moyens soulevés sur ce point ;

8. Considérant, en troisième lieu, que pour alléguer l'existence d'un détournement de pouvoir, la SCI Mas du Juge s'est bornée en première instance à faire valoir que l'extension des espaces boisés classés aurait eu pour objet de justifier le classement de sa propriété au plan local d'urbanisme, que des modifications avaient été apportées au projet de plan local d'urbanisme après l'enquête publique et que cette modification était favorable à une propriété appartenant à la mère d'un adjoint au maire ; qu'en se bornant à répondre à ces allégations, non étayées et peu circonstanciées, que l'existence d'un détournement de pouvoir n'était pas établie, le tribunal administratif de Nîmes a suffisamment motivé son jugement ;

9. Considérant, en quatrième lieu, que le jugement en litige a répondu au moyen tiré de ce que des modifications ont été apportées au plan local d'urbanisme après l'enquête publique ;

10. Considérant, en cinquième lieu, que s'il appartient au juge administratif, dans l'exercice de ses pouvoirs généraux d'instruction, de demander à l'administration de communiquer tous documents nécessaires pour établir sa conviction, il n'est tenu de le faire que dans la mesure où le requérant fait état d'allégations précises qu'il incombe à la juridiction de vérifier en demandant à l'administration de produire les documents qu'elle estime utiles ;

11. Considérant, d'une part, que le tribunal administratif de Nîmes a répondu au moyen tiré de ce que le classement du bâti en zone Nh rendait impossible toute extension des constructions, que la SCI Mas du Juge ne justifiait pas de la réalité de la superficie des bâtiments déjà implantés dont elle est propriétaire ; qu'il a ainsi suffisamment motivé la réponse à ce moyen ; que, d'autre part, la requérante n'avait donné en première instance aucune précision sur la superficie des constructions existantes et n'avait pas produit de pièces justificatives de cette superficie ; qu'en s'abstenant de lui demander de justifier de cette superficie, le tribunal n'a pas commis d'irrégularité ;

12. Considérant, en sixième lieu, que la SCI Mas du Juge fait valoir que le tribunal administratif de Nîmes a jugé à tort que le moyen tiré de l'illégalité des dispositions d'ordre général du règlement du plan local d'urbanisme n'était pas assorti de précisions suffisantes pour en apprécier la portée et le bien-fondé, alors que ce moyen aurait selon elle été clairement exposé ;

13. Considérant que le moyen rappelé au point 12 était ainsi formulé en première instance : "La requérante demande que soient examinées du point de vue de la légalité interne les clauses suivantes contenues dans les dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme ; Référence aux installations dans la définition des constructions, notions relevant de procédures d'autorisation d'urbanisme différentes, qui ne peuvent donc être associées. Calcul de la hauteur au faîtage des bâtiments par rapport à la bordure du terrain naturel, pouvant amener à n'autoriser que des hauteurs négatives sur les terrains de grande superficie" ; que ce moyen étant effectivement dépourvu de précisions permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé, les premiers juges n'ont pas commis d'irrégularité en l'écartant pour ce motif ;

Sur la légalité de la délibération du 7 novembre 2011 :

En ce qui concerne la légalité externe :

14. Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération attaquée : " Le projet de plan local d'urbanisme est soumis à l'enquête publique par le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent dans les formes prévues par les articles R. 123-7 à R. 123-23 du code de l'environnement " ; qu'aux termes de l'article R. 123-22 du code de l'environnement, dans sa rédaction également applicable à cette date : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête entend toute personne qu'il lui paraît utile de consulter ainsi que le maître de l'ouvrage lorsque celui-ci en fait la demande. Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies " ; qu'il résulte de ces dispositions que si le commissaire-enquêteur n'est pas tenu de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête, il doit porter une analyse sur les questions soulevées par ces observations et émettre un avis personnel sur le projet soumis à enquête, en exposant les raisons qui déterminent le sens de cet avis ;

15. Considérant que le commissaire enquêteur a procédé à l'examen des observations présentées au cours de l'enquête publique par la SCI Mas du Juge relatives aux conditions d'assainissement des eaux pluviales sur le chemin du Junas ; que s'il a répondu aux observations sur le contenu du schéma d'assainissement des eaux pluviales joint au plan local d'urbanisme que ce document était dépourvu de valeur règlementaire, il n'en a pas moins pris en compte ces remarques ; que le moyen tiré de ce que le commissaire enquêteur n'aurait pas répondu aux observations présentées lors de l'enquête publique doit dès lors être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

16. Considérant, en premier lieu, que si la délibération contestée mentionne en page 3 que l'intégralité des réserves du commissaire enquêteur a été prise en compte, il résulte des pièces du dossier que plusieurs réserves émises par le commissaire enquêteur et concernant le règlement du plan local d'urbanisme n'ont pas été levées ; qu'ainsi, la référence aux installations dans la définition des constructions n'a pas été supprimée, l'énumération des différentes destinations des constructions a été maintenue, la méthode de calcul de la hauteur des bâtiments n'a pas été modifiée, l'interdiction systématique des panneaux photovoltaïques n'a pas été supprimée ; que, toutefois, les réserves qui n'ont pas été levées portaient sur des points mineurs, alors que la commune avait levé l'ensemble des réserves émises par les personnes publiques associées à la révision du plan local d'urbanisme ; que dans les circonstances de l'espèce, et alors d'ailleurs que la commune n'était pas tenue de se conformer à l'avis du commissaire enquêteur, cette mention erronée de la délibération attaquée est sans incidence sur sa légalité ;

17. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération attaquée : " Le rapport de présentation : / 1° Expose le diagnostic prévu au premier alinéa de l'article L. 123-1 ; / 2° Analyse l'état initial de l'environnement ; / 3° Explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durable, expose les motifs de la délimitation des zones, des règles qui y sont applicables et des orientations d'aménagement. Il justifie l'institution des secteurs des zones urbaines où les constructions ou installations d'une superficie supérieure à un seuil défini par le règlement sont interdites en application du a de l'article L. 123-2 ; / 4° Evalue les incidences des orientations du plan sur l'environnement et expose la manière dont le plan prend en compte le souci de sa préservation et de sa mise en valeur ; (...) " ;

18. Considérant, d'une part, que la SCI Mas du Juge fait valoir que le rapport de présentation serait entaché de contradictions lorsqu'il indique que "certaines zones NA du plan d'occupation des sols ont été supprimées et en particulier celle du Mas du Juge du fait de ses problèmes d'accès, de réseaux et du développement du mitage sur une partie du territoire communal déconnecté du village", alors que la propriété du Mas du Juge est desservie par les réseaux ; que, toutefois, le rapport de présentation évoque des problèmes de réseaux mais n'indique pas que la propriété de la SCI Mas du Juge ne serait pas desservie ; que, d'autre part, si le rapport de présentation indique à tort en page 141 que les dispositions d'ordre général ont été supprimées du règlement du plan local d'urbanisme, cette erreur matérielle est sans incidence sur la légalité de la délibération attaquée ; qu'enfin, le rapport de présentation précise que si aucun plan de prévention des risques d'incendie n'a été prescrit, un zonage de l'aléa feu de forêt a été réalisé et que les secteurs identifiés comme étant boisés ou en nature de landes et de friches, doivent être classés en zone N du plan local d'urbanisme ; qu'il expose ainsi la manière dont le plan prend en compte le risque incendie ; que le moyen tiré de l'insuffisance du rapport de présentation sur ces différents points doit ainsi être écarté ;

19. Considérant, en troisième lieu, que la délibération du 2 septembre 2010, par laquelle le conseil municipal d'Aubais a annulé la procédure d'élaboration du plan d'urbanisme en cours était justifiée par certains avis critiques émis par les personnes publiques associées sur le projet arrêté le 22 janvier 2010, en raison notamment de l'absence d'actualisation du rapport de présentation et de la non prise en compte d'un site Natura 2000 ; qu'en tout état de cause, la convention conclue entre la commune d'Aubais et un bureau d'études le 4 août 2010 portait sur la reprise de la procédure en cours et non sur la mise en oeuvre d'une nouvelle procédure d'élaboration du document d'urbanisme ; qu'enfin, la circonstance que le contrat conclu entre la commune d'Aubais et le bureau d'études Adele SFI a été passé sans publicité préalable et sans mise en concurrence est, par elle-même, sans incidence sur la régularité de la procédure au terme de laquelle la délibération en litige a été adoptée ; que le moyen tiré de l'existence, à cet égard, d'un détournement de procédure, doit, dès lors, être écarté ;

20. Considérant, en quatrième lieu, que la circonstance que le plan de prévention des risques d'inondation d'Aubais classe en zone constructible certaines parcelles au regard de la nature du risque constaté, ne fait pas obstacle à ce que le plan local d'urbanisme classe ces parcelles en zone naturelle, les objectifs de ces documents étant distincts ; que le moyen tiré de l'incompatibilité du plan local d'urbanisme adopté avec le plan de prévention des risques d'inondation doit, par suite et en tout état de cause, être écarté ;

21. Considérant, en cinquième lieu, d'une part, que si le rapport de présentation souligne que la majorité des fossés et buses situés en aval du chemin de Junas présente des capacités très faibles, le fait pour le plan local d'urbanisme de n'avoir pas prévu la réalisation d'un ouvrage pour recueillir les eaux de ruissellement n'est pas, en lui-même, de nature à entacher d'illégalité la délibération attaquée ; que, d'autre part, le rapport de présentation précise qu'une partie des écoulements du chemin de Junas s'évacue vers la propriété du Mas du Juge ; que la circonstance que le schéma d'assainissement des eaux pluviales annexé au plan local d'urbanisme comporterait des imprécisions ou des erreurs sur les caractéristiques du ruissellement de l'eau dans le secteur du chemin de Junas n'est pas de nature, en tout état de cause, à entacher d'illégalité la délibération attaquée, au regard notamment des précisions apportées à cet égard par le rapport de présentation ;

22. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article R. 123-8 du code d'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Les zones naturelles et forestières sont dites "zones N". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique, soit de l'existence d'une exploitation forestière, soit de leur caractère d'espaces naturels. (...) " ;

23. Considérant que la partie du Mas du Juge classée en zone N est constituée d'un espace de 11 ha, entouré de zones naturelles et d'espaces boisés classés ; qu'alors même que ce domaine a fait l'objet antérieurement d'une exploitation agricole, la commune d'Aubais n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en la classant en zone naturelle et non en zone agricole A ;

24. Considérant, en septième lieu, que la SCI Mas du Juge fait valoir que, postérieurement à l'enquête publique, le projet de plan local d'urbanisme a été modifié en ce qui concerne le classement de trois parcelles, classées en zone 2AUai où peuvent être admises " les constructions, installations, travaux (...) à condition d'être réalisés dans le cadre d'une opération d'ensemble couvrant la totalité du périmètre du secteur 2AUai " ; que, toutefois, il ne résulte pas des pièces du dossier que cette modification mineure, qui concerne trois parcelles de faible superficie, aurait porté atteinte à l'économie générale du projet de plan local d'urbanisme ; que, dès lors, celui-ci pouvait être légalement approuvé sans que soit organisée une nouvelle enquête publique ;

25. Considérant, en huitième lieu, qu'en autorisant les constructions en secteur 2AUai à condition d'être réalisées dans le cadre d'une opération d'ensemble couvrant la totalité du périmètre de ce secteur, le plan local d'urbanisme ne pose pas de condition de forme ; que s'il règlemente l'usage des parcelles situées dans ce secteur, il ne porte pas d'atteinte au droit de propriété ;

26. Considérant, en neuvième lieu, que l'article 3 du titre 1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Aubais, titre relatif aux rappels divers et dispositions générales, comporte la définition suivante : " Construction : Regroupe les bâtiments, (même ceux ne comportant pas de fondation), les annexes (sauf les piscines non couvertes) ainsi que les installations, outillages et ouvrages impliquant une implantation au sol ou une occupation du sous-sol ou en surplomb du sol (pylône, parabole, antenne ...) " ; que cette définition a pour seul objet de préciser ce qu'il y a lieu d'entendre par construction pour l'application des dispositions du plan local d'urbanisme et que la circonstance qu'elle ne correspondrait pas à la notion de construction telle qu'elle est entendue pour l'application d'autres dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'occupation ou à l'utilisation du sol est, par elle-même, sans incidence sur la légalité du document en litige ;

27. Considérant, en dixième lieu, que l'article 3 du titre 1 précité du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Aubais dispose que " la hauteur au faîtage est la hauteur mesurée de la bordure du terrain naturel de référence au point le plus élevé du bâtiment. " ; qu'il ne résulte nullement de ces dispositions, éclairées notamment par d'autres dispositions du règlement relatives aux modalités de calcul de la hauteur de construction évoquant la hauteur au droit de la façade entre le terrain naturel et le point le plus élevé de la façade, que l'expression "bordure du terrain naturel" doive être entendue comme désignant la limite entre le terrain d'assiette d'un projet et la propriété voisine ; que le moyen selon lequel la définition de la hauteur au faîtage pourrait conduire à une impossibilité de construire sur des terrains en forte déclivité, doit dès lors être écarté ;

28. Considérant, en onzième lieu, qu'aux termes du règlement du plan local d'urbanisme d'Aubais sont interdites en zone N : " les constructions destinées à l'habitat, excepté dans le secteur Nh et dans les conditions définies à l'article N2 suivant(...) les constructions destinées à l'hébergement hôtelier, sauf en zone Nh(...) "

29. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la zone Nh est la seule de ce type sur le territoire de la commune et qu'elle a été créée pour prendre en compte le bâti existant du domaine du Mas du Juge ; qu'il ressort en effet de la page 168 du rapport de présentation que le secteur Nh a été créé autour de cet ensemble bâti pour en permettre "l'évolution douce" par des "possibilités d'extensions mesurées" ; que, d'autre part, l'article N2 autorise les travaux d'aménagement et d'entretien des constructions existantes sous réserve qu'il n'y ait pas de changement de destination, alors qu'ainsi qu'il a été dit précédemment l'hébergement hôtelier est autorisé en zone Nh ; qu'en outre, l'article N2 dispose que peuvent être autorisés " les travaux de rénovation et de réhabilitation des éléments de bâti repérés aux plans de zonage au titre de l'article L. 123-1 7° du code de l'urbanisme ", alors que les constructions existantes au Mas du Juge n'ont pas été repérées à ce titre ; qu'enfin l'article N2 dispose que peut être autorisée l'extension limitée des habitations existantes à la date d'approbation du plan local d'urbanisme, à condition que la surface hors oeuvre nette initiale du bâtiment soit au moins égale à 100 m² et que la surface hors oeuvre nette totale de la construction n'excède pas un total de 150 m² de surface hors oeuvre nette et 250 m² de surface hors oeuvre brute ; que la requérante justifie, par la production du plan de masse des constructions existantes, qu'aucun des bâtiments situés sur sa propriété, soit parce que sa surface hors oeuvre nette est inférieure 100 m², soit parce qu'elle est supérieure à 150 m², ne peut faire l'objet d'une extension ; qu'en classant en zone Nh, qui prévoit des possibilités d'extension des constructions existantes, un secteur qui se trouve de fait privé de toute possibilité d'évolution, alors qu'il a été créé spécifiquement pour prendre en compte le bâti existant, les auteurs du plan local d'urbanisme de la commune d'Aubais ont commis une erreur manifeste d'appréciation ;

30. Considérant, en douzième et dernier lieu, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

31. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu de faire application des dispositions de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme, que la SCI Mas du Juge est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de la délibération en litige, en tant qu'elle approuve la création d'un secteur Nh comprenant la partie bâtie de sa propriété ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

32. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions que les deux parties présentent au titre de leurs frais non compris dans les dépens, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La délibération du 7 novembre 2011 du conseil municipal d'Aubais portant adoption du plan local d'urbanisme, est annulée en tant qu'elle approuve la création d'un secteur Nh correspondant à la partie bâtie du domaine du Mas du Juge.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Mas du Juge et à la commune d'Aubais.

Délibéré après l'audience du 29 mai 2015, à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre ;

M. Portail, président-assesseur ;

M. Argoud, premier conseiller ;

Lu en audience publique, le 19 juin 2015.

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N° 13MA05157


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