Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...E...a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006 par avis de mise en recouvrement du 7 décembre 2010.
Par un jugement n° 1103502 du 17 mai 2013, le tribunal administratif de Nice a partiellement fait droit à sa demande en la déchargeant des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée à concurrence d'une somme de 801,83 euros pour l'année 2005 et d'une somme de 972,34 euros pour l'année 2006, ainsi que des pénalités y afférentes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée par télécopie le 17 juillet 2013 et régularisée par courrier le 19 juillet suivant et un mémoire enregistré le 13 octobre 2014, MmeE..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ledit jugement du tribunal administratif de Nice en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;
2°) de prononcer la décharge des impositions restant dues ;
3°) à titre subsidiaire, de prononcer la réduction du chiffre d'affaires soumis à la taxe sur la valeur ajoutée à hauteur des crédits justifiés, à savoir 15 578 euros pour 2005 et 13 792 euros pour 2006 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens de l'instance.
Mme E...soutient que :
- la procédure d'imposition a été irrégulière, ses revenus professionnels pour l'année 2006 n'ayant pas été redressés à la suite d'une vérification de comptabilité ;
- la méthode de reconstitution de son chiffre d'affaires soumis à la taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2005 et 2006 présente un caractère excessivement sommaire ou radicalement vicié ;
- les attestations qu'elle a fournies permettent de déterminer de manière précise l'origine et la nature des sommes litigieuses (cadeaux des grands-parents, versements de loyers au titre de la colocation, revenus propres de sa fille Aurélia, sommes correspondant à des prestations sociales ou à des remboursements de mutuelle) ; elle justifie par ailleurs de l'origine de la somme de 1 454,99 euros correspondant au solde des frais de son divorce.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 janvier 2014 et un mémoire en réplique enregistré le 19 décembre 2014, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Martin, rapporteur,
- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.
1. Considérant que Mme D...E..., néeA..., qui avait indiqué exercer, à compter du 1er janvier 2006, une activité de travaux de secrétariat et avait déclaré à ce titre un bénéfice industriel et commercial de 4 200 euros, a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2005 et 2006, ayant commencé le 13 novembre 2007, date de l'envoi d'un avis de vérification ; que, par ailleurs, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès du tribunal de grande instance de Paris, l'administration a obtenu de cette juridiction copie d'un jugement en date du 29 février 2008 selon lequel " Mme D...A...a à Paris et sur le territoire national entre courant 2004 et courant 2006, exercé de façon illégale la profession d'expert-comptable " ; que dans ces circonstances, l'administration, estimant que Mme E...avait en fait, au cours des années 2005 et 2006, réalisé de manière occulte au sens des dispositions de l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales des prestations d'expert-comptable, a, le 28 août 2008, proposé à la contribuable des rectifications portant sur la taxe sur la valeur ajoutée due au titre des deux exercices en cause, mises en oeuvre selon la procédure de taxation d'office prévue par les dispositions de l'article L. 66-3° du livre des procédures fiscales et basées sur la reconstitution du chiffre d'affaires de l'entreprise de MmeE... ; que celle-ci relève appel du jugement du tribunal administratif de Nice en date du 17 mai 2013 en tant que celui-ci n'a que partiellement fait droit à sa demande ;
Sur l'étendue du litige :
2. Considérant que par une décision en date du 5 février 2014, intervenue en cours d'instance, l'administration fiscale, prenant en compte le caractère non commercial de remboursements accordés à la requérante par la société mutuelle " Les amis de Bordeaux ", a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence des sommes respectives de 316 euros et 521 euros des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels Mme E...a été assujettie au titre des années 2005 et 2006 ; que les conclusions de la requête relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales : " Lorsque, au cours d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, sont découvertes des activités occultes ou mises en évidence des conditions d'exercice non déclarées de l'activité d'un contribuable, l'administration n'est pas tenue d'engager une vérification de comptabilité pour régulariser la situation fiscale du contribuable au regard de cette activité. " ;
4. Considérant que Mme E...fait valoir que ses revenus professionnels pour l'année 2006 ont été irrégulièrement redressés, faute de vérification de comptabilité ; qu'il résulte de l'instruction et n'est pas sérieusement contesté qu'au cours de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de MmeE..., laquelle ainsi qu'il a été dit au point 1, avait inscrit une activité de secrétariat et traduction au répertoire national des entreprises à compter du 1er janvier 2006, a été mis en évidence, au vu de factures établies au nom des sociétés Ets Visipnetics Intl, SRL BJS et Ets Valencia, obtenues par le service dans l'exercice de son droit de communication, le fait que l'intéressée réalisait et facturait des honoraires soumis à la taxe sur la valeur ajoutée relatifs à diverses prestations telles que des déclarations fiscales et sociales, des établissements de bilans et des opérations comptables, présentant la nature de prestations d'expertise-comptable et ne pouvant être assimilées à des tâches de secrétariat ; que, par ailleurs, conformément aux dispositions des articles L. 81 et L. 92 du livre des procédures fiscales, l'administration a régulièrement exercé le 3 juin 2008, postérieurement à l'engagement, par l'envoi de l'avis susmentionné du 13 septembre 2007, de la procédure de contrôle en litige, son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire et a obtenu, ainsi qu'il est rapporté au point 1, copie d'un jugement du tribunal de grande instance de Paris selon lequel la requérante avait exercé de façon illégale la profession d'expert-comptable entre courant 2004 et courant 2006 ; que ce jugement a permis de confirmer que l'intéressée tirait des revenus de l'exercice d'une activité occulte d'expert-comptable durant la période vérifiée ; que, par suite, les dispositions précitées de l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales font obstacle à ce que Mme E...puisse utilement soutenir que la procédure aurait dû comporter l'engagement régulier d'une vérification de comptabilité, en vue de l'imposition des rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux tirés de son activité occulte, mise en évidence au cours de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle ; que, par ailleurs, ainsi que l'ont justement relevé les premiers juges, la circonstance que l'administration n'a pas assorti, pour l'année 2006, les droits supplémentaires en cause de la majoration prévue par l'article 1728 du code général des impôts en cas de découverte d'une activité occulte, est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;
Sur le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
En ce qui concerne la charge de la preuve :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : (...) 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 193 du même livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ;
6. Considérant qu'il est constant que Mme E...ne s'est nullement fait connaître d'un centre de formalités des entreprises en ce qui concerne son activité d'expertise-comptable et n'a souscrit aucune des déclarations sur le chiffre d'affaires auxquelles elle était astreinte à raison de ladite activité professionnelle ; qu'en application des dispositions précitées du livre des procédures fiscales, il lui appartient d'établir le caractère exagéré des impositions mises à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006 ;
En ce qui concerne la méthode de reconstitution des recettes :
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, d'une part, que les factures établies par Mme E...dans le cadre de son activité occulte au nom de ses clients, les sociétés Ets Visipnetics Intl, SRL BJS et Ets Valencia, comportaient mention de la taxe sur la valeur ajoutée ; que, d'autre part, alors que Mme E...n'a pas infirmé la circonstance qu'elle ne disposait pas de compte bancaire personnel pour encaisser le produit de son activité, le vérificateur a requalifié de revenus professionnels des sommes portées sur les comptes bancaires de ses enfants Aurélia et Sébastian ; que si la requérante expose que certaines sommes mouvementées sur les comptes de ses enfants sont de nature privée, elle ne conteste cependant pas avoir encaissé des recettes commerciales notamment sur le compte dont était titulaire sa fille Aurélia, ouvert auprès de la Banque postale ; que les mouvements créditeurs observés sur ce compte doivent être regardés comme révélant, par leur nombre et leur montant, et alors que la requérante n'en donne aucune justification, que ledit compte servait en fait, ainsi que l'a retenu le service, à recueillir les recettes réalisées par MmeE... ; que dans ces conditions et alors que l'intéressée ne tenait pas de comptabilité régulière et probante, le vérificateur a pu rattacher les crédits bancaires d'origine inexpliquée constatés sur le compte ouvert au nom de Mlle C... G... aux recettes de la contribuable et les imposer à la taxe sur la valeur ajoutée, cette méthode ne pouvant être regardée dans les circonstances de l'espèce comme radicalement viciée ou excessivement sommaire ;
En ce qui concerne les sommes dont le caractère commercial est contesté par Mme E... :
8. Considérant que la requérante se prévaut de divers documents et attestations pour contester la nature commerciale des sommes redressées par le vérificateur ; que cependant, en premier lieu, l'attestation établie le 10 décembre 2009 par M.A..., père de MmeE..., selon laquelle il aurait versé diverses libéralités à sa fille et à ses petits-enfants et le tableau relatifs à de tels versements allégués sont dépourvus de toute valeur probante ; qu'en deuxième lieu, à supposer même que M. F...ait été le colocataire et le compagnon de la requérante, cette circonstance ne permet aucunement de justifier, faute d'éléments relatifs aux flux financiers invoqués et sur la seule foi d'une attestation de M. F...en date du 15 novembre 2009, du versement par ce dernier d'une somme mensuelle de 657,60 euros au titre de la colocation ainsi que d'un prêt de 1 200 euros qu'il aurait accordé à MmeE... ; qu'en troisième lieu, si Mme E...se prévaut, pour la première fois en appel, d'un chèque en date du 4 juillet 2005 émis pour un montant de 1 454,99 euros par la SCP Chantal-Pasqualini-March, elle ne conteste pas le fait relevé par le ministre en défense que cette somme ne figure pas parmi les sommes taxées au titre de l'exercice 2005 ; qu'enfin, si Mme E...soutient que certaines sommes créditées sur le compte de sa fille Aurélia correspondraient à des revenus propres de celle-ci, tirés de cours particuliers qu'elle aurait donnés à des lycéens et du remboursement d'un billet d'avion, l'attestation en ce sens de Mlle C...E..., datée du 9 janvier 2010, est dépourvue, à elle seule, de toute valeur probante ;
9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme E...n'est pas fondée à demander la décharge des droits supplémentaires et des pénalités restant dus de taxe sur la valeur ajoutée au titre des exercices 2005 et 2006 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme E...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête à concurrence d'une somme de 316 (trois cent seize) euros pour l'année 2005 et à concurrence d'une somme de 521 (cinq cent vingt et un) euros pour l'année 2006.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...E...et au ministre des finances et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2015, où siégeaient :
- M. Cherrier, président de chambre,
- M. Martin, président assesseur,
- Mme Chenal-Peter, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 septembre 2015.
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N° 13MA02853 2
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